C’est une vue tout à fait abominable qui se présente aux quatre adolescents. Uniquement un seul cadavre troué serait déjà horrifiant, mais là, c’est une bonne dizaine dans la pièce entière. Les corpulences diffèrent, avec certains qui sont clairement des corps d’enfants ou de jeunes adolescents, d’autres plutôt d’adultes. Ce qui est indéniable, c’est qu’aucune vieille personne ne se trouve dans cette pièce. La vue est trop horrible pour qu’ils puissent vérifier plus longtemps, mais du peu que Deshya a pu observer, chaque cadavre est troué dans plusieurs parties de leur corps, avec celui devant eux qui en a un dans le torse et des yeux qui manquent. Même si elle est habituée à voir des morts, désormais, elle ne peut que tourner le regard avec des yeux grand ouverts, une bouche bée et une respiration rapide — de l’hyperventilation, plutôt. En réalité, Tessa est la seule à être ‘calme’ dans le groupe — et encore, ce mot n’est pas précis. Elle est plutôt ‘la plus calme’ du groupe, mais est clairement choquée, le corps tremblant. L’odeur de la pièce, le fait qu’il soit sous la surface de la terre et dans un bâtiment abandonné, sombre et peu rassurant font que l’ambiance est une des pires qu’ils n’ont jamais vécu ; Tessa se demande même si elle préférait pas être de retour dans le train bombé plutôt qu’ici. Toutefois, en voyant l’expression horrifiée de ses trois amis, elle déglutit bruyamment et reprend son souffle, fermant les yeux et n’observe donc pas le cadavre pour l’instant. Sa lampe de poche tremble dans sa main, elle qui continue d’éclairer le cadavre devant eux tous. La raison que Raiji a crié de la sorte n’est plus un secret pour eux, désormais… Le fait qu’il n’ait pas hurlé plus fort est même surprenant, car il est fort possible que Tessa elle-même ne puisse pas retenir cela dans sa cage thoracique. Le garçon se calme petit à petit, Maruno s’assurant qu’il va bien, tandis que Deshya observe discrètement Tessa. Cette dernière serre fortement la lampe de poche dans sa main et se calme à son tour, ouvrant doucement les yeux.
Ceux-ci qui se posent sur le cadavre devant elle, mais qui voit aussi les autres.
– …
L’odeur a l’air d’augmenter en intensité à chaque seconde qui passe. Est-ce une impression ou la réalité ? Impossible à confirmer. Tessa prend une grande inspiration, aussi horrible soit-elle, et expire tout avant de faire un pas en avant. Le bruit vient à résonner dans la pièce sombre, alertant ainsi les trois autres adolescents de son acte de courage. Deshya est celle qui ose se tourner vers elle, du coin de ses yeux elle voit les cadavres.
– Tessa, tu n’as pas besoin—
– J’sais, mais j’suis sûrement la seule qui peut supporter de m’en approcher. ‘Tain, c’est dégueu…
Elle se bouche le nez en s’approchant, sa main tremblante à nouveau, ainsi la lumière de sa lampe frissonne, comme si elle-même avait peur de ce qu’elle voyait. Toutefois, Tessa se refuse de tourner le regard : ils sont venus ici pour vérifier l’authenticité du ‘ldirect’ de ce fameux couple sur TikTok, alors maintenant qu’ils comprennent que cela n’était pas qu’une simple comédie pour attirer l’attention, Tessa veut savoir ce qu’il se passe. Ce n’est pas un simple cadavre qui est tombé sous le sort malheureux d’une lame qui lui a tranché la gorge ou l’a planté dans le dos ou le cœur : c’est littéralement un corps remplis de trous, avec des yeux qui manquent et une bouche grande ouverte, comme si l’âme qui s’y trouvait auparavant cherche encore à hurler sa douleur que personne d’autre ne pourrait comprendre. Même si Tessa est du genre à ne pas se laisser affecter par ce qu’elle voit, ce qu’elle voit devant elle n’est pas l’œuvre d’un mannequin ou d’effets spéciaux. C’est une vue horrible qui s’empire non seulement avec l’odeur nauséabonde des cadavres, mais aussi à cause des autres corps qui se trouvent dans la pièce. Elle tourne le regard pour observer les autres, remarquant que chaque cadavre est ‘différent’ : les trous ne sont pas aux mêmes endroits. Certains ont toujours leurs yeux, mais n’ont plus la moitié de leur crâne — Tessa ne veut même pas vérifier si leur cerveau est toujours là où il devrait être. Ce qui est encore pire qu’on ne puisse le penser, c’est le fait que certains des morts sont clairement des enfants, chose bien trop horrible pour que Tessa ne veuille y penser plus longtemps. Elle n’a actuellement aucune idée de ce qu’il s’est passé ici, si c’est l’œuvre d’un criminel à l’esprit inhumain ou si c’est quelque chose d’autre d’encore plus horrible sur lequel ils sont tombés, mais une chose est certaine : quoi qu’il advienne, quoi que soit la raison pour tout cela… Tessa ne pense pas qu’ils auraient dû tomber là-dessus. Que ce soit aujourd’hui ou demain —
Ou jamais.
CHAPITRE 55
⎾Les Cadavres Dans Les Sombres Coins Du Bâtiment⏌
– … C’est horrible.
Tessa se retourne enfin, n’en pouvant plus de visionner un spectacle aussi gore et inhumain, et retourne aux côtés de ses deux amis et sa nouvelle ‘connaissance’. Raiji s’est calmé depuis et Maruno n’a plus besoin de le tenir. Excepté Deshya, ils ont tous leur main qui tient leurs narines, l’odeur absolument intenable. La raison pour laquelle la fille au pull de renard ne le fait pas n’est pas un signe de force : elle est juste tellement choquée de ce qu’ils ont trouvé ici qu’elle ne pense même plus à l’odeur de morts, de pourritures et probablement de la douleur que les victimes ont dû ressentir qui se manifeste en forme physique.
– A-Alors… ?” demande Maruno en regardant Tessa, sa voix tremblante.
– … Ils sont tous troués à des endroits différents. Tous morts depuis quelques mois, même si je ne peux pas dire le temps exact. En tout cas, il est clair que quand on était en grandes vacances, les corps étaient déjà ici. J’en suis certaine.
– C’est donc ça qu’ils ont vu… ?” demande Raiji, pensant à nouveau à Clément et Maurine.
Si c’est le cas, alors aucun d’entre eux n’oserait les critiquer pour leurs fuites et même le retrait de la vidéo des réseaux sociaux — ou la moindre publication de cette même vidéo par quiconque d’autre. Simplement y penser doit leur donner la nausée. Néanmoins, si c’est réellement cela ce qu’ils ont vu — ce qui est plus que probable —, alors…
– Ils auraient dû prévenir la police ou un truc dans l’genre…” pense Tessa tout haut.
Deshya est bien d’accord avec elle, mais ils ont dû être si effrayés qu’une telle pensée n’est pas entrée dans leur esprit. Toutefois, ils auraient dû le faire un peu plus tard, lorsqu’ils ont pû se calmer… Si les cadavres se trouvent toujours ici, ils peuvent facilement deviner que le couple n’a, en effet, pas réellement contacté les autorités pour s’en occuper…
– Mais avec un tel média sur le net, est-ce que la police ne chercherait pas à en savoir plus ?” demande Raiji.
Maruno secoue la tête, mais avant de lui répondre, il demande s’ils peuvent au moins s’éloigner de cette pièce répugnante. Sans surprise, c’est un accord général qui s’impose et tous quatre s’écartent en chœur, d’une marche rapide qui s’approche de la course.
– Même si c’est sujet d’intrigue sur internet, une telle vidéo peut être facilement truquée. Certes, c’est un live, mais si la police commence à s’inquiéter sur de telles choses, je pense qu’ils auraient non seulement trop de travail, en plus, ils auraient des pistes qui mènent à rien et pourraient juste soupirer en se disant que les gens sur internet aiment trop mentir pour de l’attention, des likes et tout ça,” répond Maruno, retirant la main de ses narines.
Deshya approuve : son père ne prendrait jamais au sérieux un direct de deux ‘amateurs’ de TikTok, même avec un soi-disant ‘cadavre’ visible — si le flou dont parlait Raiji pouvait correspondre à un tel mot — dessus. Si le couple avait rapporté ce qu’ils avaient vu en donnant l’adresse ou la localisation du lieu où ils sont allés, alors cela est une autre histoire : toutefois, il est clair qu’ils ne l’ont pas fait, donc excepté les personnes qui sont naïves ou qui veulent vérifier que le direct ne soit pas une ‘arnaque’, personne ne chercherait à savoir la vérité au-delà des quelques discussions trouvables sur le net. Maintenant qu’ils savent la vérité…
– On devrait contacter la police sans plus attendre…” lâche Deshya.
Encore une fois, sans surprise, c’est un accord entre tous les adolescents. Deshya plisse doucement les yeux, avançant toujours aux côtés de ses trois amis : pourquoi autant de cadavres au même endroit ? Vu que le bâtiment est non seulement abandonné, mais aussi compliqué à trouver et bien trop ‘effrayant’ et peu rassurant pour que quiconque veuille rentrer dedans, il est compréhensible que quelqu’un qui a tué une personne viendrait cacher le cadavre ici, s’il pense que l’enterrer n’est pas une bonne solution… Toutefois, il y en a une bonne dizaine, ce qui est inquiétant. De plus, elle se demande pourquoi les cadavres ne se trouvent uniquement que dans cette pièce-là, mais elle se rappelle que de base, une porte complexe à ouvrir bloquait le passage, mais qu’elle est tombée lorsque Clément et Maurine sont venus ici durant leur direct sur TikTok — en tout cas, c’est ce que Raiji leur a dit. Vu qu’aucun cadavre n’a été trouvé dans aucune autre pièce — pas dans cet étage, du moins —, il est donc possible que—
– !!
Deshya ouvre grand les yeux, arrête son pas et se retourne d’un coup vif, la respiration coupée. Raiji est le premier à le remarquer et s’arrête à son tour, remarquant que son amie vient tout juste de retourner sa lampe de poche vers le fond du couloir, illuminant à peine le mur à leur opposé. Vu qu’il ne peut qu’observer son dos, Raiji n’a pas la possibilité de voir l’expression de frayeur sur le visage de Deshya. Les deux autres membres des Renards Associés s’arrêtent à leur tour.
– Il se passe quoi, Deshya ?” demande Maruno.
– T’as vu un fantôme ?” la taquine Tessa.
– … J’en sais rien.
La réponse de Deshya surprend grandement ses amis. Ils observent tous le fond du couloir, ainsi que le visent de leurs lampes de poche, mais ils ne voient absolument rien. Ils peuvent voir les escaliers qui mènent à l’étage du dessus et celui du dessous, mais que faiblement… Rien d’autre. Le mur n’a rien de particulier, les quelques toiles d’araignées sont toujours en place et c’est toujours une obscurité désagréable qui se présente à eux.
Néanmoins, Deshya en est certaine.
– Tu frissonnes, Deshya… ?” demande Maruno.
C’est une question rhétorique : la fille au pull de renard ne cache pas ses frissons. Cela n’est pas provoqué par le froid de l’endroit, ce bâtiment n’ayant, évidemment, aucune isolation particulière. Il fait si sombre et l’endroit est si peu chaleureux que l’ambiance elle-même refroidit les lieux. La raison pour laquelle Deshya s’est retournée de la sorte est la suivante :
– J’ai cru… qu’on m’observait. Peut-être plutôt qu’on NOUS observait.
Un sentiment plus que désagréable, surtout dans un endroit si… déconcertant. Deshya ressent désormais un déconfort qui provient peut-être d’un ressenti lui-même qui provient de l’ambiance de l’endroit, peut-être d’une simple paranoïa qui ne veut rien signifier. Même s’il est possible de monter à l’étage depuis les escaliers du fond du couloir et ainsi donc il n’est pas impossible que quelqu’un les ait réellement observé, elle préfère simplement se dire qu’elle a rêvé pour son propre état mental.
– Si je veux appeler, il faut qu’on fasse ça à l’étage,” avoue Raiji en observant son téléphone. Ici, on dirait que des ondes m’empêchent de même appeler quiconque.
– C’est étrange… C’est un lieu abandonné, mais il y aurait un tel mécanisme dans les alentours ?” se demande Maruno. On est pas non plus six pieds sous terre, ça m’étonnerait que le fait qu’on soit sous la surface t’empêche d’appeler…
– …
Deshya ne dit rien, toujours en train de frissonner, lâchant l’un ou l’autre vif regard derrière elle. La fille n’a plus l’impression qu’on les observe, certes, mais elle ne peut pas rester tranquille. Remarquant le malaise de Deshya, Tessa ralentit son pas pour se trouver à côté d’elle.
– !
Deshya sursaute, vu qu’elle n’a pas vu Tessa se placer à ses côtés, mais elle a surtout été surprise par le geste de celle qu’elle aime ‘secrètement’.
Tessa vient de lui prendre la main.
– Il n’y a personne, ne t’inquiètes pas. De toute façon, on l’défoncera, sinon,” tente de la rassurer Tessa.
La fille aux cheveux mauves garde fermement la main de Deshya dans la sienne, lui proposant de bouger à l’étage sans tarder. Deshya n’avance pas, mais ce n’est plus à cause de la peur : elle est juste gelée par ses émotions — pourtant, celles-ci sont clairement en train de lui brûler le corps. Tenir la main de Tessa dans la sienne comme cela lui donne des papillons dans le ventre : cela n’est donc pas une simple expression ‘mielleuse’, mais un vrai ressenti. Elle rougit et s’en fiche désormais de tout ce qu’il se passe autour d’elles : Deshya oublie presque les cadavres qu’elle a vu quelques minutes auparavant. Tessa lui répète qu’il est préférable qu’ils rejoignent rapidement l’étage, alors Deshya approuve avec un acquiescement maladroit, profitant de sentir la main chaude de Tessa dans la sienne. C’est quand elle peut être aussi proche de celle qu’elle aime que Deshya regrette de ne pas avoir le courage de lui avouer son amour… parce que si Tessa venait à accepter, alors elle pourrait aller plus loin que simplement toucher sa main. Certes, elle l’a déjà embrassé sur les lèvres — et c’était probablement une des meilleures choses qu’elle a jamais vécu —, mais au final, ce n’était pas un baiser d’amour, mais un simple gage. Pour Deshya, c’était plus que cela, mais vu que ce n’était pas ‘passionné’ des deux côtés, la fille a surtout envie… de plus. D’embrasser Tessa non seulement plus longtemps, mais avec amour — des deux côtés. Cela paraît être une grosse demande comme le monde, mais si Deshya réussi à sortir avec Tessa, alors cela sera aussi commun que de demander de l’eau ou du sel à table. Cela restera aussi spécial que rencontrer et admirer une abeille dorée ou de voir une éclipse totale pénombrale, mais pourtant, une chose qui peut arriver presque quand on le souhaite. Deshya n’a jamais pû vivre cela, vu qu’elle n’a jamais eu de petit-copain ou de petite-copine, mais elle espère qu’elle pourra vivre cela avec Tessa… La main de cette dernière est si confortable…
– AAAAH !!
Mais malheureusement, la réalité les rattrape. Les quatre adolescents ouvrent grand leurs yeux en même temps, mais rapidement, comprenant que ce hurlement n’est pas de peur, mais de douleur, ils froncent les sourcils. Tessa retire sa main et court aux côtés de Deshya, cette dernière sortant de ses ‘pensées d’amour’. Maruno est le premier à courir dans les escaliers : le cri vient de l’étage juste au-dessus, c’est une certitude. Ils ne savent pas qui a hurlé, mais une chose est certaine : ce n’est pas ‘Léa Lotus’, vu que le cri était bien trop grave pour que cela provienne de sa voix féminine. Raiji est juste derrière Maruno, suivi par les deux filles du groupe. Ils arrivent tous quatre à l’étage, mais malheureusement, ils ne savent pas réellement où aller : ils ne savent pas d’où provient la source du cri avec précision. Tessa va proposer de se séparer pour trouver l’endroit où l’homme a hurlé, mais cela n’est pas nécessaire : ils voient Léa courir dans le couloir à leur gauche. Sans poser aucune question, sans le moindre mot, les adolescents courent après elle et la rejoint, mais elle s’arrête devant une pièce, là où deux autres hommes sont, avant qu’elle ne crie de terreur. Les adolescents arrivent rapidement et regardent à l’intérieur de la pièce—
– !!
– H-Hey, tu t’fous de moi ?!
Devant eux, un nouveau cadavre. Toutefois, celui-ci n’est pas troué ou mort il y a quelques mois…
C’est le corps de ‘Rayan Silvagre’ qui se présente à eux, cette fois-ci.
Un couteau dans le ventre, une main qui tient l’arme comme s’il avait cherché à la retirer et un air horrifié sur le visage, signe qu’il était bel et bien conscient avant de mourir, la scène est affreuse. Son sang encore chaud coule de la blessure, créant une minuscule flaque sous lui. Même sans entendre le hurlement et même sans être plus intelligent que la moyenne, quiconque pourrait dire que le crime a été commis il y a peu… Cela est tout sauf difficile à deviner. Le cri qu’ils ont donc tous entendu… provenait de cet homme.
– On a entendu le cri il y a… genre, 50 secondes ?” pense Deshya, un poing serré.
Encore une fois, un meurtre se présente à elle. Le mois d’Octobre avait commencé avait deux crimes commis par ‘XIII’, mais elle se doutait déjà que les sauver aurait été complexe, voire impossible. Cette fois-ci, néanmoins, elle est ici uniquement par ‘fun’, pour passer du temps avec trois de ses amis, aussi ‘spéciale’ est cette activité. Cela aurait dû simplement être une recherche de vérité, mais la scène était pire que prévu…
Et maintenant, un crime vient d’être commis. Juste au-dessus de leurs têtes.
Les yeux grand ouverts de Rayan ne montrent plus aucune vie et même si, par miracle, il est encore en vie, le temps qu’une ambulance puisse arriver dans cette forêt, il aura succombé de ses blessures. Les trois adultes aux côtés des adolescents sont aussi choqués, des expressions terrifiées sur leur visage, mais Balthazar est le premier à réagir.
– H-Hey, mec… ?
Il avance d’un pas, mais une main s’interpose entre lui et la possibilité d’aller plus loin. La fille qui a levé le bras comme cela grince des dents.
– N’avancez pas plus…
– H-Hein ?
– N’avancez pas plus !” crie Deshya.
Tout le monde se tourne vers elle. La fille au pull de renard a une expression énervée sur le visage, fixant le cadavre qui se trouve à quelques pas d’elle, dans le fond de cette pièce. Contrairement à l’étage juste en-dessous, là où ils étaient, le rez-de-chaussée du laboratoire abandonné est bien plus illuminé et les lampes ne sont donc pas nécessaires. Cela est dû aux nombreuses fenêtres de l’endroit, la majorité d’entre elles manquent de leur vitre. Grâce à cela, ils peuvent bien voir l’intérieur de la pièce où l’homme au prénom de ‘Rayan’ a été tué : plutôt vide, avec toutefois les restes de quelques meubles, dont un bureau, et des outils posés par terre. De plus, même si pour l’instant, seuls les adolescents ont pu le voir, deux cadavres comme ceux trouvés en bas se trouvent dans le coin gauche de l’endroit, cachés peu efficacement derrière des sortes de sacs poubelles. Malgré le fait que ce déguisement soit à la limite du ridicule, c’est en réalité un soulagement : ils ne peuvent voir que la tête des cadavres et la partie haute du torse, leur empêchant de voir bien plus que cela. Malheureusement, le corps de la femme — étant donné que l’autre doit être celui d’un jeune homme — manque une bonne partie de son crâne, ce qui est… vomitif. Deshya est certaine que si Amora, Frie ou même Abdoul seraient venu ici, ils n’auraient jamais pû se retenir de tout vomir sur le sol, chose toutefois compréhensible. Deshya est donc heureuse qu’elle n’a pas invité quiconque de plus à cette expédition de ce bâtiment abandonné… Ce qui la rend aussi énervée n’est pas uniquement le fait qu’un meurtre vient d’être commis, mais surtout que c’est ENCORE un…
ENCORE un là où elle se trouve.
– Où que j’aille, je vais tomber sur des affaires ou quoi… ?
Elle sait que cela n’est pas vrai et qu’il y a des jours sans que rien ne se passe, mais c’est généralement lorsqu’elle reste à l’école ou chez elle. Deshya est allée chez Amora, à une terrasse d’un bar avec ses amis ou même à un fast-food sans que rien ne se passe, donc elle peut espérer ne pas tomber sur des affaires à chaque lieu qu’elle rencontre, mais le fait qu’un meurtre vient d’être commis… Elle ne sait pas quoi en penser. Doit-elle penser à nouveau qu’elle est maudite ou accepter qu’elle est juste une fille extrêmement malchanceuse ?
– Si je joue au loto, est-ce que je vais gagner le jackpot… ?
Après tout, la malchance est de la chance, juste qui offre plus de malus que bénéfice. Cependant, là n’est pas lieu de blaguer : Deshya s’avance vers le corps en tournant les talons, fixant les adultes de ses yeux perçants.
– Personne sur la scène de crime.
D’un ton autoritaire, elle lâche ces mots. Tessa s’avance à son tour, Raiji se retournant en s’assurant que les adultes ne font rien de suspect. Ils sont tous trois confus, se regardant les uns les autres, avec Léa qui se sèche les yeux en essayant de se calmer dans les bras de son homme. Pendant ce temps, Maruno fronce les sourcils après avoir lâché un nouveau coup d’œil vers les cadavres sur la gauche.
– Et si…
En pensant à tout ce qu’il a vu, il se demande si la réalité de ces cadavres ne serait pas…
– Mais si c’est le cas, alors…
C’est dangereux. Très dangereux. Maruno espère qu’il a tort, mais il est fort probable que ce soit cela. Il se tourne vers les trois adultes et fronce les sourcils.
– Dans tous les cas, il y a peu de chances que Rayan se soit suicidé ou que quelqu’un est venu le tuer depuis l’extérieur. Bref…
L’une des trois personnes restantes doit être le coupable. Il y a aussi la possibilité que deux d’entre eux soient les meurtriers… même les trois ensemble. Néanmoins, Maruno préfère penser que cela n’est pas le cas, parce que sinon, ils sont tous dans une situation où survivre est peu probable. Même avec les capacités de Deshya, l’agressivité de Tessa et le côté ‘sportif’ de Raiji, ils peuvent rêver faire quoi que ce soit contre plusieurs adultes, même si c’est deux. Est-ce qu’appeler la police devant un ou plusieurs coupables potentiels est une bonne idée ? Deshya peut probablement fuir d’ici et, sans souci, perdre la trace des adultes, mais Maruno ne croit pas totalement en ses propres capacités. Il ne sait pas pour Raiji et Tessa n’est pas forcément la fille la plus rapide qu’il connaisse, donc si l’un d’eux a un pistolet…
– L’arme du crime est un couteau et il est toujours à l’intérieur du ventre de la victime, mais rien ne dit que le coupable n’a pas autre chose sur lui. Utiliser un pistolet aurait été bien trop risqué et bruyant, surtout que cela aurait été simple à retrouver. Par contre…
Pourquoi est-ce que Rayan a-t-il été tué ? Deshya, Tessa et Raiji se posent aussi la question, surtout que tous les quatre ne se connaissent pas — excepté Léa et Marc, tous les deux mariés. Il n’y aurait donc eu aucune raison que l’un d’eux ne tue l’autre… sauf si le fait qu’ils ne se connaissent pas soit un mensonge. Bref, Rayan a menti sur cela, mais au moins une autre personne aussi. Raiji pense à nouveau à sa théorie pour les cadavres et commence à penser à encore autre chose, mais peut-il se permettre d’aller dans de telles théories ? Pour l’instant, il préfère voir ce que Deshya et Tessa vont conclure, toutes les deux tout près du corps. Deshya a vêtu ses mains des gants offerts par Mariah, tandis que Tessa garde les siennes dans ses poches pour ne toucher à rien, observant les alentours debout, contrairement à son amie qui est agenouillée. Elles ont déjà confirmé la mort de ‘Rayan Silvagre’, forcément mort d’un couteau dans le ventre. Il n’a pas pu mourir sur le champ, donc lorsqu’il a été planté, il a hurlé, et ensuite le coupable a dû soit l’assommer pour le faire taire, soit garder sa main sur sa bouche pour étouffer son cri. Toutefois, Deshya n’étant pas médecin et n’ayant pas la possibilité de bien observer tout le corps, elle ne peut pas confirmer quoi que ce soit de plus. Pendant qu’elle regarde le cadavre, Tessa scrute les environs et rapidement remarque quelque chose juste devant la main de la victime qui se repose sur le sol.
– Hey, Deshya.
– Hm ?
La rousse tourne le visage vers Tessa et ensuite suit son regard pour tomber sur… quelque chose. Elle cligne des yeux et tend la main vers cette chose, mais se retient de l’attraper, ne voulant pas toucher à la scène de crime : elle doit la polluer le moins possible pour le moment où la police arrivera.
– Un cavalier noir… ?
Une pièce d’échec se trouve là, devant la main de la victime. Il est fort probable que ce soit lui-même qui l’a placé là… mais pour quelle raison ? En réalité, Deshya n’en voit que deux : soit il l’avait en main de base et l’a tout simplement laissé tombé en mourant, soit—
– … Un ‘Dying Message’.
Deshya le murmure et Tessa acquiesce : un message avant la mort, décrivant ainsi la victime. La fille aux longs cheveux mauves se retourne vers les adultes, ceux-ci semblant s’agiter à cause de l’ambiance peu agréable de l’endroit. Tessa a même l’impression qu’ils vont s’enfuir à tout moment et malheureusement, ils ne pourront rien faire contre cela. Balthazar n’a pas l’air d’être incroyablement musclé, donc Tessa pourrait sûrement le battre en combat, mais il reste un adulte et elle vient à peine d’entrer dans l’âge ‘mature’. Léa doit être une femme assez fragile et Marc… elle ne sait pas vraiment. Toutefois, ce n’est pas cela qui compte : s’ils se mettent à courir en voulant fuir, leur courir après ne servira à rien. De plus, ils savent déjà leur identité, donc ils n’auront qu’à en parler à la police. Même si cette dernière ne leur fait pas confiance et les prennent pour de simples adolescents qui jouent les détectives, Deshya n’aura qu’à en parler à Gatito — voire Minos si la situation le demande vraiment. Néanmoins, pour l’instant, elle doit se concentrer sur ce chevalier noir : que signifie-t-il ? Elle sait très bien que c’est un joueur d’échecs qui pourrait facilement la battre, vu son rang, mais ce n’est pas la pièce qu’il avait sur son porte-clef… De plus, son sac est toujours dans son dos et n’est pas ouvert, donc il est impossible que la pièce soit tombée par hasard à cet endroit. Peut-être gardait-il la pièce dans les mains pour jouer avec, lui servant d’anti-stress, et qui signifierait qu’il n’y a aucune raison de s’en préoccuper, mais Tessa n’y croit pas : c’est à nouveau son instinct qui lui dit que c’est important. Comme toujours, ce même instinct qu’elle suit toujours et qui ne se trompe presque jamais, l’un qui l’a aidé à croire plus en ses propres capacités… La dernière fois qu’il s’est ‘réveillé’ de la sorte était justement durant l’affaire du train inarrêtable. Deshya semble, elle aussi, s’intéresser à cette pièce d’échec, surtout qu’il n’y a pas d’autre indice dans les alentours. Toutefois, quelque chose d’autre attire son attention. Elle approche son regard vers la victime…
– !
Elle ouvre grand les yeux et Deshya remarque ‘cette chose’ en même temps qu’elle. Maruno voit bien que ses deux amies ont trouvé quelque chose d’intéressant, mais d’ici, il ne peut pas savoir. L’impatience montant dans son cerveau, Balthazar lâche un cri d’ennui avant de sortir son téléphone, ne cachant pas son irritation.
– Raaah, au pire, on s’en fout ! On appelle la police et—
– SÛREMENT PAS !!
Le hurlement résonne dans la pièce et force Deshya à se tenir les oreilles en se crispant, geste qui n’est remarqué par personne : tout le monde se tourne vers l’autre fille qui vient de hurler. Tessa s’approche de Raiji, Maruno et des adultes de pas violents.
– N’appelez pas la police.
– A-Attends, tu te fous de m—
Avant qu’il ne puisse terminer sa phrase, Tessa lève la chose qu’elle a récupéré du corps pour le montrer à tous, n’ayant nullement besoin de le faire voir à Deshya : cette dernière l’a déjà vu.
– Q-Qu’est…
Raiji fronce les sourcils. C’est un morceau de papier avec écrit dessus :
« Appelez la police et je vous tue tous »
Cela est écrit à la main et rapidement, mais c’est assez lisible pour comprendre chaque lettre. Un frisson traverse tout le monde et Tessa baisse la lettre, les yeux fixant tout le monde à la fois.
– Si la personne a osé tuer la victime alors qu’on était tous ici, j’préfère prendre cette lettre au sérieux,” avoue-t-elle.
– Tsk, et alors ?
Balthazar reprend son téléphone en main et l’allume.
– Si on reste tous ensemble, il pourra rien faire, c’criminel,” dit-il, se préparant à inscrire le numéro de la police.
Néanmoins, avant qu’il ne puisse le faire, Raiji attrape son téléphone d’une main rapide, l’empêchant ainsi d’appeler quiconque à l’aide de son GSM. Balthazar serre les poings et crie après lui, mais le couple lui demande de se calmer en le retenant, avant Raiji qui plisse les yeux vers l’homme.
– Je ne sais pas à quoi tu penses, mais à tout moment, le criminel a un pistolet ou quelque chose dans les mains !” crie l’adolescent. Si tu veux mourir comme un idiot, alors je t’en prie, mais ne nous implique pas dans ta bêtise !!
Les trois autres adolescents clignent des yeux, surpris des mots de Raiji, mais totalement d’accord avec lui. Le garçon rend le téléphone à Balthazar en soupirant, se tournant vers Tessa.
– Vous n’avez trouvé aucun indice sur le corps… ?” demande-t-il.
Deshya revient à leur côté et secoue la tête. Tessa ne répond rien : il est préférable qu’elles ne parlent pas du cavalier noir qui pourrait être un message ‘secret’, codé de la victime avant sa mort. Vu qu’elles sont toutes deux certaines que le coupable est l’un des trois adultes devant elles, il est préférable de ne pas en parler devant les adultes. Elles le peuvent avec les adolescents, mais sûrement pas avec Marc, Léa et Balthazar.
– On fait quoi, alors ?” demande Marc, tenant fermement la main de sa femme dans la sienne.
– Est-ce qu’on s’enfuit et laisse le corps ici ?” propose Léa.
– Même en essayant d’agir de façon égoïste et par peur, je ne sais pas si le coupable nous laissera fuir comme on veut. Il prendra sûrement en otage l’un de nous en demandant à tout le monde de revenir, vu qu’on peut appeler facilement la police de chez nous,” répond Maruno. Je pense que le mieux qu’on puisse faire… J’en ai aucune idée, en réalité.
– Rester tous ensemble groupés, je suppose… ?
La proposition de Marc semble parfaite, mais Deshya secoue la tête.
– Il y a écrit quelque chose d’autre au dos du papier,” dit-elle.
– A-Ah ?
Tessa approuve ce que vient de dire Deshya et lit justement la phrase qu’elle peut y lire :
– « Ne dites rien à personne, ne parlez de cet endroit à absolument personne et mettez tous vos téléphones dans le sac de la victime ». C’est ce qu’il est écrit.
Les mots sont un peu plus compliqués à lire, vu que le coupable a dû écrire en vitesse, mais il est certain qu’il l’a fait avant de tuer la victime : il n’aurait jamais eu le temps, sinon. Cela prouve qu’il a dû penser au plan aujourd’hui, ce qui signifie…
– …
Tessa observe silencieusement à nouveau les trois adultes qui sont juste derrière Maruno et Raiji. Ce dernier soupire.
– Il veut qu’on mette nos téléphones dans le sac pour qu’on ne puisse pas appeler quiconque, je suppose… ?” dit-il.
– Sûrement pour aussi effacer nos données, vu qu’on a pris des photos,” lâche Tessa. Moi en tout cas, j’ai quelques vidéos dans mon tél’.
En réalité, uniquement Tessa a pris quelques vidéos et photos au cas où la scène aurait changé lorsque la police serait arrivée. Les chances que cela n’arrivent ne sont que trop faibles, mais Tessa est du genre à prendre ses précautions. De plus, même sans cela, il est toujours préférable d’avoir des preuves de la sorte, même si en réalité, il est simple de retoucher des photos et créer des scènes horrifiques comme celles qu’ils ont vu là-bas. Bien évidemment, cela ne reste pas accessible à tous.
– On fait quoi… ?” demande Léa, regardant son mari.
– Est-ce qu’on doit vraiment avoir peur de ce papier et s’dire que si on l’écoute pas, on va être dans la merde ?” les questionne Balthazar, regardant son téléphone.
– Tu préfères ne pas y faire confiance et juste qu’on se fasse tuer ou un truc dans le genre… ?” soupire Tessa, n’arrivant pas à croire ce qu’elle entend de la bouche de cet homme.
Ils se tournent alors tous vers le sac de la victime, celui qui n’est pas ouvert et qui est toujours dans son dos. Maruno se gratte les cheveux.
– Il faut vraiment mettre nos portables dedans… ?” se questionne-t-il. Est-ce qu’on les mettrait pas plutôt par terre ?
– Mais si on ne respecte pas ce qu’il a dit…
– Oui, mais si on touche au sac et à tout ça… On va polluer la scène de crime. En plus, ça va être compliqué de les mettre dedans.
Ils se posent la question, mais ils finissent par se mettre d’accord : Maruno commence par mettre son téléphone devant la victime, soupirant.
– Mon pauvre téléphone…
Ils les mettent un par un : personne ne veut risquer sa vie dans cet endroit. Ils sont venus ici pour trouver un ‘soi-disant’ corps qu’auraient observé deux personnes de TikTok, mais ils sont désormais dans une situation complexe avec un d’eux qui s’est fait tué par… quelqu’un. Il est certain que c’est l’un des trois adultes, mais qui ? Alors que Marc met son téléphone, ils remarquent que Raiji n’a pas bougé de son endroit.
– Tu fais quoi, toi ?” demande Marc.
– Comment ça ?
– Va mettre ton téléphone et on se casse…” soupire Balthazar.
– J’ai pas mon tél’ sur moi.
L’aveu — si on peut l’appeler comme cela — de Raiji choque tout le monde, même les trois adolescents. Léa le fixe quelques instants sans bouger avant de secouer la tête.
– He-Hey, tu blagues ou quoi ? Fais pas le peureux !” dit-il.
– Comme elle dit, fait pas l’froussard !
Les trois adultes sont tous d’accord avec les uns et les autres. Raiji se gratte la joue et se tourne vers Maruno.
– M-Mec, je crois qu’ils veulent pas me croire…” lâche Maruno.
– …
L’autre garçon aux cheveux noirs et aux yeux verts, celui qui sort avec ‘Aya Deroom’, ne répond rien. Les adultes se tournent vers Maruno à son tour et ce dernier s’incline doucement.
– Veuillez le croire, il n’a réellement pas son téléphone,” finit-il par dire.
– Heiiin ?” lâche Marc. Genre, vraiment ?
Tessa finit par acquiescer.
– Il est pas du genre à prendre son téléphone car ses parents en ont rien à faire de lui, il n’a aucune copine et ses amis lui adressent jamais la parole en premier, donc il prend pas son tél’ avec lui,” dit-elle.
Raiji tourne le visage vers elle, une expression aussi douloureuse qu’embêtée traversant son faciès, mais il ne fait que soupirer.
– Ouais, ouais… Dans tous les cas, j’ai pas mon téléphone, désolé. Je peux aller en acheter un pour le mettre dans le tas, mais—
– Qu’importe ! On fait quoi, maintenant… ?
Le tas de téléphone se trouve dans la pièce à l’odeur de pourri, de mort et tout cela mélangé à de la moisissure. Il est aussi fort probable que des voyous soient venus faire leurs petites commissions pas loin d’ici, vu l’odeur de pisse qui se dégage d’un peu plus loin. Raiji discute rapidement avec Tessa…
Pendant que l’un des trois adultes le fixe intensément, les sourcils froncés.
Tessa se retourne d’un coup vers le groupe des plus âgés, mais aucun des trois n’agit étrangement. Elle plisse les yeux, mais Maruno l’appelle, donc elle tourne son attention vers lui.
– On fait quoi, du coup ?” demande-t-il.
– T’as une idée, Deshya ? Car j’sais pas,” répond Tessa.
Elle se tourne vers la fille au pull de renard qui se tapote le menton.
– Hmmm, autant se séparer est une très mauvaise idée en général, je ne pense pas que rester tous ensemble est actuellement ce qu’on souhaite faire,” répond-t-elle. Si on est tous ensemble, cela va embêter le criminel, vu qu’il veut forcément récupérer les téléphones et sûrement s’en débarrasser…
– Est-ce qu’on ne peut pas juste tous partir ?” demande Léa en se frottant les bras. Je commence à haïr de plus en plus cet endroit et rester tout près d’un cadavre… Il fait sombre, désagréablement froid et je déteste l’odeur !
– En plus, si on a plus nos téléphones, aucune raison que l’criminel nous embête, pas vrai ?” demande Balthazar.
Marc approuve avec eux deux, mais Deshya secoue la tête.
– Encore une fois, si on part, l’un de nous va sûrement être pris en otage d’un coup. Même si je suis plutôt rapide et Tessa assez forte, si le coupable a un pistolet, je ne peux qu’imaginer le pire… Tant qu’on ne reçoit pas des instructions, je pense qu’il vaut mieux rester pas trop loin d’ici pour éviter de s’attirer son courroux. Tant qu’on ne fait pas les malins, on devrait n’avoir aucun souci.
Les mots de Deshya sont convaincants et personne n’ose répliquer — plutôt, personne n’a de raison de le faire. Maruno s’approche de deux pas de son amie aux cheveux roux.
– Vu qu’on sait dans tous les cas que l’un des trois adultes est le coupable, on ne devrait pas leur demander vite fait leur alibi ? Je veux dire, ça m’étonne que Rayan soit mort quand on avait dit qu’on ferait deux équipes de quatre…” propose Maruno, lâchant un regard intense vers les adultes.
Deshya approuve, surtout qu’elle se pose aussi la question : pourquoi Rayan était-il séparé du groupe ? De plus, si même eux ne savent pas qui est le coupable, il est sage de se dire que soit les trois adultes sont les criminels, soit l’un d’eux… mais alors, personne n’était avec personne. Après tout, si Marc était resté avec sa copine, alors c’est forcément Balthazar le coupable. Si cet homme est resté avec l’autre homme ou la femme, alors c’est forcément Léa ou Marc le coupable. S’ils peuvent savoir le coupable dès maintenant, ils peuvent attaquer d’un coup, sans prévenir, et avec la rapidité de Deshya ou la force de Tessa, les chances de l’arrêter à temps, avant qu’il ne puisse sortir une arme, qu’elle soit lame ou pistolet, seront plutôt grandes. Néanmoins, Deshya ne pense pas que ce soit aussi simple…
– Attendez, je gardais ça pour moi, mais…
Marc agite la main devant lui, une expression de confusion se présentant aux adolescents.
– Vous faites quoi, en fait ? Vous nous empêchez d’aller sur la scène de crime, mais vous y allez sans hésiter. Vous nous ordonnez ci et ça, mais vous êtes les petits, ici ! Vous vous prenez pour qui, au juste… ?
Une question naturelle, l’une que se pose aussi sa femme et l’autre homme aux cheveux blonds. Les adolescents restent d’abord silencieux, mais rapidement, Maruno pouffe avant de mettre une main sur la tête vêtue d’une capuche de Deshya.
– Je suppose que vous ne savez pas qui est cette petite ici, alors !” lâche-t-il.
– Petite… ?
Raiji met à son tour une main sur la tête de Deshya, un air heureux sur le visage.
– Cette fifille est pas n’importe qui !
– Fi-Fifille… ?
Tessa pousse les deux garçons en soupirant et leur demande un peu plus de sérieux, retirant ainsi leurs mains de la tête de Deshya. Tessa prend le poignet de la fille en le levant et fronce les sourcils en fixant les adultes.
– Cette meuf est la ‘Détective Aux Oreilles de Renard’, capiche ? Celle qui a aidé Minos Kiyon dans une affaire, celle qui fait que dépasser la police, celle qui a conduit une moto dans l’hôtel « FEDER » et celle qui a compris les tricks de ‘XIII’ c’week-end ! La sous-estimez pas.
– A-Ahah, sa-salut…
Deshya agite doucement sa main libre avec un sourire gêné, rougissant à cause de cette même gêne qu’elle ressent actuellement. Raiji boude faiblement vers Tessa en lui disant que c’est elle qui agit comme une idiote cette fois-ci, mais la fille l’ignore complètement. Les adultes fixent tous la fille au pull de renard.
– Ah, c’était elle, sur la moto ? J’en ai entendu parler rapidement, mais j’avoue ne pas avoir trop regardé les informations…” lâche Marc. Je suis plutôt du nord et vu qu’il y a toujours des horribles nouvelles sur internet et à la télé…
– On ne regarde pas vraiment la télévision, nous deux,” dit Léa. Mais j’en ai entendu parler ! Je n’aime vraiment pas ‘XIII’, donc je n’ai pas fait attention à son exploit… Par contre, elle est suffisamment connue pour être appelée par un criminel comme lui ? Tu as genre 14 ou 15 ans, nan ?
– 16.
– A-Ah, pardon…
Léa se gratte la joue en s’excusant, une Deshya qui fait la moue devant elle : quand elle s’est présentée, elle a dit son âge, pourtant !! Néanmoins, elle n’en râle pas et préfère garder sa plainte à l’intérieur d’elle, n’étant pas le moment de pleurnicher pour si peu.
– D’accord, d’accord…” lâche Balthazar. Alibi ou pas, de toute façon, on est tous dans la merde…
– Qu’importe, dites-nous. Ces trois p’tits génies sont du genre à remarquer le moindre détail que personne louperait, donc peut-être qu’ils vont comprendre qui est le coupable simplement si vous en parlez ?
Raiji rapproche les trois membres des Renards Associés à ses côtés et sourit à pleine dent. Balthazar soupire et hausse les épaules.
– On était en train de regarder un peu les différentes pièces quand Rayan nous a dit qu’il voulait filmer un peu de son côté. On a voulu l’retenir, mais il a rien voulu entendre. Un peu plus tard, perso’, je me suis éloigné pour pisser, mais quand je suis revenu là où on était tous, y avait personne,” explique-t-il.
La femme est celle qui prend ensuite la parole.
– C’est parce que pendant qu’on était en train de visiter les pièces, on a trouvé un cadavre très… enfin… a-avec des trous et j’ai pris peur, donc j’ai voulu m’enfuir…
Elle parle avec honte et bégaye, fuyant du regard en parlant. Si ce qu’elle dit est vrai, alors cela signifie qu’il y a réellement plusieurs pièces avec des corps troués… Déjà qu’il y en a deux — si pas plus — dans la pièce où ‘Rayan Silvagre’ a été tué… Deshya se demande si dans les étages encore plus bas du laboratoire, il y aurait encore plus de corps ? Elle ne veut même pas aller le vérifier.
– Et moi je me suis figé sur place en voyant le corps et quand j’ai réussi à faire bouger mes muscles, j’ai cherché ma femme,” explique Marc. Je ne l’ai trouvé qu’un peu après qu’on ait tous entendu le hurlement de Rayan, par contre… J’aurai dû filmer, j’aurai eu une preuve !
Il claque la langue contre ses dents, mais son expression n’est pas réellement l’une de colère, plutôt d’ennui. Que ce soit parce qu’il n’a pas moyen de prouver son innocence ou parce qu’il n’a pas pris en vidéo ce qu’il a vu dans la pièce, ils ne le savent pas — cela n’a pas réellement d’importance dans tous les cas. Ce que les adolescents retiennent, c’est qu’ils ne peuvent rien conclure de leurs ‘alibis’, même s’ils comprennent désormais pourquoi ils n’étaient pas ensemble. Toutefois, cela ne répond pas non plus à leur question intérieure : pourquoi est-ce que Rayan a-t-il été tué ? S’il était venu ici avec quelqu’un qu’il connaît, il n’aurait eu aucune raison de mentir sur leur liaison.
– … Sauf si…
Tessa plisse les yeux, pense à nouveau aux cadavres et à leur état, mais se demande si elle peut se permettre de penser à une telle théorie. Dans tous les cas, ce n’est pas en se demandant POURQUOI Rayan a été tué qu’ils réussiront à s’en sortir sain et sauf, donc Tessa préfère se concentrer sur ce qu’ils vont faire maintenant et non sur cette fameuse ‘raison’.
– Vu que l’un de vous est forcément le coupable… Je propose qu’on reste tous les quatre ensemble,” dit Maruno en faisant comprendre qu’il parle de ses amis.
– Vous restez tous les quatre ensemble, mais, et non ?” demande Balthazar.
– Restez ensemble si vous préférez, mais c’est plus risqué. Sinon, séparez-vous et on attend qu’on puisse tous rentrer chez nous sans risquer de mourir… Sinon, même si c’est risqué de dire ça ici et maintenant, on a qu’à fuir d’ici et tant pis pour nos téléphones : nos vies comptent plus,” répond Raiji.
– Après, je ne sais pas si le criminel va nous laisser faire… Je pense qu’on va regarder un peu l’intérieur du laboratoire en attendant de savoir ce qu’on compte faire,” dit Deshya.
Marc se gratte les cheveux.
– Donc on se sépare en deux groupes, on attend que le coupable qui est de nous trois prenne nos téléphones et nous autorise à partir d’une façon ou d’une autre, et c’est… tout ?” demande-t-il.
– Je ne sais pas ce que vous voulez faire d’autre,” avoue la rousse en haussant les épaules. Si on fuit d’un coup et de tous nos côtés, je suis certain que le criminel prendra l’un de nous en otages, probablement un de nous quatre, les ados, et on aura pas le choix que de revenir en l’ayant énervé ou abandonner notre ami qui va se faire probablement tuer. Je ne sais pas vous, mais je ne cherche pas à ce que quiconque se fasse prendre la vie. Même sans connaître Rayan, le fait qu’il soit mort est déjà de trop.
Tout le monde est d’accord sur cela et rapidement, ils approuvent tous ce ‘plan’ : Deshya, Tessa, Maruno et Raiji vont de leur côté, restant ensemble, et Marc, Léa et Balthazar font de même de leur côté. Ils restent tous au rez-de-chaussée, même si Tessa avoue qu’elle aimerait voir ce qu’il y a à l’étage, et tous se promettent de ne pas fuir — pas tant que la situation est aussi incertaine. Tout en marchant de directions opposées, Maruno tourne le visage vers les deux filles.
– On est certain que c’est la meilleure des solutions ?” demande-t-il. Je me demande si on est vraiment en train de faire ce qu’il y a de mieux…
– Honnêtement, vu que le criminel vient des trois adultes, je préfère ne pas vraiment rester avec eux. On ne saurait pas simplement les arrêter tous les trois à nous seuls et si on essayait, on a de grosses chances de juste faire tuer ou assommer avant qu’on ne réussisse. J’sais que c’est un peu égoïste, mais j’préfère que si l’un de nous meurt, ce soit un des trois autres, pas l’un de vous.
Elle range ses mains dans les poches de son pull en mâche l’air pendant une courte seconde avant de continuer.
– D’toute façon, on n’peut pas faire grand-chose de plus qu’attendre et espérer…
Personne n’ose dire quoi que ce soit. La vue des corps troués et du cadavre de ‘Rayan Silvagre’ sont ancrés dans leur esprit… Comment pourraient-ils l’oublier, surtout aussi rapidement ? En réalité, Deshya n’a pas oublié un seul cadavre qu’elle a vu, et cela n’applique pas uniquement le mois de Septembre de cette année, mais depuis bien plus longtemps. Même si certaines enquêtes policières qu’elle a pu suivre d’un peu plus près avec son père sont un peu plus floues dans sa tête, elle se souvient bien de chaque cadavre. Certes, cela n’est en réalité pas beaucoup, vu que son père ne veut pas que sa fille voit un tel spectacle, mais cela est arrivé qu’il le veuille ou non… Si on prend en compte la très bonne mémoire de Deshya, il est normal qu’elle s’en souvienne si bien, surtout que c’est choquant et même terrifiant. Cela lui est presque amusant de se dire que la partie la plus ‘importante’ de sa vie lui est totalement retirée de sa mémoire… ou en tout cas, son cerveau ne semble pas pouvoir s’en souvenir. C’est ironique… mais si étrange qu’en fait, Deshya en a peur.
– Je pense que le criminel va vite reprendre les téléphones et il nous fera comprendre qu’on peut partir après,” lâche Maruno.
Deshya et Tessa acquiescent, mais Raiji, qui a été silencieux durant tout ce temps, serre les poings en gardant la tête baissée.
– …
Il finit par s’arrêter, ce qui étonne ses amis, eux aussi mettant un stop à leur marche.
– … C’est trop naïf.
Raiji lâche ces mots en gardant les poings serrés, ne cachant pas les émotions qu’il ressent actuellement.
– De quoi tu parles ?” demande Tessa.
– C’est trop naïf !
Raiji se retourne d’un coup et se met à courir dans le couloir, laissant les trois adolescents derrière lui.
– R-Raiji ?!
Toutefois, il ne s’arrête pas et court. Il prend un rapide tournant vers la gauche et continue, cela avant d’arriver dans une pièce vide où Raiji sort son téléphone en l’allumant, les dents grinçantes.
– …
Sans plus tarder, il compose son code et ensuite va dans ‘Téléphone’ pour pouvoir appeler la police. Il a réussi à garder son téléphone, donc il doit rapidement en profiter, vu que le ‘coupable’ doit toujours être avec les deux autres adultes.
Toutefois, une silhouette s’approche de Raiji silencieusement, par derrière, et d’un coup, lève le couteau qu’elle a en main, visant le dos de l’adolescent.