Rendu furieux par les paroles de Qin Mu, le moine Ming Xin hurla : « Hérétique ! Comment oses-tu insulter Bouddha ? »
Un sourire éclaira le visage de Qin Mu. Il était à nouveau serein. Son regard trahissait une confiance inébranlable car il savait désormais qu’il l’emporterait sur ce petit moine. Peu importait sa force ou sa technique, son état d’esprit était celui d’un perdant.
Le vieux moine assis devant Vieux Ma hésita. Les paroles prononcées par Qin Mu sonnaient comme des paroles impies, car non seulement il avait insulté Bouddha, mais il s’en était aussi pris à Dieu et au diable. Toutefois, il n’avait pas eu l’impression d’entendre le discours d’un fanatique. Au contraire, ses paroles avaient résonné à ses oreilles comme empreintes de sagesse.
Si Bouddha ne réside pas dans votre cœur, vous pouvez devenir Bouddha.
Si Bouddha réside dans votre cœur, jamais vous ne deviendrez Bouddha.
Si le diable ne réside pas dans votre cœur, vous pouvez devenir le diable.
Si le diable réside dans votre cœur, jamais vous ne deviendrez le diable.
Ming Xin manquait encore de maturité. La signification de ces phrases lui échappait, contrairement au vieux moine. Ce dernier n’avait compris la véritable essence de ces paroles qu’après avoir atteint le royaume de l’Être céleste. Cependant, même s’il avait cultivé au royaume de la vie et de la mort, il ne parvenait toujours pas à briser le Bouddha dans son cœur. Plus profonde était la cultivation, plus fine était la compréhension du pouvoir de Dieu et du diable ainsi que la grandeur de Rulai.
Mais c’était plus facile à dire qu’à faire.
Il était extrêmement étrange que ce garçon en soit arrivé à la même conclusion. Et plus déconcertant encore, c’est qu’il avait affirmé avoir brisé Dieu et Bouddha dans son cœur !
Qin Mu était bien trop jeune pour avoir compris la véritable essence de cette affirmation. Alors, comment avait-il pu libérer son cœur de Dieu et de Bouddha ?
Pour réussir à détruire Dieu et Bouddha dans son cœur, il fallait suivre une cultivation difficile et atteindre l’illumination. Sans cela, Bouddha demeurait Bouddha et Dieu demeurait Dieu.
« De toute façon il n’a pas appris la noble technique de notre monastère du Grand coup de tonnerre. Alors, peu importe son état d’esprit, il ne pourra pas vaincre Ming Xin. »
Le vieux moine baissa les yeux. Il paraissait avoir retrouvé son calme et ne s’inquiétait plus de l’issue du combat.
Dans l’arène, une lumière dorée auréolait le corps mince de Ming Xin. Tous les gens présents étaient éblouis par cette vision d’un Bouddha divin, solennel et majestueux !
Les habitants venus des villages voisins s’étaient réunis dans l’arène. Un brouhaha assourdissant y régnait, alimenté par les conversations à haute voix des spectateurs attirés par les combats. À la vue de la lueur dorée qui émanait de Ming Xin, ils se turent immédiatement, laissant place au silence.
Les badauds avaient cessé de bavarder presque en même temps, comme s’ils avaient entendu un cri perçant !
Ils assistaient à la méthode de la cultivation bouddhiste, le Sūtra Mahāyāna de Rulai.
Cette méthode de cultivation différait de celle des autres sectes. Le chemin emprunté partait de l’extérieur vers l’intérieur. L’extérieur, c’était l’extérieur du corps. Le corps devenait alors parfait. L’intérieur quant à lui représentait le cœur. Le cœur devenait lui aussi parfait. Le bouddhisme les appelait le Corps parfait et le Cœur parfait.
Même si la cultivation de Ming Xin ne lui avait permis de n’atteindre que l’étape du Corps parfait, lorsque l’image du Bouddha apparaissait, c’est comme un cri assourdissant éclatait !
L’inquiétude envahit à nouveau mamie Si et les autres vieux. Même si Ming Xin n’avait pas encore attaqué, son attitude révélait déjà la violence de sa force et visait clairement à démoraliser Qin Mu.
D’aucuns pourrait alors se demander qui oserait, dans de telles conditions, attaquer Bouddha ?
Qin Mu, évidemment !
Le corps et le cœur de Qin Mu fusionnèrent. Son cœur et son esprit s’unirent ensuite, puis son esprit et son poing, son poing et son Qi et enfin son Qi et son corps. Ils ne formèrent plus qu’un et son Embryon spirituel se déplaça en même temps que tout son corps. Grâce à l’unité formée par son être et son esprit, il déclencha alors la Tempête des Neuf dragons !
Qin Mu exécutait les Jambes divines du Chapardage céleste de Boiteux à une vitesse phénoménale. Ming Xin n’avait même pas eu le temps de cligner des yeux que Qin Mu s’était comme matérialisé devant lui. Incapable de le bloquer, il ne put que subir le coup fracassant que Qin Mu lui asséna sur la poitrine.
La Tempête des Neuf dragons comportait neuf niveaux de force cachés dans un unique coup de poing. Le premier ressemblait à un dragon enflammé qui surgit du poing de Qin Mu et qui s’écrasa contre le torse de Ming Xin en produisant un grondement puissant.
La lumière dorée qui émanait de Ming Xin s’intensifia brusquement et une gigantesque cloche d’or se mit à luire faiblement.
S’ensuivit alors le deuxième niveau de force de Qin Mu, la Vrille des dragons jumeaux. Enroulés l’un autour de l’autre et tournoyant sur eux-mêmes, les deux créatures perforèrent le thorax de Ming Xin !
Dang !
La cloche retentit une seconde fois. Comme les deux niveaux de force s’étaient succédé à une vitesse extrêmement rapide, elle avait sonné quasiment coup sur coup et provoqué une déflagration assourdissante !
S’ensuivit le troisième niveau de force de la Tempête des Neuf dragons : le Fracas de roches des Trois dragons, puis le Saut des Quatre dragons, la Purification monstrueuse des Cinq dragons, la Réincarnation des Six dragons et les Sept dragons frappant les flots !
Alors que les sept niveaux de force éclataient les uns après les autres, la cloche sonna sept fois de suite. La lueur dorée émise par Ming Xin s’affaiblit. Le petit moine recula alors d’un pas.
Le huitième niveau de force, la Force des Huit divisions du dragon céleste, éclata et fit à nouveau reculer Ming Xin. Enfin, le neuvième niveau de force de Qin Mu, la Tempête des Neuf dragons explosa. Le halo auréolant Ming Xin éclata alors en milliers de perles de lumière.
Qin Mu n’en revenait pas. Le singe démoniaque lui-même n’aurait pu absorber la puissance de la Tempête des Neuf dragons. À chaque fois que Qin Mu l’avait lancée, il n’avait jamais dépassé le sixième ou le septième niveau de force pour ne pas blesser le singe démoniaque. Mais Ming Xin n’avait pas cherché à l’esquiver. Il l’avait encaissée de plein fouet !
Sur les conseils de mamie Si, Qin Mu ne s’était pas retenu. Il avait même utilisé la puissance du Trésor divin de son Embryon spirituel. Pourtant, Ming Xin n’avait reculé que de quelques pas.
« Tu n’as pas reçu les vrais enseignements des Huit coups de tonnerre. »
Ming Xin se déplaça et le Qi vital qui se trouvait sous ses pieds explosa. Rapide, il leva la main et le tonnerre gronda au même moment. D’un seul coup de poing, il provoqua un rugissement de dragon !
Booum !
Avant que le coup de poing ne s’abatte sur lui, Qin Mu aperçut le Qi vital de Ming Xin se transformer en un dragon vert. Bien que floue, la créature lui apparut menaçante et d’une cruauté sans limite !
Le premier niveau de force de sa Tempête des Neuf dragons avait pris une forme issue de son Qi vital. Son Qi vital était donc aussi très dense. Il possédait une méthode de cultivation parfaitement adaptée aux Huit attaques du coup de tonnerre, ce qui manquait précisément à Qin Mu !
Le coup atteignit Qin Mu de plein fouet. Il comprit que ce premier niveau de force était exceptionnellement puissant. Mais avant même d’avoir pu l’encaisser complètement, la Vrille des dragons jumeaux associée au deuxième niveau de force le frappa immédiatement après. Les deux dragons nés de son Qi vital tournoyèrent autour des bras de Qin Mu et les tordirent. Ming Xin déclencha ensuite le troisième niveau de force sur les bras de son adversaire !
Blessé, Qin Mu saigna et se mit à tituber tout en continuant de reculer. Des éclats de roches volaient en tous sens dans l’arène.
Alors que le Qi des quatre dragons se déversait sur lui, Qin Mu poussa un grognement et son Qi vital afflua immédiatement vers ses yeux, déclenchant l’Éveil des yeux des cieux. Une longue lance se forma à partir du Qi vital de sa main. Elle embrocha les quatre dragons et transperça la paume de Ming Xin, anéantissant son Qi vital et l’empêchant ainsi de lancer la Purification monstrueuse des Cinq dragons.
Alors que les deux forces s’affrontaient, la lance de Qi vital de Qin Mu disparut elle aussi.
Qin Mu leva les yeux et regarda Ming Xin. Du sang coulait d’une plaie béante qui lui trouait la main.
De son côté, tous les os des bras Qin Mu avaient été broyés. Ses blessures étaient bien plus graves que celle de Ming Xin.
Qin Mu prit une profonde inspiration. Son Qi vital se mit soudainement à flamboyer alors qu’il se précipitait vers Ming Xin.
Tonnerre printanier sur la mer de l’Est solitaire !
Cette fois, c’est le feu qu’il invoqua, et non l’eau. Un torrent de flammes ardentes apparut et se déversa du ciel dans la mer, prêt à l’embraser !
Ming Xin demeurait imperturbable. Il leva la main pour l’accueillir. Il arborait une expression sereine : « Sans la méthode de cultivation, tout n’est qu’illusion et paraît plus impressionnant qu’il ne l’est en réalité. »
Ming Xin lança également le Tonnerre printanier sur la mer de l’Est solitaire. La puissance qui en émana dévasta les âmes alentour au son des grondements de tonnerre sans épargner Qin Mu dont la superbe disparut en un battement de cils !
Qin Mu leva alors ses deux mains qui s’enflammèrent. Tel un démon prit d’une frénésie meurtrière, il attaqua Ming Xin en les brandissant comme des poignards !
Compétence du couteau Tueur de cochon, Soleil sur la mer d’Orient aux milles vagues !
Cette attaque était complètement démentielle car le couteau de Boucher parvenait très difficilement à libérer sa puissance ultime sans perdre la raison. Elle ressemblait à la splendeur d’un immense soleil levant au-dessus de mille vagues se chevauchant. Elle utilisait la force inégalable du couteau pour tout faucher et lacérer sur son passage !
Couper ! Cisailler ! Entailler ! Débiter ! Déchiqueter ! Taillader !
Mille vagues qui affluaient et mille lames de couteaux qui s’abattaient encore et encore. Rien n’échappait à la lame qui ne cessait de couper et de déchiqueter !
L’expression du visage de Ming Xin changea légèrement, Qin Mu s’en aperçut et fronça les sourcils. Il comprit que Ming Xin exécutait la Huitième forme des Huit attaques du coup de tonnerre, le Bouddha aux Mille bras !
La paume du petit moine frappa la sienne et il eut l’impression qu’un Bouddha doté d’un millier de mains bloquait ses couteaux enragés !
Qin Mu flancha légèrement. Ses mains n’étaient pas de vrais couteaux. La défense de Ming Xin était particulièrement solide. Le blesser aux mains s’avérait difficile.
« Dans ce cas, je vais être encore plus rapide ! Plus rapide, encore plus rapide ! Je serai tellement rapide que tu ne réussiras plus à bloquer mes lames ! Combat de minuit dans les villes par temps d’orage ! »
Tel un démon fou, Qin Mu continua de frapper. Une seule pensée pulsait dans son esprit, être plus rapide, encore plus rapide, toujours plus rapide, si rapide qu’il réussirait à décapiter le Bouddha !
Alors que la frénésie de son Qi vital atteignait de nouveaux sommets, Qin Mu hurla : « Nul cochon dans ce monde ne peut survivre au couteau Tueur de cochon ! »
Dang dang dang dang dang !
Ming Xin le bloqua grâce au Bouddha aux Mille bras. Mais tout à coup, il ressentit une violente douleur à la gorge. Il n’avait pas réussi à éviter la lame de Qin Mu. L’immense cloche qui protégeait son corps sonna. L’instant d’après, une deuxième lame traversa sa défense et le toucha encore à la gorge, faisant à nouveau retentir la cloche.
Un troisième, un quatrième, un cinquième et un sixième couteau !
Les couteaux de Qin Mu bougèrent de plus en plus vite et frappèrent à plusieurs reprises son adversaire à la gorge !
« Grand frère, à l’époque, toi et moi avons appris les mêmes attaques. Nous nous connaissons par cœur tous les deux. Ton Bouddha aux Mille bras avait un défaut. »
Assis devant le vieux moine, Vieux Ma lui dit nonchalamment : « Et je crois que tu as transmis ce défaut à ton disciple. »