Glil l’ignoble recourut à des enchantements de renforcement de la force musculaire pour décupler ses capacités au bras de fer. Il usa de plusieurs sorts pour devenir beaucoup plus puissant au niveau des bras. Il promit de généreuses offrandes au Néant en cas de victoire de sa part.
Il n’avait pas besoin de parler pour déclencher des sorts puisant dans les flux du Néant. Il reçut comme don de l’entité qu’il servait la possibilité de déclencher un pouvoir sans avoir besoin de réciter des mots, et cela sans avoir reçu d’entraînement. Normalement il fallait des semaines d’apprentissage afin d’arriver à générer de la magie sans conséquence négative tout en étant muet. Seulement voilà le Néant investit des bénédictions dans Glil, même si l’ignoble n’était qu’un outil jetable dans les plans de conquête du cœur d’Arthur.
L’entité lorgnait sur le fort de la même façon qu’un loup affamé désire de la viande appétissante. Il ne portait qu’un intérêt très mineur pour Glil, tandis que le vampire était vu comme un splendide trophée. Entre un intriguant nauséabond comme l’ignoble pas très intelligent et un champion d’une divinité adverse, le choix de l’intérêt du Néant était très clair.
D’ailleurs Glil récolta des indices tangibles que sa dévotion ne pesait pas bien lourd comparé à l’envie du Néant d’intégrer Arthur dans les rangs de ses adorateurs. Cependant l’ignoble était trop obnubilé par ses dons, qu’il voyait comme des preuves manifestes qu’il était cher au cœur de l’entité. Certes il accumula de la puissance surnaturelle. Mais dans l’esprit du Néant, il ressemblait davantage à un rat galeux considéré comme un passe-temps un peu divertissant, qu’autre chose. Dès que l’entité perdrait son faible intérêt pour lui, il risquait d’être considéré comme un objet à jeter. Mais Glil s’imaginait être un élu parmi les élus.
De plus il croyait avec enthousiasme dans ses probabilités de victoire. Certes son aspect extérieur laissait penser qu’il était un gros balourd plein de graisse relativement inoffensif. Mais dans la réalité il estimait représenter une menace pire qu’une armée nombreuse.
Il était un champion d’une puissance qui finirait par déchaîner des cataclysmes sans précédents sur le monde. Il travaillait en tant qu’agent d’élite pour une entité qui octroyait un pouvoir capable de faire rêver les plus cupides et blasés. Alors il ne pouvait absolument pas perdre, il était trop redoutable pour qu’un minable comme Arthur parvienne à le battre peu importe les circonstances.
Il ferait durer le plaisir en octroyant plusieurs revanches à son adversaire afin d’augmenter son désarroi et son désespoir. Ainsi il prouverait de manière indiscutable son évidente supériorité. Glil jugeait que le principal point fort d’Arthur qui était les ressources physiques ne suffirait pas à lui donner la réussite. Pourtant le fort triompha très facilement de son antagoniste. En effet Arthur pouvait soulever avec une main un rocher de plusieurs tonnes. Comparé à un elfe moyen il était un monstre en matière de puissance physique. Résultat Arthur mit non seulement la pâtée à Glil, mais il lui infligea d’ailleurs une forte douleur au poignet.
Il était vrai que l’ignoble aurait pu être un adversaire très problématique, mais son orgueil démesuré l’incita à ne déployer qu’une fraction des bénédictions du Néant qu’il avait en stock. Or souvent les arrogants finissent par recevoir une défaite humiliante.
Glil : J’ai perdu, mais cela ne compte pas, tu as commencé avant le signal.
Arthur : Pas du tout, tu ferais mieux d’accepter d’innocenter Merlin, je t’ai soumis à un serment magique. Si tu refuses de tenir tes engagements tu subiras des malédictions. Ton esprit deviendra similaire à celui d’un bébé.
Glil : Tu es vraiment un ignoble parmi les ignobles, Arthur.
Arthur : Tu perdras l’usage de tes jambes.
Glil : Malheur !
Arthur : Tu diras des dizaines de fois par jour lumière de la création. Je te jetterai un sort pour que tu mentionnes très souvent ces termes.
Glil : Quelle horreur ! Tu as gagné, je prouverai l’innocence de Merlin.
Il n’était pas étrange que «lumière de la création », aient eu un rôle décisif pour convaincre Glil l’ignoble d’abdiquer. Il s’agissait d’un des pires interdits en rapport avec le Néant, les mots tabous par excellence. Le Néant c’était les ténèbres de la destruction, et la lumière de la création son exact opposé. Donc Glil craignait de s’attirer le courroux de l’entité qu’il servait en ouvrant la bouche pour répandre ce qu’il voyait comme des insanités extrêmes, une disgrâce terrible. Même s’il agissait involontairement, il avait une peur palpable des conséquences des mots tabous.
Le fort employa des mots plutôt que des coups de poing car il désirait rendre davantage crédible les propos de Glil devant un tribunal. S’il malmenait trop son ennemi en laissant des traces bien visibles de coups et de blessures, il y avait à craindre que les accusateurs de Merlin en profitent pour invoquer la thèse de l’intimidation forcée pour rejeter les aveux de Glil.
Le vampire savait que même s’il récolta des moyens utiles pour son maître, il ne devait pas crier victoire trop vite. Les dragons avaient tendance à devenir lunatiques et peu raisonnables sur la question de leurs œufs. Ils pouvaient vivre une vie presque éternelle d’après certains érudits, par contre leur capacité à avoir une descendance se révélait limitée. Généralement un dragon avait beaucoup de chance s’il donnait le jour à trois bébés au cours de toute son existence. Il pouvait s’écouler des siècles entre chaque naissance à l’intérieur d’une famille de cette espèce. Par conséquent les dragons avaient l’habitude de se comporter avec emportement sur les gens comme Merlin accusés de vendre des œufs de créatures de leur race.
Arthur enchanta une corde grâce aux cours de son mentor, afin d’empêcher Glil de tenter de s’échapper. D’ailleurs son captif en coopérant avec le fort perdit une partie des faveurs du Néant, donc il devint beaucoup plus vulnérable. Le témoignage de Glil et les preuves de l’innocence de Merlin l’exigeant, sauvèrent la vie du maître d’Arthur. Le maître du vampire n’était pas encore en état de grogner ou même de parler, il était emprisonné dans une cellule anti-magie qui le rendit groggy.
Cependant des mauvaises langues, affirmèrent que Merlin le haut-mage était tout de même un complice de trafiquant d’œufs de dragon. Certes sa responsabilité était moins grande que prévu, mais l’exigeant avait quand même joué un rôle dans la mise à mort de bébés dragons. Véruza, était assez embêté, il ne savait pas quoi faire, d’un côté il était convaincu de l’innocence du haut-mage, mais il voulait être élu de nouveau chef des dragons. Or s’il laissait Merlin s’en tirer, il risquait de ne plus pouvoir occuper à terme sa place de chef.
Arthur le fort entra dans une colère noire quand il sut que Véruza la créature, hésitait à rendre la liberté à Merlin. Il était assez disposé à sacrifier un innocent pour des ambitions politiques. La position de la créature était rendue délicate en partie par la faute du fort, Arthur oublia de fouiller Glil. Or l’ignoble une fois qu’il innocenta Merlin, en profita pour s’enfuir grâce à une pierre de téléportation. Cet artefact extrêmement rare permettait de se déplacer de manière instantanée, d’un pays à l’autre dans le monde de Gerboisia.
Pour se racheter Arthur étudia à fond les coutumes et les traditions des dragons pour obtenir la libération de prison de Merlin, mais il fit d’abord chou blanc. Il existait une multitude de lois régissant les jugements rendus par des dragons. Mais ce n’était pas parce que les règles encadrant les procès s’avéraient nombreuses, qu’elles facilitaient la vie des accusés.
Au contraire les lois mises en place par certains dragons favorisaient par moment nettement l’accusation, plutôt que la défense. Même si Véruza entreprit des réformes pour modifier des obligations qu’il considérait comme ridicules, et hautement préjudiciables pour certains suspects. Ainsi Merlin eut le droit de présenter un plaidoyer de défense en étant assisté par un avocat qui ne l’appelait mon immonde client, ou la raclure notoire.
Un prédécesseur de Véruza établit une tradition d’appeler l’accusé par des noms désobligeants lors du procès, y compris les gens occupant le poste de défenseurs. Heureusement Véruza mit fin à cette coutume assez spéciale. Cependant Arthur n’arrivait pas à trouver de moyen de sortir Merlin de la mouise, il parvint à diminuer le verdict incriminant son maître dans le sens que la peine de mort n’était plus requise. Mais Merlin aurait quand même des centaines d’années de prison à purger, à moins de débloquer favorablement sa situation, de réaliser une performance judiciaire spectaculaire.
Arthur consulta pourtant des dizaines de livres, il s’obligea à lire jusqu’à souffrir d’un mal de tête. Il chercha de manière poussée un moyen d’obtenir un verdict garantissant la libération de son maître. Mais plus il cherchait plus le désespoir l’envahissait. Le fort jugeait que la cause de Merlin s’approchait du cas sans solution valable. Plus Arthur piétinait plus il avait envie de taper sur Véruza, puis il se dit que la solution consistait peut-être justement à donner des coups.
Arthur : Seigneur Véruza j’ai une question à vous poser. Est-ce qu’il est possible d’obtenir la grâce d’un prisonnier en remportant un défi martial contre vous ?
Véruza : En effet je n’avais pas pensé à cette solution, elle me semble satisfaisante.
Arthur : Évidemment il faudra que vous ne combattiez pas de toutes vos forces contre moi, afin que les chances de Merlin d’être gracié soient maximales.
Véruza : Ne t’en fais pas, je m’arrangerai pour te laisser gagner.
Si Arthur le fort avait mieux étudié les lois, il aurait pu choisir un moyen moins dangereux qu’un combat contre Véruza le dragon mâle. En effet la créature aurait pu aussi gracier Merlin, s’il perdait lors d’une partie d’échecs. De plus Véruza renonça à tenir ses engagements en matière de retenue de sa force. Si ses rivaux se rendaient compte de la supercherie lors du combat contre le fort, ils pourraient demander sa destitution. Or la créature tenait beaucoup à son poste de chef des dragons. Il était plutôt juste et équitable, dans le sens qu’il avait mis en place une justice qui offrait aux accusés le moyen de se défendre.
En outre il prenait à cœur la protection des elfes et des nains qui lui juraient allégeance. Véruza veillait à ce que les richesses de ses sujets soient équitablement partagées, il n’interdisait pas à certains d’être fortunés, mais il n’avait pas peur d’imposer fortement les riches en période de disette dans le but d’aider les pauvres. Toutefois malgré ses qualités la créature avait un défaut majeur, pour lui le pouvoir constituait une véritable drogue. Ainsi Véruza n’avait pas peur de commettre de temps à autre des bassesses, si cela entretenait sa popularité.
Arthur ne se doutait absolument pas de la trahison de la créature, par conséquent son avenir paraissait scellé. Véruza avait beau être petit par rapport à ses semblables, dans le sens qu’il ne mesurait que trente mètres de long pour cinq de haut, quand il se mettait à quatre pattes, il n’empêchait qu’il était un dragon d’une puissance colossale. Grâce à ses facultés magiques, la créature disposait d’une force décuplée, d’une vitesse accrue, et de réflexes surdéveloppés. La confrontation entre le fort et Véruza aurait lieu dans l’arène des champions, une gigantesque structure pouvant accueillir cent mille elfes ou dix dragons adultes.
La tradition des duels de justice était appréciée, mais Véruza avait mis plusieurs conditions draconiennes pour que ce type de combat ait lieu. Le duel de justice avait valeur de jugement, il consistait à organiser un combat pour reconnaître la culpabilité ou l’innocence d’un accusé, ou donner raison à un plaignant. Chaque partie était représenté par un combattant, le guerrier qui vainquait, assurait à son commanditaire un jugement favorable. La créature préférait qu’un conflit se règle grâce à l’avis d’un tribunal, plutôt que par les capacités de deux combattants. Véruza aimait les combats, mais il trouvait plus juste que ce soient des débats qui règlent les dissensions, plutôt que des affrontements physiques. Néanmoins le duel de justice offrait une opportunité à Véruza de se débarrasser d’un témoin gênant, alors il décida de combattre Arthur.
Lorsque le jour du duel vint, les acclamations fusèrent en l’honneur de Véruza, par contre Arthur eu le droit à des huées. Les paris étaient clairement défavorables contre le fort, sa cote était de dix mille contre un. Lors d’un duel judiciaire il était courant de miser de l’argent sur les deux combattants, il arrivait parfois que des fortunes soient déboursées. Le fort avait eu l’idée de miser une grosse somme sur lui-même, il estimait qu’il ferait une très bonne affaire.
Puis en voyant l’air déterminé de Véruza, il eut un sombre pressentiment, il se dit que la créature jouait bien la comédie. Lorsque la sonnerie marquant le début du combat retentit, Véruza se mit à combattre de toutes ses forces. Arthur qui sentait que quelque chose clochait, perdit sa belle confiance en lui, et se mit à courir. Il éprouvait une vague de désespoir, une envie de demander grâce. Sa partie méchante l’invitait à abandonner, puisque si le fort déclarait forfait le seul véritablement incriminé serait Merlin.
De plus s’il empêchait le retour de son maître dans le manoir, il profiterait d’une bonne occasion pour se livrer sans retenue à des vols, de se servir dans les ingrédients surnaturels de Merlin pour les refourguer à un prix élevé. Il devait admettre que l’idée de renoncer s’avérait assez tentante. Son maître n’était pas la plus polie et gentille des personnes, et Arthur se démena déjà beaucoup pour lui.
Il songea que face à certaines circonstances défavorables, il était sage de s’incliner, de ne pas chercher à lutter quand le rapport de force adverse s’annonçait écrasant. D’ailleurs Arthur doutait que le fait de céder face à un dragon puissant soit préjudiciable pour sa réputation. Véruza était souvent considéré comme une force de la nature, impossible à stopper par les humains et les elfes issus du peuple. Donc s’avouer vaincu face à la créature ne créera vraisemblablement pas de remous négatifs pour la gloire d’Arthur. Toutefois la fierté envahit progressivement le fort, qui trouvait révoltante la perspective d’avantager un parjure, un être reniant ses engagements.
Même s’il n’arrivait à survivre que parce la créature jouait, voulait faire durer le combat pour contenter le public. La trahison de Véruza mit dans une colère terrible Arthur le berserker, qui était tellement contrarié, qu’il fit une crise d’hystérie. Or plus la rage d’un berserker s’accroissait, plus ses capacités physiques augmentaient. Par contre dans un premier temps sa frénésie le desservit, il tenta d’envoyer un éclair de sa main à son ennemi, mais il ne fit que faire pousser un peu de barbe sur son menton. Voyant que la magie cela fonctionnait un peu mal, il opta finalement pour la confrontation physique. Il se sentait un peu mal d’avoir loupé le sort d’électricité, vu les coups de baguette encaissés sur les mains pendant les cours de Merlin.
La fureur du fort eut pour effet de tripler sa masse musculaire, et de doubler la taille d’Arthur. Résultat Véruza interloqué par la transformation du fort, hésita une seconde, ce fut une grave erreur. Arthur profita de la seconde d’inaction de la créature, pour en faire le tour, et lui saisir la queue. Puis le fort souleva Véruza et le fit tourner de plus en plus vite. La créature à force d’être ballotté eut envie de vomir, alors qu’il était sur le point de gerber, le berserker la jeta violemment contre un mur.
Le choc étourdit Véruza, de son côté Arthur en profita pour monter sur sa tête et commencer à le marteler de coups de poings. La créature rua pour déloger le fort, se mit à utiliser ses griffes pour se débarrasser de celui qui le ridiculisait. Mais tout ce qu’obtint Véruza fut de faire couler son sang, le berserker à cause de sa force immense finit par faire tomber dans l’inconscience son gigantesque adversaire.
Deux options s’offraient à Arthur il pouvait achever la créature, ou l’épargner. Le désir d’ôter la vie était puissant chez le fort, la trahison représentait un acte qui méritait la mort selon le berserker. Puis Arthur se dit qu’en choisissant la voie du sang, il porterait préjudice aux elfes. Alors il décida d’épargner Véruza, bien que sa volonté de tuer soit proche de l’obsession. Le public n’en revenait pas, pendant plusieurs secondes un silence opaque régna, puis le fort eut le droit à une salve d’applaudissements. Sa victoire permit à Merlin de retrouver liberté et dignité.
Quand Merlin retourna à son manoir, il recommença à faire des remarques désobligeantes. Son séjour en prison n’avait pas arrangé son caractère.
Merlin : Arthur je te remercie chaleureusement de m’avoir sauvé, mais cela ne modifie pas tes obligations à mon égard. Je vois que tu n’as pas nettoyé comme je l’avais ordonné le sol, par conséquent tu seras puni.
Arthur : Je vous empêche d’être mis à mort, et vous continuez à me considérer comme votre serviteur. Trop c’est trop, j’arrête mon apprentissage de la magie auprès de vous.
Merlin : C’est irresponsable d’arrêter un apprentissage important, alors qu’on n’a même pas validé la moitié des étapes.
Arthur : Je ne peux pas prétendre être un haut-mage, mais je suis tout de même un magicien de bataille efficace, et je connais des dizaines de sortilèges, cela me suffit. Au revoir Merlin.
Arthur avait envie de rebrousser chemin, mais il était à peu près certain que s’il restait avec Merlin, il l’étranglerait. Alors il opta pour ne pas continuer ses études de magie avec le vieux bougon.
Sa partie sanguinaire était remontée à bloc contre son maître, et le vampire n’avait pas trop le désir de la retenir. Il fit des efforts mémorables pour redonner la liberté à son mentor. Pourtant Merlin le haut-mage continuait à le traiter comme un larbin. Alors Arthur conçut une montée de haine particulièrement puissante. Il estimait avoir déjà fait preuve de beaucoup de retenue en ne saccageant pas la maison ou le jardin de son ancien maître. Il considérait presque comme un exploit héroïque de ne pas avoir frappé le haut-mage. Même la crainte d’une malédiction lancée sur lui ne suffit pas à dissuader le vampire de recourir à la violence. Par contre la peur de tuer son interlocuteur s’il se laissait trop aller fut un élément suffisant pour retenir le bras d’Arthur. Ce dernier angoissait de subir une frénésie incontrôlable s’il donnait des coups de poing sur Merlin. Et ainsi de basculer dans le meurtre contre un elfe, reniant par la même occasion un serment solennel.
Or autant Arthur pouvait considérer comme de la légitime défense de maltraiter la réputation d’un elfe ennemi qui déblatérait contre lui, autant il pensait que lever la main sur un vieillard elfe encore bien portant physiquement mais quand même un vieillard, c’était franchir une étape honteuse.
Et puis le vampire craignait de laisser des traces impossibles à effacer complètement s’il massacrait ou malmenait Merlin. La demeure du haut-mage était farcie de dispositifs magiques en tout genre dont Arthur ne connaissait pas les fonctions. Donc il existait un risque réel de déclencher une alarme mystique, un dispositif d’espionnage ou une autre mauvaise surprise s’il s’adonnait à des penchants belliqueux.
Il avait beau avoir été l’apprenti de Merlin pendant longtemps, il habita dans une maison remplie de secrets, dont il ne décrypta qu’une partie des arcanes.
Toutefois les réflexions d’Arthur ne calmèrent pas complètement sa colère bouillonnante. Il fallait qu’il trouve un exutoire pour évacuer sa fureur. Il se mit donc en tête de tuer un animal pour se calmer les nerfs. Il vit une forêt de chênes non loin de lui et il s’y aventura. Il remarqua un lapin qui le regardait de loin après une demi-heure de marche dans les bois.
Il eut une idée pour faire baisser la garde de la bête. Il s’arrangea pour faire tomber par terre une petite carotte. Puis il fit mine de s’éloigner, cependant il s’agissait d’une ruse. Après avoir parcouru quelques dizaines de mètres, il grimpa à un chêne épais, et il observa les alentours.
Il eut la déception de constater que le lapin écoutait sa méfiance avant son estomac. Il était en partie attiré par l’odeur de la carotte mais il était habitué aux légumes sauvages à l’aspect différent des plantes cultivées. Par conséquent il trouva louche la carotte servant d’appât, et puis il y avait l’odeur d’un vampire sur le légume. Alors il s’éloigna en courant après quelques secondes de réflexion. Cet événement arracha un petit rire à Arthur, lui qui s’estimait avoir beaucoup progressé dans le domaine de la ruse avait été battu par un lapin, un animal pas spécialement réputé pour son intelligence. Cette leçon montra au vampire que la colère était une très mauvaise conseillère, et atténua partiellement son élan sanguinaire.
Arthur réalisa que sa longue demi-absence dans les affaires criminelles, joua des tours à son organisation. Il continuait à gagner de l’argent, et la majorité de ses subalternes hors-la-loi demeurèrent fidèles, mais il perdit des marchés. Des concurrents rognèrent sur sa sphère d’influence illégale. Toutefois il avait bon espoir de rétablir la situation, maintenant que son apprentissage étouffant était fini, et qu’il disposait de nombreux fonds financiers grâce au pari remporté contre Véruza. Il avait la ferme intention de se renflouer et d’accroître sa réputation.