Le Chevalier des Elfes
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Lancelot : Bonjour Arthur, tu as dit que tu avais des nouvelles inquiétantes sur mon neveu Othion. Je ne le vois pas souvent parce que nous sommes un peu brouillés, mais je suis quand même curieux.

Arthur : Mon général, je crois que vous êtes un as en matière de sort de vérité, qu’il est très difficile de vous mentir.

Lancelot : J’ai en effet des compétences mystiques pour détecter les bobards, mais pourquoi es-tu intéressé par ce genre de sortilège ?

Arthur : Je soupçonne votre neveu Othion d’avoir lâchement attaqué une elfe qui ne lui avait rien fait.

Lancelot : C’est une accusation grave, as-tu des preuves ?

Arthur : D’après le témoignage de la victime, l’agresseur a réagi dès qu’elle a présenté sous un jour défavorable Othion. Cela veut dire que le criminel est Othion lui-même, ou une de ses connaissances.

Lancelot : Pour commettre un crime il faut en général un mobile, je ne vois pas celui d’Othion.

Arthur : La jalousie, Othion est amoureux de Thérésa, mais celle-ci le considère avec mépris, et éprouve des sentiments d’amour pour moi, un humain. Or Othion voit les non elfes comme des sous-êtres. Cette situation doit le faire souffrir terriblement.

Lancelot : Tu as du ressentiment pour mon neveu, j’ai l’impression que c’est surtout ton animosité qui te pousse à l’accuser.

Arthur : Il faut tout de même admettre que des présomptions pèsent sur Othion. En plus si j’ai tort, je lui ferai de plates excuses.

Othion tressaillit quand il vit Arthur accompagné par Lancelot qui montrait un visage contrarié. Il était tard le soir, les couloirs de l’école étaient relativement déserts. Othion s’apprêtait à aller dormir, il était à deux doigts d’enfiler une toge confortable, à enlever ses vêtements de jour, et à dormir dans la chambre occupée par lui et le fort.

Othion avait peur que son crime infâme ne soit découvert, qu’Arthur ne soit là pour le confondre. Puis le vaniteux se reprit, il était un elfe de haute naissance, même si des présomptions pesaient sur lui, sans preuve solide il ne serait jamais jugé. Et Othion doutait qu’Arthur ait suffisamment d’éléments pour convaincre un tribunal d’engager une procédure judiciaire. Il pouvait avoir de lourds soupçons, mais cela ne suffirait pas.

En fait le vaniteux estimait qu’il pourrait même sortir grandi, plus riche et avec un meilleur statut, si Arthur allait trop loin dans son enquête. Même s’il s’illustra à plusieurs reprises au cours de ses études, il demeurait un humain avec un statut précaire, sans la protection de Lancelot, il n’aurait jamais pu étudier à Sar. Donc Othion jugeait qu’en jouant suffisamment bien les indignés, il aurait moyen d’exiger un dédommagement conséquent de la part d’Arthur.

Certes le vaniteux adopterait un comportement osé de militer pour recevoir un don financier, alors qu’il commit un crime grave, et que le seul tort d’Arthur se limitait à chercher la justice pour une amie. Toutefois Othion appréciait hautement l’idée de se venger d’un interlocuteur humain plus doué pour se battre, et avec une meilleure moyenne générale du point de vue des notes.

Le vaniteux essaya diverses techniques pour l’emporter sur le fort. Il modifia son régime alimentaire en y incluant beaucoup de poisson, bon d’après la rumeur sur la mémoire. Il réduisit son temps de loisir afin de se consacrer davantage aux études. Il fut même tenté de recourir à la triche lors des examens avec des feuilles de papier contenant des réponses, ainsi que la corruption de professeurs par l’argent, ou la promesse de récompenses comme une place auprès d’un haut personnage. Cependant sa fierté l’empêcha de gruger mais il en concevait quand même un goût amer. Parce qu’il se faisait progressivement distancer par Arthur. En effet son ennemi était en bonne voie pour récolter la mention très bien voire excellent sur son diplôme.

Et cela déplaisait vraiment à Othion, il avait beau enchaîner les efforts et se donner vraiment à fond, il y avait actuellement un écart de plus de cinq points entre sa moyenne générale et celle d’Arthur. Le vaniteux stagnait à dix-sept sur vingt-cinq tandis que son adversaire se rapprochait de vingt-trois. Il était donc possible que le fort arrive à un résultat très rarement vu dans l’histoire de Sar. Qu’il se rapproche d’un score presque parfait.

Même la matière qui posait le plus de problèmes à Arthur, les langues étrangères, devenait un domaine sur lequel il excellait. C’était vraiment insupportable pour le vaniteux. Il trouvait lamentable que lui un elfe d’élite soit obligé de reconnaître une valeur supérieure à Arthur dans l’intellectuel. Aussi il avait la ferme intention de faire baver le fort, si ce dernier essayait de l’accuser d’un crime. Quand bien même il s’appuierait sur la stricte vérité.

Lancelot : Le lieutenant Arthur, pense que tu as commis un crime affreux Othion. Tu te serais rendu coupable d’une agression sur une elfe du nom de Thérésa. Me permets-tu de te soumettre à un sort de vérité ?

Othion : Allez-y mon oncle je n’ai rien à cacher.

Lancelot : Que les mensonges deviennent impossibles à dire par le véritus, que la magie délie les langues. Othion as-tu malmené Thérésa ?

Othion : Jamais de la vie, il est insensé de penser que je peux lever la main sur une elfe, en particulier Thérésa.

Arthur se sentait vraiment étonné par le dénouement, il aurait été prêt à parier beaucoup qu’Othion était coupable. De son côté Lancelot éprouvait un soulagement palpable. Et Othion rayonnait de joie de mettre son ennemi le fort dans une situation délicate.

Lancelot : Arthur je crois que tu dois des excuses à Othion, pour tes accusations idiotes.

Arthur était étonné, mais il réfléchissait vite, il était au courant qu’Othion aimait les stratagèmes magiques, il pensa un moment demander à ce que son ennemi soit tout nu pour démontrer son innocence, mais le fort se dit qu’il en demandait beaucoup. À la place il exigera que son adversaire vire certains objets.

Arthur : Un instant, j’aimerai qu’Othion enlève son amulette magique, et que vous lanciez une nouvelle fois un sort de vérité, mon général.

Othion : Je ne veux pas, mon amulette est un porte-bonheur. Si elle cesse d’être en contact avec ma peau, cela me sera préjudiciable.

Lancelot : Othion je t’ordonne d’exécuter la demande d’Arthur. La superstition ne doit pas être un obstacle à la révélation de ton innocence.

Othion : Désolé je sais que je devrais vous obéir, mais même si j’ôte ne serait-ce qu’une seconde mon talisman, je risque un sort terrible.

Lancelot : Othion sois raisonnable, ne laisses pas la peur du mauvais sort te rendre suspect aux yeux des autres.

Othion : Non, et non je suis maudit, ma seule protection efficace contre un destin funeste s’avère mon amulette. Je refuse de m’en séparer même un court moment.

Lancelot : Tu ne me laisses pas le choix Othion.

Othion le vaniteux regarda avec horreur son oncle lui prendre son amulette, il eut l’impression que le monde s’écroulait sur lui, il avait une envie de fuir à toutes jambes, mais il était retenu par la poigne solide de Lancelot qui lui broyait presque un bras. Othion essayait de toutes ses forces de se dégager, mais il subissait un véritable étau. Lancelot s’y connaissait en techniques pour immobiliser un adversaire, c’était un pratiquant de la lutte et d’autres sports de combat où il fallait paralyser son concurrent pour remporter la victoire.

Cependant le vaniteux n’abandonnait pas la partie, même s’il était victime d’une prise restreignant ses marges de manœuvre, il tenait trop à sa liberté pour renoncer à tenter quelque chose. Aussi il essaya de cracher sur son oncle afin que sa cible perde momentanément de la concentration. Toutefois ce fut de la pure perte de temps. Lancelot était une personne habituée à gérer des cas difficiles au moyen de techniques d’immobilisation. Il participait de temps à autre à des batailles contre des adversaires beaucoup plus costauds que lui. Lancelot arrivait à ôter leur liberté de mouvement à des ennemis pesant cinquante kilos de plus que lui et tout en muscles. Il choisissait l’immobilisation plutôt que la tuerie contre des chefs ennemis quand il y avait des renseignements valables à récolter.

Il était profondément désolé de lever la main sur un membre de sa famille, surtout que la résistance acharnée d’Othion s’avérait une preuve manifeste de sa culpabilité. Tout de même Lancelot entretenait toujours un mince espoir que la lutte de son neveu ne soit qu’une folie liée à une superstition démente autour d’une amulette, et non une volonté d’échapper à la justice.

Lancelot avait le sens de la famille, même s’il ne voyait pas très souvent Othion, il tenait à le protéger au mieux, et non à participer à sa déchéance. Même s’il était hors de question de couvrir un crime d’agression sexuelle contre une elfe.

Lancelot : Véritus. As-tu agressé Thérésa ?

Othion : Oui je m’en suis pris à cette ignoble elfe qui trahit sa race, en cherchant à s’unir avec un humain. C’est vraiment dommage que je n’ai pas pu la violer d’ailleurs.

Arthur était partagé par l’envie de traduire devant la justice Othion et le désir de l’étrangler. Tandis que Lancelot nageait dans le désarroi complet.

Lancelot : Bien que cela me navre Othion, je suis forcé de t’arrêter.

Othion (explose de colère) : Non ! Vous ne m’aurez jamais !

Othion le vaniteux profita de la consternation de son oncle pour se dégager. Il chercha à s’enfuir en détalant dans les couloirs de l’école de Sar, mais il fut facilement rattrapé par Arthur. Il essaya de distancer son poursuivant en courant aussi vite qu’il le pouvait. Mais il ne possédait pas les talents physiques de son interlocuteur. Ainsi il dut batailler dans un endroit rempli de couronnes de feuilles de chênes, avec en dessous le nom d’une personne écrite sur un papier pour chaque couronne. Ces récompenses, encadrées sur les murs, étaient décernées pour les meilleurs sportifs de l’école de Sar.

Par contre Othion n’abandonnait pas la partie même s’il ne pouvait pas semer son adversaire. Il dégaina son épée avec l’intention manifeste de s’en servir. Il était fermement décidé à transpercer le ventre de son antagoniste. Il prit d’ailleurs des précautions pour se ménager une porte de sortie en cas de fuite. Un cheval rapide l’attendait dans une auberge non loin de l’école, et il cacha une bourse pleine de pièces d’argent et d’or sous le sol près d’un arbre creux. Othion avait des défauts cependant il s’attendait un jour ou l’autre à devenir un fugitif. Il s’adonna à des activités sexuelles peu recommandables sur des elfes et des personnes d’autres races, Thérésa n’était pas son premier coup d’essai.

Toutefois avant de fuir, il fallait déjà arriver à se débarrasser d’Arthur. Ce qui était loin d’être gagné. Le vaniteux devait d’ailleurs se dépêcher d’en finir avec le combat sinon le fort sera rejoint par des renforts notamment Lancelot. Alors Othion décida d’attaquer précipitamment, de recourir à une de ses meilleures techniques. Malheureusement il ne réussit pas grand-chose, de plus Arthur mit tellement de force dans sa parade avec son couteau qu’il désarma son ennemi. Le vaniteux reprit alors la course, mais il n’alla pas très loin car il fut assommé par un coup de poing par derrière au niveau du cou. Le général Lancelot arriva quelques secondes après qu’Othion sombra dans l’inconscience.

Arthur : Aidez-moi à transporter Othion vers une cellule pendant qu’il est inconscient, s’il vous plaît mon général.

La famille d’Othion le vaniteux fit le maximum pour que la honte ne se répande pas sur elle. De plus Arthur, Thérésa et Lancelot, promirent de faire le maximum pour empêcher le scandale, mais pratiquement tous les élèves de l’école de Sar finirent par être au courant de l’ignominie qu’Othion avait commise à l’égard de Thérésa et de la déchéance sociale du vaniteux ; qui était passé de noble arrogant plein d’espérances, à prisonnier condamné pour un crime infâme.

Il échappa à la peine de mort grâce à l’intervention de son père. Toutefois il regretta très vite de rester en vie, car non seulement ses conditions de captivité étaient dures à supporter, mais il faisait l’objet de câlineries répétées de la part d’autres prisonniers.

Du côté d’Orunaé il y avait une profonde remise en question de sa foi religieuse, il ne comprenait pas comment il était possible qu’un elfe comme Othion soit victime d’une déchéance sociale mémorable, tandis qu’un ennemi de la seule foi véritable comme le fort se couvrait d’honneurs.

Arthur admettait que la divinité Jéhavah existait mais il clamait aussi que sous certaines circonstances, il fallait mieux prier d’autres êtres. Alors Orunaé se mit à éplucher quantité de livres pour trouver une explication spirituelle à ses tourments. Il ne trouva pas de réponses satisfaisantes, à part un sentiment qu’il fit fausse route pendant longtemps, qu’il était peut-être nécessaire de réorienter ses croyances divines.

La famille de Thérésa payait le prix fort, pour que le vaniteux soit victime de brimades et d’agressions. Elle témoigna une vive reconnaissance à Arthur. Cependant le fort s’était aussi fait des ennemis puissants, notamment Morgane la haute-parlementaire. Cette cousine lointaine d’Othion éprouvait une forte animosité. Comme mesure pour saquer Arthur, elle demanda sa dégradation, heureusement Lancelot fit obstacle à la requête de Morgane. Le fort surprit une conversation houleuse par l’intermédiaire de sa boule de cristal, un artefact volé à Othion.

Morgane : Je ne comprends pas pourquoi tu protèges un humain Lancelot ?

Lancelot : Arthur est un de mes subordonnés, et j’ai juré de protéger du mieux que je pouvais mes subalternes tant qu’ils ne commettaient pas de crimes graves durant leur service.

Morgane : Je suis prête à te fournir la distinction honorifique suprême en terme de médaille militaire en échange d’une entorse à tes principes. N’oublie pas je connais très bien Hertio le roi elfe.

Lancelot : Les serments volontaires sont faits pour être respectés, peu importe les circonstances.

Morgane : Prends garde à ce que ton obstination ne cause pas aussi ta perte.

Arthur était content de la loyauté du général. Mais son avenir demeurait délicat, le fort était en permanence surveillé. La plus petite entorse au règlement militaire pourrait signifier pour lui une avalanche d’ennuis. Toutefois il ne se laissa pas tellement ébranler par la nouvelle qu’une épée de Damoclès pesait sur lui.

Déjà il avait confiance dans Lancelot pour le protéger. Ensuite il savait que son chemin serait rempli de l’apparition de nouveaux ennemis. Il se ferait des amis loyaux mais il récolterait aussi des adversaires s’il persistait à se montrer ambitieux. Bien sûr le fort n’était pas complètement imperméable à l’angoisse. Il ressentait un peu de peur à l’idée que Morgane le coince en train de ne pas respecter le règlement. Cependant il estimait aussi que s’il voulait l’emporter il ne fallait pas être gouverné par les émotions négatives comme la hantise.

Et puis comparé au contexte passé dans les mines, les menaces de Morgane paraissaient presque gentilles. Quand Arthur était un esclave, il devait contrôler jusqu’à l’inclinaison de son regard pour éviter les coups de fouet. Bien sûr le fait que sa brillante carrière puisse être interrompue n’enchantait pas beaucoup le fort, mais ce dernier affronta des épreuves terribles dans le passé qui endurcirent son cœur.

En outre il comptait sur des protecteurs comme Thérésa dans le pire des cas. Même s’il se faisait renvoyer de l’armée, il espérait quand même obtenir un poste de maître d’armes ou d’officier dans la garde de la famille de Thérésa. Néanmoins il planifiait toujours de rester encore longtemps un subordonné de Lancelot. Il désirait payer sa dette d’honneur envers le général, et la perspective de contrarier les plans de Morgane qu’il voyait comme une intrigante énervante, était une opportunité très agréable. Or d’après ce que le fort comprit, tant qu’il resterait à son poste d’officier ou qu’il progresserait dans la hiérarchie il nourrirait la colère de son ennemie.

Malgré le fait qu’il savait que certains elfes voulaient lui pourrir sa réputation, Arthur continua quand même des trafics. Mieux il élargit même au fil du temps ses contacts et alliés dans le monde illégal, désormais il était à la tête d’une organisation de cinquante personnes. Par contre il interdisait formellement à ses subordonnés de chercher à profiter de la prostitution. Il continuait à voir cette activité lucrative comme une sorte de honte à combattre, et non à encourager.

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