Nefolwyrth
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Chapitre 34 – Affrontements en famille
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La Vieille Arène était un monument célèbre de Port-Vespère. Il était dur de ne pas la remarquer dans ce paysage urbain. Combien de prodiges du théâtre s’y étaient illustrés ? Combien de gladiateurs y avaient trouvé la gloire éternelle ? Ou la mort ? Même si aujourd’hui l’état des gradins était déplorable, bien des vieillards s’y attroupaient, n’ayant plus grand chose à faire de la journée. Ils discutaient entre eux, qu’il y ait un événement ce jour-là ou non. La seule chose qui pouvait les empêcher de s’asseoir sur ces pierres massives était la pluie.

L’arène en elle-même était couverte de sable, et l’estrade carré centrale où se tenaient autrefois les duels avait été recouverte par une épaisse toile faite de fibres de brocéliane, un matériau magique qui était à la fois dur au contact, mais indolore. C’était le sol parfait pour des combats Diogellois.

La toile allait plus loin que les limites de la zone de combat, et ce pour une raison évidente : la principale façon de remporter une victoire était d’éjecter son adversaire hors du terrain. Il avait toutes les chances de faire une belle chute. Ce pourquoi, au niveau de la marche qui se faisait la limite de cette zone, une demi-douzaine de mètres de toile s’étendait encore de chaque côté.

Aux premières loges, là où nous avions la meilleure vue, tous les participants s’étaient réunis, à l’exception d’Efflam qui manquait toujours à l’appel.

Tous ceux qui se souciaient de ce drôle d’événement fixaient la duchesse, qui avait refourgué ses obligations au grand conseiller, ce qui était une coutume locale, encore une fois.

Elle était au centre de l’arène, accompagnée du mage diogellois et d’un parfait inconnu.

Le silence se fit de lui-même dans les gradins. Même les anciens qui n’étaient pas sévèrement myopes semblaient avoir reconnu la duchesse, et bien qu’ils ne savaient pas ce qui se tramait, cette dizaine de vieillards écoutaient attentivement la prise de parole de ma tante.

Luaine : « Mesdemoiselles, mesdames et messieurs ! Bienvenue dans le premier tournoi familial de Port-Vespère. Aujourd’hui, l’un de nos seize participants sera sacré champion princier. Mais n’oubliez pas, le premier but de cette compétition est de passer un bon moment en famille ! »

La fin de cette déclaration a carrément fait retomber la tension…

Luaine : « Nous utiliserons dans les grandes lignes les règles d’un combat diogellois. Ce qui signifie que chaque affrontement sera un duel. Sera éliminé celui des deux combattants qui déclarera forfait, qui ne sera plus en état de se battre, qui aura été jugé trop violent, ou dont une partie du corps aura touché la zone de chute. La magie ne sera pas interdite. »

Les personnes qui se sentaient impliquées dans ce tournoi se tournèrent vers moi d’un air sévère.

Me regardez pas comme ça, c’est Talwin qui a décidé des règles.

Jagu : « Ça t’arrange bien ! »

Léonce : « Et puis, Ellébore aussi est mage si je me souviens bien. »

Talwin levait un sourcil.

Talwin : « Ohoh, tu cachais bien ton jeu, Ellébore. Dommage que ta carte maîtresse ait été révélée avant tes combats. »

Ellébore soupira.

Ellébore : « Je ne cache pas grand-chose hélas… »

Pendant que nos discussions s’animaient, tante Luaine présentait le mage diogellois et le soigneur qu’elle venait de faire monter sur l’arène. Elle semblait prendre son rôle très au sérieux.

Luaine : « Sur ce, que le Royal Fight commence ! »

Le ton était donné, et quelque chose dans cette phrase avait fait s’embraser notre engouement.

Luaine : « Je vais sans plus attendre appeler les premiers combattants pour qu’ils me rejoignent sur la zone de combat ! »

On n’entendait plus que les commérages lointains de grand-mères, et les battements soutenus de nos cœurs. Je déglutis. Je faisais bien évidemment partie de la moitié qui prenait ce tournoi au sérieux.

Luaine : « On ne la présente plus, elle aime tout ce qui est mignon, coloré, et ce qui peut s’apparenter à une peluche, notre première participante est Kana !! »

Elle indiqua fièrement de la main sa plus grande fille qui se raidit en entendant son nom. La demoiselle en question ne semblait pas accorder grande importance à cette compétition. Comme ma tante l’avait dit, l’activité du jour était à l’opposée de ses centre d’intérêts. Il était difficile d’imaginer la princesse une arme entre les mains.

Kana : « J’arrive ! »

Dit-elle en souriant, hermétique à l’atmosphère survoltée.

Luaine : « Elle affrontera le très célèbre lucécien qui a beaucoup fait parler de lui récemment, le favori de ce tournoi, j’ai nommé : Lucéard !! »

Tout le monde se pétrifia un instant, moi compris.

Je vais me battre contre Kana ?!

L’inoffensive jeune fille se tourna vers moi avant de descendre les marches. Elle n’était pas rassurée.

Talwin vint mettre sa main sur son épaule pour compatir avec elle.

Celui-là… Il n’avait pas l’air surpris. Je suis sûr que c’est lui qui a décidé qui affronterait qui. Le connaissant, il a quelque chose derrière la tête.

Ellébore : « C’est le moment, Lucéard ! »

Le large sourire de mon amie me donna l’impulsion de me lever. Léonce me regardait du coin de l’œil comme pour me souhaiter bonne chance.

-2-

Luaine : « Combattants, avancez-vous ! »

Elle prend vraiment ça trop au sérieux…

J’étais à des lieux de m’attendre à me retrouver face à Kana au centre d’une arène. Allais-je seulement avoir le cran de l’attaquer ?

Elle continuait de sourire innocemment, comme s’il n’allait rien se passer.

Kana : « Je n’ai aucune chance contre toi, je ne suis pas très forte… »

C’est bien ma veine. Quitte à ce qu’elle n’oppose aucune résistance, ce serait plus facile pour moi si elle abandonnait.

Elle devait avoir l’esprit le moins compétitif de la famille. Il faut dire que ce trait de personnalité avait déjà été abondamment réparti sur nombre d’entre nous.

Luaine : « Choisissez vos armes ! »

C’est vite vu !

Lucéard : « Un cimeterre pour moi, euh, s’il vous plaît ! »

Le mage hocha la tête, et se concentra. Dans mes mains apparut l’arme que j’avais demandé, elle était unicolore. C’était un bleu pâle, légèrement translucide, comme si un liquide visqueux emplissait tout l’intérieur du cimeterre. Il était léger, ce qui était une bonne chose pour des novices, mais pas pour moi. Quoique Caresse n’était pas bien plus lourde que ça.

Kana : « Des chakrams ? »

La voir prendre ça à la légère était quelque peu décevant, au fond.

Trois chakrams apparurent sur chacun des ses bras. Ces anneaux de combat étaient surtout utilisés par des mages pouvant les récupérer après chaque lancer. Néanmoins, même parmi les mages concernés, l’utilisation de telles armes était anecdotique. C’était même la première fois que j’en voyais.

Lucéard : « Drôle de choix. »

Ma remarque la fit rire. Elle empoigna adroitement les deux premiers.

Luaine se mit entre nous deux, à la limite de la zone de combat, et trancha du plat de sa main l’air, comme pour nous séparer. Toute l’assistance avait les yeux rivés sur nous.

Luaine : « Vous êtes prêts ? »

Le silence régnait.

Luaine : « Que le premier combat commence !! »

S’écria-t-elle en relevant les bras. Elle s’écarta aussitôt.

Kana commença l’offensive, en lançant tout simplement l’un de ses chakrams. Sa précision était bonne, mais son manque de conviction s’était clairement fait ressentir. D’un simple coup, je repoussais le projectile qui s’envola hors du terrain. Je découvrais ainsi le fameux effet de projection des armes diogelloises.

Kana regardait son premier chakram retomber dans le sable. Elle n’était même pas en garde. Les bras ballants, elle venait de me quitter du regard.

Kana : Il est aussi fort que je l’imaginais. J’abandonnerai quand je tomberai par terre.

Elle me sourit à nouveau, comme si nous n’étions pas en combat.

J’avançais vers elle, hésitant.

Elle me jeta alors son deuxième chakram presque à bout portant. Elle ne s’était pas attendue un instant à ce que je me fasse avoir, et après avoir réussi ma parade, je frappais délicatement, avec le dos de la lame, le torse de la princesse.

L’impact avait été faible, mais avait suffit à la déséquilibrer. Elle tomba délicatement sur les fesses.

Kana : « Tu es vraiment très fort, Lucéard. Tu as gagné ! »

De quelqu’un d’autre, cela aurait pu être une moquerie. Mais Kana, elle, essayait de me féliciter, et d’annoncer à mi-mot son abandon.

Kana : « Je suis contente qu’on fasse une activité tous ensemble, mais je ne suis pas douée pour ce genre de choses. »

Après un rire discret, elle se tourna vers l’arbitre.

Kana : « Mère… »

La duchesse savait d’avance ce qu’allait demander sa fille et soupira.

Kana : « Je déclare fo- »

Efflam : « KANAAAAAAA !!! »

Efflam venait d’apparaître dans les gradins, et tout le monde s’était rendu compte de sa présence grâce à ce hurlement. Il était dans un état lamentable, couvert de terre, les vêtements déchirés ça et là, et haletait comme s’il venait de courir depuis le palais jusqu’ici.

Efflam : « Relève-toi !!! »

Lui qui avait raté le début de l’affrontement ignorait que le duel était déjà fini.

Efflam : « Continue le combat !!! »

La demoiselle se tournait vers lui, surprise. Très vite, son visage s’adoucit en apercevant son frère.

Quel amour celui-là, il est venu juste à temps pour me soutenir.

Ignorant le message d’Efflam, elle lui souriait jusqu’à en rougir.

Dommage que ce soit fini. Et je n’ai pas pu lui offrir un beau combat comme il les aime.

Après avoir entendu son frère, Talwin se leva à son tour, et posa ses deux mains sur la rambarde de pierre.

Talwin : « C’est pas fini ! Tu peux le faire, Kana ! On est tous avec toi ! »

Encore une fois, cet encouragement n’était pas à-propos.

Ne comprenant pas ce qui était en train de se passer, Kana écarquilla les yeux.

Ellébore réalisa ce qu’essayait de faire Talwin et se leva à son tour.

Ellébore : « Donne tout ce que tu as, Kana ! »

Léonce : « Il est pas si fort que ça ! Ratatine-le ! »

Eh, vous êtes pas censés être de mon côté, vous deux ?

Même sans dire un mot, Klervi s’était mise debout, au côté des autres, et serrait les poings devant elle.

Eira : « Fais de ton mieux, Kana ! »

Même si ce fut discret, une fille du roi venait d’afficher son soutien, ce qui étonnait les trois autres.

Evariste : « Allez ma championne ! Gagne pour ton papa !! »

Goulwen tapait des mains en rythme en guise d’encouragement.

Kana était perdue, et regardait machinalement vers Aenor, qui hocha la tête fermement, pour lui transmettre sa conviction.

Jagu : « KANAAA !!! »

Yuna : « Alleeeez ! »

Kana : Vous tous…

Face à ce déferlement de soutien, les yeux de la princesse devinrent humides.

Tout le public commençait à scander son nom, encore et encore.

Kana : Vous êtes tous si choux. Mais ça ne me dérange pas de perdre. Je ne suis pas forte, et ça ne m’intéresse pas comme vous de gagner à tout prix. Pourquoi en faire toute une histoire… ?

La duchesse esquissa un sourire en coin.

Luaine : « Tu voulais me demander quelque chose, Kana ? »

Kana : « Je… »

Ma cousine était perdue.

Kana : « Je… »

Efflam : « N’ABANDONNE PAS !!! »

Au milieu de toute cette effervescence, le cri d’Efflam résonna en elle. Son grand frère était monté sur la rambarde pour que sa voix porte le plus loin possible.

Kana : Si je n’ai pas abandonné dès le début, c’est parce que je pensais que ça vous faisait plaisir que je joue le jeu. Je perdrai quoi qu’il arrive, et je vous décevrai sûrement. Mais j’essaierai pour vous tous…

Mon adversaire se releva, et laissa glisser sa deuxième paire de chakram, qu’elle empoigna fermement, ce qui provoqua une ovation retentissante dans la foule.

Kana : Si ça compte pour vous tous… Alors ça compte pour moi !

Même les visiteurs de l’arène qui étaient là par hasard venaient d’être happés par l’intensité du moment. Cette fois-ci, le tournoi commençait vraiment.

Kana : « Je continue le combat. »

Même si elle souriait toujours, je n’avais jamais vu autant d’investissement de la part de ma cousine, ce qui me fit très plaisir.

Lucéard : « À la bonne heure ! »

Elle se mit enfin en garde, ce qui fit s’égosiller ses frères et sœurs davantage. J’en fis autant qu’elle.

Kana : « C’est parti ! »

Je me remis en garde, et l’affrontai de front. Elle avait l’avantage d’utiliser ses deux bras pour frapper. Les lames rendaient l’effet diogellois plus puissant, ce qui signifiait que quelque soit l’angle avec lequel elle déviait mes coups, ses chakrams pouvaient repousser mon arme efficacement.

Mais même en utilisant ses deux mains, la faiblesse de la portée de ses attaques jouait contre elle. Elle déviait encore et toujours mes assauts, mais ne pouvait contre-attaquer, et reculait encore et encore, jusqu’à n’être plus qu’à trois mètres du hors-terrain.

Au moment opportun, elle me surprit en faisant un pas en avant, et projeta par le bas l’un de ses chakrams.

Elle vise mon pied ? Elle compte sûrement me déséquilibrer avec l’effet diogellois.

Je retirais la jambe droite en arrière, en tentant une parade pour dévier le projectile vers l’extérieur.

Dans la seconde d’après, elle était devant moi, le poing droit levé, et laissait glisser le dernier chakram de cette main jusqu’à ses doigts.

Je ramenais aussitôt mon arme pour contrer ce coup qui m’attendait.

Le choc de son attaque repoussa plus mon cimeterre que ce que j’avais imaginé.

Je me retrouvais le bras en arrière, totalement à découvert.

Elle qui avait envoyé tout le poids de son corps en avant n’avait pas subi de recul, et continuait sa course, projetant cette fois-ci son poing gauche armé.

Elle a réussi à se créer une ouverture !

Kana : Moi aussi je me suis entraînée ! Je n’ai pas eu d’aussi bons résultats que mes frères et sœurs, mais je me suis donnée à fond ! J’ai aussi fait énormément d’efforts pour honorer notre parole et apprendre à me défendre par moi-même. C’était ce qu’on t’avait promis, Lucéard ! Et pour tous ceux qui se sont entraînés avec moi, qui m’ont aidé, qui ont cru en moi, je dois leur montrer que ça n’a pas été inutile ! Alors je saisirai cette opportunité, Lucéard !

Kana : « Aaah !! »

Mon bras armé serait trop long à réagir, et puisque mon cimeterre ne me sauverait pas de ce coup, je levais la main droite.

Je suis désolé, Kana. Je suis épaté par ce que tu peux faire, et j’aimerai que ce superbe enchaînement porte ses fruits, que tout le monde sache ce que tu vaux vraiment. Cependant. Puisque tu es sérieuse, je me dois de l’être aussi !

Lucéard : « AUXILIA EIUS ! »

En un claquement de doigt, un bouclier d’énergie absorba son coup de justesse, à la surprise générale.

Talwin : « La voilà ! »

Léonce : « Je n’aurai pas imaginé qu’il l’utilise vraiment, enfin, surtout pas dès le premier combat ! »

Efflam : « Wooh ! C’est donc ça la magie de Lucéard, c’est trop la classe ! »

Le bras gauche de ma cousine rebondit vers le ciel, et l’impact lui fit perdre son chakram qui atterrit quelques mètres plus loin. Déséquilibrée par ce contre qu’elle n’attendait pas, elle dût reculer de quelques pas pour ne pas basculer en arrière. Elle était déjà presque aux limites du terrain.

C’était le moment. J’étais à nouveau en position, et profitais de cette occasion pour donner le coup de grâce. Je fonçais sur elle sans plus attendre, cimeterre en avant.

Kana : J’avais oublié qu’il utilisait de la magie… Désolée, tout le monde ! J’espère que vous vous êtes bien amusés ! »

Elle reconnut immédiatement qu’elle était dans une impasse.

Kana : Ce fut rapide… Mais, moi aussi, j’y ai pris plaisir.

Je me projetais à la force de mes jambes pour donner un ultime coup d’estoc avant qu’elle ne retrouve son équilibre.

Klervi : « Kana ! »

Talwin : « Non ! »

Tout le monde s’était rendu compte qu’elle était dos au mur. Jusqu’à la fin, la combattante souriait.

Kana : «Merci… Vous tous ! »

Tout le monde s’en était rendu compte, sauf un.

Efflam : « Tu y es, Kana, c’est maintenant !! »

Kana : « Euh ?? »

Une fois de plus, la ferveur des siens lui parvint.

Elle écarquilla les yeux après avoir réalisé que, pensant en finir sur cette attaque, j’avais envoyé tout le poids de mon corps en avant.

La princesse para d’un mouvement expert avec sa main droite, et fit passer la lame de mon cimeterre au travers de son chakram tout en déviant le coup vers la droite. Au dernier moment, elle relâcha son arme pour agripper mon poignet.

Tout en réalisant ce coup de maître, son bras gauche était passé derrière elle sans que je m’en rende compte, et elle fit glisser son dernier chakram gauche, qu’elle lança ainsi sur ma jambe. Le choc déracina mon pied du sol, me laissant à la merci de ma propre accélération. Et c’est à ce moment précis qu’elle tira de toutes ses forces sur sa main droite.

Q-quoi ?!

Tout équilibre perdu, elle m’entraîna jusqu’à la limite de la zone de combat. Elle s’était condamnée à chuter elle aussi, mais le seul qui allait se retrouver hors-jeu à l’issue de cette action… C’était moi.

Je restais bouche-bée. Mon élan allait me coûter la victoire. Je me précipitais tout droit hors du terrain.

Un vieillard s’essuyait le front avec son mouchoir en tissu. La tension était palpable. Tous ceux encore assis étaient prêts à se lever d’une seconde à l’autre. Les yeux rivés sur l’action décisive. Les participants du tournoi serraient les poings pour endurer ce suspense insoutenable.

Kana : J-je rêve…

Pas déjà !!

Lucéard : « AUXILIA EIUS ! »

Je me heurtais le visage de plein fouet au bouclier qui m’empêcha de sortir de l’arène. C’était douloureusement pathétique.

Ma face aplatie glissa le long du sort jusqu’à ce que je me retrouve couché sur la toile.

C’était pratiquement déloyal de faire ça, mais ça a été un réflexe. Honnêtement, elle a mérité la victoire…

Kana était assise au sol, à côté de moi, incrédule. Elle tournait ensuite lentement le visage vers le public, espérant ne pas leur avoir fait honte.

Efflam : « … »

La mâchoire de son frère s’était décrochée.

Efflam : « Elle l’a touchée !!! »

Le garçon avait les larmes aux yeux. Les gradins auraient presque pu prendre feu après cette action.

Efflam : « Kana, t’es vraiment la meilleure ! »

Tout le monde s’égosilla à nouveau après ce court silence.

Luaine : « C’est ma grande fille !! »

L’arbitre m’a pas l’air impartial.

Léonce : « J’en ai eu la chair de poule… »

S’amusa Léonce en touchant ses bras.

Talwin : « Prodigieux ! »

On se releva tous les deux, sous les clameurs du public.

Lucéard : « Désolé, Kana, je me suis lâchement sauvé… Après courte réflexion, c’est toi qui mérite cette victoire. »

Les yeux brillants, ma cousine continuait de contempler tout l’engouement qu’elle venait de produire, avant de se tourner vers moi, plus sérieuse que je ne l’avais jamais vue.

Kana : « Je comprends maintenant pourquoi Talwin a voulu autoriser la magie. Il avait peur qu’en étant peu habitué aux combats diogellois, tu puisses perdre bêtement. Je sais bien que jusque là, c’est ça qui t’a mis en difficulté. En plus, tu n’utilises que ta magie en dernier recours. Tu n’as rien fait dont tu devrais avoir honte. »

La voir ainsi m’épatait au point de ne pas répondre.

Kana : « Et puis, tu dois continuer ce tournoi. La deuxième raison pour laquelle il t’a autorisé la magie, c’est pour qu’ils puissent te montrer ce qu’ils valent vraiment. Ils espèrent te pousser dans tes derniers retranchements. Comme tu l’as fait pour moi, donne-leur le combat qu’ils méritent, d’accord ? »

Même si elle était d’un an mon aînée, sa bouille innocente lui donnait parfois des airs enfantins.

Lucéard : « Je… »

Elle fit quelques pas, ramassa le chakram qu’elle venait de lancer, et se retourna vers moi.

Kana : « Quoi qu’il en soit, ce combat n’est pas fini ! »

Sa propre réplique la fit rire.

Kana : « Je ne m’imaginais pas dire quelque chose comme ça un jour ! »

Je me mis en garde à nouveau, ne pouvant réfréner mon sourire.

Lucéard : « Quoi que tu dises, je me sens vaincu sur tous les plans, là. »

Kana : « J’espère qu’ils ne s’attendront pas à ce que je fasse ce genre de choses tout le temps. Gagner ou perdre, ça ne m’intéresse toujours pas… »

Elle me laissa me remettre au centre du terrain.

Kana : « Mais je l’ai vu… Pendant une fraction de seconde, j’ai eu l’impression d’avoir gagné. Moi qui n’avais jamais espéré autre chose qu’une cuisante défaite. En ayant cédé dès le début, elle n’allait pas être si cuisante que ça, cela dit. Par contre, je ne me sens vraiment pas d’abandonner après tout ça. Donc, même si ce n’est que pour cette fois-ci… J’irai jusqu’au bout ! »

Cette détermination dont elle faisait preuve ne laissait personne indifférent. Sa mère était submergée de fierté, et se félicitait d’avoir accepté que ce tournoi ait lieu.

Public : « Kana ! Kana ! Kana ! Kana ! Kana ! Kana ! Kana ! »

C’est donc ça le pouvoir des gradins.

Je jetais un coup d’œil vers les soutiens de Kana, et aperçus Ellébore qui me fit un clin d’œil complice.

Moi aussi, je vais me donner à fond !

Kana : « Me voilà ! »

Avec son ultime paire de chakrams en main, elle chargea sur moi.

Lucéard : « ANGUEM IRIDIS! »

Talwin : « Oh ? »

Le ruban d’énergie s’enroula autour de la jeune fille sans qu’elle ne puisse rien faire. Je la fis ensuite décoller du sol.

Deux mètres au-dessus de l’arène, elle s’apprêtait à me lancer l’un de ses derniers projectiles, avant de se raviser.

Kana : Si je le touche, son sort s’annulera sûrement, et je tomberais par terre…

Alors que je réfléchissais à ce que j’allais tenter, je croisai son regard.

Prête à sangloter d’une seconde à l’autre, elle m’interpella d’une voix tremblante.

Kana : « J-j’ai un peu peur, Lucéard. Repose-moi, s’il te plaît. »

Toute sa combativité s’était évanouie en un instant. Et la mienne aussi. La voir ainsi m’avait brisé le cœur.

Une fois au sol, elle s’essuyait les yeux. Tout le public soupira.

Kana : « Merci.. »

Malgré son beau sourire, sa voix était toujours larmoyante.

Lucéard : « Désolé Kana, je me suis peut-être un peu emporté… »

Ris-je jaune.

Kana : « Non, ce n’est rien, j’ai juste été surprise. »

Toute l’assistance me lançait à présent des regards noirs. La pression qui pesait sur moi était insoutenable. J’essayais de trouver refuge auprès d’Ellébore, mais celle-ci me tournait complètement le dos, désapprouvant mes actions.

J’aurais mieux fait de perdre pendant que ma dignité était sauve.

Kana : « Allez, le combat n’est pas fini ! »

Dit-elle en chargeant vaillamment.

Quand elle fut à portée, je décochais un coup de cimeterre qu’elle para d’un poing, avant de renvoyer son autre poing, que je parais aussi.

Kana : J’ai beau avoir répété ces mouvements pleins de fois, c’est plus difficile contre un gaucher !

Après plusieurs tentatives peu fructueuses, elle tenta de me contourner pour frapper.

La pauvre trébucha hélas sur l’un des chakrams qu’elle avait fait tomber tout à l’heure, et subit légèrement l’effet diogellois, qui la déséquilibra. Elle finit par s’effondrer hors de la zone de combat en poussant un petit cri.

Lucéard : « … »

Gradins : « … »

Luaine : « … »

Kana : « … »

Le vent souffla, presque aussi froid que l’ambiance à ce moment précis.

Luaine : « Hum… »

Après s’être éclaircie la gorge, Luaine éleva la voix pour être entendue de tous.

Luaine : « Kana est hors-combat ! La victoire revient à Lucéard ! »

Tout ça pour ça ?!

Le public fit malgré tout une ovation retentissante, pas seulement pour le vainqueur, mais pour celle qui nous avait tous bluffés.

Kana se remit en position assise, les genoux rentrés, et soupira.

Avant même que je ne me rapproche d’elle, tous les participants étaient descendus dans l’arène et entouraient la princesse.

Efflam : « C’était incroyable, Kana ! Tu as été fantastique ! »

Talwin : « J’ai bien cru que j’allais pleurer ! »

Evariste : « C’est tout son père cette fille ! »

Klervi : « Bravo Kana. Tu es super forte ! »

Tout le monde la congratulait avec passion. Nul doute qu’elle avait eu tout ce qu’elle souhaitait, et sans leur répondre, Kana les regarda un à un, le visage rayonnant de bonheur.

Je me joins à eux pour la féliciter.

Lucéard : « Tu m’as impressionné. Je n’en reviens toujours pas. Tu as une bonne adresse quand tu veux, et surtout, tu analyses les situations si rapidement, c’est du génie ! »

Kana : « C’est gentil, Lucéard, ça me touche ! Mais tu verras, les autres sont encore plus forts ! »

Sa modestie en faisait une adversaire encore plus admirable.

Lucéard : « Haha, je vais devoir m’accrocher, alors. »

Je l’aidais ensuite à se relever. Elle me bondit aussitôt dans les bras, puis fit de même avec les autres. Ses frères finirent par la soulever, et la ramener jusqu’aux gradins comme si elle était déjà la championne du jour.

-3-

Juste après que le calme fut revenu, Luaine reprit son sérieux.

Luaine : « Le deuxième combat va commencer ! »

Je ne m’inquiétais plus d’être appelé, mais puisque le gagnant du prochain combat m’affronterait en quart-de-finale, je me devais d’être attentif.

Luaine : « J’appelle tout d’abord le symbole de l’avenir de ce royaume. Le premier héritier du trône ! Brynn ! »

L’aîné de la cousinade soupirait en se levant. Il n’était toujours pas prêt à s’adonner à ce genre de choses, en particulier sous les yeux du bas peuple.

Luaine : « Il affrontera sa belle et séduisante sœur, Eira ! »

Les deux se lancèrent un regard entendu, et soupirèrent en chœur.

On ne pouvait pas être moins motivés que ces deux-là.

Pendant qu’ils descendaient, je m’assis à côté de Kana et Ellébore sur les gradins.

Les deux premiers héritiers au trône choisirent le fleuret, puisque c’était l’arme la plus noble, et surtout la moins palpitante.

Le combat qui s’annonçait fit bâiller Dilys. Ceilio ne savait pas qui soutenir, et fixait intensément l’arène.

Luaine : « Commencez !!! »

Malgré ce cri, ce qui suivit fut un duel tout ce qu’il y a de plus cordial. La famille royale avait appris l’escrime sans vraiment apprendre à se battre. Leurs mouvements étaient gracieux et raffinés, mais n’avaient rien de percutant. Ils s’avérèrent de niveau égal, et après un affrontement qui parut interminable, décidèrent d’abandonner tous les deux, ne sachant pas se départager.

Brynn : « Ce ne serait pas juste que je sois qualifié après le combat que tu as livré. »

Eira : « C’est plutôt à moi de dire ça, Brynn. Je ne reviendrai pas sur ma décision. »

Ils repartirent tous les deux, après de brefs applaudissements. Luaine haussa les épaules, sans tenter d’insister.

Et me voilà qualifié en demi-finale…

Luaine : « La pause est finie, le troisième combat va commencer ! »

Brynn : Quelle pause ?

Brynn et Eira se rendirent compte que leur duel n’avait pas suscité l’intérêt du public.

Eira : « En quoi était-il si ennuyeux ? Le combat de Kana et Lucéard n’a duré que deux minutes, et ils ont passé la plupart de ce temps à parler. »

Brynn : « Il ne faut pas trop chercher à comprendre comment les Vespère fonctionnent, ça pourrait endommager nos fonctions cognitives. »

Les pauvres, j’ai un peu de peine pour eux. Ils ont quand même accepté de participer.

Luaine : « J’appelle à présent le premier combattant du troisième match ! C’est le challenger du jour, le combattant le plus enragé de ce tournoi, j’ai nommé Efflam !! »

Efflam : « AAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAHHH !!! »

Le garçon en question était en train de s’embraser, ce qui intimida tous ses potentiels adversaires. Il serrait ses poings et tous ses muscles, en hurlant vers le ciel.

Luaine : « Et de l’autre côté de l’arène, nous avons un bel homme qui respire le sud, le seul, l’unique, le merveilleux Evariste ! Dit Papa ! »

Evariste : « Le futur champion rentre en sc- »

Efflam : « AAAAAAAAAAAAAHHH !! »

La fureur d’Efflam avait submergé les paroles d’Evariste, ainsi que son assurance.

Luaine : « Combattants, avancez-vous ! »

Une pluie d’encouragements précédait le combat qui s’annonçait.

Kana : « Faites de votre mieux tous les deux ! »

Yuna : « Allez papa ! »

Jagu : « T’as pas intérêt à perdre, Efflam ! »

Le père de famille faisait face à son fils.

Evariste : « Ne m’en veux pas, mon garçon ! Tout ce qui arrivera pendant ce match fera partie de ton éducation ! »

Il avait repris du poil de la bête. Mais Efflam était tout sauf intimidé.

Efflam : « Je n’aurai jamais cru que te mettre une raclée ferait un jour partie de mon éducation ! »

Leur entrain fit rire la mère.

Luaine : « Mon pauvre Riri, il aurait gagné si ça avait été une joute verbale. »

Evariste : « Heureusement pour moi, c’est l’issue du combat qui compte ! Apparais, étoile du matin ! »

Au bout de son bras apparut une sorte de batte, dont l’extrémité était une boule à pointes.

Evariste : « Eh ! La boule est pas censée pendre au bout d’une chaîne ? Pourquoi elle est collée, peu chère ?! »

Son épouse soupira.

Luaine : « Tu confonds avec le fléau d’armes, chéri… »

Evariste : « Bah, tant pis, pour le premier combat, ça fera l’affaire ! »

Talwin se tourna soudainement vers nous.

Talwin : « C’est le moment les gars ! Allez, tous en chœur ! »

Goulwen : « La flamberge ! »

Kana : « La flamberge ! »

Jagu : « La flamberge ! »

Tout le monde semblait s’amuser à scander en boucle le nom de cette arme. Ellébore, Léonce et moi finîmes par suivre le mouvement pendant qu’il s’accélérait.

Efflam tendait l’oreille vers nous, tout sourire.

Efflam : « Pas le choix alors ! Viens à moi, Flamberge ! »

Longue et zigzagante comme un éclair, une épée massive apparut dans les cieux avant de tomber dans les mains du combattant. Mon oncle frissonna en se souvenant des entraînements où il avait pu voir Efflam à l’œuvre.

Luaine : « Que le troisième combat commence !! »

Dans le brouhaha des encouragements, Efflam poussa un cri de guerre avant de foncer sur son père.

Avec sa portée largement supérieure, il faucha furieusement les jambes du duc qui décolla instantanément.

Le challenger du tournoi pivota sur lui-même pour accumuler le plus d’énergie possible, et frappa de plein fouet le torse de son père qui fut éjecté jusqu’en dehors de la zone du combat. Son géniteur s’écrasa au sol, vaincu sur tous les plans.

Efflam leva sa flamberge vers les nuages pour hurler sa victoire. Il fut accueilli par une ovation retentissante.

Sa mère soupirait.

Luaine : « Ce n’aurait pas été ton père, je t’aurais disqualifié pour avoir frappé aussi fort, fais gaffe pour ton prochain combat ! »

Efflam : « Désolé, mère… »

Mon oncle émettait un râle presque inaudible, alors qu’il tentait de ramper.

Luaine : « Le vainqueur est Efflam ! »

La foule applaudit. Certains des vieillards étaient partis, d’autres avaient été invités à les rejoindre. Il y avait maintenant une vingtaine de spectateurs supplémentaires.

Goulwen et Meloar épaulèrent leur père, et l’escortèrent jusqu’aux gradins.

Luaine : « Sans plus attendre, passons au quatrième combat ! »

Talwin se leva avant même d’être annoncé.

Luaine : « Futur duc de Port-Vespère, organisateur de ce tournoi, et éternel gamin, voici Talwin ! »

Même après cette dernière précision, Talwin descendait lentement, l‘air mystérieux, dans l’espoir de se donner un genre.

Luaine : « Il affrontera celui dont la fameuse tignasse masque le visage, le prince Ceilio ! »

Le prince en question se leva sans un mot et descendit.

Kana : « Pauvre Ceilio, tomber contre Talwin, ça n’est pas de chance. »

Ellébore à ma droite prenait des notes sur chacun des combattants.

Les informations sont la plus forte des armes après tout.

Brynn : « Je ne m’en fais pas pour Ceilio. »

Cette remarque poussa Kana et d’autres à se retourner vers le dauphin. C’était la première fois qu’il montrait de l’intérêt pour un combat.

Brynn : « Notre entraînement physique est rudimentaire à côté du vôtre, mais Ceilio a de très bonnes dispositions. Même un novice comme moi l’a remarqué tout de suite. Ceci dit, j’ai peur que son choix d’armes ne lui convienne pas. »

Eira aussi semblait plus attentive. Quant à Dilys, qui restait seule jusque-là, se rapprochait discrètement de sa fratrie.

Ceilio était certainement leur espoir de briller dans ce tournoi.

-4-

Luaine : « Combattants, avancez-vous ! »

Talwin : « C’est l’heure des cestes complètes ! »

La mystérieuse matière diogelloise recouvrit ses deux poings.

Ça alors. Je l’aurais plutôt imaginé demander quelque chose comme “La légendaire hache maudite de Pak’lu’Kal” ou une autre bêtise de ce goût là.

Il avait la même posture de garde que Kana. Ils avaient été entraînés par la même personne après tout.

Ceilio : « Pour moi, une rapière je vous prie. »

L’arme des nobles, hein ? Il fallait s’y attendre.

Luaine : « Que le quatrième combat coooooommmence ! »

Elle y a vraiment pris goût.

Talwin avançait lentement, tandis que Ceilio se mettait en garde.

Talwin : « Eh ben alors, tu as peur ? »

Sous la frange de Ceilio, on ne pouvait pas distinguer grand-chose, mais il n’était pas inquiété par son adversaire, juste concentré.

Ceilio : « Avec la portée de ton arme, je ne risque rien. Kana avait au moins l’avantage de pouvoir jeter ses armes. »

Talwin : « … »

Ceilio : « Tu ne pourras jamais m’atteindre avec des poings. »

Cette réplique fit sourire Talwin qui ressentait enfin l’excitation du combat.

Talwin : « C’est ce qu’on verra, avorton ! »

Il se lança vaillamment à l’assaut, et reçut un coup d’estoc instantanément.

L’attaque de son jeune cousin était aussi rapide que précise. Et avant même que Talwin ne réalise son infériorité, Ceilio enchaîna les attaques à une vitesse remarquable. L’effet diogellois repoussait très rapidement l’aîné des Vespère qui gardait malgré tout son équilibre. Il ne pouvait hélas nullement contrer les estocades qui lui étaient destinées.

Sa seule chance de ne pas sortir du terrain était de tomber au sol avant, ce qu’il fit.

Talwin : « Je me suis fait avoir…»

Murmura t-il, en surjouant sa douleur.

Talwin: « Je ne vais quand même pas perdre contre un adversaire si peu charismatique…! »

Kana : « Brynn a raison, il est épatant ! »

Efflam : « Ça n’est pas fini ! Même si les armes sont inégales, Talwin pourra bien réussir à se créer une ouverture ! »

Le jeune homme assis à côté de Kana y croyait encore.

Ceilio se recula jusqu’au centre de l’arène. Il n’avait pas l’intention de frapper Talwin à terre, ce qu’avait deviné Talwin, qui semblait fier de lui.

Il s’avança à son tour jusqu’en face de son adversaire.

Talwin : « Tu sais, Ceilio, j’ai tout prévu dans ce tournoi. J’ai tout fait pour que chaque rencontre soit dramatique ! Tout est écrit d’avance jusqu’en finale. Et hélas pour toi, il est aussi écrit que ce match là, c’est moi qui le gagne ! »

Ceilio se remit en garde, lassé d’entendre son cousin.

Ceilio : « Cette fois-ci, je ne m’arrêterai pas avant que tu aies quitté le terrain. »

Kana et Efflam : « Allez, Talwin ! »

Le jeune homme était étrangement serein.

Talwin : « Mes frères et sœurs sont plus nombreux que les tiens, et plus bruyants. Avec eux derrière moi, je ne peux pas perdre ! »

Il fléchit légèrement les jambes, son bras droit était arqué, et son poing gauche cachait l’un de ses yeux.

Efflam s’avança jusqu’à la rambarde, surjouant la surprise.

Efflam : « Mais c’est… ! »

Talwin : « Cestament funeste ! »

Enfants vespériens (à l’exception de Meloar) : « Oooooh ! »

Léonce : Ils ont répété cette mise en scène ou quoi ?

Talwin décrivait de grands cercles avec ses bras, espérant créer des images rémanentes de ceux-ci.

Ceilio n’était pas du tout intimidé et fut le premier à attaquer, cependant…

Ceilio : « Comment ?! »

Le coup avait rebondit. Le mouvement perpétuel des bras de Talwin était difficile à suivre, et lui permettait une réactivité accrue.

Ceilio reçut un coup dans l’épaule qui le fit reculer.

Ceilio : « Q-quoi ?! »

Sans lui laisser de répit, Talwin passa à l’offensive, et enchaîna les coups, tout en continuant les mouvements cycliques de ses bras.

La force de la rapière permettait à peine à Ceilio de parer certaines attaques, mais il ne parvenait plus à briser sa garde.

Talwin profitait de l’effet de surprise pour accélérer la cadence. Hélas pour lui, Ceilio était connu pour son sang-froid, et même dans sa position d’infériorité, il parvenait à reprendre la situation en main.

Ceilio : « Maintenant ! »

Il profita d’une ouverture pour frapper Talwin en plein cœur. Hélas, celle-ci était volontaire, mais le prince ne s’en rendit compte que trop tard.

Talwin frappa ses deux poings l’un contre l’autre, ce qui stoppa net la rapière et provoqua une onde de choc qui souleva presque la frange de Ceilio.

Talwin et Kana : « Plus un ceste ! »

Tout le monde se retournait vers la jeune fille qui avait anticipé le nom de l’attaque de son frère.

Par pitié, arrêtez les jeux de mots. En particulier celui-là…

La princesse avait des étoiles dans les yeux. Elle était la plus grande admiratrice de ses frères et sœurs.

Talwin : « Et maintenant… »

Piégé par Talwin, Ceilio était contraint de contempler la grimace malfaisante de son cousin.

Talwin : « Technique secrète… »

Efflam se levait encore une fois pour partager son engouement. Tous les enfants Vespère savaient ce qui allait suivre.

Talwin : « Coup de chau-cestes ! »

Il donna un coup de pied dans l’abdomen de Ceilio à pleine puissance. Ce n’est que maintenant que le carré royal et moi-même nous rendîmes compte de ce que signifiait “cestes complètes”.

Léonce : « Ses semelles sont aussi des armes diogelloises ?! »

Ellébore : « Il a vraiment fait ce jeu de mot ?! »

Je n’ai rien de plus à dire que ces deux-là.

Ceilio lâcha son arme et s’écrasa quelques mètres plus loin.

Eira : « Mon pauvre Ceilio, ça avait l’air douloureux… »

Le garçon se releva péniblement, ce qui attisa la compassion de ses frères et sœurs.

Luaine : « Ceilio, il y est allé trop fort ? »

Ceilio : « Non, ma tante, tout va bien ! »

Face au bel esprit sportif de Ceilio, Talwin lui lança sa rapière qu’il rattrapa en subissant un effet diogellois moindre.

Luaine : « Alors, poursuivez ! »

Talwin : « Un partout. Maintenant, prépare-toi à un final cestaculaire ! »

Ressentant enfin la menace que représentait l’aîné des Vespère, Ceilio se mit en garde, plus déterminé que jamais.

Malgré moi, je décrochais du combat. Je regardais dans le vide, en direction de ma famille qui s’enthousiasmait pour ce combat particulièrement serré. Une sensation de froid raidit mon corps, et me fit frissonner. Le paysage autour de moi s’obscurcit, et les clameurs se turent dans les ténèbres.

Ellébore : « Quelque chose ne va pas, Lucéard ? »

Comme la dernière fois, ses mots me rappelèrent à la réalité. Kana et Léonce me regardaient aussi d’un air soucieux.

Lucéard : « Oh oui, pas de problème ! »

Notre attention revint sur le match en entendant le hurlement d’Efflam.

Ceilio était essoufflé, et son adversaire, Talwin, était dans la zone de chute, couché, et faisait mine d’être mort.

Efflam : « Naaaaaaaaaaaan !!! »

Il était plus abattu encore que le perdant.

Efflam aurait pu faire un public d’exception à lui tout seul.

Tous les autres acclamèrent Ceilio comme il le méritait. Sa dextérité et son aisance à se mouvoir étaient prodigieuses. Il était probablement le premier à déjouer les pronostics de Talwin, et s’avérait être l’un des combattants dont je devais le plus me méfier.

Brynn était plus que satisfait.

Brynn : « Et voilà ! »

Eira : « C’était bien joué, Ceilio ! »

Dilys restait en retrait, et souriait discrètement. Elle n’avait néanmoins pas pu échapper à mon regard.

Rien que pour avoir fait ressortir le côté doux de ta sœur, chapeau Ceilio !

Talwin qui feignait d’être un revenant s’assit à côté de son seul aîné de cette cousinade.

Brynn : « Tu te sens bien ? »

Talwin : « Wueeerh. »

Kana se tourna vers le mort-vivant.

Kana : « Tu as été super, grand-frère ! Ta mise en scène était incroyable, j’ai beaucoup ri ! »

Malgré ses efforts, les mots de Kana n’eurent pas l’effet de le consoler.

-5-

Luaine : « Pour le cinquième combat, j’appelle maintenant la voix de la raison. Le plus calme des grands frères, notre bien-aimé Meloar ! »

En entendant cette annonce, Talwin observa d’un air dramatiquement posé son frère, abandonnant son rôle de fantôme, prouvant ainsi que toutes ses réactions n’étaient que comédie.

Meloar avait beaucoup en commun avec celui que j’étais avant. Mais d’une certaine façon, j’étais pire que lui. Il y a un an, je ne me serais pas tenu au centre de cette arène, mais lui, sans rechigner, monta la marche, et entra dans la zone de combat.

Si elle avait été là, elle aurait adoré participer…

Je pouvais presque l’imaginer combattre, sous les acclamations de ses cousins.

Luaine : « Il nous vient de Sendeuil, porter les armes fait partie de son travail, c’est le second favori de ce tournoi, destiné à affronter Lucéard. Il s’agit bien sûr de Léonce ! »

Les participants applaudirent d’avance le jeune homme qui se levait.

Léonce : « Ah c’est pas trop tôt ! Que l’échauffement commence ! »

En moins de deux, il avait rejoint Meloar après avoir mûrement réfléchi.

Léonce : « Je n’ai pas d’arme de prédilection, mais j’ai un bon souvenir de ce grand hachoir de guerre que j’avais pendant la prise d’otage, alors ce sera ça ! »

Tout le monde : « … »

Monsieur fait son intéressant avec son arme géante.

Luaine : « Et toi, Meloar ? »

Le garçon, contraint de faire face à une arme qui faisait sa taille, soupira. Il n’était pas du tout intéressé par ce tournoi, lui non plus.

Meloar : « …Une arbalète. »

Tout le monde : « … »

Le public était encore plus désespéré par le choix de Meloar.

Léonce écarquilla les yeux.

Léonce : « Hein ? Mais c’est autorisé ça ? »

Luaine : « …Oui… »

Si ma tante avait pu, elle aurait interdit certaines armes, mais elle considérait qu’il était trop tard pour changer les règles.

Le garçon ténébreux mit en joue son adversaire sans attendre.

Luaine : « Commencez ! »

Il lui tira dessus dès le signal. N’importe qui d’autre aurait mordu la poussière, si ce n’avait pas été Léonce, qui para le premier coup, et recula par réflexe. Il perdait ainsi sa chance de contre-attaquer face aux assauts incessants de Meloar, mais il avait la possibilité d’éviter certains carreaux.

Son combat s’avéra haletant, et amusa toute l’assistance, indépendamment de leurs âges. L’agilité et la fureur de vaincre de Léonce était pratiquement surhumaine. Mais il luttait avec la même difficulté que n’importe qui contre une arme déloyale.

C’était une guerre d’usure. On pouvait d’ailleurs féliciter Meloar qui arrivait à tirer sans discontinuer, avec une vitesse d’exécution remarquable, et une précision impressionnante.

Léonce ne parvenait pas à l’approcher, et s’épuisait rapidement, contrairement à son adversaire qui prenait le luxe de ne pas bouger. Il piochait dans son carquois les carreaux diogellois qui ne cessaient d’apparaître.

Et pourtant, au premier signe de lassitude, il fit un pas en avant, et jeta directement son arbalète sur le roturier essoufflé. L’impact ne poussa mon garde du corps que de quelques centimètres.

Meloar : « Je suis désarmé, j’abandonne. »

Sans attendre confirmation de sa mère, il quitta l’arène.

C’est tout lui, ça…

Luaine : « Ah, Meloar… »

Sa mère lançait un regard au combattant au sol, qui respirait péniblement, avant de faire face au public.

Luaine : « Léonce l’emporte ! »

L’ovation fut retentissante. Tout le monde était satisfait de ce combat prenant, où ils avaient pu voir les qualités de chacun des participants. Léonce avait encore beaucoup de sa superbe à montrer, et heureusement, il allait avoir une nouvelle occasion de le faire lors des quarts-de-finale.

Ellébore et moi accueillîmes Léonce en héros à son retour, ce qui lui fit accepter qu’un combat aussi injuste ait eu lieu.

Luaine : « Nous y voilà, le sixième combat de ce premier tour ! Il opposera la princesse la plus ronchon du royaume, mais que nous aimons tous inconditionnellement, Dilys ! »

Faisant honneur à sa réputation, Dilys faisait la moue. Elle ne semblait même pas encline à se lever de sa place.

Dilys : « Pourquoi devrais-je participer à cette mascarade ? »

bougonna-t-elle. Une partie d’elle trouvait ça amusant, mais jamais elle ne l’aurait reconnu.

Luaine : « Son adversaire sera la reine du silence, la plus courageuse des jeunes filles ! La plus jeune des participantes en solo, on encourage bien fort Klervi ! »

Dilys se leva aussitôt, prête à en découdre. Quant à sa cousine, qui rejoignait lentement l’arène, on peinait à deviner si ce tournoi l’amusait ou non. Elle devait surtout être en train de penser que pleins de gens, dont une majorité d’inconnus, allaient la regarder se battre, ce qui la fit rougir d’embarras.

Aussi proche qu’elle soit de Meloar, Klervi a beaucoup de bonne volonté contrairement à lui, je pense qu’elle se battra sérieusement.

Dilys était la première sur scène, et son sourire condescendant s’accordait parfaitement avec le ton qu’elle employa.

Dilys : « Je vais prendre une Hache double de berserker. »

Au bout d’un manche assez court apparut deux larges lames de haches, longues et terrifiantes. L’arme en question était plus grande que l’adolescente qui la soulevait sans trop de difficulté.

Encore une fois, l’assistance se questionnait sur le choix de cette arme.

Brynn : « Je ne peux pas imaginer quelque chose qui lui convient mieux. »

S’amusa son grand frère, comme tout le reste de sa fratrie.

Léonce : « C’est bien vu de sa part. J’ai l’impression que vu la légèreté des armes, utiliser quelque chose de massif et volumineux est très avantageux dans un duel diogellois. »

Lucéard : « Oh, tu es de retour parmi nous ? »

Le fils du jardinier était allé boire, et avait pu reprendre du poil de la bête.

Il avait d’ailleurs tout à fait raison. L’effet diogellois semblait prendre en compte la force supposée des armes.

Léonce : « J’affronterais la gagnante de ce match, même si ce sont des poids plume, je vais quand même surveiller leur combat. »

Je ne leur souhaite pas de gagner leur duel alors.

Dilys : « Alors Klervi, qu’est-ce que tu attends, choisis ! »

Pensant que rien que son arme aurait pu pousser Klervi à jeter l’éponge, Dilys la dévisageait d’un air supérieur.

Klervi : « …Goupillon. »

La fillette de 13 ans essayait de ne pas croiser le regard des spectateurs. Elle n’était pas à l’aise, mais ne se souciait pas du tout de la hache double.

Dilys : « Hahaha ! C’est mignon comme nom d’arme, ça ! Qu’est-ce que c’est au juste ? »

Se moquait Dilys jusqu’à voir le goupillon se matérialiser.

C’était un fléau d’armes avec trois chaînes à son bout et autant de boules à piques. Cette arme fit trembler le public. Les mères cachaient les yeux de leurs enfants.

Evariste : « Ce sont les deux plus frêles du tournoi, et elles ont les armes les plus ridiculement terrifiantes. »

Après ce constat, le père de Klervi réfléchit.

Evariste : « Oh, mais ! Ma petite Klervi a pris l’arme que son père voulait, mais en triplement plus dingue ! Ton papa t’aime, Klervi !! »

Klervi était déjà plus sereine après avoir entendu les mots de son père. Elle lui répondit d’un doux sourire. Cette vision attendrit Ellébore.

Talwin : « Le duel fatidique qui allait opposer les deux jeunes filles de chaque fratrie, et déchirer une famille à jamais, allait commencer. »

Pourquoi tu fais le narrateur ?

Luaine : « Les filles, vous êtes prêtes ? Faites attention avec ces armes, allez-y mollo. »

Les deux adversaires retenaient toute l’attention du public qui en allaient déjà de leur pronostics. De nouvelles têtes s’installèrent dans les gradins.

Ellébore : « Ce goupillon dégage vraiment une aura de danger. »

Lucéard : « C’est vrai, mais il est aussi dangereux pour son utilisateur. Je pense que la hache double a l’avantage. Le problème du fléau d’arme est qu’on ne peut rien parer avec, et si on l’utilise mal, on peut facilement se blesser tout seul. »

Luaine : « Commencez !! »

Les acclamations du public n’attendirent pas plus longtemps et emplirent la Vieille Arène.

-6-

Dilys prit l’initiative et avança rapidement vers Klervi.

Dilys : « Abandonne tant que tu peux ! »

Kana : « Attention, Klervi ! »

Le véritable défi pour la plus jeune des princesses était de surmonter sa timidité, sans quoi elle ne trouverait pas la force de bouger. Néanmoins, Dilys réalisa enfin que dans le regard de Klervi, il n’y avait pas la moindre trace de peur, même juste avant qu’elle ne frappe.

Klervi bondit en arrière sans précipitation, et évita de justesse le coup sans effort.

Elle fit ensuite une rotation sur elle-même, fit tournoyer son goupillon et laissa les boules à piques s’agiter au-dessus de sa tête de manière inquiétante, avant de frapper sans mouvement superflu.

La plus jeune du carré royal renonça à une deuxième attaque et para le coup en interposant sa hache. Sa propre arme lui heurta la tête à cause de l’effet diogellois.

Léonce : « L’arme de Dilys est aussi un très bon bouclier quand on la tient de la bonne façon. Mais une arme contondante comme celle de Klervi a toujours l’avantage sur un bouclier, en particulier quand celle-ci peut le contourner. »

Lucéard : « Comme tu dis, mais Dilys avait ses mains à découvert malgré tout. Si Klervi s’en aperçoit, sa parade ne passera plus. »

Ellébore et Kana souriaient en nous écoutant commenter comme si nous étions les experts de référence.

Dilys frappa encore dans le vide. Klervi avait vraisemblablement un don pour se mouvoir le moins possible, tout en étant la plus efficace. C’était une qualité qui s’avérait pratique puisque malgré sa constitution, elle n’était ainsi pas prête de s’épuiser.

La princesse aux cheveux sombres attaqua aussitôt, et tenta d’anticiper la parade de sa cousine.

Mais Dilys avait un coup d’avance, et frappa avec sa hache comme s’il s’agissait d’une batte, renvoyant les boules à piques droit sur Klervi, qui prit la décision immédiate de se laisser désarmer plutôt que recevoir sa propre attaque de plein fouet.

Klervi tomba les deux mains au sol, et son goupillon glissa quelques mètres plus loin.

Ceilio : « Oh ! »

Tout le public s’étonnait de la rapidité avec laquelle Dilys avait pris le contrôle du combat.

Talwin : « Klervi a plus d’un tour dans son sac. Elle s’est entraînée avec nous, elle a plus d’expérience que Dilys en combat. »

Eira : « Mais on parle justement de Dilys. Cette petite a horreur que les choses n’aillent pas dans son sens, elle a tendance à se comporter de façon un peu extrême pour obtenir ce qu’elle veut… »

Klervi était à quatre pattes, la nuque exposée. Avant même qu’elle ne se relève, Dilys était au-dessus d’elle, la hache vers le ciel.

Efflam : « Elle va pas faire ça quand même ?! »

Tout le monde était alarmé par ce que signifiait cette position. Même Meloar était à deux doigts de demander à ce que le combat s’arrête.

L’arbitre était aussi tendue, mais n’interrompait toujours pas le match.

Kana : « Klervi ! N’abandonne pas ! »

Efflam, à côté de Kana, s’indignait qu’on lui vole sa réplique. Puis il sourit en comprenant les sentiments qui animaient sa sœur.

Dilys : « Sans rancune ! »

Comme si elle exécutait publiquement Klervi, Dilys abaissa le manche de toutes ses forces, mais au dernier instant, croisa le regard calme de sa cousine, qui d’un bond, glissa entre ses jambes. La princesse berserker avait dû les écarter pour garder son équilibre en levant son arme.

À la surprise générale, Klervi s’était retrouvée derrière sa cousine en une fraction de seconde, et se releva en poussant cette dernière dans le dos, qui perdit son équilibre à la fin de l’attaque, et chut contre la lame de la hache qu’elle venait d’abattre. L’effet Diogellois lui fit lâcher prise et l’éjecta de quelques mètres. Dilys tomba sur le dos face à Klervi.

Tout le monde : « Oooooooh !! »

Le brouhaha s’intensifia soudainement.

Talwin : « J’arrive pas à y croire ! C’est l’action la plus classe que j’ai jamais vu ! »

Ce retournement de situation nous avait tous épatés.

Quand Dilys se releva, furieuse, elle vit sa cousine sur son chemin, la double hache entre ses mains délicates. La concentration totale de Klervi intimidait la princesse, ce qui la mit dans une colère noire.

Brynn : « Je n’y crois pas… »

Talwin croisa les bras, puis les jambes, avant de se laisser pencher en arrière, retrouvant son air serein.

Talwin : « Klervi est une fille discrète, et puisqu’elle est timide, on a souvent tendance à la croire fragile. Mais je peux vous assurer qu’en 13 ans, je ne l’ai pas vue une seule fois avoir peur. Je suis même persuadé qu’elle en est incapable. Ce qui fait d’elle la guerrière la plus prometteuse de cette famille. »

Dilys : « Rends-moi ça, Klervi ! »

Klervi se mit en garde, pour que sa cousine réalise sa situation.

Klervi : « Tu ne veux pas qu’on arrête là ? »

Lui demanda-t-elle gentiment, ce qui attisa davantage la fureur de Dilys.

Dilys : « Bon, j’en ai assez ! Tu vas voir de quel bois je me chauffe ! »

Feignant de foncer vers elle, Dilys dévia de sa trajectoire avant d’être à la merci de la hache double, et contourna son adversaire pour récupérer le goupillon.

Elle commença à l’agiter violemment au-dessus de sa tête.

Quel danger public celle-là….

Dilys : « Toi et tes grands airs, vous avez bien mérité une correction ! »

Tu es la moins bien placée pour parler de grands airs, tu sais ?

La demoiselle aux couettes se rua sur sa cousine, qui se tenait prête à parer de la même façon que Dilys plus tôt.

Dilys : « Tu m’en diras des nouvelles ! »

A la surprise générale, Dilys lança l’arme en entier, et ce, au bon moment. Klervi ne sut pas contrer cette attaque imprévisible qui prit ses jambes pour cibles. Les chaînes de l’arme s’enroulèrent autour de ses mollets, lui faisant perdre l’équilibre.

Dans l’instant d’après, Dilys en profita pour empoigner la hache par-dessus les mains de Klervi, et la frappa avec.

Malgré sa résistance, le coup que la pauvre demoiselle reçut la fit chuter, toujours emmêlée dans les chaînes de son goupillon. Dilys avait récupéré son arme, et un avantage écrasant.

Jagu : « C’est quoi ce combat de fou ?! »

Dilys montrait un sourire carnassier à l’idée d’en finir au prochain coup.

Efflam : « Klervi, relève-toi ! »

Eira : « C’est le moment Dilys, tu y es presque ! »

Aenor se leva, elle venait d’en faire une affaire personnelle.

Aenor : « Qu’est-ce que vous faites, vous autres ! On ne vous entend pas, soutenez votre sœur ! »

Ce dictateur miniature poussait les Vespère à redoubler d’effort.

Goulwen : « Klervi, tiens bon ! »

Talwin et Kana : « Alleeeez !! »

Brynn : « Dilys, tu es la meilleure de nous tous, montre-leur tout ce que tu vaux ! »

Après tous ces retournements de situations, le véritable miracle se produisit.

Meloar s’était levé, et vola l’attention des cinquante personnes rassemblées dans les gradins.

À contrecœur, il éleva modérément la voix.

Meloar : « Hm, Klervi… Ne va pas te faire mal, ce n’est qu’un jeu… »

La déception dans les gradins était grande, mais dans les yeux de la jeune fille qui se débattait pour s’extraire des chaînes, une lumière s’installa.

Venant de Meloar qu’elle admirait énormément, n’importe quelle forme d’encouragement la galvanisait aussitôt.

En réponse à l’arme secrète des Vespère, Ceilio n’eut d’autre choix que se lever à son tour.

Ceilio : « Dilys, on croit en toi ! »

Alors que même des inconnus scandaient leurs noms, sans savoir qu’il s’agissait de princesses, Klervi se releva d’un bond, et évita le coup qui l’attendait. Elle renvoya d’un mouvement expert un coup de goupillon à sa cousine qui sut le parer.

S’ensuivit un enchaînement d’attaques aussi barbares que puissantes. Les deux jeunes filles ne parvenaient pas à se départager, et leur désir de gagner était tout aussi intense.

Klervi se recula, agitant violemment les boules à piques au-dessus de sa tête. Dilys se reculait aussi, hache en arrière, jambes fléchies.

Nous étions tous contre la rambarde pour assister au final de ce duel.

Dilys : « Aaaaaah !!! »

Ce cri de guerre précéda une charge intrépide de la part de Dilys qui fut imitée par Klervi.

Klervi : « Yaaah… ! »

L’embarras de la jeune Vespère était d’autant plus mignon que son cri.

Presque arrivées au contact, Dilys frappa par la droite, et Klervi en fit autant, négligeant toutes les deux leur défense. Elles reçurent ainsi simultanément les attaques de plein fouet avant que Luaine n’ait pu les interrompre, et furent éjectées dans des directions opposées. Dilys finit sa chute en roulé-boulé dans la zone prévue pour ce genre de réception douloureuse. C’était néanmoins un vol plané qui avait coupé le souffle à toute l’assistance.

Les cris avaient fait place à un silence d’anticipation, d’inquiétude. Après s’être assurée qu’il n’y avait pas de casse, ma tante leva une main.

Luaine : « La première combattante à avoir touché la zone de chute est Klervi ! La victoire revient à Dilys ! »

Malgré la déception de certains, tout le monde acclamait Dilys. Elle l’avait bien mérité. Sa fougue lui avait permis de prendre le dessus sur un adversaire du calibre de Klervi.

Cette dernière se redressait lentement après un atterrissage assez doux. Elle se rendit compte qu’elle était assise sur son frère Meloar. Le garçon était décoiffé et saignait du nez.

Elle se remit debout en un instant, rouge comme une tomate.

Klervi : « G-grand frère, d-désolée… ! »

Ce dernier restait assez neutre, mais la gratifia d’un sourire, qui sur lui brillait par sa rareté.

Meloar : « Je t’avais dit que tu allais te faire mal. »

Il avait vu venir ce dénouement ? C’est pour ça qu’il s’est levé tout à l’heure ?

Talwin : « Même si on parle de Meloar le rabat-joie, on ne peut pas lui enlever que c’est le garde-fou de la famille. »

Voir Talwin dire du bien de son frère était aussi d’une rareté extrême.

Kana aussi était descendue, et serra Klervi dans ses bras jusqu’à l’étouffer dans sa poitrine.

Kana : « J’ai eu si peur, Klervi ! »

Sanglotait-elle.

Klervi : « K-kana… »

Supplia-t-elle doucement, avant de tomber dans les pommes.

Kana : « Klervi ?! Dilys, qu’est-ce que tu lui as fait ? »

Qu’est-ce que TU lui as fait…

Efflam : « Ça alors, je n’avais jamais vu Klervi autant sur l’offensive qu’à la fin de ce combat. »

Talwin : « Tu as encore du chemin à faire pour devenir un vrai grand frère, Efflam ! »

L’aîné agitait son index vers le ciel avec son air de je-sais-tout.

Efflam : « Dit-il ! »

Kana qui continuait de chouiner avec Klervi entre ses bras fut interpellée par Aenor, qui était aussi descendue des gradins avant la fin du combat. La connaissant, c’était probablement elle qui avait soufflé aux deux autres de se tenir prêts.

Aenor : « Repose-la maintenant ! Tu vas la tuer ! »

Ses ordres étaient plus froids qu’agressifs, mais toujours efficaces.

Kana : « T-tu as raison, Aenor. »

Klervi reprit son souffle, puis lança un regard profond à Aenor. C’était sûrement leur façon de se dire merci. Ces deux-là savaient discuter entre elles sans ouvrir la bouche, ce qui en disait long sur leur relation.

De son côté, Brynn tendait la main à sa petite sœur.

Dilys : « Je n’ai pas besoin de ton aide ! »

Elle se releva d’elle-même en tournant le dos à son frère, et leva le menton, comme si Brynn était une nuisance pour elle.

Brynn : « Tu as réussi à battre Klervi alors que tu es la moins entraînée de nous tous. Je suis très fier de toi, Dilys ! »

La demoiselle se retourna encore plus pour éviter qu’on ne voit qu’elle rougisse. Elle essaya même de grimacer pour montrer qu’elle n’était pas contente.

Dilys : « Garde tes félicitations pour quelqu’un d’autre, je m’en fiche bien ! Ce tournoi n’est qu’une vaste blague ! »

Eira et Ceilio arrivèrent juste après. L’aînée des princesse lui tira la joue.

Eira : « Oh allez, souris un peu ! Tu as été fantastique ! Et tu vas en quart-de-finale ! »

Dilys : « Ha ! Génial ! Je vais affronter le type au hachoir ! J’aurais vraiment mieux fait de perdre ! »

C’est pas faux.

Ceilio : « On te soutiendra quand même pour ton prochain combat ! »

Dilys continuait de grommeler en revenant à sa place.

Tout le monde en fit autant, sauf Klervi qui restait sur les genoux de Kana.

Talwin : « Préparez-vous, l’affiche du prochain combat est des plus alléchantes ! »

Il assume un peu trop avoir truqué ce tournoi.

-7-

Luaine : « Pour ce septième combat, j’appelle la fugitive la plus recherchée du royaume, et le génie de la mécanique local, le duo des enfants : Yuna et Jagu ! »

Citoyenne : « Ces enfants vont se battre ? »

S’indignait une mère de famille dans les gradins.

Jagu : « Enfin à nous ! »

Yuna : « Ouiiiii ! »

Jagu : J’ai fait bien attention à ce qu’elle ne disparaisse pas avant le début. Maintenant, plus rien ne peut m’empêcher de gagner !

Yuna trottinait gaiement en descendant les marches, mais se souciait-elle vraiment de sa victoire ?

Luaine : « Ils affronteront le plus ancien meuble du palais, la légende encore vivante de notre personnel de maison. Le célèbre majordome Gauvin ! »

Tu parles d’un duel au sommet. C’est surtout le choc des générations.

Après l’annonce de ce deuxième participant, Ellébore se tourna vers Goulwen, qui lui regardait le terrain, nonchalamment.

Néanmoins, Aenor qui était assise à côté de lui fixait en retour la détective d’un air impitoyable. Le dernier combat du premier tour risquait lui aussi d’être intense.

Talwin : « Je n’ai trouvé que ça pour que mère accepte de les faire participer. On leur laisse l’illusion de pouvoir se battre comme nous, mais on s’assure qu’ils perdent en douceur dès le premier combat. »

Lucéard : « Forcément… »

Talwin : « Héhé… Mais tu risques d’être surpris. »

Il semblait fier de lui.

Yuna était la première à bondir dans la zone de combat, puis se tournait vers l’entrée de la Vieille Arène. Jagu était en train de pousser un tas de ferraille de forme cylindrique, haut, et monté sur roues. Il était pourvu d’une paire de bras articulés qui, même à cette distance, paraissaient n’être qu’un assemblage de pièces de récupérations.

Le pantin de fer était plus grand que Gauvin lui-même, qui s’avançait à son tour.

Brynn : « Qu’est-ce que… ? »

Après l’avoir difficilement monté jusque sur le terrain, Jagu ouvrit la trappe du bas. Yuna entra sans plus attendre, et s’assit dans un fauteuil étroit à l’intérieur de la machine.

La seconde “porte” de cet appareil permit à Jagu d’entrer à son tour. Les deux compartiments de cette étrange création étaient à peine assez grands pour accueillir des enfants. Une partie des accès était grillagée, ce qui permettait aux deux combattants de voir leur adversaire en face d’eux.

Puisque Yuna était en bas, je devinais qu’elle allait contrôler les déplacements.

Quant à Jagu, qui empoignait de longs leviers, il pouvait faire bouger les articulations du haut.

Aenor fixait l’invention de son petit frère avec grand intérêt. Elle devait s’imaginer monter dedans, et probablement poursuivre Goulwen avec.

Goulwen observait avec inquiétude cette même machine, il avait dû imaginer la même chose.

Sur le crâne de cette créature de métal, un joyau long et rose dépassait. C’était de la murmhurlite, une pierre aux propriétés magiques amplifiant les sons. C’était aussi ce qu’on retrouvait à chacun des angles de la zone de combat et qui nous permettait d’entendre l’arbitre et les participants. Dans le cas de Jagu, une petite partie de ce minerai dépassait à l’intérieur de sa carapace de métal, ce qui lui permettait de s’adresser à tout le monde sans avoir à en sortir.

Jagu : « Chers spectateurs, je vous présente Jagu-Jagu 3ème du nom ! Ceux qui le connaissent savent déjà quel a été le plus grand changement. Il faut maintenant deux chauffeurs. Yuna se chargera de la direction et de l’avancée, tandis que moi, je serai le combattant principal ! Nous sommes invincibles ! »

Le petit génie a encore fait des siennes. J’avais presque oublié son intérêt pour la mécanique. Avec cette machine, il est vraiment passé au niveau supérieur.

Jagu-Jagu 3ème du nom se tourna en direction des gradins.

Jagu : « Nous allons remporter ce combat, et ensuite, je te vaincrai en quart-de-finale, Aenor ! Cette fois-ci ! Cette fois-ci je gagnerai ! »

Aenor ne prenait pas sa provocation au sérieux, et haussa les épaules.

Aenor : « Nous verrons bien ! »

Aenor ne participe même pas à ce tournoi…

J’entendais à côté de moi Ellébore déprimer.

Ellébore : « Personne ne s’attend à ce que je gagne… »

Lucéard : « Moi si. »

Affirmai-je en me tournant vers elle. La jeune fille me regardait, surprise.

Lucéard : « J’ai dû mal à t’imaginer perdre. Quelque chose me dit que d’une manière ou d’une autre, tu trouveras une issue pour gagner. »

Ne s’attendant pas à donner une telle impression, elle signifia davantage son étonnement, puis reprit confiance en elle.

Ellébore : « Oui, il n’a jamais été question de me laisser faire ! »

Dans mon dos, Klervi et Kana se lançaient un regard complice.

Luaine : « Combattants ! Choisissez vos armes ! »

Jagu : « Pour nous ce sera deux fauchons ! »

Il n’hésita pas un instant. Il avait dû réfléchir à ça dès la conception des “mains” de Jagu-Jagu.

Léonce : « Personne d’autre n’y a pensé jusque-là, mais les règles n’empêchent pas de choisir plusieurs armes. »

Gauvin : « … »

En face de celui qui s’annonçait déjà comme allant en demi-finale, Gauvin, ce bon vieux majordome torturé par ses rhumatismes, laissa retomber sa canne sur le côté, de manière dramatique. Il esquissa ensuite un sourire qui souligna chacune de ses rides.

Terrifiant.

Face aux deux sabres de l’engin, ce vieil homme ne semblait pas impressionné.

Gauvin : « J’ai reçu pour mission de ne pas vous laisser aller plus loin dans ce tournoi. Et c’est avec une grande fierté que je respecterai les ordres. »

Je ne m’attendais pas à ce qu’il fasse du zèle lui aussi.

Gauvin : « Masse d’ogre Tes’nrih ! »

La mâchoire des plus cultivés d’entre nous se détachèrent. Le mage diogellois semblait utiliser une quantité de mana autrement plus grande pour faire apparaître l’arme, avant même que Luaine ne l’interrompe.

L’arme qui apparut était haute de cinq mètres. En effet, les ogres Tes’nrih étaient la plus grande espèce d’ogre de notre royaume. Et leur arme était particulièrement barbare.

Gauvin : « Au nom de la duchesse, je serai votre ultime obstacle ! »

La duchesse en question venait de se rendre compte que la plus grande menace pour ses enfants était ce grabataire.

Jagu suait abondamment en apercevant l’arme au travers des grilles de Jagu-Jagu.

Gauvin : « Que le marteau de la justice et de la sécurité s’abattent sur vouuuus ! »

L’arme qui tenait debout toute seule jusque là fut poussée par les maigres forces du majordome.

Luaine : « Arrêtez ça, enfin ! »

Jagu : « Yuna, pédale !!! »

Misant tout sur cette attaque, le vieil homme contemplait son arme basculer, mais celle-ci se redressa, à la manière d’un culbuto, avant de lui tomber dessus. L’onde de choc prodigieuse engendra une bourrasque qui décoiffa tous les spectateurs.

L’employé de maison avait été éjecté par la force du coup, et s’était envolé au loin.

Luaine soupira en apercevant Gauvin au dernier rang des gradins, à l’article de la mort.

Luaine : « Le combat n’a pas encore commencé… Mais puisque l’un des deux participants n’est plus en état de se battre, la victoire revient à… »

Elle soupira une fois de plus. Le scénario catastrophe avait eu lieu.

Luaine : « Jagu et Yuna. Par forfait… »

Yuna faisait tourner la machine sur elle-même pendant que Jagu faisait onduler ses bras mécaniques, effectuant ainsi une danse de la victoire.

Yuna : « Youpiii ! »

Jagu : « On a gagné ! »

Il n’y a vraiment pas de quoi être fier.

Talwin souriait, il espérait ce dénouement.

Quelques applaudissements discrets se firent malgré tout entendre.

Ce fut à ce moment-là qu’Ellébore se leva.

Ellébore : « On y est… »

Malgré sa détermination, la demoiselle avait le trac. Les combats du premier tour avaient engendré beaucoup de tension. Les deux derniers combattants devaient se montrer à la hauteur de tous ceux qui s’étaient battus avant.

Goulwen se leva, modérément motivé par rapport à Aenor qui fut la première à descendre les escaliers de pierre.

Luaine : « Le tout dernier combat de ce premier tour s’apprête à commencer, mais présentons ces deux derniers participants malgré tout ! »

La duchesse avait repris du poil de la bête après l’incident navrant du match d’avant.

Luaine : « J’annonce tout d’abord le plus gourmand de la famille ! Le plus gentil des frères, prêt à faire un peu d’exercice pour le plaisir de tous ! J’ai nommé Goulwen ! »

Aenor et lui étaient déjà en bas et avançaient calmement vers le centre du terrain, acclamés par la foule toujours plus nombreuse.

Luaine : « Il affrontera la plus jeune détective de Lucécie, la fille du docteur qui a laissé son nom dans l’histoire de la médecine : Ellébore ! »

Ellébore sortit de sous la voûte qui menait à l’arène, sous une pluie d’encouragements.

Ellébore : « Suis-je toujours dans l’ombre de mon père ? »

Ironisa t-elle. La détective était néanmoins contente du début de l’annonce.

Luaine : « Hm, que fais-tu, jeune fille ? »

D’un air sévère, la mère de famille s’adressait à Aenor, qui lui répondit solennellement tout en mettant les pieds sur le terrain.

Aenor : « Mère, pourrais-je rester dans la zone de chute pour ce combat ? Je n’interférerai pas, je serai juste là pour conseiller Goulwen. »

Son frère savait d’avance qu’elle comptait apporter sa pierre à l’édifice, et le soutien de sa jeune sœur le touchait.

Elle se tourna ensuite vers lui d’un air impitoyable.

Aenor : « Quant à toi, ton rôle est de nous offrir la victoire. Je n’accepterai aucun échec ! »

Le pauvre adolescent rit jaune en entendant les ordres de son adorable petite sœur.

Luaine : « Tout ne peut pas être à ta convenance, jeune fille. »

La réponse de sa mère était tout aussi sévère.

Luaine : « Les règles sont les règles, tu n’as pas à te tenir sur ce terrain, que ce soit en zone de combat comme en zone de chute, un point c’est tout. »

Aenor : « Entendu… »

Coupée dans son élan, l’enfant baissa les yeux. Je me surprenais à avoir de la peine pour elle.

Elle a beau être autoritaire, elle n’est pas tyrannique pour rien, ni capricieuse comme Dilys. Tout ce qu’elle entreprend lui tient plus à cœur que quiconque, et pourtant, elle prend sur elle, sans faire mauvaise figure après un tel rejet. La maturité dont elle fait preuve à son âge est dingue.

La princesse s’arrêta malgré tout à la limite de l’arène, là où Goulwen pouvait probablement l’entendre. Elle semblait à peine contrariée. Il faut dire qu’elle prenait le combat qui suivait tellement au sérieux qu’elle ne laissait pas ses sentiments personnels interférer.

Goulwen était face à Ellébore, au centre du terrain. Avec beaucoup de sérieux, les deux adversaires se regardaient, attendant le signal de l’arbitre. Ils ne leur restaient plus qu’à choisir leurs armes, et l’affrontement serait imminent.



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