La journée a été fatigante pour Deshya. Non seulement a-t-elle dû faire face non un, mais plusieurs cadavres, leurs états étaient tels qu’elle est certaine de cauchemarder cette nuit-ci. Même une fille si mentalement forte que Tessa ne pourra pas résister aux rêves délirants et horrifiants de ce spectacle ; c’est avec assurance que Deshya pense cela. Normalement, ils auraient simplement dû chasser au « mythe » et prouver qu’il n’y avait rien de particulier là-bas, ou peut-être des restes d’un déguisement qu’ils auraient utilisé pour le cadavre. En réalité, ils auraient pû simplement demander à une troisième de simplement ne pas bouger, assis dans la pièce sombre, et vu le flou de la vidéo, personne n’aurait pû différencier le corps vivant d’un cadavre. Néanmoins, elle a appris une vérité bien plus horrible, là-bas, ainsi qu’a rencontré une personne qui était une des raisons de la présence de tels cadavres à un endroit si sombre. Cette même personne, homme nommé « Balthazar », a été arrêté pour son crime envers Axel, cela par la police de Sléron. C’est en tombant dans le piège de Raiji — même si Deshya aurait trouvé un moyen d’appeler la police ou arrêter Balthazar d’une manière ou une autre — qu’ils ont pû le stopper avant qu’il continue ses crimes ou volent leurs téléphones. Aussi surprenant soit tout cela, mais le criminel a accepté de parler à Deshya parce qu’il voulait enfin l’avouer à quelqu’un, mais ne semblait pas avoir la moindre envie d’en discuter avec la police.

Tout cela à propos du marché noir.

Ce qu’a appris Deshya à propos des 5 Doigts, du « Majeur », de la Main et même du Bras, qui est donc l’EFE, continue de la mouvementer. Bien évidemment, tous les marchés du marché noir est le Corps, ce qui intrigue Deshya : qu’est donc la Tête, alors ? Est-ce qu’il y a un nom pour quelque chose qui dirige les marchés du marché noir ou est-ce que le Corps est l’entièreté du corps humain, donc de la tête aussi ? Elle peut aussi se demander si la Jambe ou même les Orteils existent donc, mais cela est une chose qui l’intéresse déjà moins : l’EFE est réellement plus intriguant et même important.

L’EFE, qui veut dire l’Everything For Everyone, est le plus grand des marchés du marché noir. Beaucoup connaissent ce nom et qu’ils y vendent des horreurs, des œuvres d’arts volés et des bijoux de valeurs que personne au-delà des millionnaires ne pourraient rêver de récupérer. Même si peu de documentations se trouvent sur l’EFE — il semblerait qu’il faut passer par le Dark Web pour y aller, ou alors avoir des relations à l’intérieur de l’EFE directement —, certaines choses sont connues, comme le fait que c’est souvent en été qu’ils agissent le plus. Vu que les corps qu’ils ont découvert dans ce laboratoire ont été tué il y a quelques mois, les chances qu’ils aient été placé là-bas juste avant les marchés du EFE ne sont pas si minces qu’on ne le pense… Cela ne peut pas arrêter de choquer Deshya : ils sont réellement tombés sur une affaire qui auraient pû les mettre en danger.

Non, cela, si ça se trouve, les mets déjà en danger dès l’instant même.

Si Balthazar a été entendu parler de tout cela avec Deshya, dont Maruno qui a tout écouté, alors ils vont probablement être pris comme cibles par l’EFE, plus précisemment les 5 Doigts — et encore plus précisemment le « Majeur », la Section française, la Section 3. Deshya ne peut pas non plus continuer de se demander si ses attributs ont un lien avec eux : est-ce possible qu’elle avait été pensé comme une marchandise ? Une esclave, sexuelle ou non, qui a des attributs d’animaux, cela aurait un prix qui dépasse l’entendement. De plus, vu qu’elle est mineur, mais pas non plus trop jeune — et c’est triste à dire —, cela aurait plu à beaucoup de gens qui achètent des esclaves là-bas. Il n’y a aucune raison de chercher à humaniser ceux et celles qui se procurent des humains pour les contrôler de la sorte. Posséder une servante est des années lumières de posséder une esclave, surtout que pour cela, il faut généralement l’acheter ou au moins le demander. Deshya ne veut même pas imaginer sa vie en tant qu’esclave et sur le chemin de retour, à peine trois minutes de chez elle, elle veut vomir en y pensant, mais son raisonnement lui dit qu’elle part sur la mauvaise voie : si c’était le cas, en aucun cas serait-elle encore en liberté. Elle aurait pû s’enfuir, certes, mais qu’elle ne soit pas récupérée depuis, surtout par l’EFE lui-même, est tout bonnement impensable. Ils ont des gens qui font partis d’associations criminelles suffisamment puissantes pour effrayer même la mafia. De plus, le peu de documentation sur l’EFE a déjà parlé du tableau de Djanno Tsuvei, un des peintres les plus connus des années 1940, durant la deuxième guerre mondiale. Un de ses tableaux les plus populaires et mieux gardés du monde entier, nommé « Dernier Souffle », qui représente la mort d’un soldat dans les bras de sa femme, a été volé il y a sept ans et justement, devinez quoi ? Il a été vendu durant l’EFE. C’est actuellement la seule vidéo qui a été prise à l’intérieur de l’EFE et n’est pas une farce, une tentative de fake ou supprimée juste ensuite. De toute façon, il est désormais impossible de se débarrasser d’une telle vidéo, tant de gens l’ont sauvegardé par-ci et par-là. Ce même tableau n’a jamais été retrouvé, car elle s’arrête durant les enchères, ne montrant donc pas qui est l’acheteur à la fin. Toutefois, il a été possible de reconnaître certaines personnes – évidemment, toutes riches — qui y étaient, menant à leur arrestation. L’un d’eux est un politicien d’un autre continent, celui d’Arèpe, et est toujours derrière les barreaux. L’EFE n’est pas un seul marché en soi-même et de plus, il ne doit pas se trouver à Bélium, mais dans plusieurs pays plus pauvres et à la police bien moins compétantes. C’est au même moment que Deshya insère la clef dans la serrure de sa porte qu’elle se souvient qu’Ayumi Steel, une des meilleures détectives du monde entier, juste aux côtés de Kira Miname, a été demandé d’enquêter sur l’EFE et le marché noir, mais elle a refusé. Bien que Deshya ne se souvient pas de toute la vidéo, elle se souvient bien de la raison de son refus : trop dangereux… et inutile. Son argument est que non seulement elle irait fouiller dans des affaires où des milliers de marchands, criminels, bandits et hors-la-loi se trouvent, elle ferait aussi face à des gens bien plus puissants qu’elle, probablement des politiciens et sans aucun doute des rois et reines. La raison qu’elle pense que c’est intuile est que même si elle est une détective qui pourrait probablement en savoir plus sur eux, elle ne pourrait jamais arrêter un tel marché : c’est une organisation bien trop grande, puissante et qui est telle la queue d’un lézard ; qui poussera à nouveau même coupée, cela éternellement. Ayumi a donc refusé toute enquête sur le marché noir, parce que même si elle ne peut pas approuver leurs actions, rien ne sert de chercher à briser un mur avec une aiguille, chose que Deshya comprend totalement. Même elle, si elle venait à devenir très populaire et au niveau des plus grands des détectives, refuserait. Certes, elle est intriguée sur les 5 Doigts, surtout qu’elle se demande quelles sont les autres Sections, mais elle ne peut pas se permettre de fourrer le museau dans l’antre de requins sanguinaires comme si elle allait s’en sortir saine et sauve.

– Je suis rentrée !

Elle ferme la porte derrière elle et ressent une sorte de pic au cœur. Même si elle ne comprend pas directement pourquoi, il lui faut actuellement deux secondes pour le deviner : aucune réponse. Elle se débarasse de ses chaussures et déglutit bruyamment, son cartable à moitité retiré de son dos. Vu l’enquête qu’elle vient de vivre, Deshya ne peut pas s’empêcher de ressentir une certaine paranoïa et inquiétude envers ses parents et même ceux qu’elle aime ; encore plus Tessa, Maruno et Raiji. Si seulement on les a réellement entendu et que Deshya est prise comme cible, alors… ! C’est sur une pensée pareille qu’elle rejoint rapidement la cuisine, ouvrant la porte d’une main ferme et inquiète, mais la silhouette de sa mère qui admire la télévision la rassure instantanément, lui permettant de souffler sans subir un ulcère mortel.

– Oh, te voilà, chérie !

Péra prend la télécommande et appuie sur un des nombreux boutons, mais uniquement pour couper le son, et non la télévision elle-même. Deshya acquiesce et s’approche de sa figure maternelle en hésitant à sourire, les images des cadavres au laboratoire toujours en tête.

– Tout va bien ?” lui demande sa mère.

– Je vous expliquerai, mais ça aurait pû mieux aller…

Bien évidemment, Deshya ne compte pas parler du marché noir en soi-même, mais uniquement de ce qu’elle a trouvé là-bas. Deshya sait déjà que Korone va insister pour tout savoir, mais elle ne compte pas non plus détailler l’état des corps qu’ils ont trouvé dans des sombres pièces du laboratoire.

– Oh, j’espère que ce n’est rien de grave…” dit attristement la femme aux cheveux roux.

Deshya assure que ce n’est pas le cas et lui demande ce qu’il y a pour le souper, vu qu’il est déjà 20h passé. Sa mère lui révèle qu’elle n’a rien fait pour elle, vu qu’ils ont tous mangé des tartines, ayant mangé plus chaud ce midi. Elle lui propose de lui cuisiner des pâtes rapides ou même sortir la grosse cannette de cassoulet qui attend dans la buandrie, mais Deshya décide de manger comme eux, donc une simple tartine. Trois tranches lui iront bien : ce n’est ni trop peu, ni trop tout court. Elle ouvre le frigo en se demandant quoi mettre dessus, sa queue de renard bougeant de gauche à droite derrière elle. Pera l’observe et se serre les mains, osant parler au même moment où Deshya attrape du fromage.

– Tu t’es réellement habituée, à ‘ça’, hein… ?

Une question que Deshya ne comprend d’abord pas, mais en voyant le regard de sa mère déposée sur sa longue queue duveteuse, la fille acquiesce.

– Je l’ai déjà dit, non ? J’adore, même. Le seul problème est ma sécurité et celle des autres, mais je suis honnêtement heureuse d’être comme ça.

– … C’est drôle.

– Drôle… ?

Deshya ferme le frigo en marchant dans la cuisine, arrivant devant la planche à découper où elle a déjà placé trois tranches de pain. Pera acquiesce.

– Tu dis que tu veux vivre plus normalement et tout ça, mais tu aimes vraiment être une fille aux attributs de renard. Tu grandis.

– …

Deshya ne répond rien à cela, mais ce n’est pas par impolitesse ou ennui : elle n’a juste réellement aucune idée de quoi dire. C’est vrai qu’elle souhaite toujours vivre comme une fille un peu plus normale, mais avec les enquêtes qui lui tombent dessus, sa popularité qui monte en flèche et sa propre ‘libération d’elle-même’, elle commence à s’en foutre un peu… Ce qui la tracasse le plus, c’est de savoir à quelle point elle est en sécurité et si les autres autour d’elle ne sont pas en danger — c’est pour cette raison qu’elle continue de garder le secret de ses attributs, après tout. Pourtant, Deshya veut voir la réaction d’Amora quand elle apprendra que sa meilleure amie ‘si mignonne et choupie’ est réellement une fille renard. Peu de chance qu’elle en soit effrayée ou dégoûtée, donc Deshya veut juste lui réveler la vérité… mais cela devra attendre.

– On s’est tous habitué et Korone ne connaît que ça de toi, donc tout va bien,” sourit faiblement Pera.

– … Tu es certaine, maman ?

– E-Eh ?

Pera lâche un bruit de surprise, Deshya terminant de décorer ses tranches de pain à l’aide de fromages d’un jaune clair pur et de mayonnaisse blanche comme la neige.

– Je sais que Korone m’adore comme ça, que papa a réussi à s’habituer et que toi aussi, mais j’ai parfois l’impression que… tu n’aimes pas réellement ça ?

En tout cas, c’est son ressenti. Pera ne répond rien, donc Deshya va s’asseoir à table en attendant une réponse, mais même si sa mère ne veut pas continuer la conversation, cela lui va. Toutefois, Pera s’assied devant Deshya, à sa place habituelle, et admire sa fille.

– Si, tu es magnifique comme ça. Je sais que beaucoup d’adultes de mon âge trouveront cela inhumain et étrange, mais même si tu n’étais pas ma fille, j’aimerai bien cela. Tu sais bien que je ne juge même pas les Furries.

– C’est vrai, mais—

– Non, c’est juste que…

La femme coupe sa fille, fuyant doucement du regard.

– J’ai juste peur pour toi… Je n’ai pas envie que les gens te jugent pour ce que tu es, je n’ai pas envie que tu sois à nouveau enlevée, je n’ai pas envie qu’on te fasse du mal. Tu tombes tout le temps dans des affaires et j’ai parfois l’impression que plus les journées avancent, plus le danger s’approche de toi.

– …

– J’ai juste un peu peur pour ta sécurité. C’est peut-être bête, vu que rien ne s’est passé depuis, mais vu que tu deviens plus populaire… Tu sais…

– … Moui.

Deshya avale le morceau de pain en approuvant, baissant à son tour la tête.

– C’est vrai que ma popularité est à double tranchant, que si des gens comprennent la vérité pour mes attributs, ça peut me mettre en danger, mais…

Deshya serre les poings. Elle se rappelle de ce qu’elle a ‘avoué’ à son père, juste après être tombée dans la fontaine avec Korone et Aya : elle ne peut pas promettre de ne plus jamais se mettre en danger pour les autres. Deshya pourrait rassurer et réconforter sa mère en expliquant qu’elle ne compte plus jamais se mettre en danger, mais sa personnalité, ce qu’elle est l’en empêche. Elle veut aider à résoudre des enquêtes pour empêcher les criminels de s’en tirer, elle veut utiliser son génie pour réveler les mystères et finalement, découvrir la vérité entière sur ce qu’elle est. Elle ne peut pas juste dire à sa mère qu’elle ne compte plus jamais se mettre en danger, car cela serait mentir, mais lui simplement dire qu’elle va continuer à se mettre en danger seule n’est pas non plus une chose dont elle capable de dire. Alors, quoi lui répondre ? Juste du simple silence ? Arrêter la conversation là pour ne pas plus inquiéter sa mère ?

– Je ferai de mon mieux, maman.

Deshya mâche le morceau de pain en souriant. C’est uniquement lorsqu’elle l’avale, sous le regard attentif de sa mère, qu’elle termine sa phrase.

– Je promets que vous ne me perdrez pas.

Elle n’a pas besoin de dire plus ; c’est bien suffisant. C’est une promesse qu’elle veut garder et même si elle ose se mettre en danger, même si elle doit traverser les flammes des enfers pour s’échapper d’une situation impossible, elle reviendra en vie. Elle restera ‘elle’, Deshya Oveja, et ne compte jamais céder à la mort. Pera reste bouche bée, ses yeux se mouillent à petites gouttes, mais elle les sèche et refuse de pleurer.

– J’ai vraiment les meilleures filles du monde, hm.

– Et moi — enfin, nous deux, les meilleurs parents du monde. Comme quoi, il doit y avoir un lien.

Elles se mettent à rire toutes les deux, discutant ensuite de l’école ainsi que de Raiji.

Un peu plus tard, après le papotage avec sa mère et avoir terminé ses tartines — elle en a repris une à la confiture de fraise, cela par gourmandise —, elle monte les escaliers en laissant Pera regarder la télévision, profitant d’un feuilleton épisodique qui est à propos de relations complexes avant le mariage. Ce n’est pas une chose qui intéresse Deshya, mais sa mère aime bien vu que c’est très axé sur la comédie, parfois parlant de sujets très sérieux et ‘adultes’. Qu’importe — Deshya arrive dans le fenil, là où elle rencontre son père qui observe la télévision avec Korone, mais c’est une autre série.

– Vous regardez quoi ?” demande Deshya, ne passant même pas un ‘Bonsoir’.

– Ooooh, gand’e-soeu’ !!

Des chips dans la bouche, Korone crie de joie en levant les bras. Son père tourne le visage vers Deshya, mais ses yeux restent sur la série.

– Korone voulait regarder quelque chose avec moi, donc on regarde une ancienne série espagnole, mais en sous-titrée français.

Deshya s’avance dans le fenil et entend bel et bien que les acteurs parlent en espagnol. Elle comprend plus ou moins tout ce qu’ils disent, mais certains parlent si rapidement que si elle ne s’y concentre pas, elle peut espérer tout comprendre… Elle se demande s’il est possible de lire les sous-titres assez vite pour tout capturer dans son esprit ?

– Comment tu vas ? Tu viens de rentrer ?” demande son père.

– Il y a quelques minutes, j’étais en bas en train de manger et je parlais avec maman.

– Tu as mangé une tartine comme nous ?” la questionne ensuite la petite fille.

Deshya approuve, ce qui fait sourire Korone. Gatito met pause à la série et Deshya s’assied à côté d’eux deux.

– Je comptais t’appeler à la fin de cet épisode, vu que tu prenais ton temps…” avoue-t-il.

– On avait peuuuur ! Ooooh, très peur !

– Korone.

– Quoiii ? C’est vrai, moi, je me suis inquiétée ! J’ai noyé ma peur dans les chips, les très miam miams.

Elle tend le paquet, proposant à sa grande-sœur d’en prendre, ce que Deshya accepte avec un remerciement accompagné d’un sourire. Gatito ne sait pas s’il doit soupirer ou rigoler, alors il ne fait que pouffer à la remarque de Korone. Comme toujours, sa voix mignonne et énergique a un effet bénéfique sur le moral des autres… Elle serait parfaite en tant que psychologue rien que pour cette raison.

– Tu as fait quoi, aujourd’hui ?” demande Gatito.

Cette fois-ci, Deshya n’hésite pas d’avouer la vérité, même si elle passe certains détails, que ce soit sur l’état des cadavres ou même sur les 5 Doigts. Elle ne cache pas qu’ils ont compris pour les transplantations illégales et le marché noir, mais pas les détails de tout cela, donc la conversation entre Balthazar et elle reste secret, uniquement connue d’eux deux et de Maruno, lui qui a clairement tout entendu. Gatito est surpris d’apprendre tout cela et compte en parler avec la police de Sléron, vu qu’il aimerait en savoir plus. Korone est heureuse d’apprendre que Raiji a pensé à un tel plan dangereux : elle l’apprécie beaucoup et vu ce qu’il a fait durant l’enlèvement de Deshya, cela ne l’étonne pas. Gatito lui réplique que ce n’est pas quelque chose qui devrait être ‘admiré’, mais Korone ne semble pas changer d’avis sur cela, ce qui amuse Deshya. En réalité, cette dernière, elle aussi, a bien aimé le plan de Raiji, bien que peut-être un peu trop dangereux… Toutefois, vu que les trois membres des Renards Associés ont compris ce qu’il voulait faire, cela s’est bien passé… et heureusement. Deshya n’imagine même pas ce qu’elle aurait fait si Raiji n’avait pas été sauvé à temps… Perdre un ami n’est pas dans ses projets et ne le sera jamais, mais en réalité, Deshya ne veut perdre personne point barre, même si c’est un homme ou une femme qu’elle n’aime pas trop. Elle compte arrêter le moindre criminel dans son chemin, les empêchant de tuer une seule personne de plus — ou même de le tenter.

Après ses explications un peu plus longues que prévu, Deshya entre dans la salle de bain avec Korone. Toutes deux attrapent leur propre brosse à dent et y placent du dentifrice, même s’ils sont différents : celui de Korone est un dentifrice pour enfant et à la fraise, celui
de Deshya est à la menthe. Elles se brossent ainsi les dents toutes les deux, ensemble, s’observant dans le miroir. Lorsque cela est terminé, deux minutes trente plus tard, elles crachent dans l’évier tour par tour et ensuite se rincent la bouche. Elles se mettent en pyjama, vu que l’heure de dormir s’approche dangereusement. Deshya n’est pas réellement fatiguée, surtout que la certitude de ne pouvoir admirer des rêves, mais de frissonner sous le spectacle de cauchemars ne lui donnent guère envie d’aller dormir. Pour Korone, c’est une autre histoire. La fatigue l’atteint de plus en plus, comme des mains qui montent sur elle et lui demandent d’aller se reposer. Elle a beau être très intelligente et plus mature que ce que devrait être une fille de 8 ans — tout en ayant une personnalité très mignonne —, elle n’est pas si extraordinaire au point où elle peut simplement résister au sommeil. Quel humain pourrait s’opposer au marchand de sable, lui Dieu qui n’est que concept ? Chaque personne, chaque être a besoin de repos, alors l’heure sonne pour Korone. Comme la majorité du temps, même dans les temps plus froids de l’hiver, Deshya s’habille de sous-vêtements qui sont aussi pyjama, n’ayant aucune peur de montrer ses attributs de renard à Korone, elle qui sait la vérité depuis le presque début de leur rencontre. Vu que Deshya ne peut s’habiller de la sorte lorsqu’elle dort avec Amora ou quiconque d’autre — bien que Deshya ne dort que toute seule ou avec Amora, jamais réellement avec une autre personne —, elle doit garder son pull pour dormir. Cela reste agréable, mais Deshya a toujours préféré laisser son corps respirer totalement, raison pour laquelle elle refuse de garder des chaussettes en dormant, même des bas ou autre. Pour Korone, même si elle a d’autres pyjama désormais, surtout qu’elle est adoptée dans la famille et est allée acheter beaucoup de vêtements pour elle avec Pera, elle se vête de son pyjama renard, celui qui appartenait à Deshya dans le passé, lorsqu’elle était le plus jeune. Korone n’aurait sûrement aucun problème à dormir moins habillée, mais les nuits sont plutôt froides et elle préfère ne pas frissonner dans son sommeil à cause du manque de chaleur sur elle. Certes, elle se blottit toujours sur la queue de renard très duveteuse de sa grande-sœur, mais cela n’est pas suffisant pour lui donner toute la chaleur nécessaire. Korone se demandait comment Deshya pouvait dormir presque toute nue malgré l’air peu chaude de la nuit, mais lorsqu’elle a pû prendre le coussin de sa grande-sœur dans les bras quelques instants, avec peu de vêtements lui couvrant le corps, Korone a compris : quelle chaleur ! Quel sentiment agréable ! La chaleur de son propre corps qui est attrapé par le coussin, ensuite qui lui est renvoyé et qui donne donc une impression de se blottir contre une personne douce et moelleuse, agissant tel un radiateur à l’aide de la chaleur du corps de celui ou celle qui l’enlace ! Korone trouve cela si agréable, si plaisant, mais cela ne rivalise en rien ce qu’elle ressent en prenant la queue de renard de Deshya dans les bras, l’enlaçant comme si elle ne voulait jamais qu’elle ne parte. Après tout, c’est ce que ressent Korone : jamais ne veut-elle que Deshya ne la quitte. Jamais Korone ne veut-elle partir d’ici. C’est sa nouvelle famille, mais cela sera sa famille à tout jamais. Ses anciens parents lui manquent toujours et elle reste traumatisée de perdre ceux qu’elle aime, raison pour laquelle ni Gatito, ni Pera n’a été encore appelé par les surnoms qu’ils méritent, mais Korone ne voudrait pas d’une autre famille. Un jour, plus grande, elle devra partir et faire sa vie, peut-être seule, peut-être avec un mari ou une femme, peut-être même autrement, mais elle sait qu’elle ne pourra pas rester éternellement dans les bras de ceux qu’elle aime… mais en réalité, cela ne signifie rien à ses yeux : sa famille reste sa famille, même s’ils sont séparés par l’océan le plus grand et des terres désertiques qui ne montrent aucune vie à des kilomètres à la ronde. Même dans la mort, ils resteront sa famille ; et alors même si elle ne vit plus avec eux, dans la même maison, elle pourra toujours revenir et les prendre dans ses bras. Korone sait qu’elle est bien trop jeune pour penser à tout cela, mais elle ne peut s’y empêcher : son cerveau est tout simplement l’un qui fonctionne de la sorte. Montant les escaliers qui mènent à l’étage supérieur, le dernier palier de cette maison, elles arrivent toutes deux dans la chambre de Deshya avec un certain degré de fatigue. Comme toujours, Korone est la première à sauter sur le lit, profitant de ce doux et moelleux matelas, ainsi que de la couverture agréable au toucher. Ainsi, que par son habitude, Deshya s’assoit sur sa chaise de bureau, allume son ordinateur mis en veille et fait de même pour l’écran. Korone s’avance sur le matelas et s’approche donc de sa grande-sœur, comme chaque nuit : elle aime voir ce que regarde Deshya sur Twatter ou internet en général. Certes, cela est arrivé que l’une ou l’autre illustration ‘olé olé’, nudée ou des sujets plus sensibles les surprennent de leur arrivée soudaine, mais Korone n’est pas du genre à être traumatisée ou choquée par cela… bien qu’elle ne préfère pas les voir. Deshya fait donc toujours attention en passant sur Twatter, vu qu’elle suit l’un ou l’autre artiste dans ce domaine ‘-18’, mais elle n’en a pas réellement honte : elle préfère juste que Korone ne voie pas ce genre d’illustrations. L’ordinateur s’allume donc, montre le fond d’écran qui est une photo de Deshya et sa famille — et oui, Korone est dessus, vu qu’elle a changé le fond d’écran il y a peu —, ainsi que des onglets dans tous les sens. Il est compliqué d’affirmer si le bureau virtuel de Deshya est un ordre qui semble désordonné ou un bordel qui garde une touche de sens en son sein. Ce qui est certain, c’est que Deshya sait exactement où se trouve A, B ou C sur son ordinateur, ce qui est tout ce qui compte pour elle. Deshya vérifie d’abord le moindre exploit d’un grand détective, mais malheureusement, rien d’intéressant n’a eu lieu aujourd’hui. On parle rapidement de l’un, qui est dans le Top 20, mais non le Top 10, qui aurait été dépassé par un policier dans le sud d’Arèpe, mais cela n’est pas très intriguant ou surprenant pour Deshya : ce détective-là, du peu qu’elle connaît, est du genre à être très lent, mais très efficace. Appelez-le pour une longue affaire et il saura trouver la vérité plus rapidement que n’importe quel policier. Néanmoins, il ne reste pas au niveau de quiconque dans le Top 10 des détectives, vu que des gens comme Minos Kiyon ou Ayumi Steel sont compétents dans les longues et courtes affaires, allant plus rapidement pour résoudre des mystères, même celles qui demandent un minimum d’une semaine ou même d’un mois. On parle aussi rapidement de Kira Miname, le meilleur détective du monde entier, mais ce n’est pas à propos d’une affaire ou d’un mystère, mais juste de sa dernière apparition dans le nord du Marialla, un pays qui longe l’océan dans le nord d’Inakunia. Bref, que des paparazzis ou des fans qui l’ont pris en photo en se demandant pourquoi il se trouve là, théorisant sur une possible enquête ou peut-être des vacances bien méritées. Toutefois, ce genre de ‘choses’ — car Deshya ne veut même pas les considérer comme des informations vu leur inutilité — ne l’intéresse absolument pas. Oui, parfois, cela peut être pertinent, mais dans ce cas-ci, cela consiste plutôt à rouler les yeux. Deshya décide donc de tourner son attention vers Twatter, espérant trouver la moindre bonne nouvelle qui pourrait lui offrir le plus petit des réconforts pour le moment où elle va dormir ce soir. Demain, elle a école, donc elle ne peut pas juste se permettre de ne pas se reposer. Elle pourrait demander à son père de ne pas y aller pour pouvoir calmer ses esprits, mais Deshya veut se prouver forte, donc elle refuse cette faiblesse. En allant sur Twatter, comme à son habitude, les notifications affluent. Des utilisateurs qui mentionnent Deshya, que ce soit sur un possible mystère d’internet — vu qu’elle a aidé à résoudre l’affaire de Sleeping Little Beauty —, sur la énième vidéo d’elle qui sort de cet hôtel en ruine ou même sur un post au hasard. Des gens parlent dans les commentaires en oubliant de retirer la mention de Deshya — bref, son arobase — ou simplement likent, partagent ou répondent des posts de Deshya ou qui la mentionnent elle.

– Tu es à 46 267 abonnés, maintenant !” lui fait remarquer Korone, pointant du doigt l’écran au-delà de la silhouette de Deshya.

Encore une fois, elle augmente niveau abonnés. Cela ne signifie pas qu’elle devient plus populaire encore, vu qu’elle n’a encore rien fait de nouveau pour attirer plus l’attention, même si l’affaire de ‘XIII’ a réussi à intriguer plus qu’un. Vu que l’affaire de l’hôtel FEDER est de moins en moins une chose d’actualité, il n’y a aucune raison que cela continue de la rendre plus célèbre, malgré les milliers — même millions — de vues sur YaTube. Parfois, Deshya la regardent en se demandant comment elle a osé penser à un tel plan et le mettre en exécution, ainsi que comment la chance a été suffisamment de son côté pour que l’hôtel ne tombe pas quelques secondes auparavant. Cela n’est qu’une question de hasard, mais cette même chance est la raison pour laquelle elle peut encore respirer librement, assise sur une chaise en sachant qu’Aya est encore en vie, elle aussi — cela va de même pour Korone. Néanmoins, Korone ne les aurait pas rejoint si Deshya ne l’avait pas fait en premier lieu. Bref— Deshya admire un peu les posts sur son Twatter sans trop se préoccuper des dizaines de messages qu’elle a reçu — bien qu’elle compte le faire, surtout qu’elle a limité l’autorisation de la contacter à ceux qu’elle suit — et préférant trouver des memes, des vidéos ou images drôles, des sujets intéressants ou des dessins sympathiques. Pendant cinq bonnes minutes, rien de particulièrement sympathique ne se présente à elle, mais pour finir, son téléphone vibre. Lorsque Deshya vérifie qu’elle notification elle vient de recevoir, elle remarque que ce n’est pas un message d’Amora ou de quiconque, mais celle d’un nouveau post par ‘Waffie’ sur son Twatter.

‘Waffie’ est cette ‘à peine populaire’ Vtubeuse qui vient à peine de dépasser les 26K abonnés il y a peu, mais qui en a un peu plus sur son site de streaming. Joyeuse, amusante, marrante et toujours à l’école, c’est la Vtubeuse préférée de Deshya et cette dernière la suit depuis un petit temps. Quand Deshya se sentait mal à cause de ses nouveaux attributs de renard et son manque clair de normalité dans cette ‘nouvelle vie’, Waffie a réussi à la réconforter par douce voix, ses amusantes remarques et ses nombreux lives aussi drôles qu’étranges. Sa communauté est loin d’être petite, mais elle n’est pas forcément celle qui se fait le plus remarquer. Beaucoup d’entre eux sont des personnes bien dans leur monde ou qui aiment blaguer et ‘embêter’ Waffie, mais cela par compassion et amour. Généralement, ceux dans sa communauté ont un humour qui s’approche de celui de Waffie, ne cachent parfois leur excitation sexuelle — comme énormément de fans de Vtubers, malheureusement — ou ont des blagues qu’eux seuls peuvent comprendre, parlant de lives et de moments précis qui ne sont compréhensibles qu’en apprenant plus sur Waffie ou en l’ayant vu de ses propres yeux. Deshya elle-même ne comprend pas chaque blague, mais la majorité, elle le peut. Voyant que Waffie a posté quelque chose, Deshya se presse de tapper son nom d’utilisateur dans la barre de recherche — @WaffieVT — et espère de tout cœur que c’est l’annonce du prochain live. De ce qu’elle sait, cela sera simplement des réactions variées de vidéos, généralement sur des sujets plus sérieux comme l’espace, le fond des océans ou même la psychologie humaine, vu qu’elle ne souhaite pas simplement jouer à des jeux vidéos à chaque fois. C’est avec cet espoir que Deshya descend à peine sur la page de Waffie, passant sous son ‘post épinglé’ qui est l’horaire de sa semaine dernière, et c’est avec choc qu’elle lit ce qui est écrit. En réalité, lorsque Deshya eut terminé de lire le post, c’est une autre émotion qu’elle ressent—

Je m’appelle “JUGE”, je suis là pour me débarrasser des insectes que sont les Vtubers. L’humain derrière l’identité de ‘Waffie’ est en ma possession, dont le reste de sa famille.
Je vous propose un jeu : 6 personnes contre 1 ; bref, moi.
Si vous gagnez, je les laisse en vie. 1/3

 

Si c’est moi qui gagne, alors je les tue. Le jeu se passera demain à 18h, à un endroit que je donnerai à l’avance.
Si vous voulez essayer de participer pour sauver ‘Waffie’, mettez dans les commentaires un message avec ‘#JUGEVSUS’ et je choisirai moi-même 6 personnes. 2/3

Le jeu sera choisi entre 5 aléatoirement demain pour que ce ne soit pas possible de réfléchir à l’avance. Les spectateurs seront autorisés, mais je surveillerai l’endroit depuis un écran. Toute tricherie ou toute tentative de me retrouver mène à la mort de Waffie.

Sauvez-la, lol.

— C’est de la terreur. De l’horreur… De la peur.

CHAPITRE 57  
⎾Le Message Qui Choqua Une Communauté Entière⏌


Voici les trois tweets postés sur le compte de Waffie, se     suivant l’un après l’autre, vu qu’il est possible de poster un tweet en répondant au précédent en un coup, sur ce réseau social. Deshya est complètement immobilisée sur sa chaise, fixant son écran avec une bouche grande ouverte, mais qui ne montre plus le moindre signe de sourire. En analysant rapidement Deshya, jamais personne n’aurait pû dire qu’il y a à peine quinze secondes, elle souriait. Le moment même où elle a commencé à lire, tombant sur le simple mot « JUGE », Deshya avait déjà perdu la moindre excitation et la moindre joie en elle. Korone demande à sa grande-sœur si elle va bien, vu qu’elle s’est figée d’un coup, mais vu son manque de réponse, la petite-fille décide de lire à son tour ce qu’elle peut voir sur l’écran de l’ordinateur. Lorsqu’elle eut terminé, Korone garde grand ouverts ses yeux, comprenant dès lors la raison du choc de sa grande-sœur. Tout d’abord, elle se demande si cela est une ‘blague’ de mauvais goût ou une façon d’annoncer un prochain live en instaurant de la peur, mais préférant imaginer le pire, Korone tourne le visage vers l’arrière de la tête de Deshya

– G-Grande-sœur, e-est-ce qu’on doit prévenir Gatito ?!” demande-t-elle avec une touche de peur dans la voix.

Deshya ne répond pas tout de suite, mais vu le tic de son oreille droite de renard, Korone comprend qu’elle a été entendue. Le silence commence par être oppressant, surtout que vu que les fenêtres sont fermées, elles peuvent entendre à peine le vent souffler doucement à l’extérieur, encore moins les animaux et insectes nocturnes qui pourraient laisser leurs voix, chants et mélodies être entendues. Korone va répéter sa question, mais Deshya réagit enfin.

– …

Le silence est d’abord brisé par un bruit de grincement, cela qui provient des dents de Deshya. C’est un bruit qui est loin d’être strident, mais qui exprime avec clarté ce que ressent actuellement la fille aux longs cheveux roux. Suivi de cela n’est pas un bruit, mais les poings de Deshya qui se serrent fermement, enragée par ce qu’elle vient de voir sur l’écran. Tandis que le nombre de partage et de likes augmentent plus rapidement que la moyenne sur les tweets postés sur le mur de Waffie, Deshya finit par lâcher quelques larmes, mais cela n’est pas de tristesse, encore moins par la joie : ‘est la simple rage qu’elle ressent actuellement qui fait que de ses yeux coulent de l’eau. Ses larmes ne sont ni salées, ni sucrées, mais amères ; goût de la colère.

– Pourquoi…

Korone peut comprendre la réaction de sa grande-sœur, étant donné qu’un de ses modèles, une personne — car oui, derrière le modèle d’un Vtubeur se trouve un être humain — qu’elle adore, est sous menace de mort. Bien que Korone n’est pas encore certaine que ce message soit un vrai, Deshya, elle, semble le penser.

– Pourquoi tout ça arrive ?!

C’est un cri ne sort pas de sa gorge, mais de son cœur. Deshya frappe son bureau de son poing droit, évitant de frapper son clavier ou encore sa souris, et grince des dents encore plus puissamment, au point presque où elle en ressent de la douleur.

– Encore et encore…

Deshya touche un peu à sa souris et des clics retentissent, avant que très rapidement, elle écrit sur son clavier. Finalement, après avoir appuyé sur la deuxième plus grosse touche du clavier, cela pour envoyer le message qu’elle vient d’écrire, elle se retourne sur sa chaise, face à Korone qui est restée silencieuse depuis. Même si les larmes de Deshya ne sont pas aussi sévères, ne ruissellent pas sur ses joues aussi abondamment et n’ont pas une même signification qu’après son retour de l’affaire de l’enlèvement de Byron Elrick, cela en restent des larmes. Elle pleure quand même.

– Korone… Est-ce que je vais devoir vivre comme ça toute ma vie ?

– P-Pardon ?

Deshya se lève de sa chaise et prend Korone dans les bras, plaçant une partie de son sur le lit.

– Il y a des jours où tout est tranquille, où aucune enquête, aucun danger ne se pointent du doigt, mais une fois par semaine, au moins… Pourquoi est-ce que tout autour de moi…

Deshya serre Korone encore plus fermement.

– Waffie qui est en danger… Et quoi, après, ça va être vous ? Je vais perdre mes parents ? Je vais te perdre toi ? Amora ? Est-ce que vous allez tous être en danger où que j’aille… ? Et si le fait que je voulais aller à l’hôtel F-FEDER f-fait que… fait que Maruno a été… a été enlevé et… et…

Malheureusement, sa phrase ne se termine pas, mais cela n’est pas nécessaire pour savoir ce qu’elle veut dire. Korone, toujours sous le choc de ce qui a été écrit sur le mur de cette Vtubeuse, ainsi que de voir sa grande-sœur adorée pleurer de la sorte, ne répond d’abord rien. Toutefois, le temps passe et le silence est brisé uniquement par les sanglots de Deshya, alors la petite fille parle enfin.

– … Non, non. Tu ne vas perdre personne. Parce que tu pourras tous nous protéger et on te protégera tous, pas vrai ?

Deshya ouvre grand les yeux et Korone caresse les cheveux de la fille rousse, entre ses deux oreilles tombantes.

– C’est vrai qu’il y a beaaaaucoup d’enquêtes et tout ça qui viennent à toi, mais même si tu es aimant à enquêtes, tu es aussi un aimant à bons amis, à bonne famille, à tout un tas de bonne chance, mais tu es aussi aimante, hihi.

Korone sourit à pleine dent.

– Si la vie t’envoie plein d’obstacles, alors je suis ceeertaine que tu les passeras avec facilité et rapidement, comme ça, tu pourras profiter de la route ensoleillée le plus longtemps possible ! Jamais le moindre obstacle ne te gênera dans ton chemin !

Korone n’est pas certaine d’avoir choisi les bons mots, parce que même si elle ne peut qu’être un génie, cela est pour son intelligence et ses capacités à savoir des informations peu connues de tous ou à voir des détails que personne ne penserait réellement, dont sa facilité à imaginer des scénarios probables, mais qui ne passeraient dans les têtes des autres qu’après avoir ramassé un certain nombre d’indices. Cependant, malgré ce génie, Korone n’est pas la plus douée avec les mots, lorsque les émotions sont impliquées. Ici, ce sont ceux de Korone qui sont en jeu, mais aussi la douleur intérieure de Deshya. La petite fille n’est pas surprise que Deshya pense de la sorte, vu qu’elles en ont déjà parlé auparavant, même un peu après l’affaire de Byron Elrick. C’est une fille malchanceuse, mais uniquement dans ce domaine.

– Tu es chanceuse d’être une fille si formidable et même si la vie veut te bloquer la route, je suis certaine de certaine que tu brilles si foooort que tu vas brûler tout ce qui te gêne, même si ça prend du temps !

Korone n’a pas une autre façon de l’exprimer. Elle prend fermement Deshya dans ses bras à son tour, frottant sa joue contre celle de sa grande-sœur. Par finir, cela fait rire Deshya qui remercie Korone, se relève en séchant ses larmes et souffle longuement. Elle se tapote les joues et acquiesce.

– Tu as raison, petite-sœur ! Je me laisse aller, mais tu as raison !

– Je pense que c’est mieux,” avoue Korone. Je veux que grande-sœur pleure sur moi quand elle a besoin et sourit sur moi quand elle a besoin. Si grande-sœur doit dire quelque chose sur son cœur, je veux qu’elle le dise, sauf si c’est secret de chez secret.

Deshya se tourne à nouveau vers Korone, mais elle lui montre finalement son pouce, de même qu’un beau sourire. Toutefois, voyant que Deshya s’est calmée, Korone n’hésite pas à demander :

– Est-ce que ça ne pourrait pas être une simple blague ou je ne sais pas… ?

– Le message de ‘JUGE’ ?” demande Deshya.

Korone acquiesce, agitant ses cheveux à une cadence énergique. La fatigue de la petite-fille, sans surprise, n’est plus aussi forte désormais. Deshya s’assied sur la chaise de bureau et se retourne vers Korone.

– Waffie ne ferait jamais une blague comme ça, surtout que ce ‘JUGE’…

Deshya serre les poings.

– Il a déjà tué deux Vtubeurs et leurs parents dans les trois derniers mois.

– Un tueur en série… ?!

Deshya acquiesce.

– Il n’agit pas à Tetazo particulièrement, surtout que l’un des deux Vtubeurs dont je parle est un homme qui habitait dans le pays d’à côté… Il n’était pas forcément un Vtubeur connu non plus, malgré sa communauté assez connue des autres, vu leurs blagues parfois incompréhensibles.

– Et il n’est toujours pas arrêté ?

– La police le cherche encore maintenant, mais vu qu’il est très fort pour se cacher et que, disons… Disons qu’il est un taré qui propose des parties de jeux et s’il gagne, il tue, sinon, il laisse le Vtubeur et sa famille en vie, mais vu qu’aucune victime n’a encore été sauvée, on ne sait pas s’ils auront quoi que ce soit d’intéressant à raconter sur le criminel. Après, les sauver serait sûrement la meilleure manière de l’attraper ou d’avoir la moindre piste sur lui.

– Oh, je vois… C’est un homme horrible !! Pourquoi s’attaquer uniquement aux Vtubeurs, ça n’a aucun sens !!

– Je ne sais pas…. Mais je ne compte pas le laisser tuer Waffie. Même pas en rêve.

Toutefois, elle n’est pas certaine d’être prise dans le jeu. Bien évidemment, elle a envoyé un message sous le tweet de ‘JUGE’ et espère être choisie, même si cela n’est pas une chose qu’elle peut contrôler. Toutefois, si, par hasard, chance ou choix, elle vient à pouvoir participer dans ce jeu encore inconnu, alors elle donnera tout ce qu’elle a. Dans la partie de poker modifié — bien que maintenant qu’elle a bien plus appris sur le poker, elle a appris que ce qu’elles ont fait n’est même pas réellement du poker —, celle contre Tessa, elle a reconnu en elle ce côté de ‘folie’ qui peut l’aider dans des jeux stratégiques, mais peut-être même dans la vie de tous les jours aussi. Ce côté-là est sûrement son point fort, donc elle doit l’utiliser à son avantage et si elle est choisie à être contre ‘JUGE’, alors peut-être sera-t-elle elle-même un avantage dans ce ‘combat’. Dans tous les cas, une chose est certaine :

Deshya ne compte sûrement pas laisser ‘Waffie’ mourir, coûte que coûte.

Le jour suivant ouvre ses bras, mais malheureusement pour Deshya, son réveil n’est pas l’une d’une princesse de Disney : elle a mal dormi, ayant cauchemardé des cadavres qu’elle a vu dans le laboratoire abandonné, mais dont certains étaient les corps de Waffie. Ces cadavres étaient le modèle Vtubeuse de Waffie plutôt que l’humain derrière son compte, mais c’est parce que personne n’a jamais encore pû admirer la ‘vraie forme’ de Waffie. De plus, en se réveillant, Deshya se pose de nombreuses questions : comment est-ce que ‘JUGE’ a réussi à trouver la maison de Waffie ? Pareil pour les deux autres Vtubers ? Pourquoi aller aussi loin pour tuer des gens qui ont une simple passion comme le streaming avec des modèles de Vtubers ? Pourquoi joue-t-il de la sorte, laissant une chance à quiconque de sauver les victimes ? Certes, il est presque intraçable et généralement, les identités des Vtubers ne sont pas connues par la police, donc il est impossible d’aller sur place à temps pour les sauver. Il est peut-être possible de trouver d’où est parvenu les tweets de sa part, mais non seulement fait-il attention à ne pas pouvoir être localisé, mais en plus, même si cela était possible, l’endroit où les cadavres de ses victimes ont été retrouvé est souvent bien plus loin que l’endroit supposé où il aurait partagé les posts sur Twatter. Une personne horrible qui prévoit bien à l’avance, ne permettant pas quiconque de l’arrêter dans son acte… excepté si on le bat dans un jeu. Il est même possible que gagner contre lui ne serve à rien, vu que c’est lui qui a l’entièreté pouvoir : s’il décide quand même d’en terminer avec ses victimes, alors soit. Il n’y a rien qu’ils puissent faire excepté de simplement l’arrêter à temps, chose complexe. Il ne faut pas oublier que c’est un tueur en série, donc c’est quelqu’un de dangereux qui n’a sa place uniquement derrière des barreaux froids et à l’intérieur d’une pièce sombre et sans vie. Deshya n’a pas le talent informatique suffisant pour pouvoir ‘hack’ et trouver un moyen de localiser où se trouve ‘JUGE’, mais vu que la police elle-même n’a pas encore réussi, elle suppose que c’est tâche complexe…

Pour la nuit elle-même, les posts de ‘JUGE’ ont été vus et encore vus. De nombreux messages de courage pour ‘Waffie’, des demandes de partout pour que des joueurs très intelligents puissent participer et aider la victime de l’emprise de ce tueur en série se font voir. Même si ce n’est pas un sujet qui devient tendance, la communauté Vtubeur est complètement choquée, perturbé et effrayée. D’abord un Vtubeur de 12K abonnés, ensuite l’un d’environ 7K et maintenant 26K. De plus, ils n’ont aucun rapport entre eux excepté leur communauté un peu ‘spéciale’, mais pas forcément méchante ou même haineuse. Il n’y a aucune raison de les chasser comme ‘JUGE’ le fait. Les tweets de ‘JUGE’ reçoivent énormément de réponses, avec certains qui utilisent le hashtag demandé pour essayer de sauver ‘Waffie’, d’autres insultant le criminel lui-même. Le post qui est le plus liké, partagé et vu…

Est celui de Deshya elle-même.

D’autres ont de l’attention, mais tout le monde souhaite bon courage à Deshya si elle est choisie. Aucun d’entre eux ne savent ses prouesses dans les jeux stratégiques, mais ils sont tous confiants qu’une fille comme elle, si intelligente et réfléchie est un atout dans un tel combat. Après, est-ce que ‘JUGE’ va accepter de jouer contre elle ? Après, de toute façon, qu’elle soit choisie ou non, il y aura un total de six personnes différentes qui vont se défier à ‘JUGE’, donc si l’un des autres membres de l’équipe n’est pas à la hauteur… Alors Waffie et sa famille vont vivre leur dernier jour.

Deshya sort de sa maison en saluant Korone et sa mère, son père déjà au travail. Néro est actuellement à l’extérieur, dans le jardin, en train de jouer dans l’herbe en faisant ses commissions à n’importe quel endroit qui n’est pas sur la terrasse. En marchant dans la rue, Deshya regarde ses messages SMS et remarque qu’Amora lui a envoyé quelque chose ce matin : ses règles lui font bien trop mal pour qu’elle ne puisse venir aujourd’hui, probablement demain non plus. Deshya lui souhaite bon courage, surtout qu’elle a déjà vu Amora souffrir au point de tomber dans les pommes… Heureusement que Deshya ne vit pas cela, mais est bien plus tranquille de son côté. Ce n’est évidemment pas la joie, mais qui aime avoir ses règles ? Elle est juste déçue que les hommes ne vivent pas cela non plus… Cela serait une réelle équité entre les deux sexes. Le seul souci avec ses propres règles est qu’elle peut être fatiguée plus rapidement, mais rien qui soit réellement dérangeant. Vu qu’elle aime une fille et qu’elle ne veut pas forcément avoir d’enfant dans le futur, qu’il soit proche ou lointain, elle trouve parfois que ses règles sont inutiles. Toutefois, que peut-elle y faire ? Deshya a réussi à défier Dame Nature en devenant un réel hybride humain-animal, mais elle ne peut pas non plus briser certaines lois.

– Donc je ne vais pas à l’école avec Amora…

Deshya pensait peut-être lui parler de ce qu’il va se passer avec ‘JUGE’, vu qu’elles n’en ont pas parlé et les chances qu’elle sait ce qu’il se passe sont basses, surtout si elle n’a rien dit ce matin ou hier soir. De plus, elle aime beaucoup aller à l’école avec Amora : même si elle est très énergique et peut parfois ‘fatiguer’ Deshya, cela est actuellement un bon moyen de commencer la journée. Toutefois, heureusement pour la rousse, une autre fille s’approche d’elle :

– Salut, Deshya !

Cheveux blancs attachés et de gros yeux remplis de vie, voici Frie. Elle est habillée un peu différemment que d’habitude, un legging remplaçant les habituels pantalons et un chapeau mignon sur le crâne. Sinon, elle reste la même avec un pull chaud sur le corps.

– Oh, Frie ! Comment tu vas ?

– Je vais bien, merci.

Même si le côté un peu plus timide et gêné de Frie est loin d’avoir disparu de son corps, il est clair qu’elle ose plus parler et montrer ce qu’elle ressent, voyant Deshya comme une vraie amie. Deshya est heureuse de voir l’évolution de leur propre relation.

– Tu as l’air un peu fatiguée,” remarque Frie.

– J’ai pas trop bien dormi…” avoue Deshya.

Elle ne compte pas lui parler des cadavres qu’ils ont trouvés dans le laboratoire abandonné, vu que cela est préférable de rester entre les membres des Renards Associés et Raiji. Elle ne veut pas non plus parler de ‘JUGE’ et l’affaire de Waffie, mais d’un coup—

– Est-ce que c’est à cause des messages d’hier… ? Tu sais, avec ‘Waffie’.

— Frie parle justement de cela. Deshya lui demande comment elle sait une telle chose, surtout que Frie est du genre à dormir plus tôt et était donc sûrement endormi à ce moment-là.

– Quand je me suis réveillé, j’ai vu des messages de Raiji qui m’a envoyé les tweets,” explique-t-elle. J’ai vu le tien aussi.

– C’est vrai que Raiji est techniquement un ami de Frie et qu’il est aussi un fan de ‘Waffie’,” pense Deshya.

Ce n’est pas réellement un détail qu’elle a oublié, mais se souvenir de cela ce matin aurait été complexe. Cela n’est pas étonnant que le garçon ait rapidement vu la nouvelle, mais Deshya est étonnée qu’il ne lui en ait pas parlé à elle aussi. Est-ce la cause due au laboratoire et leur expérience, empêchant Raiji d’envoyer le moindre message à Deshya ? Cette dernière n’espère pas qu’il se sente mal en pensant que c’est de sa faute qu’ils ont vécu une telle chose. Certes, d’un côté, on peut se dire que c’est le cas, lui qui a proposé une telle expédition, mais en même temps, comment aurait-il pu croire que cette rapide visite, cette ‘chasse à la vérité’ viendrait à être si horrible ?

– C’est horrible…” avoue Frie. Il faut qu’on l’arrête maintenant, avant qu’il ne commette d’autres victimes !

Le sérieux sur le visage de Frie remplace sa timidité.

– J’espère que tu seras choisie et que tu battras ce criminel au jeu et qu’il ne tuera pas !! Je suis convaincue que tu peux le faire !

Même sans le dire, le ton de sa voix est suffisant pour que Deshya comprenne que Frie a grandement confiance en elle. Cette confiance a dû commencer du moment où Deshya a arrêté le criminel aux côtés de Tessa, durant l’affaire du train, mais a dû prendre plus de place en elle en voyant ses exploits. Deshya acquiesce.

– Si je suis choisie, je ne le laisserai pas faire. Je te le promets.

Deshya n’aime pas vraiment promettre cela, car rien ne dit qu’elle va réussir, mais c’est une façon d’elle-même se donner du courage. Du peu qu’elle s’est renseignée, ‘JUGE’ propose un jeu à deux, voire trois personnes — contrairement au grand nombre de six cette fois-ci — en permettant aux joueurs de sauver ceux qu’il a pris en captivité s’ils gagnent. Toutefois, dans les deux cas, les joueurs ont perdu, et cela à plate couture. Ce n’est pas de leur faute : jouer ensemble n’est pas simple et puis, même s’ils ont accepté de jouer, ils n’étaient pas des pros aux jeux, ni des ‘génies’ dont l’intelligence pourrait les aider. De plus, ‘JUGE’ ne semble pas être idiot ; loin de là.

– Je te soutiendrai, en tout cas !

Frie crie cela en serrant les poings devant elle, soufflant du nez avec une expression déterminée, souhaitant courage et bonne chance à Deshya en avance. La fille rousse la remercie et Frie sourit.

– C’est normal, je ne suis pas trop là pour toi, j’ai l’impression…

– Ah bon ? Je ne ressens pas ça.

– Je ne sais pas. Contrairement à Amora qui est toujours à tes côtés, Tessa ou Maruno que tu vois tous les jours ou même des personnes comme Raiji ou Alec, j’ai parfois l’impression d’être un peu de côté. Ce n’est pas ta faute, pas du tout ! Promis ! C’est juste moi qui me fait petite…

– Pourtant, tu es plus présente pour moi qu’Alec, ces temps-ci. Bon, c’est normal vu qu’il est avec ses nouveaux amis, mais quand même.

– Même ! Je ne dois pas te coller comme Amora le fait, je ne saurai pas et ce n’est pas mon intention, mais j’aimerai quand même… plus te soutenir. Tu vis beaucoup de choses, ces temps-ci, alors en tant qu’amie, je dois te soutenir !

– Maaaw, merci. Je veux te soutenir aussi, Frie.

– P-Pa-Pas besoin…

Rapidement, sa timidité reprend le dessus et les joues rouges de Frie le prouvent, si sa voix bégayante n’est pas suffisante à le capter. Deshya trouvera cela toujours très mignon et elle aime beaucoup ce côté de Frie, même si elle est consciente que la timidité n’est pas une chose que ceux qui la possèdent aiment. Toutes deux discutent encore un peu, avec une Frie qui promet de parler un peu plus avec Deshya, et une Deshya qui lui assure qu’elle est heureuse de l’avoir à ses côtés. Rapidement, elles arrivent à l’école, là-bas où le sujet de ‘Waffie’ ne crée pas une foule, contrairement avec l’affaire de Minos Kiyon ou celle contre ‘XIII’.

Comme prévu, impossible de se concentrer sur les cours. Trois problèmes interviennent dans l’esprit de Deshya, mais touche aussi Maruno : premièrement, c’est bien évidemment l’affaire qui concerne Waffie et sa famille. Vu que c’est aujourd’hui que ‘JUGE’ va annoncer qui seront les six joueurs et que même sans cela, comment ne pas être effrayé de la mort potentielle de gens qu’ils aiment ? Certes, Maruno a entendu parler du sujet en voyant le tweet de Deshya, et non parce qu’il suit activement cette Vtubeuse, mais une vie est une vie — alors lui aussi en est stressé. Deuxièmement, par cause des cadavres troués dans le sombre laboratoire. Cette vue est toujours abominable dans leur esprit, mais cela le sera toujours. Il est certain que dans les jours à venir, voire semaines, ils n’y penseront plus, mais cela ne restera qu’à tout jamais une horreur visuelle. La raison pour laquelle eux deux sont plus touchés par cela que Tessa ou Raiji n’est pas leur sensibilité, mais le troisième point qui font qu’ils ne peuvent pas réellement se concentrer : à propos du marché noir et des 5 Doigts. Vu qu’ils sont qu’eux deux à avoir appris la vérité, ils sont les deux seuls à en être perturbés. Maruno a hésité à en chercher plus sur internet, mais non seulement les chances de découvrir quoi que ce soit est minime, mais de plus, s’il le voulait vraiment, il devrait se diriger vers le Dark Web ou un endroit aussi dangereux que cela — bref, il ne compte pas s’y risquer. Deshya, elle, n’a même pas hésité sur ce sujet et ne veut que garder cela dans un coin de sa tête, ne préférant pas aller de ce côté pour l’instant. Certes, la possibilité que ce sont eux qui l’ont transformé et garder en captivité pendant cinq mois — si c’est bien ce qu’il s’est passé — n’est pas impossible, pas impossible du tout, mais tant qu’elle n’a pas la moindre preuve ou piste pour emprunter un chemin si dangereux, alors Deshya préfère ne pas toucher le sujet du marché noir.

Plutôt rapidement, en tout cas moins lentement que ce que Deshya avait prévu, le temps de midi sonne ses cloches. Les cartables sont empiffrés de fardes, cours et plumiers, tandis que les élèves les attrapent et hâtivement sortent des classes. Pour certains, le mardi est la pire journée, juste après le lundi qui est le retour des cours et juste avant le mercredi, milieu de la semaine scolaire et qui permet un repos mérité durant l’après-midi. Le mardi est comme la période après le début d’une tempête, mais avant qu’elle ne se calme, durant ce qu’on peut croire le climax. Mais hélas ! voilà le jeudi qui se présente ensuite, la réelle calamité de la semaine, le centre des sept jours et rarement une partie de plaisir pour quiconque. Au moins, le temps de midi est une pause qui permet de survivre la première partie de la journée, se préparant à la seconde, de même que rassasier les ventres. Vu qu’Amora n’est pas là, qu’Abdoul, Minoru et Alec sont de leur côté et Lam va acheter une mitraillette — la baguette, pas l’arme — dans le magasin d’à côté, Deshya décide d’aller manger à l’extérieur avec Tessa et Maruno à nouveau, cette fois-ci accompagnée de Frie. Elle aurait bien proposé à Raiji de les accompagner, mais il a rapidement disparu des classes. Elle est certaine que ce n’est pas en raison de l’éviter, vu qu’ils ont un peu discuté durant la pause de récréation, bien qu’ils n’ont pas ramené le sujet de ‘Waffie’ durant les deux courtes minutes de blabla. Deshya, Tessa, Maruno et Frie sont désormais assis les uns à côté des autres sur un banc, profitant du soleil extérieur et de l’air qui se refroidit chaque jour petit à petit. Les cinq premières minutes sont assez silencieuses, avec Frie qui n’ose pas trop parler et Tessa qui profite bien trop de sa fricadelle pour embêter Maruno. Ensuite, c’est le bruit d’une notification depuis le téléphone de Deshya qui retentit, brisant ce presque silence. Rapidement, elle l’attrape et regarde son écran, cela sous le regard intrigué de ses amis. Quelques secondes passent et là—

– !!

Deshya ouvre grand les yeux, un sourire inconscient se forme sur son visage. Avant même qu’on ne puisse lui demander ce qu’il se passe, Deshya montre son téléphone avec grande joie et leur explique :

– J’ai été prise !! Dans les six joueurs, j’ai été prise !!!

Elle est donc membre de l’équipe qui va défier ‘JUGE’ dans un jeu pour sauver Waffie et sa famille. Tessa et Maruno vérifient rapidement leur téléphone à leur tour, sous le regard surpris de Frie, mais tous deux râlent.

– Raaah, j’ai pas été pris !

– Et j’m’étais créée un compte pour ça…” soupire Tessa.

Ils ne cachent pas leur déception, mais tournent finalement leur visage vers Deshya en souriant

– Au moins, notre Deshya va participer, hein ?” lui dit la fille aux longs cheveux mauves.

– Je ferai tout pour gagner ! Je ne laisserai pas ce ‘JUGE’ commettre une nouvelle victime,” rassure Deshya.

Son envie de jouer ne vient pas de son amour pour le jeu, mais parce qu’elle considère qu’elle peut être un atout dans le moindre jeu : même si elle ne s’y connaît pas bien ou joue une version très modifiée, comme lors de la partie de poker contre Tessa. Si elle peut être un avantage dans l’équipe, alors bien évidemment qu’elle souhaite y être. Le jeu est toujours inconnu, mais par chance, il est possible de tomber sur l’un que connaît bien Deshya. Si ce sont des échecs, par exemple — même si elle ne voit pas comment faire un six contre un —, alors elle va clairement être un grand atout. Cependant, peu de chances que cela n’arrive…

– Je suis contente que tu puisses participer !” avoue Frie. Tu as intérêt à gagner, maintenant ! Enfin, je ne veux pas te mettre trop de pression, tu sais…

Frie baisse doucement le visage, mais Deshya la remercie en promettant de non seulement faire de son mieux, mais aussi réussir à gagner cette partie, même si cela n’est pas entièrement sur ses épaules. Elle ressent déjà un début de pression, mais elle ne peut pas laisser ce même sentiment l’affecter, même si pour l’instant, cela n’est pas trop grave.

– Imagine qu’c’est une partie de poker à nouveau,” plaisante Tessa.

– Qui sait…” lâche Maruno.

La coïncidence serait plutôt grande et de plus, Maruno ne sait pas si une partie de poker pareille est possible. Il suppose que cela l’est, mais il se demande comment cela serait organisé.

– Deshyaaa !!

Un cri retentit d’un peu plus loin, d’un garçon qui court vers eux en agitant son téléphone dans sa main.

– T’as été prise comme moiiii !!

– T-Toi aussi ?!

Le garçon qui s’approche d’eux, qui porte des vêtements différents qu’hier, d’un pull similaire à celui de Tessa, mais avec un pantalon noir sur les jambes, s’arrête finalement devant le banc et acquiesce avec joie.

– J’ai été pris aussi !! Je ne reconnais pas les quatre autres vu que leurs comptent n’offrent rien de particulier tant qu’à leur identité, mais toi, aaah toi aussi !!

Le garçon qui se présente à eux… est Raiji Harmony.

– Raiji qui attrape le syndrôme de Deshya et attire les problèmes vers lui…” laisse sortir Maruno en le regardant.

– Il ne faut pas que cela n’arrive !” lâche Frie d’un cri étouffé. De plus, tu appelles ça le syndrôme de Deshya ?

– Je disais ça sur le coup, ahah ! Je ne pense pas que quiconque ici soit maudit.

Pendant qu’ils parlent, Tessa s’est mise à gonfler les joues, chose que remarque d’abord Raiji.

– Pourquoi elle boude ?

– Vous avez été pris tous les deux, mais pas nous. Imagine si on était tous les quatre ensemble. On aurait gagné en quelques minutes.

– Cela aurait été plus simple, j’avoue,” parle Frie.

L’excitation autour d’elle lui fait oublier sa propre timidité, donc elle n’hésite pas à discuter et à réagir avec eux. Raiji s’assied à côté de Deshya, sans demander la permission, et range son téléphone dans la poche de son pantalon noir.

– Et si on y allait tous ensemble, comme hier ?” propose-t-il.

– Comment ça ?” demande Frie.

– Il semblerait que cette fois-ci, la partie se passera dans l’ancienne salle de théâtre qui se trouve toujours dans le centre de Shiru,” explique Deshya. Le jeu devrait commencer dans les environs de 18h, donc on a le temps.

– Oh, la salle qui devait être en réparation, mais le maire a décidé de la laisser comme telle pour l’instant. Ne va-t-elle pas connaître ses derniers jours bientôt, vu qu’elle prend trop de place inutilement ?

Maruno acquiesce à la question de Frie, mais ajoute :

– Ce n’est pas un endroit si inutile, vu qu’il permet à beaucoup de sans-abris de s’y protéger. Par contre, il est clair que ça prend beaucoup de place, surtout que c’est une salle bien complexe. J’y étais allé une fois avec mes deux mères, plus petit.

– Si c’est là-bas, on peut prendre le même train qu’on avait pris pour aller chez Amora,” propose Tessa. On devrait pas retomber sur des bombes ou un criminel, donc ça va.

– Si on tombe sur un criminel encore comme ça, Tessa, je te jure qu’on doit jouer au LOTTO, toutes les deux…

La remarque de Deshya fait rire Tessa aux éclats, ce qui amuse aussi les autres à leurs côtés. Ils acceptent d’y aller ensemble, excepté Frie qui s’excuse : elle a promis de s’occuper de son neveu, cet après-midi, surtout qu’elle doit avancer sur un projet. Ils lui souhaitent bonne chance et, décidés, ils iront tous les quatre ensemble à l’ancienne salle de Shiru.

Cependant, contre toute attente, lorsqu’ils partent ensemble de l’école, après la fin des cours, Frie les rejoint. Elle leur explique avec joie que son neveu est avec sa sœur, vu qu’au final elle n’a nullement besoin de travailler aujourd’hui, donc Frie a le champ libre ce soir ! Maruno lui demande à propos de son projet, mais Frie avoue qu’elle aura le temps de finir cela demain et au fond, vu que c’est sur son téléphone, elle peut y travailler dessus dans le train de l’aller et du retour, ainsi qu’avant d’aller dormir. Cela convient à tout le monde et même leur fait plaisir, donc ils vont tous ensemble à la gare. Sans grande surprise, ils ne sont pas les seuls qui y vont : certaines personnes ont entendu parler de ce jeu entre ‘JUGE’ et six ‘sauveurs’, donc ils veulent vivre le moment en vrai. Contrairement à la partie de poker modifiée avec Tessa, cette fois-ci, le nombre de spectateurs va probablement atteindre au moins la centaine, si pas plus. Cela met de la pression sur les épaules de Deshya et Raiji, mais ils ne sont pas du genre à trop s’en inquiéter, donc leur performance ne devrait pas en être trop affectée. Ce qui va jouer le plus sur leur mental est bien évidemment l’enjeu : perdre signifie que ‘Waffie’ et sa famille vont mourir. Ce n’est pas une blague, ce n’est pas un jeu : ils ne peuvent pas se permettre de les laisser subir un tel destin ! Même si c’était un Vtubeur ou un vidéaste qu’ils ne connaissaient pas, ils ne changeront pas d’avis : une vie est une vie.

– Tiens, à quel point t’es bon aux jeux d’strat ?” demande Tessa en s’adressant à Raiji, assise à côté de Deshya.

Frie est à côté de Raiji, tandis que Maruno est juste à leur côté, en regardant un peu plus sur ‘JUGE’ sur son téléphone. Toutefois, il écoute et participe aux conversations de ses amis.

– Hmmmm…

Raiji se tapote la joue en réfléchissant.

– J’sais pas à quel point Deshya est forte, mais je pense que je n’aurai pas son niveau, mais va savoir. J’suis du genre à bien suivre un plan qu’on m’explique ou le créer moi-même, mais si je ne connais pas bien le jeu, il m’faudra sûrement un peu de temps pour bien réfléchir. Après, j’pense que j’apprends assez vite et j’suis loin d’être le plus des idiots, pas vrai ?

– T’es un idiot intelligent, j’dirai,” avoue Tessa.

– Aah ?

– Y a personne d’autre qu’un idiot qui risquerait sa vie comme ça en faisant totale confiance à ses amis. Et encore, t’es qu’une connaissance pour moi, jusqu’ici, y a que Deshya qui était réellement ton amie.

– Je sais…

Raiji soupire, mais il relève rapidement la tête.

– Mais là, c’est pas ma vie en jeu. Je ferai confiance en Deshya et aux autres de mon équipe pour qu’on gagne, mais si la vie de quelqu’un d’autre est sur la ligne, alors je ferai tout pour la sauver. Même si j’dois me sacrifier.

Des mots sincères. Des mots qui viennent du cœur et qui ont reçu beaucoup de réflexion dans le passé.

– Ne te sacrifie pas !” lâche Frie, triste d’entendre ça.

Tessa fixe attentivement Raiji, mais finit par tourner le visage vers la fenêtre, admirant l’extérieur.

– Se sacrifier pour sauver la vie d’quelqu’un d’autre…

Elle ne dit rien de plus, mais Desha sait que si Tessa lui aurait dit que c’était idiot, elle ne l’aurait pas cru. Les simples actions de Tessa lui ont prouvé son courage.

Il faut aussi savoir qu’avant même le début des cours de l’après-midi, à la fin du temps de midi, le père de Deshya lui a envoyé un message comme quoi il se trouve à Shiru avec d’autres policiers. Même si ‘JUGE’ lui-même n’y sera pas, vu qu’il utilisera encore une fois son ordinateur pour voir ce qu’il se passe et jouer à distance, énormément de spectateurs se trouveront à l’endroit. Il est impossible à confirmer que ‘JUGE’ a choisie une telle salle justement parce que sa grandeur permettrait une grande foule qui observerait le jeu ou pour une autre raison, mais qu’importe de comprendre la pensée d’un tel criminel : sa logique n’est pas celle du commun des mortels. Ce qui est certain, c’est que la police est nécessaire sur place pour éviter toute mutinerie pour une raison ou une autre, régulariser la foule et donc qu’ils ne fassent rien de dangereux, ainsi que s’assurer la protection des six joueurs. Si ces derniers viennent à perdre, qui dit que des gens ne vont pas s’amuser à les insulter, les menacer et même agir en fonçant sur eux ? Il est même possible d’imaginer l’un ou l’autre qui détient une arme sur lui. Bref, la police est plus que nécessaire là-bas.

La police de Shiru n’est pas l’une qui est plus reconnue que cela, mais elle est loin d’être idiote ou incompétente. Elle n’est pas au niveau de celle de Tetazo ou celle de Lière, mais bien plus ‘indépendante’ que celle de Sléron ou celle de Teuhl. Ce que cela signifie est qu’ils ne demandent rarement d’autres villes, vu qu’ils savent bien se débrouiller seuls. Cependant, pour certaines affaires plus importantes, ils peuvent être assistés par d’autres polices, contrairement à celle de Tetazo ou de Lière qui n’en demandent presque jamais. Si Gatito va à Shiru pour aider la police là-bas à gérer tout cela, ce n’est pas une question d’incompétence de leur part ou un manque de confiance de la part de l’inspecteur de Tetazo : de l’aide supplémentaire est toujours sympathique et honnêtement, il veut juste protéger sa fille de plus près.

Les cinq adolescents descendent du train ensemble et discutent un peu sur le chemin, réfléchissant déjà à des sortes de stratégie au cas où le jeu est ceci ou cela. Cette conversation ne durera cependant pas très longtemps, vu que rapidement, ils arrivent à l’endroit prévu.

– J’aurai voulu aller dans cette salle quand elle était encore opérative…” avoue Frie.

– Je comprends,” lâche simplement Raiji.

C’est un grand bâtiment dans la ville, entouré de maisons qui sont typiques à Bélium et aux pays occidentaux de ce continent. L’ancienne salle de théâtre est à l’intérieur de cet endroit qui ne s’élève pas à des mètres et des mètres de haut, mais qui s’allongent sur longue taille, un clocher inutilisable au-dessus du bâtiment. Les portes d’entrée sont déjà ouvertes, étrangement bien entretenues, avec un tapis rouge déchiré par le temps, déchiqueté par les animaux et sale par ceux qui marchent dessus, qui invite quiconque à entrer. On dirait presque une école mixée à un cinéma plutôt qu’une salle de théâtre, mais l’esthétique est originale et agréable. Sans qu’il ne soit réellement besoin de le préciser, la beauté de cet endroit était tout autre quand encore des pièces s’y jouaient et que la vie y régnait. Désormais, uniquement des sans-abris qui profitent de la chaleur de l’intérieur, les animaux de la vie qui y amassent les provisions, des délinquants qui s’amusent à s’entraîner dans leur hobby de graffitis ou à tout casser en s’amusant, ainsi que des ‘chasseurs de fantômes’ — rarement professionnels, vu que l’endroit n’a rien de particulier, ni aucune horride histoire — ne viennent à l’intérieur. Toutefois, aujourd’hui est particulier : une grande foule se trouve devant le bâtiment, avec nulle âme qui n’est actuellement autorisée à l’intérieur. Mélangés aux spectateurs excités se trouvent des personnes plus droits, sérieux et aux tenues identiques : les policiers de Shiru. L’un d’eux est toutefois différent, parce que c’est un inspecteur qui vient de Tetazo :

– Papa !

Deshya remarque Gatito et se dirige vers lui en agitant la main au-dessus d’elle, allant à sa rencontre. Ses quatre amis la suivent de près, mais ne pressent pas leurs pas.

– Oh, tu es arrivée, Deshya,” remarque son père.

– Saluuut !

– Bonjour Korone. Dis, papa… Aaaah ?!

Après avoir salué sa petite-sœur, Deshya cligne des yeux, et ensuite baisse la tête vers elle. Comme à son habitude, Korone sourit comme si la vie était la plus belle et colorée de toutes les vies possibles. Peut-être qu’elle ressent une chose similaire, vu qu’elle peut vivre heureuse aux côtés d’une famille si aimante.

– Qu’est-ce que tu fais ici, Korone ?!

– Oh, c’est la p’tite qui était avec nous durant la partie de poker !” remarque Tessa. La nouvelle p’tite-sœur adoptive de Deshya.

– Oooh, plein de gens !

Korone se tourne vers les amis derrière Deshya, oubliant totalement de répondre à la question de sa grande-sœur.

– Il y a madame trop cooool, monsieur le beauuuu-gosse, monsieur Raijiji et madame blanche neige !

– Blan-Blanche neige… M-Moi ?

Frie se pointe du doigt et Tessa éclate de rire à nouveau, accompagnée de Maruno et même de Raiji. Deshya veut aussi rire, mais voyant le manque de sérieux chez eux, Gatito décide de s’éclaircir la voix et répond à Deshya à la place de Korone.

– Elle insistait pour venir ici et te voir jouer, mais ta mère aussi le voulait, donc je les ai accompagnés toutes les deux.

Deshya a prévenu son père par message quelques minutes après avoir su qu’elle était choisie, durant la pause de midi. Elle suppose que c’est pour cela qu’il a décidé de venir ici aussi, malgré la compétence et le effectifs de la police de Shiru.

– Elle est où maman ?” demande Deshya.

– Elle est déjà à l’intérieur avec d’autres personnes, mais on n’autorise pas grand-monde encore vu qu’on vérifie que tout va bien. Avec ta mère, on venait souvent ici pour regarder des pièces de théâtre, donc j’ai accepté de le laisser admirer l’intérieur d’une zone où tout est sécurisé.

– La police pense que ‘JUGE’ aurait pû mettre des bombes ou un système dangereux ici, nous emmenant tous dans un piège ?” demande Maruno.

Le policier pourrait lui répondre que cela ne le regarde pas, mais il ne peut pas se permettre d’agir comme ça avec ni Tessa, ni Maruno, ni même Raiji, vu qu’il est une des raisons que sa fille est encore en vie, pour l’instant.

– La police de Shiru le pense, mais personnellement, de ce que j’ai pu rapidement apprendre sur ‘JUGE’, je ne le pense pas,” répond-t-il. Toutefois, cela est toujours mieux de vérifier.

– Quoi que ce soit de trouver ?” demande ensuite Tessa.

– Rien, excepté que la salle principale a été nettoyée en son sein, une table assez moyenne a été placée avec cinq jeux de société qui ne sont même pas ouverts.

Gatito croise les bras.

– Il y a aussi un ordinateur qui n’est connecté qu’à une prise de courant pour le laisser allumer, mais même s’il est allumé et semble être connecté à une webcam, une note dessus explique bien qu’essayer de le tracer viendrait à la mort des trois personnes prises en otage. Même s’il semblerait qu’une excellente informaticienne peut essayer de trouver la localisation à distance, elle ne le pourra que lorsque la webcam sera allumée et que cela sera donc connecté du côté de ‘JUGE’. On suppose que c’est depuis cet ordinateur qu’il va pouvoir jouer avec vous six.

– Et vous ne savez pas encore l’identité de Waffie ?” demande cette fois-ci Raiji. Même si ce n’est pas quelque chose que je veux savoir, cela aiderait à trouver une piste d’où elle est retenue.

Deshya prend Korone dans les bras, elle qui demandait en sautant les bras en l’air, et Gatito répond en même temps au garçon :

– J’ai rapidement posé la question à mon chef et il semblerait que si, des amis proches de Waffie qui savent que c’est elle ont donné son adresse et tout, mais il n’y a personne là-bas et aucune piste sur le criminel. Il y a des traces d’effraction et leur chien a été endormi depuis une drogue à l’intérieur d’un morceau de viande qui le lui a été lancé, mais aucun résultat actuellement. Cependant, rien ne dit qu’ils ne vont pas trouver quelque chose dans les minutes ou heures à venir, ou peut-être même le savent déjà.

– … Je vois.

Korone a déjà entendu tout cela, mais les adolescents l’apprennent uniquement maintenant, évidemment. Il y a donc toujours de l’espoir qu’ils découvrent plus sur ‘JUGE’ et arrivent à le pister à temps, alors ; c’est une bonne nouvelle. Une réelle bonne nouvelle. Il faut espérer que ce tueur en série ait fait une bêtise, alors… Qu’on puisse le traquer.

– J’aime beauuucoup tes cheveux !” complimente Korone, observant Frie.

– Les tiens sont superbes aussi !” répond l’adolescente, heureuse d’entendre cela. Tu as des cheveux blancs à ton âge, on peut se les décolorer aussi tôt ?

Korone secoue la tête.

– C’est naturel ! Je suis une fille spéciale, hihi !

Excepté Tessa qui ne connaît pas bien Korone, personne ne viendrait à le nier, surtout Raiji. Ce dernier est toujours intrigué sur la façon dont la petite fille a réussi à placer le pistolet dans ses mains en le frappant fortement par terre, allant jusqu’à viser parfaitement la main du criminel dans le noir, ne prenant pas plus d’une seconde pour tirer. Raiji se pose encore des questions sur elle et honnêtement, jamais n’arrêtera-t-il jusqu’à ce qu’il sache la vérité. Cependant, nullement compte-t-il insister pour recevoir les réponses à ses questions.

– …

Deshya admire les cheveux de Korone, se demandant aussi comment cela se fait qu’elle a des cheveux de cette couleur-là, vu que ce n’est pas censé être naturel. Ce ne sont pas des cheveux blancs de stress, qui seraient un peu plus gris, ni des cheveux blancs de vieillesse, mais réellement des cheveux purs comme la neige. En réalité, malgré ce qu’elle pense, ils peuvent être des cheveux de stress, mais ils n’ont pas l’air d’être cela. Deshya aussi se demande si ses yeux mauves sont à cause de la gêne d’Alexandrie ou une autre raison…

– Grande-sœur a dit que Raijiji allait aussi jouer. Raijiji a intérêt à jouer bien, sinon je le frappe de mes petits poings !

Korone fait semblant d’être agressive en tapant en direction de Raiji. Ce dernier s’agenouille par terre et se tient les poings, suppliant à Korone de l’épargner, mais Korone se met à rire telle une diva.

– Mwah. ah. ah ! Je ne puisse guère indulgencier un pécheur, tel un juge ne peut acquitter un criminel. Ô sir Raiji, si vous voulez ne décevoir cette dame que je suis, alors triomphé. Alors remportez la victoire ou assujettissez-vous à mon humble être !!

– … ?

– …

– Je suis un génie et j’ai aucune idée d’ce que veut dire assujettissez-vous.

Tessa met les mains derrière la tête.

– J’ai menti.

– P-Pourquoi tu mens pour dire que tu as menti la seconde d’après… ?” demande Frie.

– Car fallait bien que quelqu’un dise un truc. Hey, Deshya, arrête de donner d’la weed à ta p’tite-sœur, c’est pas cool.

– Je ne fais pas ça !!” crie la fille rousse.

Tout le monde se met à rire, mais Raiji garde un œil sur Korone. Même si elle aurait pû répéter une phrase entendue à la télévision, il est peu probable que ce soit le cas et qu’elle puisse tout répéter de la sorte. Bref, Korone est réellement une fille très étrange. A-t-elle réellement huit ans ? Est-ce que Deshya sait quelque chose sur elle, ce qui fait qu’elle est dans leur famille, désormais ?

– … Je ne peux pas rentrer dans leur vie privée, mais…

Avant qu’il ne puisse terminer sa pensée, une fille crie le prénom de Maruno en lui sautant dessus, le prenant dans ses bras, un sourire jusqu’aux oreilles. Tout le monde la reconnaît rapidement :

– Ch-Chou, qu’est-ce que tu fais ici ?!

– C’est madame belle-gosse !” crie Korone.

La fille à la peau foncée, aux cheveux attachés et soignés, dont des yeux bleus rayonnants et magnifiques, impossible à rater. La fille est enfant unique d’une famille très riche :

– N’est-ce pas notre Aya ?” sourit Tessa.

‘Aya Deroom’, petite-amie de ‘Maruno Uffite’. Justement, elle est en train de prendre dans ses bras, mais aussi est enlacée par son copain. Ils sortent ensemble depuis un peu plus de cinq mois maintenant, mais se connaissent depuis plus longtemps, même si cela ne fait même pas un an. La fille finit par l’embrasser rapidement sur la bouche, osant le faire devant tant de gens, et ensuite recule d’un pas en regardant tout le monde.

– Il y a même la petite Korone !” remarque-t-elle.

– C’est moi !

Aya agite sa main pour la saluer avant de s’approcher joyeusement de Deshya, la câlinant à son tour.

– Saluuut Deshya ! Comment tu vas ?

– Je vais très bien et toi ?

– Je vais bien aussi, merci !

Depuis l’affaire de l’hôtel, elles ne se sont pas parlées énormément, sans pour autant dire jamais. Aya a passé beaucoup de temps avec son petit-ami ou avec ses parents, vu ce qu’il s’est passé à l’hôtel FEDER, mais elle a dû aussi discuter avec un psychologue à propos de ses peurs. Heureusement pour Aya et ses parents, mais aussi leurs proches, aucun traumatisme — en tout cas, aucun repéré. Cela ne signifie pas qu’Aya n’a pas parfois peur ou qu’elle ne fait pas plus attention à ses alentours, mais pas au point où elle est devenue paranoïaque, effrayée de tout ou même apeurée de son copain. Encore une fois, heureusement, elle se comporte bien, même si Deshya ne lui a pas parlé plus que cela.

– Oooh, Tessa va aussi participer au jeu ? En plus, je vois… Frie, c’est bien ça ?” demande Aya.

– Oui, bonjour.

Poliment, Frie s’incline vers Aya pour la saluer, ce qui fait plaisir à la fille qui se sent honorée. Elles ne se connaissent pas vraiment, mais elles se sont rencontrées à un autre hôtel, celui de ‘Beleza Verde’. Malheureusement, à cause du meurtre en chambre close qui s’est produit là-bas, elles n’ont pas pu faire connaissance plus que de simples et courtes présentations. Le fait qu’Aya se souvienne de son prénom malgré cette courte rencontre est une chose déjà assez étonnante. Elle se tourne ensuite vers le garçon aux cheveux noirs et yeux verts, mais pas son copain, mais l’autre.

– Et… Je ne pense pas qu’on se connaisse, si ?” demande Aya.

– Je m’appelle ‘Raiji Harmony’, j’suis dans la classe de Deshya est son ami. Après, j’suis plus un pote qu’autre chose pour Maruno et Tessa, j’pense même que je suis une connaissance et pas plus.

Il se pointe ensuite de l’index droit, se tapotant le torse.

– Je participe au jeu contre ‘JUGE’, comme Deshya !” explique-t-il.

– Eeeeh, vraiment ?! C’est excitant à savoir !!

Pendant qu’Aya se trémousse en parlant aux autres, Korone demande à Deshya pourquoi elle est ici. La fille rousse hausse les épaules, mais heureusement pour elles, Maruno pose justement la question. Au même moment, Deshya se souvient qu’Aya est aussi une fan de ‘Waffie’ et parfois elles se parlent dans le tchat, justement. Toutefois, à la grande surprise de Deshya ce n’est pas la raison qu’elle est ici :

– J’ai été prise comme joueuse, comme vous deux !!

Ce n’est pas en tant que spectatrice, mais en tant que joueuse. Tout le monde montre un certain choc, même Gatito, mais de ceux qui viennent d’ouvrir grand les yeux, c’est Maruno qui montre l’émotion la plus sévère et intense d’eux tous. Il ouvre la bouche, mais il ferme finalement les poings et serre les dents.

– …

Cependant, il prend une grande inspiration et soupire tout en fermant les yeux, reprenant un sourire. La raison qu’il a agit de la sorte n’est ni jalousie, ni énervement, car comment pourrait-il ressentir cela envers la fille qu’il aime tant ? Sa copine d’amour ? Non, il y a quelque chose d’autre.

– Oooh, tu vas jouer avec nous !” lâche Deshya. Au moins, on se connaît déjà tous les trois. Enfin, je vous connais, c’est vrai qu’Aya ne connaît pas Raiji et vice versa.

– C’est à notre avantage !” sourit Raiji, serrant un poing signifiant déjà une victoire pour eux.

– Pourquoi tu ne me l’as pas dit ?” demande Maruno, intrigué sur ce point.

Ils aiment bien faire de petites cachoteries et ne pas tout révéler à l’autre parfois, mais il reste surpris qu’elle ait décidé de ne pas lui parler de tout cela. Aya se tourne vers lui et elle montre un certain regret sur son visage, l’un qui est sincère.

– Je voulais juste te faire la surprise… Je ne souhaitais pas te cacher quoi que ce soit…

– Je ne le prends pas mal, je demandais juste !

Maruno se met à caresser les cheveux de sa copine avant de lui embrasser le front, ce qui fait sourire tout le monde. Tessa regarde les trois joueurs devant elle.

– Donc sur les six joueurs, on a Deshya qui devrait être un très grand avantage, Raiji qui a l’air d’être plutôt intelligent et Aya… Aucune idée de ses compétences. Vu qu’elle est toute mimi, j’suppose qu’elle ne sera pas forcément un avantage, mais j’espère qu’elle sera pas un désavantage non plus…

Le temps passe petit à petit et les trois autres joueurs ne viennent pas à leur rencontre. Il est désormais 17h50 et depuis quelques minutes, la foule entre dans le bâtiment, autorisée à enfin pénétrer cet intérieur abandonné. Le groupe de Deshya reste ensemble, mais lorsqu’il ne reste plus beaucoup de gens à l’extérieur, ils décident d’y aller. Les seules personnes qui n’ont pas encore entré l’ancien théâtre sont en train de fumer, des policiers qui gardent les lieux ou simplement des civils qui discutent entre eux ; certains sont même juste perturbés de voir tant de gens venir ici, vu que le théâtre est censé de ne plus être fonctionnel et l’utiliser pour performer est littéralement illégal. Ils se renseignent donc en discutant avec les policiers ou passent juste sans y prêter plus d’attention, ne voulant pas déranger les forces de l’ordre.

– Allons-y. Le jeu va bientôt commencer, vous avez besoin d’y être,” leur ordonne Gatito.

Ils acquiescent et vont tous ensemble à l’intérieur. Korone est depuis descendue des bras de sa grande-sœur, prenant désormais la main de l’homme roux et le suit. Elle aurait aimé jouer avec sa sœur, Raijiji et madame la belle-gosse, mais vu qu’elle n’a pas tenté de participer et que de plus, cela aurait probablement été très étrange… Il est préférable dans tous les cas qu’elle ne soit pas dans les six joueurs. Enfin, ils entrent dans le grand couloir abandonné, passant sur le tapis rouge en très mauvais état. Ce qui aurait pû être une visite magnifique et une vue sublime est désormais un spectacle de pitié. Seules les araignées et les quelques insectes qui ont pris habitation ici souhaiteraient performer le moindre théâtre. Tout est désolât, l’air n’est pas agréable à respirer, causé par la poussière qui tournoie et danse autour d’eux. Gatito se souvient du gigantesque lustre autour de leur tête, celui qui illuminait la pièce entière de ses rayons chaleureux. Il n’existe même plus, ne se trouvant ni par terre, ni accroché au plafond. C’est un endroit qui ne mériterait peut-être pas de description, tellement sa vue est pitoyable et manque la moindre lumière, même celle du soleil ne l’atteint pas correctement. Avançant tous ensemble, deux groupes se séparent : Deshya, Raiji et Aya vont ensemble du côté gauche pour rejoindre la grande pièce, Gatito, Korone, Tessa, Maruno et Frie vont du côté droit pour rejoindre les grandes salles d’à côté. Ce qui est étrange avec ce théâtre, c’est justement qu’il y a deux façons d’observer l’endroit : soit directement dans la grande salle en allant s’asseoir sur les sièges adaptées, soit en allant dans l’autre grande salle où un géant écran est installé, permettant quiconque le souhaite de voir le théâtre de là-bas, avec le salon. Frie est justement étonnée de voir qu’il est toujours en place, sans être brisé ou en mauvais état.

– Il n’a pas été volé… ?” demande-t-elle.

– Il est trop grand pour être volé par quelqu’un tout seul et vu que c’est un écran uniquement relié aux caméras dans la grande salle, il faut bidouiller un peu à tout pour même espérer le récupérer,” explique Gatito. En plus, voler cet écran ne peut pas permettre quiconque de le vendre sur internet, car il est simple à savoir qu’il provient d’ici. Le garder chez soi est aussi assez inutile vu qu’il est trop grand pour la majorité des maisons.

– Ah, je vois…

Frie scrute ensuite les environs et aperçoit tous les spectateurs qui sont déjà assis ou alors debouts, mais discutent avec des amis, des membres de la famille ou des connaissances. L’ambiance est bien plus chaleureuse que prévue, vu que c’est un jeu qui peut mener à la mort de trois personnes s’il est perdu par Deshya et les cinq autres joueurs.

– On dirait que pour beaucoup ici, c’est juste un jeu, c’est tout…” remarque Maruno avec presque du dégoût.

– Un spectacle pour les divertir.

Tessa décide de s’asseoir sur une place vide — en réalité, ce siège était pris par une adolescente, mais elle l’a juste poussée, rendant cette place ‘libre’. La fille se met à s’énerver, mais Tessa l’ignore complètement en regardant Maruno.

– Y en a qui doivent juste agir comme ça pour pas penser au pire, j’parie.

– J’en doute pas… Ah !! T’as pas besoin de pousser sa mère, je vais m’asseoir par terre ! Par terre, je te dis !!

La femme se met à râler contre Tessa, mais Gatito vient les calmer en forçant Tessa à choisir un autre siège, mais comme si elle râlait, elle s’asseoit par terre à son tour et soupire.

– Le sol est confortable et pas poussiéreux comme dans le hall, ça va, ça va…

Frie se met à rire, décidant de rester à côté des deux membres des Renards Associés, tandis que Korone et Gatito vont de l’autre côté. La petite fille regarde le grand écran et remarque que même s’il ne montre encore rien, il est allumé.

– Comment ça se fait qu’il soit encore actif ?” demande Korone.

– Il semblerait que ce ‘JUGE’ est venu ici à l’avance pour préparer la scène. Il doit avoir attrapé ses trois victimes quelques jours auparavant, sinon, il n’aurait jamais pû tant prévoir.

Quand Korone y pense, Deshya a dit que ‘Waffie’ n’avait pas fait de nouveau live pendant quelques jours d’affilée… La raison de ce comportement est désormais comprise. La fille aux longs cheveux blancs observe l’immense écran.

– Le criminel a décidé que le jeu serait joué ici justement à cause de cette pièce et la possibilité de regarder la salle à distance, pour éviter, ce que je suppose, toute tricherie,” pense-t-elle.

En effet, ‘JUGE’ a été plus que clair que tout spectateur doit se trouver dans cette pièce et nulle part autre. Toute tentative de tricherie ou quiconque ne respecte pas ces règles peuvent mener à la mort de ceux qu’il a en « otage », vu qu’il veut jouer une partie intéressante sans aucun trucage. Cela doit être aussi la raison pour laquelle les jeux qui sont sur la grande table installée dans la salle de théâtre sont encore emballés et qu’il n’a pas choisi le jeu à l’avance, pour ne pas pouvoir s’y entraîner à l’avance. Ce que se demande Korone, c’est la nature des jeux : est-ce que ‘JUGE’ y serait très fort déjà de base, alors il a cet avantage ? De plus, un 6 contre 1, n’est-ce pas le mettre en gros désavantage ?

– Mais en fonction des règles…

Alors peut-être que c’est l’équipe de Deshya qui commence avec une écharde dans le pied — mais cela dépendra aussi des joueurs avec eux.

Deshya, Raiji et Aya arrivent dans la grande salle et sont impressionnés : contrairement au hall d’entrée pitoyable, l’endroit ici est toujours magique. Des lumières illuminent l’endroit, ce que signifie que bizarrement, l’électricité passe toujours ici, avec des sièges qui font tous face à l’immense scène en bois tout en bas. La différence d’hauteur entre la porte d’entrée et la scène doit être d’au moins dix, voire quinze mètres. Les sièges sont rouges avec des ornements dorés, et des tapis de même couleur les accueillent et proposent aux adolescents de descendre les marches. C’est une magnifique salle qui a toujours une partie de splendeur de son ancienne grandeur, mais qui n’en reste pas moins sans vie et avec une ambiance de tristesse, comme si son fantôme d’antan règne toujours l’endroit. Voyant que trois autres personnes sont déjà sur la scène, tout près de la table qui porte un ordinateur sur son bois, Deshya, Raiji et Aya décident de s’y diriger sans plus attendre. Non seulement les aiguilles de l’horloge tournent, ils ne peuvent pas attendre de savoir qui seront leurs trois alliés. Les chances que ce soit quiconque qu’ils connaissent sont faibles, mais pas de 0. Toutefois, en arrivant là-bas, les trois adolescents ne reconnaissent pas les trois autres.

– Oh, c’est ‘Deshya Oveja’ !!” s’excite la seule fille des trois jeunes adultes.

– La détective aux oreilles de renard, hein. C’est justement grâce à elle que j’ai vu le tweet de Waffie, je me devais de participer aussi,” avoue le jeune homme à lunettes.

– Il y a même ‘Aya Deroom’, la fille des Deroom… ? Eh bien, on a une équipe spéciale, mais intéressante,” avoue ensuite l’autre homme.

Les trois adolescents saluent les trois autres et enfin, l’équipe de six est présente. Deshya décide de rapidement se présenter la première, vu que connaître ses alliés est important pour commencer. Raiji fait de même et finalement Aya, avant que le jeune homme à lunettes décide de faire pareil.

– Enchanté alors, moi, je suis ‘Grégoire Pacoma’ !

C’est un adolescent du même âge que Maruno, dont ses yeux bleu clair se cachent timidement derrière des lunettes de soleil. Toutefois, ses lunettes doivent aussi servir pour la vue, vu que Deshya a déjà vu de tels modèles auparavant. Pour ses cheveux, ils sont plutôt basiques, bien coiffés et courts, n’arrivant même pas à la nuque de l’homme. Il n’est pas petit, surpassant facilement la taille de Deshya et Aya, mais n’est pas plus grand que Raiji. Ses vêtements sont composés surtout de noirs et il est clair qu’il s’est bien habillé pour l’occasion. Sa présentation est courte et il ne parle pas trop vite, mais il ne cache pas son excitation tant qu’à jouer contre ‘JUGE’ et aux côtés de Deshya, ne montrant pas le moindre signe de peur. Cela n’est pas de même pour la fille qui décide de se présenter.

– Je m’appelle ‘Élodie Suzak’, enchantée.

C’est une jeune femme, un peu plus grande que Deshya, aux cheveux brun clair assez courts pour une femme. Ils lui arrivent aux épaules à peine, sont lisses et naturels. Son visage comporte des grains de beauté et ses lèvres décorées d’un beau bleu et ses yeux sont d’une couleur étrangement similaire. Son physique n’a rien de particulier et ses habits sont presque les mêmes que ceux de Raiji, juste qu’à la place d’un pantalon, elle est vêtue d’une jupe et rien sur les jambes. Malgré l’air qui se refroidit, elle n’a pas l’air d’être frileuse. Elle a 20 ans depuis quelques jours maintenant et elle ne cache pas qu’elle n’est pas la plus douée aux jeux stratégiques, mais si elle doit suivre un plan, elle le pourra. Deshya pense qu’elle peut être une bonne alliée. Finalement, l’autre jeune homme.

– Moi, c’est ‘Corentin Terinia’, j’espère qu’on pourra sauver Waffie tous ensemble. Je refuse qu’une personne si incroyable ne meure !

21 ans et atteint les 22 rapidement, c’est un homme à cheveux blonds incroyablement… peu coiffés. Si le capharnaüm devait avoir une forme physique, alors la voilà, cette forme. Ses yeux bruns montrent beaucoup de vie, mais ses cils sont si courts que même en fermant les yeux, il est possible qu’on puisse encore voir ses rétines. Tout cela se trouve sur un visage assez carré, avec un menton qui ressort un peu. Son nez est aussi gros, mais cela n’est pas une moche chose. Pour ses vêtements, il est habillé comme si l’été venait d’atteindre son climax, avec un short vraiment petit, imitant ceux des femmes. Un t-shirt à manches courtes et des sandales — oui, des sandales ! — sur les pieds, on penserait de lui plus un touriste qu’un actuel habitant de ce pays. Pourtant, il assure bel et bien qu’il habite justement Shiru, contrairement aux deux autres qui viennent plus de l’est. Les présentations sont courtement terminées et ils n’ont pas le temps de parler plus longuement qu’un bruit retentit :

– Alors les SAUVEURS sont tous là !!

Suivi d’un bruit de ‘connexion’, voilà la voix d’un homme. Bien évidemment, cette même voix est modifiée par un logiciel, quel que soit-t-il, pour éviter qu’on le reconnaisse. Les six joueurs se tournent vers la source du bruit : l’ordinateur. Ce qui les choque tous, c’est ce qu’ils y voient.

Le modèle de Waffie qui bouge de gauche à droite, toute heureuse.

– J’ai beau haïr les Vtubeurs, permettez-moi d’utiliser le modèle de cet homme pour communiquer avec vous~ !

– Ce n’est pas un homme !” hurle Corentin. C’est une femme transgenre depuis Mai 2021 !! Elle a toujours été une femme, même à sa naissance !!

– Son corps est d’homme, alors c’est un homme. Qu’importe ce détail, permettez-moi de communiquer de la sorte. Vous verrez pour la dernière fois votre chère ‘Waffie’ bouger avec vie, alors profitez~ !

Les six joueurs expriment leur colère sur leur visage, les poings serrés et le cœur qui bat rapidement, mais aucun ne réplique. Non seulement les propos de ce ‘JUGE’ sont abominables, il ose discuter de la sorte en utilisant le modèle de ‘Waffie’, comme si c’était elle qui parlait de la sorte. Elle bouge de gauche à droite, ses beaux cheveux roses dansent joyeusement et ses oreilles de chat battent parfois de l’aile, avec sa queue de la même couleur qui s’agite derrière. Ce que Deshya a toujours trouvé très mignon la dégoûte désormais, preuve que la personne qui se trouve derrière et les propos dits comptent, même dans le cas d’un Vtubeur.

Du côté de la pièce où le grand écran règne les lieux, ce dernier s’allume et montre enfin la table avec les six joueurs là-bas. Korone les observe, à côté de son père, assis sur une chaise qu’on lui a apportée, mais ne reconnaît personne d’autre que les trois qu’elle connaît. Cela va de même pour les trois adolescents qui sont de leur côté, tous trois assis par terre à côté des sièges. En réalité, pas mal de spectateurs sont obligés de rester debout ou assis sur le sol parce qu’une bonne partie des sièges sont inutilisables ou même tout simplement ont été volés. Le son depuis l’écran est impeccable, réussissant à capter ce que vient de dire ‘JUGE’ à travers le modèle de ‘Waffie’. Cela en énerve bien plus qu’un, avec Gatito qui attrape son talkie-walkie.

– Faites de votre mieux.

Il n’est peut-être pas de la police de Shiru, mais il est respecté ici et a donc reçu l’autorisation de discuter avec la femme qui va essayer de retracer l’endroit où se localise actuellement ‘JUGE’. Quel est l’intérêt de gagner cette partie s’ils peuvent l’arrêter directement ? Un tueur en série comme lui, qui s’amuse avec la vie de ses victimes et propose à des gens de les sauver, les brisant intérieurement s’ils perdent le jeu, ne mérite qu’une éternité en prison. Gatito espère donc de tout cœur qu’ils vont réussir à le localiser à temps…

– Vous avez six chaises devant vous et une derrière moi. Je vais inviter une personne au hasard dans les spectateurs pour jouer à ma place, mais ne vous inquiétez pas, je n’autoriserai aucune tricherie~

‘Juge’ se met à pouffer, mais ce n’est pas un bruit que quiconque trouverait mignon.

– Je préfère libérer mes victimes en perdant à la loyale que devoir tricher pour gagner. Je refuse aussi que vous osez tricher de votre côté, donc au moindre signe de tricherie, j’arrête le jeu. Vous pouvez tentez si vous vous trouvez si malins, mais ne me sous-estimez pas~ !

– On ne compte pas tricher,” avoue Raiji.

L’homme frappe un poing sur la table.

– On va te battre tellement fort que non seulement tu ne vas pas pouvoir tuer, mais tu vas t’pisser d’ssus !!

– Ne le provoques pas, calme,” lui dit Corentin. Même si je suis d’accord avec Raiji.

Les six joueurs sont tous en accord : même si la triche pourrait leur permettre, sûrement, de gagner avec plus de facilité et s’assurer de sauver la vie de ‘Waffie’ et sa famille, il serait idiot de tenter une chose si risquée et finir par perdre quoi qu’il advienne. ‘JUGE’ en semble convaincu et le modèle de Waffie change en mode ‘Sparkles~ !’ — bref, des yeux étoilés et des scintillements autour d’elle.

– Woaaah, incroyable, incroyable !! J’aime, j’ai bien fait de vous choisir, ahah ! J’avoue avoir hésité pour Deshya Oveja, mais je veux la faire échouer… Qu’elle ne puisse rien faire, qu’elle ne puisse sauver personne. Tu sais… comme contre ‘XIII’.

Deshya ouvre grand les yeux et serre les poings. Son père, depuis la salle des spectateurs, grince les dents en fronçant les sourcils, même geste que Korone, en réalité. Deshya va parler, mais quelqu’un s’avance devant elle.

– ‘XIII’ est un criminel que même des gens comme Kira Miname ne peuvent pas comprendre tout de suite tous les trucs et astuces. La police de Bexel, l’une des plus compétentes du monde entier, n’arrive pas à l’attraper. De plus, même si c’est indirectement, si tu oses dire que tu peux être du niveau d’un homme pareil, alors tu te mets le doigt dans l’œil si profondément que tu dois toucher ton cerveau, pourtant aussi minuscule que ce que je parie est ton pénis, cela si tu en as un, vu que tu n’as même pas les couilles de venir nous affronter directement.

La fille fronce les sourcils.

– Tu n’es et ne sera jamais au niveau de ‘XIII’. Tu ne peux même pas espérer atteindre le dixième du niveau de Deshya et tu penses que ta façon de parler est incroyable, hein ?

Frie est celle qui parle.

– Ils vont te faire échouer toi, tu vas voir. Et si tu oses, même après avoir perdu, tuer les victimes, alors j’espère que tu mettras ton corps à côté des leurs et nous fera le plaisir d’aller te faire foutre.

Et là, personne ne répond. Tessa tourne le visage vers la gauche, remarquant qu’en effet, Frie vient tout juste de partir. Maruno ne l’avait même pas remarqué… ni personne, en réalité. Un policier avait cherché à l’arrêter, mais elle avait couru si vite qu’elle avait réussi à l’échapper. C’est un silence complet sur la salle avant que Frie s’avance d’un nouveau pas.

– Je veux être celle qui joue pour vous. Je veux voir votre défaite d’ici, d’aussi proche. Je n’accepterai jamais de tricher car j’ai entièrement confiance qu’ils peuvent gagner sans le moindre avantage.

Frie commence à le vouvoyer d’un coup, sûrement dans sa colère et pour le convaincre de la choisir. Certes, vu les insultes envoyées, peu de chance qu’elle le soit, mais, contre toute attente—

– Ahahahah !! Ahah, ahahah !!! Je t’adore, toi ! Quiconque es-tu, j’accepte ! Joue pour moi et je fermerai ta petite gueule que tu as ouverte avec tant de confiance, toi aux cheveux blancs ! Justement, choisis un nombre entre 1 et 5. En fonction du chiffre, cela sera un jeu différent qui est sur l table. N’essaie pas de dire ‘1’ pour choisir le jeu le plus à gauche ou à droite, chaque chiffre est dédié à un jeu différent, mais au hasard. J’ai tout ça sur un petit papier que j’ai avec moi.

— c’est un accord direct, même apprécié, de la part du tueur en série. Frie soupire, mais Deshya reste bouche bée, même réaction que beaucoup, en réalité. Raiji cligne des yeux.

– T-Tu peux parler comme ça, Frie… ?” demande-t-il.

La fille se tourne vers lui en montrant un air très sérieux, l’un qu’on ne voit pas souvent sur elle — en tout cas, Deshya ne l’a jamais vu, dans ses souvenirs.

– Ce n’est pas parce que je suis une fille gênée, timide et apeurée socialement que je ne peux pas montrer un côté plus direct et agressif. Je refuse qu’on parle de la sorte à Deshya et même à vous tous, ainsi qu’on joue avec des vies de la sorte.

Frie se retourne ensuite, faisant face à l’ordinateur où le modèle de Waffie a des cœurs dans les yeux.

– Je dis ‘4’. Quel que soit le jeu, ils gagneront. J’ai une confiance extrême en mes deux amis, leur amie et les trois autres personnes ici.

– ‘4’, alors ! Je vois, je vois ! Tu m’intéresses, je t’aimerais dans le jeu, toi aussi, mais je ne peux plus changer ça… Cela me va, cela me va, jeune fille ! Alors, ‘4’, tu as choisi ‘4’. Alors bouge les quatre autres jeux que celui que je vais te dire, jeune fille. Pour aujourd’hui, pour le jeu de ce début d’Octobre, alors jouons ! Vous, les SAUVEURS, essayez de la sauver en me battant dans ce jeu-là…

Et là, le jeu est révélé. Un six contre un…

– Le ‘Stratego’ ! Voici le jeu que nous jouerons et cela pour la vie de quelqu’un. Le Stratego !!!

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