Le soleil se lève doucement dans l’horizon, annonçant le début de cette nouvelle journée. Le 09 Septembre 2022 s’est terminé après l’arrêt de ‘Daniel Teri’, le coupable du meurtre de ‘Ben Tharen’. Après un message de quelques minutes de la part de sa meilleure amie, Deshya a réussi à se reposer avec calme et bonheur, dormant dans le même lit qu’Amora. Cette dernière dort aussi comme un vrai bébé, enlaçant la duveteuse queue de renard de sa meilleure amie, sans se douter qu’elle est actuellement réelle, et non une fausse. De leur côté, Lam et Frie dorment aussi avec sérénité. Contrairement aux deux autres meilleures amies, celles-ci sont de leur côté, Lam avec un coussin dans les bras, Frie simplement sur le dos. Dans cet hôtel, un crime a été commis le soir d’auparavant, mais heureusement, la nouvelle ne s’est pas répandue et aucune panique n’a été créé. La police a aussi décidé de garder cela secret et ne publiera donc rien dans les journaux.
Un peu avant 9h du matin, les quatre amies se lèvent une par une, commençant par Amora, ensuite Deshya et Lam et finalement Frie. Elles se brossent les dents, s’habillent et discutent un peu avant de se rejoindre dans le couloir. Cette fois-ci, la fille au pull renard n’oublie pas d’emporter son téléphone avec elle au restaurant de l’hôtel. Là-bas, elle ne voit Aya nulle part, mais étant donné qu’elle est venue avec ses trois amies avant tout, elle décide de ne pas aller la chercher et reste simplement avec elles.
– Je discuterai avec Aya ce soir ou demain,” pense Deshya.
Le petit-déjeuner se passe avec beaucoup de rires et de discussions entre les bonnes amies. Deshya parle un peu plus de l’enquête d’hier, chose demandée par Frie elle-même. Amora discute à propos du massage d’hier soir ainsi qu’une anecdote de sa soirée à l’hôtel lors de vacances, 5 ans auparavant. Ensuite, Frie et Lam parlent de souvenirs de lorsqu’elles n’avaient même pas 12 ans, bien avant qu’elles se rencontrent. Leurs discussions sont vives et amusantes, ce qui les réjouit toutes les quatre. Elles décident d’aller dans la piscine jusqu’à midi et ensuite jouer au billard, ce que toutes les quatre acceptent avec joie. Elles montent s’habiller en maillot de bain à nouveau, vont dans la piscine et n’en sortent qu’environ vers 12h30. Deshya est heureuse de pouvoir retirer ce bonnet collant de ses cheveux et tout en regardant dans le miroir de la salle de bain de sa chambre d’hôtel, elle soupire en souriant.
– La prochaine fois, j’irai dans une piscine privée avec mes parents. Au moins, je pourrai porter un bikini tranquille sans cacher mes oreilles…” pense-t-elle.
Elle dépose son bonnet à côté d’elle et s’habille de son pull de renard. Elle sort ensuite de la salle de bain et est accueillie de sa meilleure amie aux longs et beaux cheveux roses. Comme toujours, son énergie rayonne de son corps et son sourire est brillant comme le soleil du zénith. Deshya sait qu’elle ne devrait plus s’étonner d’un tel comportement, mais c’est impossible pour elle. Toutefois, Deshya ne veut pas qu’elle change. Jamais.
Elles descendent ensemble et vont rejoindre la grande salle de jeux, là où doivent les attendre Lam et Frie. Cependant, sur le chemin, Deshya entend le bruit du piano qui joue. Elle se retourne et Amora lui demande ce qu’il se passe, mais elle entend le piano à son tour. Sa meilleure amie lui prend la main et lui propose d’aller voir de plus près avant de rejoindre Lam et Frie. Deshya se fait entraînée, elle n’a donc rien à dire sur ce sujet. De toute façon, elle veut aussi écouter de plus près parce qu’elle pense savoir qui est derrière cette mélodie.
Et Deshya remarque qu’elle a raison lorsqu’elles arrivent dans la grande pièce tout près du restaurant.
Une fille un peu plus jeune qu’elle termine sa mélodie et est applaudie. Un homme est à côté d’elle, en train de rire.
– Je connais une autre chanson !! Et par cœur !!! Mais elle n’est pas en français ! Je vous la chante, si vous voulez ?
– Fais ça !!!
– Ouiii, ça serait top !
– Ahah, c’est ma fille, ça !” rigole l’homme à côté d’elle.
Deshya sourit en voyant qu’elle avait raison sur l’identité de la personne devant le piano et Amora l’admire.
– C’est…
Elle ne termine pas sa phrase : la fille commence à jouer tout en chantant d’une langue bien différente du français.
– ねこ ふんじゃった ねこ ふんじゃった
ねこ ふんずけちゃったら ひっかいた
ねこ ひっかいた ねこ ひっかいた
ねこ びっくりした ひっかいた
わるい ねこめ つめを きれ
やねを おりて ひげを それ
ねこ ニャーゴ ニャーゴ ねこかぶり
ねこなでごえ あまえてる
ねこ ごめんなさい ねこ ごめんなさい
ねこ おどかしちゃって ごめんなさい
ねこ よっといで ねこ よっといで
ねこ かつぶし やるから よっといで。
D’un japonais étrangement correct, la fille chante tout en jouant du piano. Une voix enfantine, féminine et mignonne sort de sa gorge pendant que ses doigts tapotent sur les touches du grand instrument devant elle. La foule d’une bonne quarantaine de personnes apprécient silencieusement le chant et la mélodie de la petite fille.
– ねこ ふんじゃった ねこ ふんじゃった
ねこ ふんずけちゃったら とんでった
ねこ とんじゃった ねこ とんじゃった
ねこ おそらへ とんじゃった
あおい そらに かささして
ふわり ふわり くもの うえ
ごろニャーゴ ニャーゴ ないている
ごろニャーゴ ニャーゴ とおめがね
ねこ とんじゃった ねこ とんじゃった
ねこ すっとんじゃって
もう みえない
ねこ グッバイバイ ねこ グッバイバイ
ねこ あしたの あさ おりといで。
Elle termine sa mélodie et lève ses deux mains en souriant. Tout le monde se met à applaudir, tandis que le père de la fille s’attrape d’un bras en rigolant. Amora tape dans ses mains à son tour, avec bien plus d’énergie que Deshya. Deux jeunes de leur âge viennent à leur côté.
– Elle joue bien, quand même,” lâche Lam.
– Je trouve que son japonais est excellent !” avoue Frie.
– Oh, vous avez aussi entendu la musique du piano ?” leur dit Amora en se tournant vers ses deux amies.
Elles secouent la tête et Lam pointe du pouce Deshya.
– On a vu sa capuche depuis la salle de jeu, mais vous vous êtes éloignées. On venait voir ce que vous faisiez.
– Eeeh, je vois.
Alors qu’elles discutent ensemble, la fille qui jouait du piano s’approche d’elle en souriant.
– Vous avez aimé ?” demande-t-elle. C’est une musique que ma mère m’a apprise quand j’étais plus petite !
La fille en face d’elle est actuellement l’une qu’Amora, Frie et Lam ont rencontré hier soir : ‘Aya Deroo’, la petite-copine actuelle de Maruno Uffite. Deshya acquiesce en regardant son amie.
– C’est ‘Nekofunjatta’, le titre, n’est-ce pas ?” lui demande-t-elle.
– Vraiment ? Je ne savais pas que c’était japonais,” avoue Lam.
Frie approuve avec Lam et Deshya se retourne vers elles en souriant.
– Le vrai nom de la pièce est ‘Flohwalzer’, mais en japonais, on dit ‘Nekofunjatta’, qui se traduit à ‘J’ai Marché Sur la Queue d’Un Chat’ en français. Justement, en français, on l’appelle ‘La Valse des Puces’. En espagnol, c’est même ‘La Chocolatera’ qui se traduit en ‘Le Chocolatier’ dans notre langue. C’est une mélodie simple à jouer et on l’apprend à certains novices, surtout les enfants. Le compositeur est inconnu, mais elle a été reprise et un peu modifiée par plusieurs auteurs. Comme ‘Bent Fabric’, un pianiste assez populaire danois qui est mort il y a peu, a fait une pièce nommée ‘Chicken Feed’ qui est…
Remarquant l’air perdu sur tous les visages de ses amies, Deshya se tait et se gratte la joue.
– Disons juste que je l’aime bien, ahah…
– C’est parce qu’on parle de ‘neko’ dans la chanson ! Deshya adore les chats !” lâche Frie.
– Elle préfère les renards, cependant,” avoue Amora.
– On dit ‘kitsune’ pour les renards, je le sais !” lâche Lam.
– Hey, vous vous perdez, là.
Aya se met à rire en écoutant les filles parler entre elles. Comme si cela était contagieux, elles se mettent toutes les quatre à s’esclaffer ensemble.
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Vers 15h, après une bonne partie de billard avec ses trois amies — étant donné qu’Aya est allée à la piscine à ce moment-là —, Deshya récupère ses affaires dans sa chambre d’hôtel et salue d’abord Lam Douce, ensuite Frie Rengoat et pour finir Amora Takt. Elle va à la piscine et dit au revoir à Aya Deroom et le père de celle-ci avant de s’en aller de l’hôtel. Son sac sur le dos, elle se dirige vers la route et attend un bus qui l’emmène dans la rue juste à côté de celle où elle habite. Elle sait qu’elle arrivera facilement à temps chez elle. Lorsqu’elle monte dans le bus, elle présente sa carte payée pour un an gratuit dans le bus et se pose sur une chaise libre. Deshya sort son téléphone et regarde le message de son père.
« On part vers 17h. Sois à la maison avant 16h. Aussi, dit bonjour à tes amies de ma part. Bisou. »
Tout en leur disant au revoir, Deshya avait dit à Amora, Lam, Frie et Aya un salut de sa part : elle oubliait si souvent de le dire qu’elle n’avait pas voulu faire l’erreur à nouveau. Même si son père ne le saura jamais, le simple fait qu’elle-même le sache est un poids sur son cœur. Aussi peu sérieux soit cet action, elle promet toujours de dire bonjour à ses amies de sa part, alors pour une fois qu’elle n’oublie pas…
Le voyage en bus se passe tranquillement, contrairement à ce qu’il s’est passé il y a une semaine et un jour, lors de la mort des parents adoptifs de Korone. Elle sort du bus et retourne chez elle en pensant à eux deux.
– Korone et ses deux parents adoptifs devaient mourir dans ce bus, mais par chance, Korone a survécu parce qu’elle a mis des gants après avoir touché le crayon et le journal…
Après avoir découvert la vérité du meurtre et qui était le coupable, Deshya est restée dans le bus quelques instants avec Korone, alors que le criminel était escorté vers la voiture de police. Il s’était débattu et avait hurlé qu’il devait tuer la petite sinon…
– Sinon quoi, justement ? Pourquoi avoir tué Mathieu juste après ? Est-ce que c’est pour qu’il ne révèle jamais rien à la police ? Mais ça m’étonnerait qu’il savait quoi que ce soit sur le sniper qui l’a tué, ni qui a failli tirer sur Korone… Si l’homme armé était suffisamment préparé pour lui tirer dessus et s’échapper juste après, il ne ferait pas l’erreur d’avoir son identité découverte par Mathieu au moindre moment, alors pourquoi l’avoir tué… ? Et surtout—
L’homme à la capuche d’aigle qui a été aperçu s’enfuir de la ruelle sombre où l’homme au sniper a justement été tué. Une affaire dans une affaire. Non seulement n’ont-ils aucune piste sur l’identité de l’homme armé, mais ils n’en ont aucune sur celui à la capuche d’aigle non plus. Même Korone ne semble pas savoir qui elle est réellement, vu que son nom de famille lui est inconnu. Deshya trouve qu’il y a beaucoup de mystère autour de cette petite-fille, surtout qu’elle semble avoir de bons réflexes et une intelligence bien plus développée que la normale…
– Elle a compris qui était le tueur de Claire Dochamps, mais a aussi compris pour l’astuce derrière son alibi et celui de Tom, le mec qui m’a assommé. C’est même elle qui a proposé à Raiji de garder un capteur sous sa langue… Est-ce qu’une petite fille comme elle peut penser à tout ça ? Surtout qu’elle m’a avoué qu’elle n’a rien dit à Raiji pour qu’il ne fasse jamais comprendre aux coupables que la police était dans les alentours… Ses cheveux blancs, ses yeux mauves…
Deshya se pose bien trop de questions sur Korone, mais elle sait pertinemment une chose : elle n’aura aucune réponse sans les exprimer à Korone. Cependant, comment en parler ? De plus, elle semblait sincère lorsqu’elle a avoué qu’elle ne savait rien sur elle-même.
– Est-ce qu’elle est liée à moi ou est-ce que je suis simplement parano… ?
Deshya arrive devant la porte de sa propre maison et laisse ses doutes sur le côté. Elle sort sa clef et l’insère dans la serrure avant de la tourner à l’intérieur. La porte s’ouvre et au même moment où Deshya entre dans le couloir, une magnifique scène se présente à elle.
– Regarde, je suis une princesse !!
– Ah, tu es là.
Dans une magnifique robe scintillante, Korone tourne sur elle et montre à Deshya sa belle coupe de cheveux : une queue de cheval duveteuse à l’arrière de son crâne. Ses chaussures à courts talons lui donnent l’impression d’être à peine plus grande, mais elles lui vont très bien. Juste à côté d’elle, un homme bien plus imposant se touche le nœud papillon : il est vêtu d’un costard élégant et sa barbe est entièrement rasée. Ses cheveux ont la même coiffure que toujours, mais il est clair aux yeux de sa fille qu’ils sont un peu plus soignés que d’habitude. Devant Deshya, son père et Korone brillent de leur beauté, alors qu’elle vient à peine d’arriver.
CHAPITRE 39
⎾Pure Neige * Le Coup de Feu Invisible ; Prologue Festif⏌
– Woaaah, Korone est toute mignonne !!
Deshya s’abaisse et prend la petite-fille qui saute dans ses bras. La jeune aux cheveux roux se relève en enlaçant Korone et tourne le visage vers son père.
– C’est rare de te voir aussi élégant !” le taquine-t-elle.
Son père abaisse ses paupières et lui frotte violemment la capuche avant de la pousser gentiment vers le côté. Il passe devant elle et se dirige vers la cuisine, les mains dans les poches de son pantalon serré par une ceinture. Il ne prononce pas un seul mot, mais Deshya pouffe. Korone la questionne sur son comportement, mais la fille lui répond simplement qu’elle est amusée.
– Eeeh… Je vois !
Korone est déposée par terre et celle-ci court vers la direction de la cuisine à son tour. Deshya la rejoint et braque ses yeux sur son père, lui qui boit de l’eau dans un grand verre.
– Mes habits sont prêts ?” demande-t-elle.
– Ils sont sur ton lit. Je dois avouer que ça fera un peu bizarre, mais on a pas vraiment le choix.
– Saleté d’oreilles de renard…
– On peut rien y faire. J’ai demandé à mon amie de faire de son mieux. Je trouve que c’est beau, donc ça devrait aller.
– Je vois… Merci.
Deshya le remercie et se serre un verre d’eau à son tour avant de monter les deux cages d’escaliers. Elle ouvre la porte de sa chambre et remarque les habits qui l’attendent. Elle les admire et les bouge de gauche à droite pour bien les observer.
– Ils sont beaux… C’est vrai que ça serait mieux si je n’avais pas à cacher mes oreilles de renard, mais je suppose qu’on ne peut rien y faire,” pense-t-elle.
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Vers 16h20, Deshya descend de sa chambre et se présente à Korone. Derrière la petite fille, Gatito attendait patiemment avec sa femme, ‘Pera Dimera’ : ou plutôt, Pera Oveja. Elle-même est dans une tenue élégante, mais contrairement à Korone et sa propre fille, ce n’est pas une robe, mais l’une noire décorée de paillettes. Deshya ajuste la capuche qu’elle a sur la tête et Korone ouvre grand la bouche, des étoiles dans les yeux.
Deshya est vêtue d’une belle robe orange qui lui arrive plus bas que les genoux. Les motifs noirs dessus sont accompagnés de blancs, imitant les couleurs d’un renard. La queue duveteuse qui pend depuis le dos de Deshya est partiellement cachée derrière la robe, mais vu sa longueur, il est impossible de l’abriter sous le vêtement entièrement. Sur la tête, une capuche aux nombreuses étoiles noires cache ses oreilles de renard, d’une couleur très similaire à la robe. Elle-même possède des paillettes et bien qu’il serait préférable de ne pas avoir à la mettre, tous les quatre comprennent qu’ils n’ont pas vraiment le choix. Deshya avait déjà pensé à ‘coller’ ses oreilles de renard sur ses cheveux pour qu’ils ne soient pas visibles, mais il ne fallut pas longtemps pour comprendre à quel point l’idée était ridicule.
– Héhé, j’aime beaucoup cette robe, elle me va mieux que celle de l’année dernière,” lâche Deshya en se regardant dans le miroir du hall d’entrée.
– Deshyshy est trop mimi !!” s’écrie Korone en sautillant sur place.
– Il nous faut environ une heure de trajet en voiture pour arriver là-bas, il vaut mieux partir maintenant,” remarque Gatito.
– Allons-y, alors,” dit Pera. Oh, aussi, Deshya. Tu es très mignonne dans cette robe, il faudra que tu la mettes pour une autre occasion, dans le futur.
Pera caresse la joue de sa fille en souriant. Deshya approuve tout en lâchant un grand et magnifique sourire, ensuite ouvre la porte d’entrée. Gatito attrape un sac et se dirige vers la voiture avec sa femme, sa fille et la petite Korone à ses côtés. Pera monte à l’avant, sur le siège passager, et les deux jeunes filles à l’arrière. Gatito place le sac dans le car de la voiture et s’assied ensuite devant le volant. Il ferme la portière, allume le contact ainsi que la radio. Il se retourne et vérifie que les deux filles sont correctement attachées et après confirmation, il avance sur la route.
– On y va, alors !” lance-t-il.
Korone balance ses pieds avec joie et anticipation. Bien qu’elle soit habillée de la sorte, elle se pose une question intrigante :
– On va où, exactement ?
Elle demande avec le sourire et Deshya tourne le visage vers elle avec étonnement.
– Papa ne t’as pas dit ?
– Hm, je ne sais rien !” avoue-t-elle.
– C’est vrai que je n’y ai pas pensé,” avoue Gatito.
– Pourtant, vous lui avez acheté une robe ?
Pera retourne la tête avec le sourire.
– La fête est prévue depuis longtemps, donc je me suis dit que lui acheter une robe en même temps que ses habits n’étaient pas une mauvaise idée ! Sinon, j’ai des habits à toi, j’aurai trouvé quelque chose, hihi.
– Pourquoi on prend Korone, tiens ?
– On ne va pas laisser Korone à la maison toute seule, pas vrai ? En plus, elle sera mieux avec nous qu’avec un babysitter, surtout qu’on doit faire attention.
Gatito répond d’un ton sérieux et Deshya acquiesce, comprenant la situation. De plus, cela ne la dérange pas : pouvoir voir Korone avec une telle robe lui fait plaisir, en réalité.
– On va à la fête de quiii ?” demande Korone.
Pera, la femme du conducteur de la voiture, est celle qui lui répond en premier.
– C’est une fête annuelle, elle se passe tous les 10 Septembre ! Nous sommes invités toutes les années, vu que nous sommes amis avec l’homme qui les organise.
– Eeeh, c’est vrai ?
– Oui ! L’homme qui l’organise s’appelle ‘Colin Furas’, un homme plutôt riche que nous connaissons depuis assez longtemps, un peu après la naissance de Deshya !
– Je vois, je vois !!
Korone sautille sur son siège, hâte d’aller à cette fête. Deshya prend ensuite la parole.
– J’y vais depuis mes 11 ans, là-bas. C’est souvent très sympathique, tu devrais bien t’y plaire. Il y a beaucoup de gens, mais il y a plein de choses à manger, des activités amusantes et tout ça !
– Il y aura un buffet, alors ?” demande Korone, les yeux encore plus brillants qu’avant.
Deshya approuve, ce qui lâche un cri de plaisir de la part de la petite fille. Les trois membres de la famille pouffent ensemble, amusés par le comportement de la petite. Cette dernière regarde la route depuis sa fenêtre et garde son grand sourire.
– Et c’est quoi comme fête, exactement ?” demande-t-elle, ses yeux rivés sur le paysage extérieur.
Elle connaît que très peu Tetazo, vu qu’elle habitait un peu plus qu’ici, lorsqu’elle habitait encore avec ses deux parents adoptifs, donc elle s’intéresse énormément aux sceneries qu’elle peut observer : découvrir de nouvelles choses est quelque chose qu’elle adore.
– Colin fête l’anniversaire de son mariage avec sa femme, ‘Mona Furas’. Ils sont tous les deux très heureux de s’être rencontrés et leur amour a probablement déjà donné le diabète à certains, mais ils sont très mignons ensemble,” lui répond Gatito.
– J’avoue qu’ils sont super mignons, ensemble !!” lâche Pera.
– J’ai hâte de les voir !
Korone arrête de regarder le paysage et admire désormais la tenue de Deshya. Elle est étincelante et imite la couleur d’un renard, donc Korone ne se lasse pas de la regarder.
– Tu vas pouvoir te régaler, au buffet là-bas !” lui dit la fille à la queue de renard.
– Beaucoup de bonne nourriture, je le sens !!
– On mange souvent un peu trop, justement…” avoue Gatito.
Deshya gonfle les joues en fronçant légèrement les sourcils.
– J’en peux rien si la nourriture est bonne là-bas.
Gatito hausse les épaules et sa femme le dévisage avec un sourire en coin.
– Tu n’es pas en train de dire que notre Deshya est grosse, n’est-ce pas ?
Sa voix est telle une menace et Gatito déglutit bruyamment. Il répond que ce n’est pas cela qu’il voulait dire, mais Pera n’est pas convaincue. Korone les écoute attentivement et décide de toucher le ventre de Deshya, ce qui surprend cette dernière, mais la petite-fille secoue la tête.
– Je trouve que Deshya est paaaarfaite comme ça !
Le silence s’installe dans la voiture, mais il est rapidement brisé par le rire de la famille. Comme si cela était contagieux, Korone se met à rigoler à son tour et le voyage continue avec une belle ambiance.
Ils arrivent tous les quatre là-bas un peu avant 17h30. Gatito se gare tout près d’autres voitures, à la seule place qui semble être libre du parking. En sortant de la voiture, ils font tous attention à ne pas cogner la portière sur le véhicule d’à côté. Gatito récupère ses clefs et sort à son tour. Korone ouvre grand la bouche et les yeux en voyant le grand bâtiment en face d’eux :
– Une grooooosse villa !!” crie-t-elle.
L’architecture est moderne, mais un côté ancien arrive à se retranscrire dans les façades de la villa. Le toit est plutôt pointu et même d’ici, ils peuvent observer une partie du gigantesque jardin qui se trouve à l’extérieur. Une statue domine une partie du paysage à leur droite, une fontaine modeste à gauche. Le parking est privé et réservé uniquement pour les invités de ‘Colin Furas’, l’homme riche qui habite avec sa femme dans cette belle bâtisse. Un passage très soigné, décoré de nombreux buissons, est visible devant eux, chemin pour rejoindre la villa qui se trouve un peu plus haut.
– Est-ce qu’il y aura des gens qu’on connaît ?” demande Korone, excitée.
Ils se mettent à avancer ensemble et Gatito réfléchit.
– Hmmm, je sais que Mariah et Dash seront là, mais tu ne les connais pas… Je ne pense même pas que Deshya les connaisse.
– Je vois qui est Mariah. C’est ‘Mariah Sukeni’, c’est ça ?” demande Deshya.
Gatito acquiesce. Deshya ne l’a jamais rencontré, mais de ce qu’elle a entendu sur elle… Il est impossible de la rater. Cependant, elle a hâte de la rencontrer. Pour ‘Dash’, elle ne voit pas qui cette personne se trouve être. Gatito regarde Korone en souriant faiblement.
– Cependant, je sais qu’Annie sera aussi à la fête.
– Annie ? La madame qui s’est occupée de papa et maman quand ils sont morts ?
Il acquiesce. Deshya ressent un spasme à son œil droit.
– Quand j’y pense, excepté quand le papa de Kyria a été tué, j’ai rencontré Annie à chaque enquête de meurtre…” pense-t-elle.
Bien évidemment, Deshya ne pense pas que la docteure est maudite, vu qu’elle ne vient aux scènes de crime uniquement pour s’occuper de vérifier l’état du corps, la cause de la mort, et autres choses dont elle n’a probablement pas connaissance. Cependant, Deshya se demande si elle est la seule docteure policière : cela serait bien trop de travail pour elle seule !
– Je ne connais qu’Annie et encore, je la connais depuis l’affaire du train… Je pensais en savoir plus sur la police de Tetazo, mais on dirait que j’ai tort, ahah…
Elle sourit grâce à ses propres pensées et continue sa route à la grande villa, même si elle n’est pas aussi impressionnée que la première fois où elle est venue ici. Néanmoins, elle ne peut qu’admirer un tel bâtiment. Ce n’est même pas le seul qu’il possède. Elle n’imagine même pas la somme d’argent qu’il gagne par mois.
Ils arrivent ensemble à la porte d’entrée et deux gardes s’interposent. Gatito montre rapidement son invitation et décline l’identité d’eux quatre. Ils le reconnaissent rapidement et vérifient les quatre invités, mais lorsqu’ils voient la petite fille, ils hésitent.
– Ne devriez-vous pas venir à trois ?” demande l’un des deux garde. Qui est-elle ?
– Je m’appelle Korone !” répond la petite-fille.
– Je peux vérifier la liste, mais je ne pense pas qu’elle soit invitée.
– Eeeeh ?!
La petite serre les poings et les place devant elle, les yeux grand ouverts. D’une expression de chien battu, elle observe le garde en faisant trembloter sa lèvre inférieure. Cependant, l’homme n’est pas affecté et scrute les prénoms dans la liste. Korone soupire et Deshya lui caresse la tête.
– Colin m’a dit que j’avais le droit de l’emmener aussi,” leur explique Gatito.
– Nous allons devoir vérifier avec lui avant de vous laisser—
– Pas besoin, pas besoin !
Le garde se fait couper par la voix joviale d’un homme qui entre dans la quarantaine. Sa barbe est rasée, contrairement à sa moustache noire, et ses yeux bleus clairs montrent énormément de vie en eux. Il touche une épaule des deux gardes et les tapote en souriant.
– Mon cher ami ici m’a déjà parlé de la petite, elle a le droit de venir à la fête. Ma femme a même préparé des chocolats en forme de dinosaures pour elle !
Korone demande à Deshya si c’est bien lui ‘Colin Furas’, l’organisateur de la fête, et la fille acquiesce. Lorsqu’elle a cette confirmation, la petite fille lève les bras en pouffant, un magnifique sourire sur le visage.
– J’adore les dinosaures !! Comment saviez-vous cela ?!
– Ahah, les petits adorent souvent les dinosaures, c’est pour ça !” lui répond Colin en rigolant.
– J’aurai préféré des hamsters ou des renards, mais miaaam !” pense Korone.
Elle se régale déjà d’avance, mais elle compte bien goûter un peu de tout, pas seulement les chocolats faits spécialement pour elle. Gatito discute rapidement avec l’homme moustachu et quelques secondes plus tard, ils peuvent rentrer tous les quatre dans la villa. Les deux gardes s’inclinent et leur souhaite une bonne fête. Colin se retourne vers eux deux.
– Venez aussi profiter de la fête quand vous le voulez !
– Bien !
Deshya sourit en voyant leur interaction. Même si Colin est un homme riche qui est directeur d’une chaîne de magasins de beauté très populaire, c’est l’un qui ne cache jamais ce qu’il a réellement dans le cœur : une bonté admirable. C’est un homme qui a souvent offert des dons de plusieurs milliers d’euros, voire plus, à des recherches de vaccins contre des maladies très graves, des aides aux réfugiés de guerre ou même à l’avancement d’une société où les LGBTQ+ ne seront pas maltraités et mis de côté. C’est un homme qui sait utiliser son argent d’une façon égoïste quand il le faut, mais sait aussi comment être altruiste et en partager avec ceux qui en ont besoin. Deshya a conscience qu’il est possible que cela ne soit qu’une façade pour paraître plus gentil qu’il ne l’est vraiment, mais en tant qu’ami de ses parents — et techniquement son ami à elle aussi —, elle est convaincue qu’il a réellement un cœur d’or. Participer à ses fêtes est toujours un plaisir. Le grand couloir où ils se trouvent actuellement est festif, décoré de ballons et de leds aux couleurs arc-en-ciel. Korone est impressionnée par les nombreuses portes par-ci et par-là, ainsi que le grand escalier à la fin du couloir. Cependant, ce n’est pas là où ils se dirigent : Colin s’arrête devant une des portes et l’ouvre tout en discutant avec la famille Oveja. La salle qui se présente à eux reflète avec couleurs dans les iris de la petite-fille aux cheveux blancs. De nombreuses personnes s’y trouvent déjà, en train de discuter, grignoter ou profiter de l’ambiance festive. La pièce est immense et au fond de celle-ci, une scène plus élevée que le sol n’attend rien d’autre qu’être utilisée. Les fenêtres ont leur tenture ouvertes, mais la lumière du jour tombant est éclipsée par celle des nombreuses au plafond. Contrairement à celles du couloir, celles-ci n’ont pas vraiment de couleur particulière, mais leur ton doré rend la scenerie en face d’eux encore plus magique. Un bruit de fond musical est entendu, mais les sons des discussions empêchent les quatre nouveaux arrivants de reconnaître la mélodie. Korone lève les bras et demande à l’homme roux s’il peut la porter pour qu’elle puisse tout voir et il accepte directement. Dorénavant sur ses épaules, elle admire avec délice la peinture vivante qui se présente à elle. Devant eux, une femme aux longs cheveux bleu encre court et s’approche d’eux avec un grand sourire.
– Vous êtes arrivés ! Il ne manque pas grand monde !” leur dit-elle.
– Oh, chérie !
Colin se place à côté de sa femme et lui tient la taille d’une main aimante. ‘Mona Furas’ est saluée par les trois membres de la famille Oveja. Korone la regarde et demande qui elle est, ce que répond Mona elle-même.
– En voilà une fille toute mignonne ! Je m’appelle ‘Mona Furas’, je suis la femme de Colin. Je travaille dans le même secteur que lui, surtout que je suis celle qui expérimente parfois nos propres produits.
– Eeeh, vous êtes belle !
– Merci ! Tu es très mignonne, toi !
Les deux sourient en fermant les yeux, ce qui amuse Deshya et ses parents, ainsi que le mari de Mona. Cette dernière remarque la fille à la belle robe orange, blanche et noire et la salue en s’approchant d’elle.
– Oh, tu es encore plus belle que la dernière fois ! Tu as encore une capuche avec tes fameuses oreilles, hihi !” lui lâche Mona.
Deshya acquiesce en rougissant faiblement.
– Je dois avouer que ça me fait un style original, héhé…
Deshya place les deux mains dans son dos.
– Bah, c’est même un style unique, vu que je dois être la seule avec des oreilles de renard…” pense-t-elle.
Mona commence à discuter avec son mari et Gatito se retourne vers Deshya, la petite-fille toujours sur ses épaules.
– Nous allons dire bonjour à nos amis, tu gardes Korone avec toi ?” demande-t-il en la déposant par terre.
Korone prend la main de Deshya et cette dernière acquiesce.
– Bien sûr, ça me va.
– Merci.
Gatito prend la main de sa femme et ils passent à côté de Colin et Mona qui partent à leur tour. Deshya baisse le regard vers Korone et lui demande ce qu’elle veut faire.
– Je veux dire bonjour à Annie !!” lâche-t-elle.
– C’est vrai que papa a dit qu’elle devrait être ici. On va la chercher ensemble.
– Mui !
Deshya et Korone marchent entre les nombreux invités tout en scrutant les environs, cherchant la dame dans la cinquantaine qui travaille comme docteure policière. Certaines personnes saluent Deshya et la petite-fille, ce qui les ralentit dans leur recherche, mais plus rapidement que prévu, une femme aux cheveux blancs se présentent à elles.
– Korone est venue aussi !” se réjouit Annie.
Elle s’abaisse devant elles et Korone lâche un immense sourire.
– Annie !! Bonsoiiir !!
– Bonsoir, Korone ! La dernière fois qu’on s’est vu, c’était quelques instants quand Deshya s’est faite kidnapper, pas vrai ?
– Ahah, super moment…” se remémore Deshya.
Deshya lâche la main de Korone qui les agite tous les deux devant Annie. Elle approuve ensuite que c’était la dernière fois.
– Encore merci pour votre travail !” lui dit Korone.
– C’est mon métier, je dois le faire bien !
– Bien le faire !
Elles pouffent toutes les deux et Deshya les admirent avec un faible sourire. Lorsqu’elle est comme ça avec Korone, elle a l’impression qu’elle est actuellement…
– Ma petite-sœur…
Deshya ne sait pas si elle doit se sentir heureuse ou triste. Après tout, elle reste une enfant unique. Elle aurait voulu avoir un petit-frère ou une petite-sœur, même si elle venait à se disputer parfois avec, mais cela n’est pas une possibilité. Elle tourne le visage vers ses parents, qu’elle peut voir derrière la foule, et ferme les yeux. Korone ne va pas pouvoir rester indéfiniment avec eux, après tout. Elle doit l’accepter : elle n’est pas sa petite-sœur. C’est simplement une petite-fille qui a failli être assassinée et qui reste avec eux le temps de la protéger, vu que l’identité de l’homme armé est toujours inconnue. Cependant, il ne semble pas être reconnu même avec ses empreintes digitales, son apparence ou autre. Bref, cet homme est un mystère.
– Deshya ?
La fille à la queue de renard sort de ses pensées et tourne le visage vers Annie, cette dernière venant tout juste de l’appeler.
– Ah, pardon, je pensais à quelque chose…” avoue Deshya.
– Pas grave. Comment tu vas ?
– Je vais bien. Après l’incident d’hier soir, j’ai pû me reposer et m’amuser avec mes amies, donc tout va bien.
– Tu m’en vois heureuse. J’ai vu Bibi hier soir, elle m’a parlé un peu de toi, justement !
– Ah bon ?
Annie acquiesce et se relève.
– Elle m’a dit qu’elle espérait que tu n’irais pas te fourrer dans de gros problèmes, vu que tu sembles tomber sur beaucoup d’enquêtes différentes.
– Ahah, je ne promets rien…
Deshya se gratte la joue, ce qui amuse Annie, mais en même temps, cela l’inquiète. Elle veut insister sur sa sécurité, mais elle décide de simplement lui passer une friandise de la table derrière elle en souriant.
– Bah, dans tous les cas, profitons de la fête !” lâche-t-elle.
– Oui !
Deshya remercie Annie en attrapant la friandise. Korone demande pour en avoir une aussi et Annie accepte en lui en passant deux. La petite-fille les montre à Deshya en se vantant d’en détenir deux, ce qui est plus que ce que possède Deshya. Cette dernière fait la moue et elles se mettent à se chamailler, mais c’est bien évidemment pour blaguer, ce qui fait rire Annie.
– Je ne vais pas l’embêter avec tout ça alors que c’est une soirée festive,” pense Annie.
Elle considère que ce n’est pas le moment pour l’embêter avec sa propre sécurité et ce qu’elle doit faire ou non.
Quelques instants après, Deshya et Korone vont au buffet pour voir ce qu’il y a à manger. La petite-fille n’arrive pas à se décider et dévore des yeux l’entièreté des tables. Il y a tant de bonnes choses qu’elle ne peut juste pas choisir un plat par lequel commencer. Elle veut tout goûter, mais elle sait qu’elle ne peut pas se permettre d’une telle chose, même si c’est un buffet où ils sont tous libres de prendre ce qu’ils veulent. Deshya attrape deux assiettes et en offre une à Korone. Elle va se servir quand les lumières s’éteignent toutes en même temps.
– Qu’est-ce qu’il se passe ?” lâche un invité.
– Ah ?!
– L-Les lumières ?!
Deshya se retourne et regarde la salle avec des yeux plissés. Elle peut encore voir un minimum grâce à la lumière de l’extérieur. Les rayons de la lune leur permettent de voir ce qu’il se passe en face d’eux, mais cela n’est pas réellement suffisant. Alors qu’ils commencent à tous s’inquiéter, la porte de la pièce, de là où sont entrés Korone et la famille de Deshya, ainsi que tous les invités, s’ouvre d’un coup.
– Qui est-ce ?!” crie une personne.
Aucune réponse. Cependant, les lumières reviennent à elles. Plutôt, des lumières éclairent la porte. De là, de la fumée surgit et bloque la vision de tous. Deshya protège Korone en la poussant doucement vers l’arrière et fronce les sourcils. Gatito l’imite avec sa femme, de l’autre côté de la pièce. D’un coup, depuis la fumée, quelque chose sort et roule sur le sol. Au même moment—
Un bruit de fanfare.
Il vient de nulle part. Des bruits de trompettes et de tambours sont entendus. Gatito cligne des yeux avant de serrer un poing, un spasme à l’œil.
– N-Ne me dis pas que c’est…
Il n’a pas besoin de terminer sa phrase : une silhouette féminine sort de la fumée au même moment où la fanfare s’enjaille. Les trompettes donnent leur tout, les tambours sont tapés avec joie et énergie, des sons de percussions sont même entendus. La fumée se dissipe et marchant sur le tapis rouge qui a été déroulé sur le sol, une femme aux longs cheveux noirs s’avance sur le rythme de la musique. Des mèches roses et des yeux bleus hypnotisants, elle arrive dans la salle sans cacher son tatouage d’ailes noires au niveau du torse. Ses oreilles ont des boucles en forme de cœur au niveau des lobes, ainsi que quatre étoiles qui montent vers la moitié de l’oreille. Ses formes ne sont même pas cachées : son corps n’est vêtu que d’une combinaison blanche, noire et mauve qui prend parfaitement ses formes. La femme marche d’une façon élégante, séduisante, sensuelle, voire appétissante. Elle s’arrête d’une pose à faire craquer les hommes les plus résistants et agite ses cheveux noirs et roses avec un sourire aguicheur. Derrière elle, un homme musclé à la tenue révélatrice et militaire, non attaché et courtes manches, arrive en lançant des pétales multicolores à gauche et à droite. Son pantalon est troué d’un peu partout et ses chaussures noires sont attachés sur le côté. Ses cheveux sont d’un beau rouge et forment comme un nuage au-dessus de son crâne, un dégradé juste en-dessous. Ses oreilles, tout comme celles de la femme, sont percés et ont des bijous attachés à celles-ci, bien que différement que ceux de la femme qu’il suit. Il est aussi visible que sur son torse, au niveau de son pectoral gauche, un tatouage noir est à moitié caché par son habit. Sur son bras gauche, les tatouages blancs, bleus, rouges et noirs se montrent sans aucune honte, tout comme ses gros muscles qui prouvent une force monstre en lui. La fanfare continue de jouer de leur soul, bien que personne ne puisse être vu jouer d’un seul instrument. Le tapis rouge s’illumine d’une belle couleur dorée tandis que la femme ferme les yeux et claque des doigts. Les lumières de la pièce s’allument toutes en même temps et la fanfare s’excite avant que l’homme derrière la femme jette les dernières pétales et appuie sur un petit bouton.
Et là, une affiche tombe depuis le plafond, juste derrière eux deux, et s’arrête un peu avant de toucher le sol, montrant des lettres qui forment un prénom.
– ‘Mariah Sukeni’ ?” parle tout haut Deshya, n’arrivant pas à comprendre ce qu’elle vient d’observer.
La femme agite une nouvelle fois ses cheveux et sourit.
– La vraie star de cette fête est arrivée.
Gatito s’approche d’elle et lui attrape le cou du bras en souriant à dents serrés.
– N’est-ce pas notre ‘star’ préférée, heiiin ?!
– Oh, tu es là, Gatito. Dis-je comme si je ne m’en doutais pas déjà.
Elle s’échappe de son emprise d’un geste acrobatique et la fanfare s’arrête d’un coup. L’homme aux cheveux rouges éteint la radio qu’il avait dans le dos et sourit en voyant Gatito.
– Bonjour, inspecteur ! Enfin, bonsoir !
– Ne faites pas les innocents, qu’est-ce que vous faites ?!” crie-t-il.
Deshya s’approche d’eux avec Korone, les yeux toujours grand ouverts.
– C’est eux deux, Mariah et… Dash ?” demande-t-elle.
Deshya sait une chose sur Mariah : elle est une femme totalement excentrique qui ne cache jamais ses formes à quiconque. Une femme qui aime montrer à quel point elle est belle, admirable et sexy à tous. L’une qui aime être le centre de l’attention et qui aime qu’on la dévore du regard. C’est pour cela que Deshya était convaincue qu’il était impossible de la rater… mais là, c’est d’un niveau bien trop haut pour elle. Elle n’a aucun mot pour exprimer ce qu’elle est en train de ressentir à l’instant. La femme est à peine plus petite que Deshya et pourtant, elle semble dominer la pièce toute entière. Elle regarde Deshya et sourit à pleine dent.
– T’es la mignonne petite renarde qui semble surpasser la police elle-même, pas vrai ?
– Hey, tu racontes quoi, là ?” demande Gatito.
Mariah croise les bras en-dessous de ses seins et lâche un ‘mhp’ léger.
– C’est pas ma faute si je dis simplement la vérité. Elle devrait être engagée à la police.
– Elle a 16 ans à peine et puis—
– Au pire j’ai raison, t’as tort, je veux lui faire un câlin !
Mariah prend Deshya dans ses bras en la serrant fortement et lâche un bruit heureux. Gatito soupire bruyamment et les invités sont tous confus dans la pièce. Colin saute sur la scène et prend le microphone en main.
– Pardonnez-nous de cette entrée… très… spéciale. Elle m’en avait parlé à l’avance, j’ai donc accepté parce que je lui devais un gage. Désolé pour cette petite frayeur !” leur explique-t-il.
Les invités se mettent à discuter entre eux, tous rassurés que ce ne soit rien de grave. L’homme aux cheveux rouges regarde la petite fille aux cheveux blancs.
– C’est donc toi, la petite Korone ?” demande-t-il.
– Tu me connais ?
– L’affaire du bus est importante, alors nous en parlons souvent à la station de police.
– Eeeh, mais tu es qui, en fait ?
L’homme sourit et s’abaisse devant elle. Mariah lâche Deshya qui reprend sa respiration : elle avait été serré bien trop fermement, elle a cru qu’elle allait mourir. Elle écoute la conversation entre Korone et l’homme à la peau foncée en se tenant la poitrine.
– Je m’appelle ‘Dash Tarway’, je suis réceptionniste de la police. Tu sais, je réponds aux appels et je reçois certaines personnes qui viennent à la station,” explique l’homme aux cheveux rouges.
– Eeeh, je vois,” lâche Korone.
– C’est un peu comme mon serviteur, héhé,” ajoute Mariah.
Dash sourit en se grattant la joue.
– Serviteur est un grand mot : plutôt comme un fan,” corrige-t-il.
Deshya trouve cela assez spécial de voir un homme aussi costaud et imposant que lui se gratter la joue et rougir de la sorte. Mariah place les deux mains au niveau des genoux et les montent sensuellement en fermant les yeux.
– Moi, je suis ‘Mariah Sukeni’, la nouvelle détective de la police de Tetazo~…
Elle lève les deux mains après avoir frotté la presque entièreté de son corps et prend une pose qu’on pourrait observer dans un magazine de mode populaire.
– Petite de taille, mais grande d’ego.
– Je confirme,” lâche froidement Gatito.
– Elle est réellement une détective ?” demande Korone en s’adressant à l’homme roux.
Gatito approuve et croise les bras.
– Elle est arrivée en Juillet, c’est la petite dernière de la police. Cependant, elle a déjà résolu plein d’enquêtes, même sans être sur la scène de crime.
– Même sans y être ? Elle est comme ‘Nero Wofle’ ?
– Elle est une détective en fauteuil, alors ?!
Korone sautille sur elle-même et tout le monde tourne le visage vers elle. Korone cligne des yeux et se gratte les cheveux.
– J-J’ai entendu le terme en regardant… une série… télévisée !
– Eeeh, c’est vrai ?” demande Dash.
Elle acquiesce avant de détourner le regard.
– Ne fais pas l’idiote comme ça !!” pense-t-elle.
Le terme de ‘détective en fauteuil’ n’est pas l’un qu’elle devrait connaître, après tout. Deshya a pensé pareil, mais elle ne fait pas de remarque sur celle de Korone et décide simplement de se tourner vers son père.
– Excepté Annie, toutes les femmes policières sont petites, ou quoi ?” demande-t-elle avec un sourire taquin.
– Elle est peut-être petite, mais elle est d’une beauté incroyable !” lâche Dash.
Mariah approuve avec son soi-disant ‘serviteur’.
– Tu es juste grande pour ton âge,” se défend-t-elle.
– Non, mais Hanoka fait genre, 1m57 ? Karine est à peine plus grande que moi et tu dois faire… 1m60 ?” parle Deshya.
– Exactement. Tu as l’œil.
– Vous êtes petites !
– Justement, c’est mignon !
Mariah pointe du doigt Deshya et lâche un sourire taquin, mais l’un qui est aussi vilain.
– Nous sommes petites de taille, donc nous pouvons être mignonnes et belles ! Si tu es trop grande, tu ne peux pas être mignonne ! Mwahahah !!
– Elle a raison ! Mwahahah !!
Dash imite le rire de Mariah et tous les deux pointent du doigt Deshya. Cette dernière soupire en abaissant les paupières. Korone saute Deshya et la prend dans ses bras.
– Deshyshy est trop mimi !!! Elle a une queue-queue de renard !
– Une fausse, ça ne fonctionne pas,” réplique Mariah.
– Même si elle est fausse, elle est magique ! Magnifique ! Trop mimiiii !!
– Hm, tu n’es qu’une bébé, tu ne sais pas ce qu’est—
– Bon, vous arrêtez ?!!
Gatito crie si fort que tout le monde dans la pièce l’entend. Mariah se tient les deux oreilles et Dash lui demande si elle va bien. Gatito attrape sa fille et Korone et les fixe avec intensité.
– Vous ne pourrez jamais gagner contre Mariah. C’est un combat perdu d’avance. Acceptez juste de perdre.
Korone gonfle les joues et croise les bras.
– Deshyshy est suuuuuper mignonne !! Moi pas perdre !
Gatito soupire et les dépose par terre en haussant les épaules.
– Comme vous voulez, ne créez pas une commotion.
– Tu viens de hurler si fort que même avec la musique, je pense que les voisins t’ont entendu…” pense Deshya avec un sourire fatigué.
Gatito retourne aux côtés de sa femme et Mariah s’approche de Deshya et Korone avec Dash.
– Dans tous les cas, ravie de rencontrer la fameuse ‘détective aux oreilles de renard’ ! S’il y a une enquête ce soir qui vient de nulle part, j’ai hâte de travailler avec toi !
– J’espère qu’il n’y aura pas besoin d’enquêter quoi que ce soit…” avoue Deshya.
– J’espère aussi, mais j’aimerai un jour travailler avec toi ! Après tout, tu as dû résoudre un meurtre dans une chambre close avec Hanoka, hier, n’est-ce pas ? Tu as déjà travaillé aux côtés de Sammy, le nya-nya détective, Hanoka, la détective rose, il ne manque que moi et le vieux !
– Le vieux ?
Mariah lui tapote plusieurs fois dans le dos en rigolant et la salue en s’éloignant. Dash récupère l’affiche et sort de la pièce pour la ranger autre part. Korone le regarde partir avant de sourire.
– Ils sont rigolos.
– Je vis dans un monde de fou,” soupire intérieurement Deshya.
Deshya soupire et demande à Korone si elle veut enfin manger quelque chose. Elle accepte avec joie et retourne au buffet avec Deshya. En arrivant là-bas, elle récupère l’assiette qu’elle a posé sur une des tables et ouvre grand la bouche en admirant les plats qu’elle peut voir d’ici quand—
— un sentiment horrible la traverse de haut en bas.
Korone ouvre grand les yeux et se fige sur place. L’assiette dans les mains, elle fixe le vide, immobile. Tous ses sens sont en alerte totale. Elle veut trembler, mais son corps ne bouge pas. Comme si les ténèbres étaient autour d’elle, s’approchant d’elle encore et encore, elle se sent oppressée d’une force imposante et horrible. On l’étouffe, on lui prend la gorge, on l’empêche de respirer. Korone entend son cœur battre violemment dans sa poitrine, elle ressent des frissons abominables et insupportables. Elle veut fuir, mais ses pieds ne bougent pas. Toutefois, elle commence enfin à trembler.
Des yeux la fixent. De tous les sens. Les iris l’observent. L’analysent. La reconnaissent. Elle est complètement nue face à eux. Ce regard pesant l’enfonce dans des sables mouvants, les mains viennent l’attraper de tous les côtés, on la force à rester sur place, figée et immobilisée. Elle ne peut fuir nulle part, même si elle le voulait. Korone tremblote. Deshya se place à côté d’elle et lui demande si elle veut manger ce poulet, mais la petite fille ne répond rien. Elle les ressent. Ces regards atroces qui lui donnent des frissons interminables. Elle est bien trop faible face à eux. Elle ne peut rien faire. Elle ne peut qu’accepter—
– Korone ?
Deshya lui touche l’épaule et Korone faillit lâcher l’assiette qu’elle a dans les mains. Elle tourne lentement son regard vers Deshya en tremblant, des larmes dans les yeux. Elle se sent si mal, si horrible.
– D-D-Deshya…
– Korone, ça va… ?
Deshya s’abaisse, inquiète pour la petite fille qui commence à pleurer. Korone dépose l’assiette sur la table en tremblant et attrape Deshya dans les bras.
– J-Je me sens… vraiment pas bien… T-Toilettes…
– Toilettes, tu dis ? Okay.
Deshya acquiesce et dépose rapidement l’assiette à côté de celle de Korone. Elle fonce aux toilettes avec la petite fille dans les bras, ne perdant pas de temps. Korone ressent son ventre se retourner encore et encore, tandis que les regards continuent de dévorer son âme, l’empêchant de bien réfléchir. C’est une sensation insupportable. Elle veut que ça s’arrête… Elle veut qu’on arrête de la fixer de la sorte !! Elle ne comprend rien, Korone ne sait pas ce qu’il se passe !!
Deshya laisse Korone aux toilettes, tandis qu’elle attend à l’extérieur, assise contre le mur. Elle peut entendre la petite fille vomir parfois, tout en l’entendant pleurer, ce qui la tracasse grandement. Elle qui rigolait quelques secondes auparavant, elle s’est simplement figée et a commencé en pleurant d’un coup. Deshya ne comprend pas ce qu’il s’est passé : est-ce qu’elle est simplement malade ? L’aurait-elle caché ?
– Heureusement que je savais déjà où se trouvaient les toilettes, vu que je suis déjà venue ici…” pense-t-elle.
Elle sait très bien qu’elle a le droit de les utiliser, vu que plusieurs d’entre elles sont construites dans la villa justement pour les invités. Il y en a d’autres à l’étage, mais Deshya ne voulait pas perdre la moindre seconde : se faire vomir dessus aurait été la pire chose possible.
Korone arrête enfin de vomir et s’assied par terre en respirant calmement, mais d’un rythme non régulier. Heureusement pour elle, elle ne s’est pas fait pipi dessus : elle a cru que cela allait arriver. La peur qui l’avait traversé… Elle ne pense pas avoir déjà ressenti quelque chose de pareil dans le passé. Korone regarde ses mains fébriles et se mord la lèvre inférieure.
– Qu’est-ce… C’était quoi… Qui…
Elle n’arrive pas à bien ranger ses pensées. Elle est confuse et son cerveau lui fait mal, tout comme son ventre ou même ses poumons. Ce qu’elle venait de ressentir…
– C’était comme si on m’écrasait la poitrine et dans tous les sens…” pense-t-elle.
Korone ne sait pas ce qui a provoqué un tel ressenti, mais une théorie tourne dans sa tête. Cependant, cela signifie donc que le danger est justement avec eux dans cette fête. Même si elle avait raison, cela ne change en rien qu’elle n’a aucune idée de ce qu’il se passe. C’est un simple ressentiment :
– Est-ce que… quelqu’un que je connais et qui sait qui je suis se trouve ici, avec nous tous… ?
Korone a peur que cela soit la vérité. Elle ne veut pas que cela soit la réalité. Elle préfère que ça soit simplement de la paranoïa. Parce que si cela s’avère vrai… alors quelqu’un dans cette fête sait qui elle est réellement. Alors peut-être qu’un allié du sniper est justement sur ses pas. Si cela est vrai, alors… Alors Korone n’imagine pas ce qu’il va se passer.
Pour elle.
Ou pour Deshya et sa famille.
C’est une pensée horrible qui la fait frissonner à nouveau. Elle se tient les épaules et grince des dents. Cependant—
– Tout va bien, Korone ?
Deshya tapote à la porte et lui pose cette question. Korone cligne des yeux et déglutit bruyamment. Elle se relève et boit un coup d’eau dans l’évier pour retirer le goût immonde du vomi. Elle répond ensuite avec honnêteté :
– Je tremble encore un peu… mais ça va mieux.
– Tu es certaine ?” insiste Deshya.
– Oui…
– Je te laisse ici ou tu veux retourner à la fête ?
– J’ai faim… Je vais vraiment mieux.
– Alors, allons manger, héhé.
Deshya se relève à son tour et Korone sourit. Au même moment, quelqu’un attend devant la porte, bras croisés, un pied sur le mur. Cette personne plisse les yeux, mais au même moment—
– Voulez-vous utiliser les toilettes ?
Une femme dans sa trentaine arrive dans le couloir, ce qui surprend la personne en face des toilettes. Elle se retourne et s’incline poliment.
– Il semblerait que quelqu’un y soit déjà. J’irai plus tard.
La personne s’en va rapidement, laissant la femme dans le couloir. Deshya sort des toilettes avec Korone dans ses bras et regarde la femme.
– Vous pouvez les utiliser,” lui dit la fille.
– Merci,” lui répond amicalement la femme.
Korone tient Deshya dans ses bras, un peu plus calme, mais elle ressent encore cette présence qui lui donne du mal à respirer. Si cela est bel et bien une personne, alors Korone doit se faire toute petite et se cacher d’elle.
– Mais si elle sait déjà qui je suis, alors ça ne sert à rien… Je dois… Je dois juste me sentir mal et c’est tout… Il y a tellement de gens aux alentours que ça doit être ça… Je suppose.
Korone préfère penser de la sorte que laisser sa soirée se faire gâcher par ce qu’elle est en train de ressentir. Bien qu’elle n’en soit pas réellement convaincue, rien ne sert de se cacher dans les bras de Deshya alors que la fête vient à peine de commencer : elle veut profiter de la bonne nourriture du buffet, parler avec Deshya et les autres ainsi que danser s’il lui est possible. Elle ne veut pas gâcher ce plaisir ! Elle est vêtue d’une magnifique robe, est toute belle, propre et avait hâte de cette fête depuis le début de la matinée ! Korone serre un poing et acquiesce intérieurement : elle va profiter ! Deshya arrive dans la salle principale, Korone toujours dans ses bras, et se dirige vers le buffet. Avant d’y arriver, Annie s’approche d’elles.
– Je vous ai vu partir rapidement de la salle. Tout va bien ?” demande-t-elle.
– Je vais mieux !” avoue Korone avec un sourire un peu plus léger que d’habitude.
– Elle s’est sentie mal d’un coup, mais après avoir lâché un peu ce qu’elle avait dans le ventre, on dirait qu’elle a repris des couleurs,” répond Deshya.
– Tant mieux, alors. Je me suis inquiétée pour rien, alors.
– Exactement ! Merci quand même !
Korone remercie Annie avec un plus grand sourire et est emmenée au buffet. Là-bas, elle décide de ses plats avec Deshya, sans se tracasser de la pression qui continue d’être exercée sur elle.
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Les minutes passent et les deux filles mangent plusieurs plats du buffet ensemble. Mariah et Dash se sont ramenés et discutent avec elles, mais c’est la femme aux cheveux noirs et roses qui prend une bonne partie de la conversation, parlant de ses enquêtes depuis son arrivée à la police. À la grande surprise de Deshya, Mariah n’a à peine que 24 ans, tandis que Dash n’en a que 28, le même âge que Hanoka. Deshya parle aussi de ses exploits depuis le début de l’année scolaire et c’est environ au même moment que Gatito et Pera arrivent pour parler avec eux tous. Annie est de l’autre côté de la salle, tout près de la scène, en train de discuter avec d’anciens amis de collège. L’ambiance de la pièce est bonne et la bonne humeur se ressent. Korone n’a plus cette impression d’être observée, ce qui la rassure grandement. La fête bat son plein, la musique est bonne et le buffet est dévoré petit à petit. Alors que Dash parle un peu de lui, le bruit du microphone grésille dans les baffles. Deshya, Korone et les autres se retournent vers la scène, là où des tentures se lèvent juste derrière l’organisateur de la fête, Colin Furas. Le microphone dans la main, il le place devant sa bouche et commence à parler.
– Je tiens déjà à remercier tous mes amis ici présents d’être venus à notre fête. C’est un réel honneur de pouvoir tous vous voir ici.
Les invités applaudissent et Colin pouffe.
– Comme la majorité d’entre vous le savent, nous aimons montrer un film rapide de notre année, entre ma femme et moi-même. Nous avons rassemblé beaucoup de photos et de vidéos qui montrent un résumé de notre 22ème année de mariage.
– Déjà 22 ans !” se dit Gatito.
– Le temps passe vite,” sourit Pera.
Korone avale le morceau de chocolat qu’elle a dans la bouche et admire la scène où se trouve Colin. Sa femme le rejoint en venant par la droite.
– Le petit film dure à peine 15 minutes, mais nous avons ajouté 5 autres minutes qui sont des photos et courtes vidéos du temps passé avec nos nombreux amis. Bien que vous ne soyez pas tous sur le film, cela ne signifie pas que le temps passé avec vous ne nous est pas précieux !
Les applaudissements reprennent et certains se mettent à siffler, ce qui force Deshya à fermer un œil à cause de la douleur : ses oreilles de renard sont plus fragiles que des oreilles d’humains, après tout. Gatito se tourne vers Mariah et Dash.
– Depuis quand connaissez-vous Colin et Mona, tiens ?” demande-t-il.
– Quelqu’un a voulu cambrioler sa maison le mois dernier, donc j’ai attrapé le coupable,” répond Mariah.
– Je l’avais accompagné parce que c’était ma journée de repos,” lui explique Dash.
– Je vois.
Gatito ne se souvient pas d’avoir entendu cette histoire, mais vu que Colin a parlé de ‘lui devoir un gage’, il suppose que c’est la vérité.
– Pourtant, le domaine de Mariah touche plutôt le terrorisme, les poseurs de bombe ou la protection d’une potentielle victime, et non le cambriolage…
Gatito hausse les épaules et écoute la suite des paroles de Colin.
– Pour ce film, comme chaque année, je vous demanderai de rester dans l’obscurité totale et de ne pas allumer vos téléphones. Lorsque le petit film sera terminé, les lumières reviendront à elles !
Certains rigolent et Mona prend le microphone.
– Pouvez-vous fermer les tentures et vous assurer qu’elles ne bougent pas ? La lumière de la lune ne doit pas entrer !” demande-t-elle.
Certains se dirigent vers les fenêtres et s’exécutent. Mona les remercie et Korone tourne le visage vers Deshya.
– On va les voir se faire des bisous, dans le film ?” demande-t-elle innocemment.
Mariah pouffe à sa question.
– Tu aimerais bien ou tu ne voudrais pas ?
– Je sais pas… C’est mignon, les bisous.
Dash acquiesce avec le sourire.
– Cette petite ira loin dans la vie, c’est certain.
Korone lâche un mignon ‘Hihi !’. Les tentures sont désormais toutes fermées et Deshya se retourne.
– …
Elle ne sait pas pourquoi, mais elle ressent quelque chose de désagréable. Comme si quelque chose allait mal se passer… Cependant, elle peut le comprendre : elle ne vit que des enquêtes depuis quelques jours. Elle rentre chez elle : explosion et meurtre. Elle va chez Amora à bord d’un train : deux meurtres et bombes dans le train. Elle retourne chez elle en bus : double meurtre, ensuite le coupable meurt d’une balle dans la tête, Korone est presque tuée de la même façon. Elle termine l’école : on lui demande de trouver la personne qui a enlevé un bébé. Elle veut rencontrer un nouvel ami : meurtre et son propre enlèvement, avec sa propre mort. Elle va à l’hôtel : meurtre. Désormais, doit-elle ajouter le ‘Deshya va à une fête : meurtre’ ? Elle prie pour que cela ne soit pas le cas, mais une simple mortelle peut-elle changer le futur qu’a choisi les Dieux ? Elle se doute de la réponse.
– Nous allons donc projeter le film sur ce mur ! La lumière est très faible, donc essayez de ne pas bouger de votre place : vous allez probablement vous heurter sur les autres. Si vous avez une urgence de vessie, n’hésitez pas à aller aux toilettes maintenant !” leur explique Colin.
Cependant, personne ne bouge. Voyant que tout le monde reste à sa place, Colin acquiesce et les lumières s’éteignent tous, un ami de la famille ayant appuyé sur les interrupteurs nécessaires. Deshya est étonnée de voir à quel point la pièce est sombre. Contrairement aux vrais renards, Deshya ne possède pas le ‘tapetum lucidum’, ce qui lui permettrait de bien voir dans l’obscurité, tout comme les chats. Cependant, ses yeux restent les mêmes que ceux des humains. Elle en est presque déçue, mais si ses yeux venaient à changer tels ceux des renards, elle ne pense pas qu’elle pourrait les cacher, excepté derrière des lentilles qui la dérangerait. Elle en est donc partiellement heureuse. Korone attrape le bras gauche de Deshya et le tient fermement. Bien qu’elle ne ressent plus un regard posé sur elle, dans cette obscurité, elle ne veut pas lâcher prise. À tout moment, une personne peut venir par derrière et l’enlever. Si cela venait à arriver… Elle préfère ne pas y penser.
– Voici le film !
Colin se pousse de la scène et le mur s’illumine faiblement. Dessus, les invités peuvent observer des images qui défilent lentement, montrant des moments amusants tout comme émouvants entre Colin et sa femme. Le calme règne dans la pièce et tout le monde admire le film avec silence. Korone l’observe sans lâcher Deshya, appréciant chaque photo et vidéo. La fille rousse peut apprécier le film sans avoir peur de quoi que ce soit.
Ses oreilles de renard battent de l’aile.
Un bruit de vitre brisé retentit.
Au même moment, un homme hurle de douleur. Deshya se retourne d’un coup, mais dans cette obscurité, rien ne peut être observé. Une seconde ne passe même pas quand—
Le bruit d’une vitre qui se brise retentit à nouveau.
Les tentures bougent dans tous les sens et un rayon de lune entre dans la pièce. Pendant un court instant, il permet à Deshya d’apercevoir l’état de la vitre au fond de la pièce : détruite en son milieu, des morceaux tombant vers le sol.
Ainsi que des personnes qui reculent.
– Allumez la lumière !!” crie Mariah.
Celle-ci saute au-dessus de la table derrière elle et l’homme qui avait éteint les lumières s’exécute. L’obscurité de la salle disparaît d’un instant et Deshya court à son tour, forçant Korone à la lâcher, et se dirige vers le fond de la salle. Elle pousse les invités et s’excuse avant d’arriver au fond de la salle, là où la fenêtre à été brisée. Mariah s’arrête et grince des dents, Deshya juste à ses côtés. La fille à la queue de renard serre les poings et tremblote de la mâchoire.
– C’est pas vrai…” murmure-t-elle.
En face d’elles se trouve un homme couché par terre, sur le ventre. Du sang coule sous lui…
Son propre sang. Il vient tout juste d’être tué dans l’obscurité de la fête. Dans une pièce où plus de 200 personnes se trouvent.