Le mercredi 05 Octobre, le jour suivant la défaite de ‘JUGE’, Raiji vient trouver Deshya pour avoir son aide. Ce n’est pas sur une affaire de meurtre, mais d’un ‘mystère’ : un code étrange qu’on lui a offert, écrit sur une lettre qui se trouvait dans une enveloppe, elle-même dans son casier. Grâce à Deshya, ils ont découvert le premier lieu où ils ont dû aller : ‘Jeu d’Arcade’, une salle d’arcade pas trop loin de l’école. Ensuite, ils ont dû retourner à l’école secondaire de Tetazo, trouvé le code dans le trou du grand chêne de la cour de récréation pour finalement aller à la taverne Doubs. Désormais, une quatrième lettre leur fait face.
– L’un des deux de Tetazo ? Donc il n’y en a que deux…” remarque Dorothé.
– Merci, génie, hihi,” l’embête Léa en pouffant.
– Ah, ah, ah.
Toutefois, cela semble vexer Dorothé qui ne rigole pas vraiment à sa taquinerie. Léa s’excuse, mais Dorothé lui promet que ce n’est rien. Les trois filles sourient, mais Raiji, lui, il soupire. Toutes se tournent vers lui.
– J’ai déjà trouvé,” avoue-t-il. Ce code-là était déjà plus simple.
– Déjà ?” lâche Deshya avec surprise. J’ai eu à peine le temps d’y réfléchir…
– C’est trop simple.
Il hausse les épaules, mais il finit par sourire à son tour en fixant la lettre qu’il tient en main.
– Je ne sais pas qui a fait ces codes, mais j’apprécie vraiment. C’est amusant à résoudre.
C’est une pensée qu’il parle du cœur. Il passe la lettre à Deshya et lui avoue qu’elle trouvera rapidement, mais il est fier d’être celui qui a découvert sa signification en premier. Quoi que Deshya dise, Raiji la voit comme quelqu’un de ‘supérieur’, en termes d’intelligence — ce qu’elle est sans aucun doute —, alors pouvoir la surpasser, même si ce n’est que durant un jeu amusant de résolutions de codes, le rend heureux. Deshya accepte ce semblant de défi et admire donc la lettre, accompagnée des deux filles à ses côtés. Le temps passe lentement, mais rapidement, voilà que Deshya trouve la vérité aussi. Elle rend la lettre à Raiji en approuvant : cela n’est pas si complexe, mais elle reste impressionnée qu’il ait résolu ce code en si peu de temps. Il passe un doigt sous le temps, une expression fière sur le visage, et ils se mettent en route. Sous la demande de Léa, il leur explique rapidement ce que veut dire ce code.
– Il serait presque impossible de le comprendre sans bien connaître Tetazo, mais ça parle d’Amélie. Enfin, le Parc Amélie.
– Ooooh, je comprends !” acquiesce Léa.
– Il n’y a que deux parcs à Tetazo, donc l’un des deux…” réfléchit tout haut Dorothé. Hmmm… Oh, le rectangle dont parle le code est sûrement le terrain de football à côté du parc, alors ?
Raiji acquiesce en agitant l’index en l’air.
– Le nom de la serveuse dans Amélie Poulain… est justement Amélie Poulain ! Donc ça parle d’Amélie, ça me paraît logique, hm, hm.
– Oui, je comprends !
Ils s’y dirigent donc tous ensemble, hâte de savoir quel prochain code ils vont y trouver, vu que la lettre dit que ce n’est que la moitié. Raiji est celui qui est le plus excité, se demandant qui peut être le créateur ou la créatrice de ces codes ‘étranges’.
CHAPITRE 66
⎾Messages Codés Pour Raiji Harmony ;
Partie 3⏌
Le parc Amélie est celui qui est le plus visité des deux, mais même en ce mercredi après-midi, peu d’habitants de Tetazo ou de vacanciers arpentent la verdure du lieu. Des bancs vides attendent les moindre derrières pour s’asseoir sur eux, le moindre humain pour s’y coucher et profiter du soleil d’octobre, mais dans une triste mélodie d’oiseaux et de voitures de la rue d’à côté, le parc ne reçoit aucun visiteur. Cela est une vue plutôt rare, mais vu que l’air se rafraîchit et qu’il est déjà 14h30, une heure pourtant plus que correcte pour un mercredi, cela fait que seule une poignée d’Hommes errent et profitent du parc. Dorothé se gratte les cheveux, étant revenu de son appel téléphonique, mais ce n’est pas par confusion par cette vue rare, mais plutôt parce que lorsqu’elle y pense—
– Elle est où, la prochaine lettre ?
Le parc Amélie fait environ 6,5 hectares de superficie, a une partie dédiée à des jeux plus enfantins — balançoires, bac à sable, toboggans —, une partie bien plus nature et, devant eux, un endroit avec plusieurs bancs à des intervalles réguliers, un magasin de sandwichs pas loin pour ceux qui veulent profiter du parc tout en mangeant une bonne baguette. Il n’y a personne en particulier, mais Raiji propose qu’ils aillent voir le vendeur qui est à la caisse, en train d’écouter de la musique dans ses écouteurs blancs qui ont dû lui coûter moins qu’un paquet de bonbons. Néanmoins, il s’excuse en avouant n’avoir reçu aucune lettre du genre, ayant aucune idée de quoi ils parlent. Il n’aurait aucune raison de mentir, donc les quatre adolescents comprennent que la lettre est cachée ailleurs.
– On ne va pas devoir fouiller l’entièreté du parc, j’espère… ?” se plaint déjà Dorothé.
– Il n’y a pas d’intérêt !” crie Léa. C’est trop grand !
– Plus qu’à chercher un peu sur le devant… On est à l’entrée du parc, donc ça doit être ici ou à la sortie, je suppose,” propose Raiji.
Tout le monde acquiesce et se tourne donc à leurs recherches. Chacun va dans son coin, observe les coins où une enveloppe pourrait être cachée, mais durant les premières minutes, rien n’est trouvé. Dorothé, qui est du côté des bancs, finit par lâcher un cri de surprise, agite la main sous un des bancs et se relève avec le sourire;
– Je crois que je l’ai trouvée !
Les enveloppes n’ont rien de particulières : couleur blanche, sans timbre, sans mot écrit dessus, simplement une lettre en leur sein. Il est donc impossible de savoir, avec un simple coup d’œil, si cette lettre est dédiée à Raiji ou simplement l’une qui a été bloquée là-bas. Il est possible qu’en l’ouvrant, ils trouvent autre chose ou rien du tout, alors l’anticipation qu’ils ressentent tous les quatre est compréhensible. Doucement, l’enveloppe est ouverte. Comme toujours, une lettre est trouvée, mais il faut désormais savoir si c’est l’une qui est dédiée à Raiji ou l’une qui serait pour quelqu’un d’autre. Il la déplie et observe son contenu :
« Tu as trouvé la lettre, en plus, cela sans indice d’où elle se trouve ! Alors, voici le cinquième code, en espérant que tu puisses le résoudre !
– Dia blo tin.
Cela peut être très complexe, mais je crois en toi ! Si cela est trop compliqué, un indice se trouve derrière cette lettre.
Bonne chance encore une fois,
Anonyme. »
Et comme prévu, c’est un prochain code pour Raiji Harmony ; le cinquième d’entre eux. En lisant le début, ils comprennent que le fait que l’emplacement de la lettre ne soit pas écrit sur l’ancienne n’est pas une erreur, mais bel et bien un choix pour rendre le jeu plus amusant et difficile. Toutefois, Raiji lâche un demi-sourire.
– C’est Dorothé qui l’a trouvé, mais bon…” lâche-t-il tout haut.
L’adolescente prend une pose et un air fiers, les poings sur les hanches. Léa l’applaudit en pouffant, tandis que les deux autres sont concentrés sur le code.
– Il y a donc un indice derrière…” remarque Raiji.
Néanmoins, ce n’est pas dans son intérêt de tourner cette lettre et de regarder ce fameux indice. Léa se penche sur la lettre à son tour, réfléchit quelques instants, mais elle se gratte les cheveux.
– C’est juste le mot ‘Diablotin’ séparé en trois…” dit-elle. C’est un code étrange.
Raiji approuve d’un acquiescement, mais il aime beaucoup : les codes sont tous différents, pas trop longs et réalisables. Quiconque a écrit tout cela doit soit être intelligent, soit s’être informé sur plusieurs sujets pour trouver quoi écrire, soit les deux — probablement le dernier, si Raiji doit deviner. Pour réfléchir à ce code, ils s’assoient tous les quatre sur un banc, ne pouvant pas contenir plus de gens sur lui à cause du manque de place, et ils réfléchissent ensemble. Dorothé finit par abandonner en premier, suivie par Léa qui préfère laisser Raiji trouver tout seul, mais Deshya continue quand même d’y réfléchir. Après quelques minutes, ils ne découvrent pas vraiment ce que cela voudrait signifier.
– Est-ce qu’on regarde l’indice derrière ?” propose Raiji.
Néanmoins, Deshya secoue fortement la tête.
– Sûrement pas !” s’exclame-t-elle. Si j’accepte un indice alors que ce n’est qu’un code créé par amusement, je ne pourrai jamais résoudre la moindre enquête contre XIII ! Je ne peux pas accepter d’être aidée, car durant un meurtre, il n’y aura que l’opposé de l’aide…
Les trois adolescents à côté d’elle ne montrent que de la surprise face au rugissement de cette réponse, tous muets à cause de l’exclamation de Deshya. Cette fille, justement, plisse les yeux en réfléchissant encore plus ardemment, souhaitant comprendre la réalité de ce code si court, mais si étrange… Raiji soupire, mais cela avec le sourire.
– Ces codes sont pour moi, tu sais…” lâche-t-il.
Toutefois, Deshya ne l’entend pas et cela amuse plus Raiji qu’autre chose : elle est totalement prise dans le jeu. Il n’en est pas réellement dérangé ou embêté et de toute façon, il considère qu’elle a raison : les enquêtes n’offriront pas d’indices, mais cela est aussi vrai pour la vie en général. Raiji ne compte pas devenir un détective policier — ou détective tout court —, donc cela le touche moins, surtout qu’il n’y a aucune chance qu’il ne tombe contre XIII, donc sa détermination est loin d’être aussi brûlante que celle de Deshya. Néanmoins, il est quelqu’un qui aime quand même l’intelligence et être, justement, intelligent, donc s’il vient à se laisser tenter par un indice aussi facilement et aussi rapidement, il le regrettera. Ce n’est qu’un jeu créé pour lui, une raison encore inconnue qui a poussé cet anonyme à les lui offrir, donc il ne se sentira pas mal d’admirer l’arrière de la lettre s’il se sent bloqué, vu qu’il veut savoir la fin de ces codes, mais il doit se résigner à l’idée de cette tentation. Peut-être ne devrait-il pas prendre cela aussi sérieusement, mais par respect pour quiconque a pensé à ces codes, les a gravé d’une si belle écriture sur ce papier si blanc, a plié les lettres d’une manière si précise, les a placées dans des enveloppes pures et finalement, est allée dans tous les recoins de Tetazo pour les cacher et offrir à des personnes pour que Raiji puisse avoir une sorte de jeu de piste, alors il doit résoudre ce code lui-même, sans aide, et remercier ensuite, en personne, quiconque cet anonyme se trouve être. Qu’il soit un de ses amis proches ou un inconnu, il veut le remercier avec le plus beau de ses sourires. Raiji prend donc une expression si flamboyante que Deshya, cherchant les possibilités de ce code et l’endroit que cela pourrait indiquer. Léa et Dorothé, pourtant assises des deux bords du banc, se regardent avec une touche de confusion, mais cette dernière se transforme rapidement en amusement et deux jolis sourires se présentent sur le parc. Raiji, ne trouvant pas de piste correcte, décide de se tourne vers Dorothé.
– Tiens, c’était qui, au téléphone ?” demande-t-il, voulant penser à autre chose pour l’instant.
Surprise de la question, Dorothé reste d’abord muette sur le banc, mais finit par lâcher un faible sourire en penchant la tête.
– Ah, c’était que ma mère,” avoue-t-elle honnêtement. Elle voulait juste voir pourquoi j’étais pas rentrée. On dirait qu’elle a pas lu le message que je lui ai laissé sur le chemin, ah… Elle m’fait souvent le coup.
– Elle ne lit pas tes messages ?” demande-t-il.
– Elle juste oublie, est trop occupée et donc oublie ou juste… Elle juste oublie, en fait.
Dorothé hausse les épaules en levant les mains.
– Bah, c’est sa personnalité, j’lui en veux pas trop. D’toute façon, vu son travail…
Dorothé baisse doucement la tête, mais Deshya, qui était si concentrée dans le code, regarde rapidement Dorothé. Cette dernière plisse les yeux, des sentiments mélangés dans ceux-ci.
– …
Cependant, Dorothé ne termine pas sa phrase et soupire.
– Disons juste que son travail l’empêche d’être souvent là.
– Ah, désolé…
– T’excuses pas, idiot !
Dorothé le frappe amicalement dans le dos, bien qu’un peu trop fort, tout en rigolant. Raiji ferme un œil à cause de la douleur et il pouffe, Léa les observant d’une expression particulière, pourtant assez neutre. Deshya ne s’intéresse pas plus que cela à leur conversation et donc continue sur le code, voulant s’occuper de cela avant tout. Elle est triste d’entendre que sa mère n’est pas trop là pour elle, mais au moins, elle semble se demander pourquoi sa fille n’est pas encore à la maison. Lorsque Deshya retourne son attention sur la lettre, Dorothé la regarde en plissant les yeux, mais la rousse ne le remarque pas. Léa interpelle ensuite Dorothé, donc cette dernière reprend un air assez normal sur le visage.
– Oui ?
– Tu n’as vraiment aucune idée pour le code ?” demande la fille mignonne.
– Aucune… C’est juste un mot séparé en trois.
– Ouais… Diablotin, ça peut vouloir dire beaucoup de trucs…
– … Trois…
Deshya réfléchit, mais finalement, elle ouvre grand les yeux. Le lien établi, elle sourit et se lève en rendant la lettre à Raiji, un sourire fier sur le visage.
– J’ai trouvé !” avoue-t-elle.
– Ah ?! J’ai encore rien compris…” soupire le garçon.
– C’est plutôt simple. Cela se base que sur une seule chose. On y va ?
– J’ai pas trouvé, encore une fois…
Léa essaie de le rassurer avec pitié, mais Dorothé rigole tout en lui promettant que ce n’est pas grave. Deshya se sent un peu mal de tout trouver avant lui, vu que c’est vrai que les codes lui sont dédicacés : elle devait simplement l’aider pour le premier, mais la voilà qui prend le rôle de détective principal dans cette série de codes… Elle ne devrait sûrement rien dire pour les prochains, jusqu’à la fin. Ils se mettent tous en route, Deshya leur expliquant brièvement la résolution de ce code.
– Il faut prendre le mot ‘Diablotin’ et le traduire en anglais. Rien de plus.
– A-Attends, c’est juste ça… ?” demande Dorothé.
Deshya acquiesce.
– C’est trop simple pour y penser.
– Mais pourquoi c’est séparé en trois ?
– Diablotin en anglais…
Raiji crie, ce qui fait sursauter Léa et effraie Dorothé, et il se met à agiter ses cheveux violemment en grinçant des dents.
– Raaah, c’est juste ça ?! J’ai cherché trop loin !!
– J’suis pas intelligente comme vous, mais je crois qu’il a compris…” plaisante Dorothé.
– Tu crois ?” pouffe Léa, une main sur le cœur.
Elle se tourne ensuite vers Raiji en lui demandant ce que veut donc dire le code. Le garçon soupire en secouant sa tête, une main devant le front.
– ‘Diablotin’ en anglais est ‘Imp’. Trois lettres, mot séparé en trois… I M P. Tu dois juste prendre ces lettres comme un acronyme.
– IMP… « Institut Marc Déporet » ? L’hôpital de Tetazo ?
Deshya acquiesce et Léa se gratte la joue, rougissant.
– Quiconque a fait ce code a manqué d’imagination…
– …
Dorothé reste muette, mais finit par souffler du nez, amusée. Néanmoins, le reste du chemin, elle ne parle quand même pas.
Arrivés là-bas, le grand hôpital qui a été créé par ‘Marc Déporet’ — comme le nom le dit — leur montre de sa grandeur avec fierté. Un bâtiment blanc, immense, aux centaines de fenêtres et un jardin qui pourrait permettre la construction de deux grandes maisons, c’est un hôpital réputé pour avoir des médecins de qualité, mais n’est pas non plus aussi reconnu que la police de la ville. Le parking devant l’hôpital est tout aussi impressionnant, avec des dizaines et dizaines de voitures colorées dans tous les sens. Deshya n’est venue ici qu’une seule fois : pour voir le fameux médecin qui s’est suicidé le jour d’après, lorsqu’elle a été transformée en fille renarde.
– …
Depuis, jamais n’a-t-elle eu besoin d’aller à un hôpital ou chez le moindre médecin. Oui, elle a dû voir le dentiste, mais elle a réussi, grâce à l’aide de ses parents, à garder sa capuche de renard.
– Le jour où je reviens ici…
Alors il n’y a aucune chance qu’elle puisse cacher la vérité. Et si elle a besoin de soins vitaux ? Est-ce que les médecins ne vont pas être choqués au point où soigner, guérir ou sauver Deshya va devenir presque impossible ? De ce qu’elle sait, ses organes et l’intérieur de son corps n’ont pas changé. Bien évidemment, sa queue et ses oreilles sont surtout celles qui sont… très étonnants. Pour sa queue de renard, des os et muscles sont reliés à son corps pour le fonctionnement de sa queue. Au départ, Deshya ne savait justement pas bien l’utiliser, mais maintenant, elle peut même l’utiliser pour s’y blottir et dormir confortablement dans le froid. Elle n’en a pas forcément besoin, vu qu’elle a un lit chaud avec des couvertures et un coussin qui renvoie sa chaleur lorsqu’elle l’enlace, mais c’est une chose qu’elle doit garder en tête. Pour ses oreilles, elles sont reliées à son ouïe — ce qui est logique — et donc un système ‘différent’ pour entendre que celles des oreilles humaines. Le médecin qui a pris soin d’elle, appelé ‘Rudy Sarun’, n’a pas eu le temps de bien analyser la composition de son crâne pour voir comment cela avait été produit, car c’est littéralement une prouesse scientifique. Deshya n’y a pensé que cette année, mais quand elle y pense, pouvoir comprendre comment elle a réussi à devenir une fille aux attributs de renard pourrait aider la science en elle-même. Au-delà des simples gens qui souhaitent avoir des copains ou copines aux attributs d’animaux, s’ils savent comment rattacher des oreilles de renard sur quelqu’un, ils pourraient peut-être utiliser ce procédé pour ceux qui n’ont plus l’usage de leurs oreilles normales. Bien évidemment, Deshya ne compte pas livrer son corps à la science pour une telle chose, mais elle ne peut pas nier qu’elle y a pensé.
– Où trouver la lettre, cette fois-ci ?” demande Léa.
– Nous allons pas devoir chercher dans tout le bâtiment et dehors, j’espère…” se plaint déjà Raiji.
Tout le monde espère cela, mais à peine s’avancent-ils en se demandant s’ils doivent aller demander à la réception, un homme âgé se met à agiter son bras en leur direction, les saluant depuis son banc. Les adolescents se regardent, mais pour finir, ils y vont ensemble. Arrivés devant ce chauve homme, ils se demandent si c’est lui qui aurait leur prochaine lettre, vu que personne ici ne semble le connaître.
– Dis, le jeune…
Il pointe du doigt le seul garçon du groupe et Raiji lui demande ce qu’il y a.
– Tu es… Raiji… Harmonie, c’est ça ?
– Harmony, pas harmonie. C’est prononcé un peu différemment. Mais oui, c’est moi.
– Je me disais bien. Je suppose que tu es ici… pour ceci…
Comme Deshya s’y attendait — et elle n’est pas la seule, en réalité —, l’homme sort une enveloppe et la tend aux jeunes qui le remercient en chœur. L’homme pouffe, tenant sa canne de ses deux mains, et la tapote doucement contre le sol.
– Sache que tu es un bien chanceux jeune homme, Raiji.
– Ah bon ? Pourquoi ?
– Ahah, continue les codes. Je suis certain que cela en vaudra la peine.
L’homme regarde devant lui avec le sourire. Raiji remarque que sur l’enveloppe, encore une fois, une photo de lui y a été attachée. Cette fois-ci, c’est l’une prise durant un ‘voyage’ entre amis que Maruno a pris l’année dernière. On a zoomé sur son visage et c’est tout ce qu’il reste de cette photo. Raiji sourit en la regardant, trouvant cela mignon d’accrocher une photo de lui pour que ceux à qui il ou elle a donné les enveloppes puissent reconnaître Raiji. Ce qui est tout autant mignon, c’est que les personnes semblent l’attendre et sont heureuses pour lui. Qui pourrait donc être la personne qui a pensé ces lettres… ? Il se pose la question sans arrêt, mais l’idée même de le savoir à la fin lui donne le cœur qui bat. Peut-être n’aura-t-il pas l’identité de la personne, mais il espère qu’il le pourra… Justement, Raiji demande à la personne âgée s’il peut le lui révéler, mais—
– … zzz… zzz…
– I-Il s’est déjà endormi ?!
– Je suppose que le cliché des vieux qui s’endorment vite n’est pas qu’un cliché…” sourit Dorothé.
– Laissons-le dodo et allons voir la lettre, hihi !” propose Léa.
Ils acquiescent et s’écartent du coup du vieil homme. Ce dernier ouvre un œil et sourit doucement, les observant s’éloigner. Le dos courbé et tenu grâce à sa canne, il pouffe en regardant Raiji, pensant à nouveau qu’il est réellement chanceux.
– Ouvrons cette enveloppe !” lâche Deshya. Je veux voir le code !
– T’es réellement dans le jeu, ahah,” se marre Raiji.
– P-Pardon, je sais que ce sont des codes pour toi…
– Bah, c’est juste pour s’amuser, c’est pas un problème, pas vrai ?
Elle ne sait pas si elle doit approuver, mais elle finit par acquiescer pour avoir une excuse pour continuer à résoudre les codes à ses côtés. Raiji ne peut pas s’empêcher de se dire que même si elle a un pull et une queue de renard, on dirait plutôt une chienne avec ses gros yeux, pour l’instant. Raiji, en ouvrant l’enveloppe, plisse les yeux.
– Quand j’y pense, utiliser un nom d’animal au féminin paraît toujours être négatif… Chatte, chienne, cochonne,… Bon, je suppose que cochon aussi, mais bon…
Au moins, appeler Deshya ‘renarde’ n’est pas péjoratif. Justement, de ce que Raiji sait avec les discussions qu’il a eu avec elle, Deshya aime bien ce surnom. Dans tous les cas, il se concentre sur la lettre :
« Je me demande si tu as utilisé l’indice. Je parie que tu as décidé de ne pas l’utiliser, mais même si tu l’as fait, je suis fier que tu as trouvé ! Voici le sixième code,
l’avant dernier.
– Eschrichtiidae, Monodontidae, Ziphiidae ou Pontopriidae.
Cela peut être très, très simple avec une recherche sur internet. Je compte sur toi pour ne pas tricher.
Toutefois, si tu ne sais réellement pas, alors je comprends. Cela n’est pas complexe, il faut juste le savoir.
La lettre est derrière une poubelle. »
– Derrière une poubelle…” lit tout haut Raiji.
– On dirait bien,” pouffe Deshya.
Ils regardent à nouveau le code avant de sourire, tournant la tête l’un vers l’autre.
– Je sais où ça se trouve !
Et ils le disent en même temps. La même phrase, la même intonation. Ils se mettent à rire et Léa gonfle un joue, remarquée par Dorothé qui lâche un sourire en coin. Léa finit par ouvrir la bouche, levant la main.
– Je sais aussi !
– Aaah ? Je suis la seule à pas savoir ? Rayayaya…
Dorothé se tient le front et soupire en secouant la tête, triste d’elle-même. Toutefois, Léa lui dit que ce n’est pas quelque chose de connu et que c’est un domaine bien particulier et précis, donc elle ne doit pas se sentir mal pour cela. Dorothé avoue qu’elle est quand même un peu déçue d’être en-dessous d’eux trois, mais vu qu’elle sait que l’intelligence n’est pas son fort, elle reprend rapidement son sourire et leur demande ce que cela veut donc dire. Comme à chaque fois, c’est sur la route qu’on lui explique la vérité. Néanmoins, c’est Léa qui est celle qui parle, prenant un grand sourire sur son visage.
– Eschrichtiidae est pour est le nom de l’espèce de baleines grises, Monodontidae pour le narval, Ziphiidae pour les baleines à bec et finalement, Pontopriidae pour le dauphin de la Plata !
– C-Comment tu sais ça… ?” demande Dorothé.
– Je savais uniquement pour la baleine grise…” ne cache pas Deshya.
– Et moi je reconnaissais juste les noms, mais je ne savais pas plus que ça !
Tous sont étonnés, choqués même, de la connaissance incroyable de Léa sur ce sujet. Bien évidemment, il est possible qu’elle mente, mais vu qu’elle n’a aucune raison et que Deshya est certaine qu’elle ne se trompe pas pour la baleine grise, cela est peu probable. Léa rougit, tirant doucement le haut de sa capuche grenouille vers son visage, se cachant ainsi les yeux.
– H-Héhé, j’aime juste beaucoup les cétacés et ce qui touche les océans…
– Donc il faut aller au Musée des Cétacés, je suppose ?” demande Dorothé.
Raiji et Deshya acquiescent. C’est déjà plus loin de l’hôpital, proche de la frontière avec Lomsée, la ville sudique de Tetazo. C’est un musée qui existe depuis quelques années maintenant, mais vu qu’il n’est pas visité aussi souvent que prévu, ils vont peut-être changer de thème l’année prochaine. Cela n’est pas encore confirmé, mais ils en ont parlé aux informations il n’y a pas longtemps et ce n’est pas la première fois qu’ils y pensent. Deshya n’y est jamais allé, mais ce n’est pas parce que cela ne l’intéresse pas — elle trouve l’océan presque aussi intéressant que l’espace —, mais plutôt parce qu’elle n’a jamais pensé à y aller. Peut-être que cela serait une bonne idée de s’y diriger Ce qui intéresse Deshya le plus sur ce musée, toutefois, c’est une partie de son histoire : l’une des meilleures détectives du monde entier, Rose Juhei, a mené une enquête de meurtre il y a un certain temps, plus d’un an auparavant. Deshya a déjà lu à propos de cette enquête, même si ce n’est pas la meilleure de cette femme aux longs cheveux blancs. Savoir qu’elle va à un endroit où Rose a résolu une enquête l’excite ! Après, vu la note de fin de la lettre, ils vont devoir trouver la prochaine enveloppe, l’une des dernières, devant des poubelles, donc sûrement sur les côtés du musée — pas à l’intérieur, en gros. Deshya veut soupirer de déception, mais elle continue de marcher aux côtés de deux de ses amis et sa nouvelle connaissance, hâte de savoir comment cette histoire va se terminer.
Il est déjà 15h passé et le ventre de Dorothé commence à grogner à cause de la fin.
– J’espère que ça sera pas trop long, après tout ça,” avoue-t-elle.
– Tu veux qu’on aille prendre quelque chose à manger ?” propose Léa.
Dorothé secoue la tête, s’arrêtant devant le grand bâtiment qu’est le musée qu’ils recherchent.
– Nah, je m’amuse bien, mais je compte rentrer après ça. On doit arriver à la fin dans tous les cas, donc j’survivrai. Surtout que pour pas mentir, j’ai pas pris d’argent avec moi.
– Je ne dis pas non à te payer un petit donut !
– Léa, ma p’tite Léa. T’sais que t’es trop bonne ? Et des deux sens.
– A-Ah ?! Ne dis pas ça !!
– Tu le mérites, c’est un compliment ! C’était pas vulgaire !
– Mooow, même…
Léa se gratte la joue.
– C’est juste pour être gentille…
– J’apprécie l’geste, mais j’veux pas de ton argent. J’prendrai à bouffer chez moi.
– D’accourd…
Raiji écoute leur conversation avec amusement. Deshya revient rapidement avec l’enveloppe en main, l’agitant au-dessus de sa tête. Léa reprend rapidement un sourire sur son visage et tous se penchent sur l’enveloppe. Deshya la passe à Raiji qui l’ouvre sans plus attendre, attrape l’enveloppe et tous la lisent. Ils sont tous surpris de ce qu’il y est écrit, car il y a bien moins de mots que les dernières fois. On peut y lire :
« Ceci est le dernier code.
– Là où tu as prouvé ton courage. »
– Mon… courage ?
Raiji tourne le visage vers Deshya qui fixe la lettre de grands yeux avant d’imiter Raiji. Dorothé et Léa se grattent les cheveux.
– Dis… tu crois… ?
– … Je suppose, hein ?
– Vous parlez de quoi ?” demande Dorothé, ennuyée par ce code qui n’en est pas réellement un.
En tout cas, c’est le dernier code, le dernier endroit qu’ils doivent visiter. Un total de sept codes, sept lieux. Si Raiji et Deshya ont raison, alors là où ils doivent se diriger à présent…
… est à l’entrepôt de Tetazo, là où Raiji et Korone ont sauvé Deshya de son enlèvement.
– C’est donc ici ?
Raiji a rapidement raconté cet ‘exploit’ à ses deux amies. Dorothé semblait n’en rien savoir, choquée que Raiji avait osé agir aussi bravement, et Léa en avait rapidement entendu par un ami.
– Ah, je sais pas si j’ai envie de dire que ce sont des bons ou mauvais souvenirs…” blague Raiji.
– Je ne me suis pas trop amusée…” réplique Deshya avec un air de dégoût, n’ayant jamais oublié ce moment plutôt horrible de sa vie.
Heureusement, tout s’était bien terminé grâce à la précision et l’agilité surhumaine de Korone. La petite fille n’a pas nié à sa grande-sœur la vérité, après qu’elle soit adoptée, même s’il semblerait que Korone elle-même ne sait pas trop comment elle a pû faire quelque chose d’aussi… incroyable. Elle rendrait jaloux une bonne majorité de policiers. Deshya frissonne rien qu’en pensant au couteau qui était prêt à lui trancher la gorge, mais grâce à ses discussions avec Bibi Derumi et sa petite-sœur, elle a réussi à ne plus en être traumatisée. En réalité, elle ne l’a jamais réellement été, du sens où elle n’a pas eu peur d’être enlevée à nouveau, mais savoir qu’elle est passée si proche de la mort… Cela n’est pas amusant. Personne ne viendra à la contredire, sauf les fous.
– Et où se trouve l’enveloppe ?” demande Léa.
– C’est dans ce bâtiment que Deshya a été retenu, donc je vais aller voir,” leur dit Raiji, partant déjà.
Elles l’observent partir et Dorothé pose les mains sur ses propres hanches.
– Donc c’était contre… Michel…
– Jean Boketsu,” la corrige Deshya. Il est en prison pour ses actes, cela durant 25 ans.
– 25 ans pour un meurtre pareil ? J’aurai dit plus !” souffle du nez Léa.
– C’est déjà bien.
Deshya aurait aussi aimé plus, mais elle considère que ce n’est pas rien du tout : c’est le quart d’une vie. Par exemple, la sentence de Koinu Blushark, celle qui a tué son père et aussi vraie première enquête de Deshya, n’a été que de quinze ans et quelques semaines. Cela fait dix ans de moins ! Deshya ne sait pas forcément comment le système judiciaire fonctionne exactement, vu que c’est complexe et chaque pays à ses propres lois et décisions sur les peines — des pays ont encore la peine de mort ! —, donc Deshya n’a jamais trop étudié le sujet. Elle connaît des termes bien particuliers, mais au-delà de tout ça… Elle sait juste que les pires criminels du pays passent tous par la capitale, ‘Bexel’.
– Raiji est quand même particulier,” sourit Léa.
– Courageux, mais parfois timide. Intelligent, mais parfois si bête. Je te comprends, hm, hm.
Dorothé acquiesce deux fois et Léa pouffe.
– Oui !
Deshya sourit en les regardant toutes les deux. Elles l’accompagnent tout ce temps de ‘voyage’, de recherche de codes, mais si Deshya ne se trompe pas…
– J’ai l’enveloppe !
– Ah, parfait !
Raiji revient avec une enveloppe similaire à toutes les autres, qu’il a toutes rangées dans son sac pour ne pas polluer ou les perdre.
– Elle était devant la porte pour entrer dans le bâtiment,” explique-t-il.
– On va enfin savoir la vérité des codes !” attend impatiemment Léa.
– Yuuup !
Raiji ouvre donc l’enveloppe, sous le regard impatient de tous, et ouvre la lettre qu’il vient de prendre dans les mains. Son contenu, écrit cette fois-ci en rose, est le suivant :
« Comme le A d’Arbre, de 1 à 7 prends-les.
Dis le code final à haute voix.
Et entend la mienne. »
Un message codé final. Il n’y a pas de nom d’envoyeur, rien d’écrit à l’arrière et avec cette lettre, rien d’autre. Raiji vérifie une dernière fois dans l’enveloppe, mais cela ne change pas la vérité.
– De 1 à 7 je dois… les prendre ?
Aucun des sept ne semble comprendre directement. Ils y réfléchissent, mais en premier lieu, c’est un vrai mystère. Léa finit par soupirer, se tournant vers les deux filles.
– Peut-être qu’il y a autre chose dans les environs ?” demande-t-elle.
– T’crois qu’y a p’t-être une autre enveloppe ? Genre, sept autres trucs ?” la questionne Dorothé.
– Hm, va savoir. Mais ce code à l’air étrange, donc il y a peut-être une genre d’épreuve finale !
– On peut vérifier ça. On t’laisse trouver, Raiji !
Les deux filles s’éloignent donc de leur côté, cherchant la trace d’une autre piste. Deshya tourne le visage vers la lettre.
– Sept… Arbre… A… Oh. Oh !
Deshya ouvre grand les yeux, réfléchit quelques instants—
— et finit par éclater de rire.
– Q-Qu’est-ce qu’il y a ?! Tu as trouvé ?!” demande Raiji, se tournant vivement vers elle.
Deshya ne peut pas tout de suite répondre à son ami, vu que son rire ne s’arrête pas, mais elle finit par se calmer en soupirant longuement, les mains sur les genoux. Elle prend une grande inspiration et sourit.
– Naaah, j’ai pensé à autre chose. Je vais chercher avec Léa et Dorothé !
Elle s’excuse, ne répond pas au ‘A-Attends !’ de Raiji, lui qui tend le bras vers elle, et court hors de portée de vue. Le garçon gonfle les joues et bouge sa bouche de gauche à droite.
– Mouais… J’parie que tu sais un truc…” murmure-t-il.
Néanmoins, c’est trop tard pour insister et quoi qu’il advienne, il doit trouver ce que cette lettre veut dire. Est-ce qu’il y a réellement sept enveloppes dans cet endroit qui peuvent expliquer un dernier code ? Cela lui paraît réellement étrange… C’est bien différent du système d’un code par lettre qu’ils ont jusqu’ici, même si chaque code a été pensé différemment. Il se tient au milieu de l’extérieur de l’entrepôt, aucune motte d’herbe à des mètres à la ronde, debout et la tête penchée sur ce code.
– Un sur sept… Sept… On est allé à sept lieux, pas vrai ?
Il plisse les yeux.
– Les lieux… C’était quoi, déjà ?
Il réfléchit donc.
– Jeu d’Arcade, ensuite l’École Secondaire de Tetazo, ensuite la Taverne Doubs, on a continué avec le parc Amélie, l’Institut Marc Déporet, le Musée des Cétacés et finalement, ici, l’Entrepôt de Tetazo… A comme Arbre… ?
Il se gratte l’arrière des cheveux.
– La personne veut dire la première lettre de chaque endroit ? Voyons voir… J… É… T… P… I… M… E… ? Hein ? A-Ah…
Il ouvre grand les yeux..
– JETAIME… Je… Je t’aime ?
Confus, il fronce les sourcils, la main qui tient la lettre tremblante, et finit par déglutir.
– H-Hein… ? Je…
Il cligne des yeux.
– Je t’aime… ?
– Oui.
Raiji ouvre grand les yeux et se retourne d’un coup. Ce mouvement est si rapide et brusque que sous lui, le sol terreux crée un minuscule tourbillon de poussière et ses cheveux se décoiffent encore plus que d’habitude. De ses yeux verts, il observe fixement la fille qui vient de parler, se trouvant debout derrière lui — désormais devant lui. Un petit, mais intense sourire lui décore son visage doux, et ses yeux bleus clairs sont brillants comme de l’eau douce. Elle acquiesce doucement et retire sa capuche de grenouille avant de lâcher un sourire encore plus grand.
– Je t’aime. Oui, je t’aime, Raiji Harmony.
Même si ses joues sont rouges et son cœur bat à la chamade, le visage de Raiji est semblable à une tomate mûre et son cœur bat si rapidement qu’il est en train d’épuiser toutes ses années devant lui en quelques secondes. Il lâche la lettre tellement il est ébahi, bégayant des mots qui n’existent pas. Léa veut fuir le regard, mais à chaque fois qu’elle baisse doucement la tête, elle se force intérieurement à le fixer avec son beau sourire, les mains derrière le dos. Ces dernières justement se frottent les unes contre les autres, ainsi que ses jambes qui bougent doucement, prouvant que son corps veut fuir à toute vitesse le plus loin possible d’ici, se réfugier dans un igloo à tout jamais. Néanmoins, comme Raiji a osé le faire lorsqu’il a fait face à Jean Boketsu pour sauver Deshya, elle est et reste courageuse. Un peu plus loin, Deshya et Dorothé observent la scène discrètement.
– Tu savais depuis le début que Léa était celle qui avait écrit les lettres, pas vrai… ?” demande Deshya, le regard fixé sur Léa.
– Je l’ai compris dès le premier code quand elle arrêtait pas d’regarder Raiji, pas avant,” répond Dorothé. J’étais réellement intriguée par les codes.
– Ah, je vois… C’est trop mignon, comme déclaration.
Deshya ne peut pas s’empêcher de sourire rien qu’à l’idée que Léa a préparé tout cela rien que pour se confesser à Raiji.
– T-Tu… L-Léa…
Enfin, le garçon arrive à parler. Léa pouffe.
– Oui, c’est moi qui ait préparé tout ça. Je ne pensais pas que Deshya et Dorothé nous suivraient, mais c’était mon but depuis le début, d’être à tes côtés. Je suis certaine que même sans l’aide de Deshya, tu aurais tout trouvé, donc je suis fier de toi !
Elle veut lever les bras pour le féliciter, mais la gêne fait qu’elles soient collées dans son dos, ses propres mains refusant de se séparer.
– Je voulais quand même être avec toi pour voir ton intelligence en action et si jamais l’un de mes codes n’était pas clair, je voulais aider…
– J-Je me sens mal d’avoir résolu à la place de Raiji…” lâche honteusement Deshya.
– T’as merdé, la rouquine.
– …
Raiji secoue la tête et ferme la bouche après avoir pris une grande inspiration. Le temps semble se figer autour d’eux lorsqu’il expire tout, fermant les yeux. Il relève la tête, réussissant enfin à fixer Léa dans les yeux.
– Tu as fait tout ça… pour me dire… J-J-Je… J-Je t’aime… ?
Elle acquiesce.
– J’ai toujours eu un regard sur toi, honnêtement, mais nous n’étions pas dans la même classe et au fond, on ne se connaissait pas vraiment… En apprenant à te connaître, en voyant ton exploit de ton sauvetage de Deshya et juste ta gentillesse avec moi, j’avoue être tombée amoureuse de toi. On dit que l’amour prend beaucoup de temps à se former, mais je suppose que le mien est rapide.
Elle se frotte les mains encore plus rapidement, à chaque mot qu’elle prononce son cœur bat plus rapidement, la gêne lui rougit le visage davantage.
– J-J’en ai parlé avec Martinet, le vieil homme de l’hôpital, car il est une de mes connaissances, et il m’a aidé pour trouver l’un ou l’autre code, vu qu’il est un ancien détective. Enfin, j’aurai pû trouver tout seul, mais c’est lui qui a pensé au premier et celui pour la taverne, héhé…
Léa déglutit bruyamment.
– J’hésitais à faire tout ça car je trouvais cette recherche de code ridicule et puis, j’avais pas le courage de le faire, mais hier, quand tu as confronté ‘JUGE’ et que tu as dit que tu voulais une copine… J-Je me suis dit qu’il fallait que j’ose. J-J’ai jamais… J’ai-J’ai jamais cru que tu m’aimerais en retour, mais il faut bien essayer, pas vrai ?
– …
Deshya l’écoute en baissant doucement les paupières.
– Du coup, ce mâtin, j’ai tout préparé ! J’ai dû me lever trois heures plus tôt et mon père, qui travaille un peu avant que je ne parte à l’école, m’a aidé à me conduire ici et là. Héhé… C’est idiot, tu penses ?
Elle baisse le visage et, tout en gardant son sourire, prend un air triste.
– Peut-être que j’impose mes sentiments, peut-être que dire ‘Je t’aime’ aussi rapidement de nos jours… n’est pas une bonne chose, mais… Je ne voulais pas cacher mes sentiments dans mon cœur. Cela m’aurait fait trop mal.
– …
– J’espère quand même que tu t’es bien amusé, R—
Mais avant qu’elle ne puisse terminer sa phrase, Raiji la prend fermement dans ses bras.
– !!
Elle ouvre grand les yeux et elle en perd même son souffle. Raiji pouffe.
– Idiote… Tu crois qu’une fille si gentille que toi n’allait pas me… Non, même pas. Tu crois que TOI, Léa, tu n’allais pas rentrer dans mon cœur ? C’est même pas que tu sois si gentille qui fait que moi aussi, j’ai commencé à t’aimer, mais…
Une petite larme coule sur le visage de Raiji, mais cette même larme est l’une qui provient de sentiments doux — de bonheur.
– Mais parce que tu es toi, évidemment que je ressens la même chose.
Léa est complètement muette, la gorge serrée et son cœur prêt à exploser en mille morceaux dans son torse. Elle finit par enlacer Raiji à son tour en étant aux bords des larmes, mais elle fait tout pour qu’aucune ne coule sur ses joues, mais restent bien à leur place, aux bords de ses yeux.
– E-Est-ce que j’ai le droit de demander quelque-quelque chose, a-alors… ?” demande-t-elle en bégayant.
– Que si j’ai le droit d’y répondre.
– T-Tu veux bien sortir avec moi, alors, Raiji… ?
– Hm. Je ne veux que ça.
Léa le tient fermement dans les bras en pouffant de joie, laissant les deux autres filles au plus loin les regarder avec joie, mais Dorothé finit par se relever en s’étirant.
– Je viens d’avoir le diabète le plus élevé de tous les temps, donc j’vais rentrer et mourir dans mon lit. Et toi, rouquine ?
– Je vais les laisser tranquille… Bah, Léa et Raiji ne seront pas du genre à s’embrasser si rapidement, je pense, mais quand même.
Toutes deux ne veulent pas les embêter et décident de partir, mais une voix retentit dans un cri :
– Merci pour la journée, vous deux !” lâche Léa.
Deshya s’arrête sur place et se retourne. Elle place ses mains en cône devant sa bouche et crie en retour :
– Et bonheur à vous deux, bande de mamoureux !!
Raiji et Léa se mettent à rire, se tenant toujours dans les bras. Dorothé cache ses mains dans ses poches et s’éloigne de l’entrepôt sans rien leur dire. Toutefois, cela ne signifie pas qu’intérieurement, elle les félicite.
Et ainsi, le nouveau couple reste à s’enlacer quelques minutes, avant de décider d’aller un peu chez elle pour prévenir les parents de Léa — la maison n’est pas loin et c’est comme cela qu’elle a appris pour l’enquête —, vu qu’ils attendent justement de savoir comment cette confession va se passer.
Et donc, en ce mercredi 05 octobre, Raiji, qui s’était réveillé en espérant que personne se serait souvenu de ce qu’il a dit la veille, vient à remercier les dieux qu’il ait dit de tels mots durant son combat contre ‘JUGE’.
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Deshya et Dorothé marchent l’une à côté de l’autre sur le chemin de retour. Le temps que Deshya rentre chez elle, il sera dans les alentours de 16h, ce qui est une heure plus qu’acceptable. Sa sœur lui a envoyé un message en montrant une photo d’elle qui fait un câlin à Néro, leur chien, ce qui a amusé Deshya, mais elle range son téléphone pour la fin de cette marche aux côtés de Dorothé. Cette dernière ne semble rien vouloir dire et ne profite même pas du paysage, les yeux rivés devant elle. Deshya ne sait pas réellement quand leurs chemins vont se séparer, mais si elle ne dit pas n’importe quoi, Dorothé ne vit pas à Tetazo, mais dans une ville adjacente. Après, vu qu’elles ne se connaissent presque pas, elle ne s’en souvient — cela si elle l’a déjà entendu. Peut-être est-ce un souvenir qui n’est même pas ‘réel’ et qu’elle crée elle-même. Ce qu’elle est convaincue, cependant, c’est que Dorothé n’habite pas la porte à côté de sa maison.
– C’était mignon, en tout cas,” lâche Deshya pour briser le silence.
– Yep…
La réponse de Dorothé est faible, mais audible. Cependant, on ne dirait pas que la fille soit réellement présente, comme si elle pensait à quelque chose au point d’être perdue dans ses pensées. Deshya ne sait pas si elle veut essayer de converser ou simplement accepter ce silence jusqu’à la séparation de leurs chemins. Voyant que Dorothé n’a pas l’air de vouloir parler plus que cela, la rousse décide de juste garder ses mains sur les lanières de son sac et accepte de ne pas parler jusqu’à la fin. Néanmoins—
– Deshya, je peux te poser deux questions ?
– A-Ah ? Vas-y ?
C’est Dorothé qui prend la parole en premier. Toujours le regard fixé devant elle, elle demande d’abord à Deshya :
– Tu crois qu’une meuf normale comme moi peut se permettre un grand rêve ?
– …
Deshya n’arrive pas à comprendre la raison d’une telle question, mais vu que Dorothé semble réellement vouloir une réponse, elle essaie de lui répondre le plus honnêtement possible.
– Je ne sais pas ce qui fait réellement quelqu’un de normal ou non… mais je pense que oui, bien sûr. Tu peux réussir.
– … Je ne sais pas si je suis si normale, c’est vrai, mais… Eh.
Dorothé s’arrête à une intersection et sourit.
– Je suis contente que tu penses ça aussi. Mon rêve est grand et je vais devoir beaucoup faire pour réussir…
Dorothé fronce les sourcils.
– … Même si je dois être l’antagoniste des autres…
Dorothé parle assez doucement, mais Deshya entend ce qu’elle dit grâce à son ouïe développée. Deshya plisse les yeux, mais avant même qu’elle ne puisse essayer de comprendre ce que ça veut dire, Dorothé tourne son visage vers Deshya en fronçant les sourcils, des yeux si intenses qu’ils parurent briller d’éclatants soleils.
– Et alors, Deshya, il y a des gens qui s’intéressent beaucoup à toi, n’est-ce pas ?
Deshya ouvre grand les yeux, un frisson traversant son corps tel un éclair qui rejoint le sol de sa puissance. Elle recule d’un pas et Dorothé avance d’un pas féroce, et continue de fixer Deshya droit dans ses iris. La fille rousse ressent le besoin de fuir, mais son corps tremble dans une peur inexpliquée.
– …
Dorothé semble attendre une réponse et serre un poing, ce à quoi Deshya répond, après avoir dégluti.
– … D-Des gens s’intéressent à moi c-car je suis de plus en plus… p-populaire, oui… ?
Deshya essaie de sourire, mais ce qu’elle ressent sur le moment le lui en empêche. Dorothé fronce encore plus les sourcils, bien que faiblement, mais finit par fermer les yeux et soupire.
– … Ouais.
Elle se retourne ensuite, plaçant correctement son cartable sur ses épaules.
– Ouais, je suppose.
Et sur ces mots, elle s’en va, prenant une autre rue que Deshya, laissant la fille au pull renard derrière elle.
Et cela dans l’incompréhension la plus totale.