Traductrice : Moonkissed
Auteur : Exallion
« De quoi veux-tu parler ? »
demanda Mark en regardant Paula qui était assise en face de lui.
Ils étaient tous les quatre de retour dans l’aile sud du toit, assis sur les chaises qu’ils avaient laissées là auparavant. Mark et Paula se faisaient face, tandis qu’Ange était assise à côté de son amie et Mei à côté de son Gege.
« Paula, c’est rare que tu aies l’air aussi sérieuse. »
dit Ange, confuse.
Paula jeta un coup d’œil à Ange avant de se retourner vers Mark. Elle soupira et relâcha ses épaules avant de finalement dire son intention.
« Ce n’est pas si grave. Je veux juste savoir et confirmer certaines choses. »
Elle regarda droit dans les yeux de Mark qui lui rendit son regard.
« Mais s’il te plaît, réponds à mes questions sans mentir. Je veux juste connaître la vérité.
– Tu penses que je suis un menteur ?
– Oui. »
Paula répondit franchement à la question de Mark.
« Ça remonte à quand l’oncle Bernard t’a demandé pourquoi tu nous avais sauvés. Je sais que tout ce que tu as dit n’est pas la vérité et que certaines parties sont des mensonges. Et puis, n’essaie pas de nous faire avaler des choses que seuls des malades délirants diraient. »
En entendant la dernière phrase, Mark sentit une flèche lui transpercer le dos. Mark ne put que soupirer.
« Tu es vraiment un archer, n’est-ce pas ? Tu peux même tirer des flèches avec tes mots.
– Je ne sais pas où tu as trouvé ces références, mais je t’en prie, réponds sérieusement à mes questions. »
Ange se sentait vraiment confuse à présent. Elle n’avait pas réalisé ou peut-être n’avait-elle pas réfléchi à ce que Mark avait dit cette fois-là. Mei ne semblait pas s’en préoccuper, mais elle le regardait avec curiosité.
Mark haussa les épaules et répondit.
« D’accord, tu m’as compris. Tu peux demander maintenant. Je te promets de te dire la vérité, mais ne t’attends pas à ce que je réponde à tout. »
Paula acquiesça.
« En fait, ce que je voulais demander en premier, c’était la vraie raison pour laquelle tu nous as sauvés, mais je ne le ferai pas. Je vais d’abord te demander qui tu es vraiment.
– Mes antécédents ?
– Oui.
– N’est-ce pas un peu privé ? Ce n’est pas comme si cela me dérangeait vraiment, mais je te poserai la même question plus tard.
– C’est bon.
– D’accord. Si je devais dire, pour la plus grande partie, je suis juste un reclus. »
Les trois filles furent surprises. En regardant leurs visages surpris, Mark continua.
« Cela fait trois ans que j’ai commencé à vivre de cette façon, d’accord ? Je ne sors pas beaucoup de la maison et je ne sors que si j’ai besoin d’acheter quelque chose ou si je dois faire quelque chose d’important.
– Tu ne travailles pas ? »
demanda Ange.
« Je travaille, idiote. Je suis reclus, mais je ne suis pas un NEET. Enfin, la plupart du temps. Je suis rédacteur d’articles et programmeur indépendant et j’ai aussi quelques petits boulots en ligne. Lorsqu’il y a des projets, j’ai du travail, mais il y a aussi des moments où je n’en ai pas. La rémunération des projets est bonne, alors je peux me débrouiller quand je n’ai pas de travail. »
Lorsque Mark avait terminé, Paula soupira. Elle voyait bien que Mark ne mentait pas, mais cela n’expliquait pas les choses dont il était capable.
« Je vois bien que tu dis la vérité mais ça n’explique pas plusieurs choses.
– Quelles choses ?
– La première est tes capacités de combat, une autre est ta disposition et en regardant cette arbalète que tu as fabriquée, tu es aussi compétent dans la fabrication d’armes comme ça et tu sais aussi comment utiliser ces outils électriques correctement.
– Bon sang, tu veux creuser autant ?
– Oui, mais si tu ne veux pas répondre, c’est très bien.
– Eh bien, je suppose qu’elle continuera à me harceler si je ne réponds pas. »
Mark désigna Ange qui le regardait avec un visage qui lui demandait de répondre. Paula soupira devant l’apparition de son amie mais ne l’arrêta pas non plus.
« D’accord Angeline, je vais le dire alors arrête de faire cette tête. »
Ange fit une grimace de triomphe comme si elle avait gagné quelque chose.
« À propos de cette arbalète, j’ai l’habitude de fabriquer ce genre de choses. L’un de mes petits boulots consiste à fabriquer des accessoires d’armes pour les cosplayers. Je reçois des commandes de temps en temps et je suis bien payée en fonction de ce que je fais. Parfois, j’ai dû fabriquer des armes très fonctionnelles, comme des pistolets qui émettent des sons ou tirent de fausses balles. J’ai pris l’habitude de concevoir des mécanismes et j’ai étudié l’électronique de base en autodidacte.
Si je peux utiliser des outils électriques et des équipements lourds, c’est parce que j’en ai fait l’expérience. Lorsque j’ai obtenu mon diplôme universitaire, il m’a été difficile de trouver un emploi qui me convienne et j’ai dû changer de travail de temps en temps. J’ai essayé tous les emplois, du chauffeur aux travaux de construction. J’ai aussi travaillé dans un atelier de métallurgie pendant un mois et j’y ai fait des travaux lourds. C’est là que j’ai appris à utiliser des outils électriques et des machines à souder. »
« Et tes capacités de combat ? »
demanda Paula, mais la réponse ne vint pas de Mark. C’est Ange qui avait répondu.
« Paula, je pense qu’il est autodidacte. Son style est peu conventionnel et peu raffiné. Tu sais que je suis ceinture violette de karaté et bleue de taekwondo. J’ai remarqué qu’il utilisait certains mouvements des deux arts martiaux. »
À ce que dit Ange, Mark acquiesça.
« Angeline a raison, j’ai appris tout seul en utilisant des tutoriels sur Internet et en copiant des mouvements dans les jeux auxquels j’ai joué.
– C’est…
– Incroyable, n’est-ce pas ? Mais c’est la vérité. Je m’intéressais aux arts martiaux depuis que j’étais petit, mais nous n’avions pas les moyens de nous inscrire dans des clubs d’entraînement. Quand j’étais à l’école primaire, l’un des jeux auxquels je jouais souvent avec mes frères était le combat à l’épée. Nous fabriquions de grossières épées en bois à partir d’épais troncs et branches de Kakawate et nous attaquions et défendions sauvagement l’un contre l’autre. En tant qu’enfants, nous ne pouvions pas contrôler nos mouvements et il nous arrivait de nous blesser mutuellement. J’ai appris à esquiver et à supporter la douleur à la dure.
– C’est un jeu assez dangereux. »
Mark rit.
« Je ne peux pas le nier. »
Paula continue de regarder Mark pendant qu’il parlait et soupira. Tout ce qu’il disait, il n’y avait pas de mensonge.
« Et pour mon caractère… Il a été influencé par mon trouble de la personnalité de type A d’avant. »
Mark dit sérieusement.
« Tu as dit avant ? Alors c’est guéri maintenant ? »
Paula demanda à Mark de secouer la tête avant de répondre.
« Pour une partie, j’ai ma propre méthode qui chevauche et contrecarre les symptômes du trouble paranoïaque, mais les symptômes des troubles schizoïdes et schizotypiques sont toujours là. C’est pourquoi j’appelle cela un trouble de la personnalité du groupe A incomplet. »
En entendant ce que Mark disait, Paula était plongée dans ses pensées. Elle avait marmonné le nom des trois troubles de la personnalité du groupe A et avait réfléchi à leurs symptômes. Puis, elle avait regardé Mark avec un visage où elle avait réalisé et confirmé quelque chose.
Le trouble de la personnalité paranoïaque se caractérisait principalement par la méfiance et l’anxiété à l’égard des autres et par des soupçons sur ce qu’ils pensaient. Paula avait déjà remarqué quelque chose chez Mark et cet indice avait encore renforcé ses soupçons à son égard. Mark avait dit que son trouble de la personnalité était toujours présent mais qu’il avait quelque chose à faire avec son trouble de la personnalité paranoïaque et que cela ne signifiait qu’une seule chose.
« Gege, as-tu consulté un médecin pour le soigner ? »
Mei, qui était restée silencieuse depuis le début, prit enfin la parole. Mark la regarda et répondit d’un ton impuissant.
« Je n’ai pas d’argent pour cela. Et si vous me demandez si je n’ai rien fait, je vous répondrai que c’est facile à dire, mais difficile à faire. Dans mon expérience, j’ai découvert mon état par moi-même et, d’une certaine manière, je l’ai accepté. Si quelqu’un d’autre avait été le premier à s’en apercevoir et à me le dire, il y aurait peut-être eu un déni inconscient et cela aurait pu aider à la réadaptation et à d’autres choses. Malheureusement, je n’ai eu personne de ce genre.
– Et tes parents ? N’ont-ils pas réalisé ce que tu traversais ? Tu ne leur as pas dit ? »
demanda Ange. À leur grande surprise, son humeur sembla baisser après qu’elle eut posé la question.
« Je leur ai dit au début, mais ils n’y ont pas prêté attention et ont pensé que j’étais juste paresseux et que je donnais des excuses. D’après ce que tu as dit, tes parents ont dû bien te traiter. Pour moi, même si mes parents ne sont pas mauvais, ils sont plutôt négatifs. »
Ange ne savait pas quoi répondre à cela.
« Gege, est-ce que ce trouble de la personnalité est la raison pour laquelle tu as changé d’emploi ? »
Mark acquiesça.
« C’est l’une des raisons, même si ce n’est qu’une raison mineure. »
Cette fois, Paula était sortie de ses pensées profondes et avait regardé Mark pour lui poser une question cruciale.
« Je voudrais te demander. Comment as-tu vécu avec cette maladie ? »
C’était une question légère qui nécessitait une réponse lourde. C’était aussi une question qui permettait de déterminer quel genre de personne il était dans toute cette histoire.
Mark haussa les épaules.
« Pour l’essentiel, j’ai vécu comme un reclus normal ces dernières années, après que j’en ai eu assez de changer de travail. Je l’admets, je fais partie de ces gens qu’on appelle Otakus et je suis aussi un gamer. Je passe le plus clair de mon temps à regarder des animes, à lire des romans et à jouer à des jeux vidéo quand je n’ai pas de travail en free-lance. »
Les trois filles le regardèrent fixement. Elles sentaient toutes que ce n’était pas tout. Et comme elles s’y attendaient, Mark continua.
« Mais pour l’essentiel, je vis comme une personne qui n’a pas d’appartenance. J’ai de mauvaises relations avec mes parents et les expériences que j’ai vécues dans le passé m’ont poussé à me détacher de la société.
Je passais mes journées à rêver que le monde tombe dans le chaos, qu’il soit détruit ou que notre pays entre en guerre. Je rêvais que lorsque ces temps arriveraient, je pourrais essayer de trouver un endroit auquel je pourrais appartenir ou, au moins, passer ma vie à vivre librement jusqu’au jour de ma mort.
Donc, d’une certaine manière, ce qui nous arrive maintenant est une sorte de bénédiction et un rêve qui s’est réalisé pour moi. »
Mark sourit amèrement. Il regarda à sa droite et tapota Mei qui pleurait déjà sur sa tête. Mark savait qu’une partie de ce qu’il avait dit avait tiré une corde dans son cœur.
Paula et Ange se sentaient un peu aigries par ce qu’il avait dit. Les deux filles avaient alors regardé Mei, confuses de savoir pourquoi elle pleurait. Elles savaient que ce qu’il avait dit était assez lourd, mais cela ne devait pas suffire à la faire pleurer.