La ville de Sombra respire d’une tranquillité reposante. D’un calme magique. Peu d’habitants arpentent les rues et Adara, l’étoile qui brille au-dessus du monde de Taurus, montre ses beaux rayons et envoie son agréable chaleur. C’est une belle journée qui se présente aux habitants, pourtant eux tous se trouvent bloqués sous un dôme invisible, d’une technologie que personne ne comprend — en tout cas, peu d’eux. La majorité veulent en sortir, savoir comment le monde se porte à l’extérieur, pouvoir libérer leurs ailes pour l’instant bloquées, incapables de s’ouvrir et montrer leurs belles plumes. Malheureusement, même après de longues recherches, personne ne sait où se trouve la source. Certains continuent de chercher encore et encore, mais aucun signe d’avancement.
En tout cas, si le cas de Natasha n’est pas pris en compte.
Dans cette belle ville, une certaine femme marche dans une des nombreuses rues de Sombra, un panier qu’elle tient par le bras droit. Elle a le sourire sur le visage et même si elle paraît très jeune, dans sa vingtaine, elle est bien plus vieille que cela. Ses longs cheveux dorés sont coiffés dans une belle queue de cheval qui se balance gentiment derrière elle, ses yeux bleus et scintillants fixant devant elle avec joie. Depuis le panier que la femme porte, il est possible de sentir une belle odeur, l’une qui est nostalgique, presque magique. Tout en avançant dans la rue, elle croise l’un ou l’autre passant qui la salue. Comme à son normal, la femme leur rend leur salutation avec un sublime sourire, rendant leur journée un peu meilleure uniquement grâce à cela.
Femme: “Hm, hm, hm !”
Elle fredonne joyeusement une mélodie qui lui revient en tête tout en balançant doucement son bassin de gauche à droite, heureuse de cette journée. La température doit être dans les alentours de 25 degrés, donc elle peut profiter de ce bel Adara ! Il n’est pas rare qu’au mois de mai, certaines journées soient réellement chaudes. Bien évidemment, c’est en juillet ou en août que la température atteint son maximum pour l’année. Anura ne peut pas se plaindre d’une telle chaleur et donc sautille en direction de la maison qu’elle doit rejoindre. Sur le chemin, elle croise un bel homme aux cheveux verts et rouges qui lui coulent le long du corps.
Femme: “Bonjour, Jonack !”
Jonack: “Ah, Anura !”
L’homme efféminé reconnaît directement la voix de la femme et la salue en agitant la main au-dessus de sa tête, souriant. Anura aime énormément cet homme : gentil, mignon et avec qui parler est un vrai délice. Sa voix douce et sa façon de penser sont réellement des friandises, alors Anura n’hésite jamais à lui parler. Toutefois, vu qu’elle ne veut pas arriver en retard, elle continue son chemin sans s’arrêter et donc ne discute pas avec lui. Elle a tout le temps du monde pour lui parler, donc cela ne l’attriste pas trop. Anura regarde son panier en souriant avant d’emprunter la rue sur le côté et arrive, quelques instants plus tard, devant une maison assez similaire aux autres, mais avec une boîte aux lettres bancales sur le devant. Elle ne peut pas s’en moquer : c’est le jeune garçon qui vit à l’intérieur qui l’a faite, après tout. Il a fait de son mieux, sans aucune aide de quiconque, et a donné toute son énergie pour la créer. Anura lui avait proposé son aide, mais le garçon avait refusé.
Anura: “Eheh.”
Se remémorant le jour où il a commencé la construction de cette boîte aux lettres, elle ne peut que pouffer en se rappelant de son expression si enjouée quand il avait terminé. Depuis, la boîte aux lettres s’est penchée vers l’arrière à cause de ses fondations assez maladroites, mais elle tient toujours debout et excepté si une tempête tombe sur Sombra ou que quelqu’un vient frapper dedans, choses peu probables, elle continuera de survivre. En réalité, cette boîte aux lettres est peu utile, vu qu’il n’y a pas vraiment de facteurs ou de journaux à l’intérieur de Sombra, mais cela lui rappelle quelqu’un qui lui est cher, alors Anura ne peut pas juger son existence. Sur ces pensées, elle toque à la porte et attend quelques instants.
????: “Qui est-ce ?”
Une voix plutôt agressive retentit de l’intérieur.
Anura: “Anura Zebra.”
Elle emploie un ton doux, rassurant et presque ressemblant à celui qu’une mère utiliserait pour parler à son fils. Le silence tombe sur eux, mais brièvement après, le bruit de la porte qui est débloquée est audible. C’est l’instant d’après où celle-ci s’ouvre, montrant à Anura la silhouette du garçon qui lui avait répondu.
Jeanarc: “Anura…”
Anura: “Bonjour, Jeanarc. J’avais promis de venir te voir, tu te souviens ?”
Le garçon aux longs cheveux châtains acquiesce doucement. Son visage n’est pas d’une magnifique propreté, mais il n’est pas sale non plus. L’expression qui s’y trouve est entre la joie de voir Anura et la tristesse qu’il ressent tous les jours. C’est peut-être même un mélange des deux.
Anura: “Tout va bien, pour l’instant ?”
Elle parle doucement, d’un ton rassurant. Vu qu’elle-même n’est pas très grande, elle n’a pas besoin de se pencher pour discuter avec le garçon qui vient à peine de passer à l’âge de l’adolescence. De plus, Jeanarc est un peu en hauteur, vu qu’une marche se trouve entre eux deux.
Jeanarc: “Comme… toujours.”
D’une voix gênée, le garçon répond. Anura sourit.
Anura: “Cela me fait plaisir que tu vas mieux.”
Jeanarc: “J’ai dit… comme toujours !”
Le garçon prend un ton plus agressif, mais Anura pouffe.
Anura: “Le “comme toujours” de maintenant n’est pas le même que tu me disais avant. Tu as de plus en plus de mordant, il semblerait.”
Elle ne crie pas. Elle ne parle pas avec agressivité en retour. Anura garde son sourire habituel, l’un qui est sincère. Le garçon serre un poing, mais il baisse la tête.
Jeanarc: “Si je veux… survivre, alors…”
Il ne termine pas sa phrase, fermant sa bouche en desserrant le poing.
Jeanarc: “… Pardon.”
Anura: “Tu n’as pas à être agressif avec moi, mais ne t’inquiètes pas. Avant qu’il refroidisse, regarde ce que je t’ai apporté !”
Anura dépose le panier devant elle, sous le regard curieux du garçon aux vêtements trop grands pour lui. Sur ses pieds ne se trouvent aucune chaussure, mais cela est habituel : excepté des chaussettes, jamais Jeanarc ne porte autre chose.
Jeanarc: “Qu’est-ce que c’est ?”
Tout en posant sa question, le garçon peut sentir une odeur agréable lui caresser les narines. Anura lâche un “Eheh” amusé, doucement taquin, et sort enfin ce qui attendait d’être montré dans le panier.
Anura: “Tu peux en avoir un peu !”
Elle lui offre ainsi une part de gâteau aux pommes. Juteux, préparé avec amour et soin, donnant envie et à l’odeur à attirer le moindre glouton, le gâteau est visible à l’intérieur du panier et fait apparaître des étoiles dans les gros yeux du garçon. Son attention est rapidement attiré à la partie que lui offre Anura, celui-ci sur un morceau blanc de tissu.
Jeanarc: “… Pour… moi ?”
Anura: “Il fait assez chaud et je ne pourrai jamais manger l’entièreté du gâteau à moi seule.”
Jeanarc: “…”
Il hésite à accepter. Serait-ce poli de sa part de le faire ? Doit-il refuser et montrer qu’il est un grand garçon qui gagne son dû avec ses propres efforts ou peut-il accepter la gentillesse d’Anura, mais montrer une certaine faiblesse ? Voyant l’hésitation dans les gestes de Jeanarc, Anura pouffe.
Anura: “Tu n’as pas à avoir honte d’accepter un cadeau. Cela serait plus impoli de refuser.”
Elle tend un peu plus son bras vers le garçon qui déglutit bruyamment. Il suffit seulement de regarder ses yeux pour comprendre à quel point il aimerait dévorer ce morceau de gâteau, mais Anura le connaît bien : il a été éduqué d’une façon trop stricte pour qu’il puisse accepter. Elle soupire en gardant le sourire.
Anura: “Je sais que ta mère t’interdisait de manger quoi que ce soit sans le mériter. Que tu dois travailler pour avoir ton morceau de pain.”
La femme se relève et dépose le morceau de gâteau devant lui, reculant ensuite d’un pas.
Anura: “Mais tu es un bon garçon, alors tu mérites cette friandise. Être fort n’est pas donné à tous.”
Elle s’incline poliment devant lui avant de reprendre le panier sur son bras, tournant les talons et continuant son chemin dans la rue. Un peu plus loin, elle lâche un coup d’œil en arrière pour voir Jeanarc manger avec joie le morceau de gâteau, un sourire visible depuis là où elle se trouve. Elle pouffe à nouveau et continue donc de marcher.
Chapitre 44 : Le Sincère
Sourire d’Une Femme
Anura: “Il ne me reste plus que la moitié de mon gâteau… Parfait !”
Elle regarde l’intérieur du panier : elle a donné quatre parts en tout. L’un à Jeanarc, un autre à Katherine et deux pour la famille Mearjia. Un vieil homme avec sa femme du même âge qui n’ont plus la force de travailler dans les champs, donc qui ont souvent besoin d’attention et de soin des autres habitants. Corissu y va parfois, mais cette fois-ci, c’est Anura qui y est allé à son tour. Le gâteau s’est un peu refroidi, mais il est aussi très bon sans être chaud et de plus, Anura peut le faire réchauffer chez elle si elle le veut. Il va bientôt être 17 heures et elle n’a pas mangé grand-chose à midi, alors elle va se faire plaisir en dévorant un gros morceau du gâteau. Anura arrive devant chez elle quand elle remarque quelqu’un qui semble l’attendre. La Kitta avance rapidement vers Anura avant de s’incliner poliment devant elle.
Natasha: “Pardonnez-moi, Anura, mais est-ce qu’il serait possible de discuter avec vous ?”
Anura: “Oh, tu es Natasha, la servante du noble qui est arrivé, n’est-ce pas ?”
Anura aurait du mal à ne pas la reconnaître : une jolie Kitta aux cheveux décolorés, un certain teint bleu à ceux-ci, et des yeux rouges bizarrement amicaux. On pourrait croire qu’avec une telle couleur, ils seraient menaçants, mais cela n’est pas le cas avec cette Kitta. De plus, elles ont discuté un peu lorsque sa faction est arrivée à Sombra, durant le repas offert par Corissu.
Natasha: “C’est bien moi.”
Ses vêtements sont un peu plus courts que la dernière fois, mais avec la chaleur, Anura peut comprendre que Natasha n’aurait pas voulu prendre sa tenue de servante. Elle ne connaît pas bien les nobles et la façon dont les factions fonctionnent, mais du peu qu’elle sait, les serveuses doivent souvent garder leurs tenues, même lorsqu’elles ne sont pas avec leur Maître ou Maîtresse. Certains le font différemment : une tenue de serveuse assez classe ou longue lorsqu’ils travaillent à l’extérieur ou avec des invités, mais des tenues sexys et presque trop courts lorsque c’est en privé. Anura ne veut même pas penser à l’abus que certaines servantes doivent ressentir… Du ressenti qu’elle a eu de Milo, le noble qui est arrivé il y a très peu à Sombra, il semblait plutôt respecter les membres de sa faction plutôt que le contraire. Si c’est réellement quelqu’un de bon, alors Anura en serait très heureuse : presque n’importe quel homme avec une servante Kitta abuserait d’elle, sexuellement ou physiquement.
Anura: “De quoi veux-tu parler ?”
Natasha: “Cela serait à propos de Sombra.”
Anura: “Tu t’intéresses à notre ville ?”
La Kitta acquiesce en plaçant les deux mains devant elle. Anura accepte donc, n’ayant aucune raison de refuser, et l’invite à l’intérieur en se débarrassant de ses chaussures. Natasha la remercie en la suivant de près, jusqu’au salon où elle s’assoit sous l’autorisation d’Anura. Cette dernière dépose le panier devant elle et lui demande si elle aimerait une part de gâteau. Natasha semble hésiter, mais elle finit par accepter avec le sourire, de la gourmandise dans les yeux. Cela fait rire Anura qui va chercher un couteau et deux assiettes. La femme coupe deux parts — une plus petite pour Natasha, vu qu’elle l’a demandé — et s’assied à ses côtés.
Anura: “Du coup, de quoi veux-tu parler, à propos de Sombra ?”
Natasha: “…”
La Kitta mange d’abord un bout de sa part de gâteau sans répondre à la femme aux cheveux dorés.
Natasha: “Eh bien…”
******************************************
Durant leur conversation, la Furry au nom de “Sann” court dans les rues d’une ville. Les maisons manquent de couleur et le peu de couleur visible viennent des graffitis insultants ou montrant des étranges signes, logos ou formes incompréhensibles. Sann est rapide, mais elle sourit. Elle saute au-dessus d’une barrière en métal froid et atterrit tout près d’un cadavre d’oiseau, mais elle n’y prête pas la moindre attention. S’approchant de sa destination, elle tombe sur deux humains qui discutent ensemble. Elle freine et saute sur le côté pour ne pas être vue.
Homme à barbe: “J’en ai vu deux là-bas. T’sais, dans la rue d’à côté.”
Homme à monocle: “Encore plus d’entre eux ? N’en ont-ils pas marre de nous harceler de la sorte… ?”
Homme à barbe: “Qu’importe. Prends ta hache, on s’en débarrasse et je brûle leurs péchés de mon Tempus de Feu.”
Homme à monocle: “Nous n’avons pas réellement d’autres choix. Faisons cela.”
Sann fronce les sourcils, mais elle reste sur place, sa présence impossible à détecter pour des gens comme eux. Elle qui souriait il y a peu…
Ville de merde.
Homme à monocle: “Allons-y.”
Les deux humains partent enfin de la rue et Sann peut sortir de sa cachette en soupirant. Avec ses vêtements, il sera compliqué pour quiconque de savoir qu’elle vient d’Inertia, mais malheureusement, l’endroit où elle se trouve… Elle se ferait tuer pour une autre raison : le fait qu’elle soit une Furry. Quelqu’un qui n’est pas “humain”.
Sann: “Bande de merdes.”
Elle tire la langue et continue son chemin, cherchant l’endroit où elle doit trouver l’informant qui souhaite communiquer avec Inertia. Elle ne sait pas à quoi il ressemble, mais à ce qu’il paraît, il aurait des informations… importantes. Sann grimpe une maison et court rapidement sur les toits, mais en sautant d’un habitat à l’autre, elle traverse les tuiles, celles-ci n’ayant reçu aucune réparation depuis longtemps.
Sann: “?!!”
Elle tombe dans ce qu’il semblerait être une chambre… devant un couple qui se mettent à trembler.
Couple: “A-Ah ?!”
Ils crient en même temps et Sann cligne des yeux avant de s’incliner devant eux.
Sann: “Pardonn—”
Homme: “Une Furry !!!”
Il hurle en tendant la main, envoyant des ronces de glace vers elle. Sann saute sur un meuble avant de sortir de la pièce en soupirant.
Je ne peux pas leur en vouloir, j’ai explosé leur toit… pense-t-elle avec le sourire, continuant à courir. Malgré le racisme envers elle et sa race, elle n’arrête pas de sourire. C’est peut-être son plus grand pouvoir, sa capacité dont elle est le plus fier. Tout en sautant sur les toits de la ville sans couleur, elle n’arrête pas de briller. Sa peau de fourrure est blanche comme la neige, ses cheveux sont décolorés, mais pourtant si soyeux, ses yeux rouges montrent de la compassion et ses vêtements brillent toujours de leur bleu impossible à rater.
Tout comme la Kitta qui sort de la maison d’Anura quelques minutes plus tard, toutes deux ne sont pas humaines. Elles sont toutes les deux des Maudites… et toutes les deux sourient.
Je n’ai pas pû apprendre autant que prévu, mais… La queue de chat de Natasha se balance joyeusement derrière son dos, ayant pû non seulement manger une bonne part de gâteau, mais aussi a pû en apprendre un peu plus sur la structure de la ville. Pour le combat qui viendra contre Vix, elle peut désormais savoir quel endroit sera le plus stratégique, ainsi que les lieux à éviter.
Je ne sais pas ce que je vais apprendre, mais… Sann a hâte. Les informants qui acceptent de partager des informations avec Inertia sont très rares, alors ils doivent en prendre avantage. S’ils pensent seulement que c’est un traître et qu’aller le rencontrer est un danger pour eux, alors jamais n’auraient-ils pris le risque. Ce n’est pas le travail de Sann de faire une telle chose, mais c’est son supérieur lui-même qui lui a ordonné d’aller le voir. Elle ne sait pas pourquoi elle, mais elle suppose que c’est parce qu’elle sera suffisamment puissante pour se débarrasser de cet informant si besoin. Toutefois, elle n’est pas la seule puissante du groupe, donc elle reste confuse.
Je vais gagner, cette fois-ci, pense Natasha. Elle en est encore plus certaine que dans sa dernière “vie”. Cette fois-ci, elle sait tellement de choses. Elle peut trouver sans difficulté la source du dôme, ainsi que qui le protège et la raison pour laquelle personne ne le “trouve”. Elle sait que demain, un homme de la ville d’à côté va mourir. Natasha a déjà conscience que Vix Jikaru et ses dix autres collègues vont venir à Sombra dans environ une semaine, prêts à génocider la ville. De plus, elle sait pour la carte maîtresse de Vix. Tout ce qu’elle a à faire… c’est de s’assurer de la victoire.
Inertia… Nous allons réussir notre but. Je suis certaine, est ce dont est convaincue Sann. Elle leur donnera sa vie si besoin. Elle n’abandonnera jamais de tendre la main pour atteindre son rêve et le réaliser. Elle a conscience que leur groupe est mal vu du monde entier… mais elle s’en fiche complètement. Elle n’arrêtera pas de les suivre. Cela… pour son propre but personnel.
Toutes les deux souriantes, Maudites et non humaines, mais toutes les deux avec des buts différents et dans un groupe différent. Toutes les deux certaines de gagner, mais toutes les deux sur un chemin complexe.
Toutefois, aucune des deux ne pense à la défaite.
Et alors, le début de la journée où l’homme d’Ember va mourir arrive.