La Tour des Mondes
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Chapitre 272 : Une présence inoubliable
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« Réveille toi, Nomad. »

Je tousse plusieurs fois alors que je suis assailli par un mal de crâne incompréhensible. Sans même réfléchir, je crie de douleur alors que je n’arrive pas à comprendre ce qui m’arrive. Mon corps se met à trembler alors que j’attrape ma tête entre mes mains. Je la frappe à plusieurs reprises contre le sol, mais ça ne change rien.

« Tu comptes me faire le coup à chaque fois ? Je pensais que t’évanouir à chaque nouveau lien ne se reproduirait plus. Apparemment tu n’es toujours pas prêt. C’est sans doute pour ça que créer une aura a été aussi difficile pour toi, tu n’acceptes pas de partager ton esprit si facilement. »

J’entends la voix de Fae, mais j’ai bien du mal à faire sens de ce qu’elle me raconte. Ma tête me donne l’impression d’exploser à chaque instant et je ne comprends pas ce qu’il se passe… La dernière chose dont je me souviens est que j’étais en train de méditer pour essayer de déployer mon aura et ensuite plus rien…

« Mange ça. Cela ne te sauvera pas, mais cela diminuera sans doute tes symptômes. »

Sans ménagement, je peux sentir qu’une main place quelque chose dans ma bouche et j’avale sans même réfléchir. L’instant d’après, ma gorge prend feu et je me mets à inspirer comme si je n’avais plus d’air dans les poumons.

« C’est juste une surcharge sensorielle et cognitive. Rien que tu n’as pas déjà affronté par le passé. Les animaux ont profité de ton manque d’expérience pour s’engouffrer dans la brèche, si je puis dire. »

Petit à petit, j’ai l’impression que chaque battement de mon cœur qui semblait alimenter mon mal de crâne diminue. En toussant, je redresse la tête pour voir Fae sous sa forme de gardienne et non humaine qui sourit en me regardant. Je manque de m’étouffer alors que je me sens complètement dominé par son aura divine, d’une façon bien plus violente que pour Orion ou Ephy…

La voir dans l’arène est une chose, mais elle n’est qu’à quelques centimètres de moi à présent et me domine complètement par sa taille et la force qui se dégage d’elle.

« Puisque tu as pris la peine de me demander sérieusement un conseil, j’ai décidé de prendre un peu plus sérieusement mon rôle de professeur. T’évanouir a plus ou moins fini de me décider et ce n’était plus très amusant à regarder. Maintenant, lève-toi. »

En me frottant le visage pour en retirer l’épaisse couche de poussière dessus, je me lève alors que ce qu’elle m’a fait avaler continue à diminuer mes symptômes. Elle me fait ensuite un signe de main pour que je regarde autour de moi.

À quelques mètres, je peux voir les zèbres que j’ai coursés… mais il n’y a pas qu’eux.

Je peux voir quelques gazelles, un buffle et ce qui a l’air d’être un groupe de suricates ainsi que quelques oiseaux dont je ne connais pas le nom.

« Tu as devant toi tous les animaux que ton aura a attirés. Cela fait exactement 36 liens simultanés. Tu es officiellement le premier Dresseur à avoir déployé une aura dans mon aile. Cela demande un certain niveau de compréhension de la classe et les autres ne sont jamais allés suffisamment loin pour l’atteindre. Mes entraînements sont pourtant clairs, il suffit de lire entre les lignes pour avoir un aura. Je t’ai en exemple pour le prouver maintenant. »

Si je n’étais pas atteint par un des pires mal de crâne de ma vie, je lui dirai bien qu’elle fait n’importe quoi en tant que prof et surtout rien, mais je n’ai pas vraiment la possibilité de la contredire dans mon état.

« Je sais que tu as l’impression que ton cerveau ressemble à de la bouillie, mais faire une pause maintenant serait une erreur cruciale dans ton entraînement. Cours avec eux et apprends à ne devenir qu’un. C’est un ordre. »

En entendant les derniers mots de Fae, je me mets aussitôt à marcher en vacillant. Autour de moi, le groupe d’animaux ne cherche même pas à communiquer et se redresse pour commencer à me suivre en se mettant autour de moi. À mesure que l’effet de la mixture que m’a donnée Fae se répand dans mon corps, j’accélère le rythme. Ma tête continue de me faire souffrir, mais je serre les dents en restant concentré sur le son qui m’entoure. Le rythme des sabots, le bruit des hautes herbes qui se couchent sous le passage des animaux, le son des dizaines de respirations…

Je n’ai pas à connaître ces animaux ou même à m’habituer à leur présence. Ils sont autant une partie de moi que je suis une partie d’eux. Je partage leurs sensations, comme si ce n’était qu’une façon d’exacerber les miens. Chaque sensation est différente, mais se superpose aux autres petit à petit alors que je commence à m’y faire.

… Je peux sentir que quelque chose a changé. Si jusque-là cette histoire d’aura ne faisait pas beaucoup de sens, elle en a un maintenant. D’une certaine façon, j’ai maintenant l’impression de voir le monde différemment, comme si j’étais libéré d’un poids que je m’étais imposé sans le savoir depuis que j’ai créé mon premier lien avec Micha. J’ai cherché à contrôler le lien et à me l’approprier alors que je devais juste le libérer au lieu de le limiter.

Alors que j’avance de plus en plus vite, je peux sentir que ma tête continue de me faire souffrir de plus en plus, mais j’arrive à l’ignorer en restant concentré sur les sensations grisantes que je ressens et qu’ils ressentent aussi à travers moi. Il n’y a plus de zèbre, de gazelle ou de buffle, il n’y a que « nous ».

En étant lié à autant d’animaux, je ne comprends pas comment il est possible pour moi de comprendre ce qu’ils font tous, mais c’est pourtant le cas.

Pendant encore une dizaine de minutes, je continue à courir sans me préoccuper de mon corps et finalement la réalité finit par m’atteindre alors qu’ils s’essoufflent autour de moi. La douleur finit par être insupportable en me donnant l’impression d’être un martèlement sans fin et je repose les mains sur ma tête alors que cela devient impossible à ignorer.

Je perds graduellement conscience et je tombe à genou en ayant l’impression que la substance que m’a donnée Fae ne fait plus effet. C’est à ce moment-là qu’elle apparaît devant moi en un instant et me gifle.

« Ce n’est pas l’heure de dormir. Ne te perds pas dans la sensation ou tu risques de perdre la tête. Concentre-toi sur ta propre respiration. Crée une sensation d’unisson avec eux. Tu es celui qui décide de ce qu’il se passe, ne laisse pas toutes ces pensées te contrôler. »

Sans même attendre une réponse de ma part, Fae me pousse en arrière et me force à m’allonger en gardant sa main sur mon torse pour me garder immobile. La lumière du soleil m’agresse alors que je ne m’entends même plus tousser dans le raffut présent dans ma tête. Il n’y a que la voix de Fae qui arrive à transpercer tous les sons que j’entends en écho des dizaines de fois à travers le lien.

« Réfléchir est ton poison. C’est le cas depuis le début. Tu compliques tout ce que tu ressens en cherchant à comprendre. Chaque sensation que tu affrontes ne cache que les milliers d’autres qui s’accumulent et qui finissent par devenir un torrent inarrêtable. Laisse ton esprit faire et concentre-toi sur ton souffle. »

Si j’en étais capable, je dirais à Fae que j’aurais bien aimé qu’elle m’explique ça lors de mes premiers dressages et pas maintenant alors que j’agonise à moitié. Il n’y avait pas une façon plus facile de m’apprendre à gérer tout ça ? Je sais bien que j’ai toujours été « sensible » à chaque nouveau lien ou même à chaque fois que le lien gagne un niveau, au point de perdre connaissance ou même finir dans le coma, mais je suis censé laisser ces sensations m’envahir ?

« Si tu n’apprends pas à gérer cela maintenant, tu risques de mourir. Ton cerveau ne sera pas capable de traiter les informations et tu finiras par te transformer en légume. Je te recommande de te concentrer. »

… Ok.

Après l’aura, la respiration. Ce n’est pas que la mienne, mais celle des autres aussi. Je dois faire ça lentement. Revenir à un état de calme et ne penser à rien…

« C’est mieux. Continue comme ça. De mon côté, je dois parler à cette Angela, ta déesse ou je ne sais quoi. Je suis fatiguée de ses interventions. »

Mon mal de crâne empire immédiatement alors que Fae finit sa phrase.

… Quoi ? Qu’est-ce qu’elle vient de dire ?!



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