Un rideau de ténèbres nocturnes tomba sur la scène.
Dans le dortoir, Song Shuhang se coucha très tôt.
Pendant ce temps Tubo, Li Yangde et Gao Moumou jouaient à un vieux jeu de combat en faction.
Les trois ne se sentaient pas gênés d’utiliser au maximum leur avantage d’être l’un à côté de l’autre pour communiquer, ensembles dans la même équipe. Ils utilisèrent même l’ordinateur de leur colocataire pour créer un compte et rejoindre l’équipe ennemie, puis ils commencèrent à leur mener la vie dure.
Leur ami cultivateur secoua la tête avec dédain, actualisant la page du Groupe des Neuf Provinces #1 sur son téléphone. Il était rare que les membres fussent si silencieux. Même le Cultivateur Solitaire Rivière du Nord n’avait rien envoyé.
Ils étaient certainement tous très occupés… Sauf le Cultivateur Solitaire Rivière du Nord.
« Oh ouais, Shuhang, j’ai trouvé les informations sur les herbes médicinales que tu cherchais. Parmi les commerces du coin référencés, un seul en propose, et une seule de chaque. J’ai aussi posté des messages sur des forums, j’aurai normalement des nouvelles demain. Je t’enverrai les adresses le moment venu » lui dit Li Yangde en minimisant sa fenêtre de jeu avant d’ouvrir une extension programmée par ses soins.
Utiliser un logiciel pirate alors qu ’ils font déjà équipe dans la même pièce , peut-il tomber plus bas ?
Song Shuhang lui répondit en riant. « Merci pour votre dur labeur, camarade Yangde ! »
« Cam… Ta mère » l’injuria-t-il avec colère.
Rapidement, la partie arriva à son terme, et les trois lascars ayant mis toutes les chances e leur côté… perdirent la bataille !
« Bordel de merde, ils se sont retrouvés chez eux eux aussi ! » ragea Tubo.
Ce jeu était vraiment vieux. Song Shuhang se rappela qu’il existait déjà quand il était à l’école primaire. Les seuls joueurs qui continuaient à y passer du temps étaient les vétérans fous furieux avec des compétences de professionnels, des techniques d’esquive de malades, et une pléthore de coups bas dans leur sac.
« On ne peut pas s’en sortir ici, changeons vite de région. Comment se fait-il qu’il y ait autant de personnes sans honte en jeu de nos jours ? » pesta Gao Moumou.
Alors tu sais que ce que vous faites est mesquin , hein?
Shuhang était allongé sur le ventre et regardait ses camarades de chambre changer de zone pour continuer à tricher tranquillement. Il demanda à un moment donné : « Eh, Tubo, as-tu encore la matraque paralysante que tu as modifiée le semestre dernier ? »
« Je la trafique toujours. Je l’ai encore modifiée quelques fois, et sa puissance est maintenant réglable à souhait. » Il était vraiment enthousiaste lorsqu’il commençait à évoquer ce sujet.
Il avait toujours aimé démonter et modifier des objets, des aussi gros qu’un scooter aux plus petits comme un pointeur laser, ces deux machines étant bien évidemment passées entre ses mains auparavant.
Le pratiquant lui demanda : « Prête-le moi d’ici quelques jours, et pourras-tu aussi en augmenter la puissance ? Plus haut c’est, mieux ce sera. »
« La tension ne peut dépasser une certaine limite, c’est pour un usage privé après tout. Qu’est-ce qui se passe, quelqu’un t’a offensé alors tu veux lui donner le coup de foudre ? » lui lança-t-il.
« Oui, il m’a carrément offensé, je me suis même décidé à jeter son cadavre dans la Mer de l’Est. » Il se mit à rire et ajouta : « Dans quelques jours, je risque de partir à l’aventure dans les montagnes avec ma sœur. J’ai entendu dire que c’était comme d’être plongé dans une forêt tropicale, alors autant avoir quelque chose pour se protéger. »
À l’exception de Zhao Yaya, Song Shuhang ne se sentait gêné de mentir devant qui que ce fût.
En entendant ses paroles, une lueur passa dans les yeux de Lin Tubo. Il savait que aller se perdre au fin fond d’une chaîne de montagnes n’était pas le genre d’activité que Zhao Yaya appréciait.
Ne parlait-il donc pas de sa sœur aux longues jambes de la dernière fois ?
Tubo pensa immédiatement à Douce Plume. Cette fille aurait évidemment été dans le coup. Elle avait même emmené Song Shuhang loin de chez eux, à la Cité-J, pour trouver le Temple de la Lampe Fantôme.
Tout à coup, il s’arrêta complètement de jouer, se retourna et demanda : « Est-ce ta sœur qui était avec toi à la Cité-J ? »
« C’est bien elle » répondit-il, un mensonge en entraînant un autre.
« Shuhang, emmène-moi avec vous pour cette aventure en forêt ! Et si cela ne te dérange pas, tu peux m’appeler beau-frère à partir d’aujourd’hui. Moi ça ne me gêne pas ! » affirma-t-il avec un visage impassible.
Pendant ce moment de déconcentration, un tir en rafale tua son personnage.
Gao Moumou s’écria : « Tu es mort, Tubo ! Tu es mort misérablement ! »
Li Yangde poussa ses lunettes d’un doigt et ajouta du sel sur la plaie : « Tubo, j’avais commencé l’enregistrement. D’après ton intonation, tu ne parlais pas de Yaya, mais… lui envoyer la vidéo peut quand même avoir un résultat sanglant. »
Alors…
« C’est ton tour de nous inviter à manger, Tubo. » Li Yangde et Gao Moumou levèrent leurs verres à l’unisson.
Vendre ses coéquipiers était la spécialité de Li Yangde, peu importait que ce fût dans les jeux ou dans la vie réelle.
« Et vous continuez à vous considérer comme des hommes ! » Tubo frappa son propre front. « Je me demande pourquoi j’ai appris à connaître deux pourritures. »
Pile-poil à ce moment-là, le téléphone de Song Shuhang sonna.
Il s’en saisit, et comme par hasard, l’appel venait de sa cousine.
« C’est Zhao Yaya. » Il ricana et ajouta : « Tubo, je vais t’appeler beau-frère maintenant, tu décroches ? »
Ce dernier sentit une douleur lancinante remonter de son entrejambe, et ses yeux s’embuer. « Pardonnez-moi. S’il vous plaît. »
Le jeune cultivateur éclata de rire et accepta l’appel. « Salut, qu’est-ce qui t’arrive si tard ? »
« Je ne peux pas t’appeler sans raison ? » La voix féminine semblait à bout de souffle. « Viens m’aider, je suis à l’extérieur de la Cité Universitaire de Jiangnan à la vieille rue des Six Chevaux. Vers la porte arrière de l’Agence de Photo “Mariage de Mousseline”. Tu sais où c’est, n’est-ce pas ? »
Song Shuhang fronça les sourcils, mais se ressaisit rapidement : « Compris, tu as besoin que j’amène un truc ? »
« Non, j’ai juste besoin d’aide pour transporter quelqu’un. Viens vite » répondit-elle.
« Reste où tu es. » Il raccrocha et enfila rapidement une chemise noire à manches longues.
Puis il chercha quelque chose sous son lit avant de se relever et de demander : « Je sors, vous avez besoin d’un truc ? »
Tudo s’écria : « Apporte des encas pour minuit. »
« Et une énorme bouteille de coca. »
« Ok ! » Song Shuhang leur fit un signe de la main et ramassa son portefeuille, disparaissant rapidement dans la nuit.
Une fois sorti du dortoir, son expression s’assombrit immédiatement.
Le numéro était bien celui de Zhao Yaya, et sa voix était sortie du téléphone mais… ce n’était pas elle.
Il la connaissait par coeur, y compris ses habitudes, sa vitesse, et même certains tics qu’elle n’avait pas remarqué.
La voix au téléphone était un peu plus grave que celle de Zhao Yaya, et le ton en fin phrase était également légèrement différent. L’ayant écoutée attentivement, son ton était rauque et sec.
Ce n’était pas elle, mais cette personne utilisait son téléphone et sa voix pour le faire sortir… Si cet individu affirmait ne pas avoir de mauvaises intentions, quelqu’un le croirait-il ?
Est – ce le comp lice d u tueur ? Après avoir échoué à me tuer, est-ce qu ’ il cible maintenant ceux qui m’entourent ?
Ces maudits bâtards … I ls sont venus quand même après tout !
Shuhang arriva à la vieille rue des Six Chevaux après avoir couru aussi vite que possible.
Il n’alla pas directement à l’Agence de Photo. Au lieu de cela, il se dirigea vers l’hôtel Guo Xin deux cents mètres plus loin, grimpa au septième étage, et se colla à une fenêtre du couloir.
Depuis les hauteurs, il pouvait voir l’emplacement du studio “Mariage de Mousseline”. Il activa alors son énergie mentale, utilisant la technique de vigilance pour renforcer ses sens et cacher sa présence.
Depuis qu’il pratiquait la technique de poing de Constitution des Fondations, ses yeux pouvaient être comparés à des jumelles. Même dans la nuit la plus noire, les objets à deux cents mètres de lui paraissaient encore clairs comme dans un film en HD.
La vieille rue des Six Chevaux était autrefois une rue piétonne prospère, mais à mesure que la construction de la nouvelle rue des Six Chevaux progressait, elle perdait petit à petit en fréquentation. Lorsque la nuit tombait, très peu de magasins restaient encore ouverts, et les passants se faisaient rares.
L’Agence de Photo était située au nord de la vieille rue. À proximité, mis à part les réverbères, seules les lumières de cet établissement étaient allumées, semblant perdues dans les ténèbres.
Song Shuhang aperçut rapidement la silhouette de Zhao Yaya. Elle était entre le studio et un parc dans lequel on avait replanté des arbres.
Sous la couverture abondante de ces derniers, elle était assise sur une chaise de pierre, les yeux fermés, semblant être dans un état d’inconscience.
À côté d’elle se trouvait un homme dégingandé.
Haut d’environ un mètre quatre-vingt trois, il avait de longs bras, beaucoup plus longs que ceux des gens normaux. Il portait de grandes lunettes de soleil et avait des lèvres épaisses comme des saucisses.
Il jouait avec le téléphone d’une femme.