Après avoir ouvert son deuxième Acupoint, celui de l’Oeil, un cultivateur avait une chance de développer une compétence innée.
Les plus chanceux auraient quelque chose comme la Clairvoyance. D’autres, avec une moins bonne étoile, recevaient la Vision à Longue Distance, la Vision Claire, la Vision Microscopique, etc. Enfin, les plus poisseux n’avaient rien.
Mais même dans ce dernier cas, il n’y avait pas lieu de se décourager. Il y avait cinq Acupoints à ouvrir au Premier Rang : celui du Cœur, de l’Oeil, du Nez, de l’Oreille, et de la Bouche. Hormis l’Acupoint du Cœur, il y en avait quatre, et chaque ouverture apportait une chance d’obtenir une compétence.
Généralement, chaque cultivateur gagnait au moins une compétence, mais certains en recevaient deux. Personne n’avait jamais entendu parler de quiconque ayant trois compétences innées.
Song Shuhang était donc un veinard. Dès l’ouverture de l’Acupoint de l’Oeil, il en avait obtenu une.
Curieux, il décida de l’essayer.
Ce n’était pas la légendaire Clairvoyance, ni la Vision à Longue Distance, la Vision Claire, la Vision Microscopique…
Le monde entier sembla instantanément se figer puis se mettre à bouger au ralenti.
Le rideau se balançait doucement. La poussière sur le sol était balayée par le vent. Des insectes associés à l’été volaient devant la fenêtre. Tout était lent à ses yeux.
Pour Song Shuhang, ce qui ne dura qu’une seconde parut en être plus de dix.
Après cela, il eut l’impression d’avoir été vidé de son énergie mentale. Il fut saisi d’une brusque migraine et le monde revint malgré lui à la normale…
Une telle compétence lui rappelait celle des experts ou des surhommes. Dans les films, les mouvements de leurs ennemis paraissaient souvent être dignes de ceux des escargots.
Il était content de cette compétence innée. Dans les situations dangereuses, il pourrait probablement s’en servir pour inverser le déroulement d’un combat. Le seul inconvénient était la consommation en énergie mentale et en Qi Sanguin.
Une seule seconde suffisait pour l’épuiser complètement. Et lorsqu’il serait un véritable expert, il en aurait moins besoin. Elle lui sembla soudain d’une utilité limitée. Ni bonne, ni mauvaise.
Cela étant dit, éveiller une compétence innée était déjà une bénédiction. Après tout, la moitié des pratiquants en était incapable lors de l’ouverture de leur deuxième Acupoint.
– « Alors, vous avez réussi à obtenir une compétence innée ? » lui demanda le Vénérable Blanc.
– « Oui, mais sa consommation d’énergie mentale est très élevée. » Song Shuhang sourit amèrement.
– « Tant que vous pouvez l’activer, c’est une bonne chose. Vous en avez débloqué une du premier coup, vous pourrez peut-être encore en obtenir une autre en ouvrant les trois Acupoints restants. Et si votre réserve d’énergie mentale est insuffisante, trouvez un moyen de l’élargir! Bref, il est temps de faire une pause. Reposez-vous pour le moment sans cultiver. »
Son énergie étant considérablement épuisée, s’il continuait à pratiquer, cela ne lui causerait que des blessures internes.
– « Oui, Aîné. Je vais aller me reposer. »
Comme on dit, l’esprit est ardent mais la chair est faible. Même s’il l’avait voulu, il aurait été incapable de pratiquer. Lorsqu’il avait activé sa Vision d’Expert, sa consommation en énergie avait été énorme et des vagues de somnolence le submergeaient. Tout ce qu’il voulait faire était de trouver un lit, de s’y effondrer, et de s’endormir.
Il se dirigea vers sa chambre, dans un état d’épuisement extrême. Trop fatigué, il n’avait pas remarqué l’anneau de bronze à son doigt.
❄️❄️❄️
Après le départ de Song Shuhang, le Vénérable Blanc alla fermer la fenêtre.
Il toucha légèrement la courte épée bleue de son doigt. Comme si celle-ci était dotée de son propre esprit, elle se mit à flotter dans les airs à sa suite.
– « Cultivateur Solitaire Li Tiansu… » Puisqu’il lui avait demandé son nom, cela signifiait qu’il avait accepté son karma. Si un jour il rencontrait les disciples ou les proches de ce cultivateur et qu’ils avaient besoin d’aide, il leur tendrait la main.
Après quoi, il descendit dans le jardin et dessina quelques runes, restaurant les dommages à la formation du Maître Praticien.
– « Bien. » Il s’étira et pensa : Que faire ensuite ?
Son esprit se tourna vers le climatiseur au deuxième étage.
– « Puisque j’ai convaincu mon camarade daoïste Shuhang de dormir, je vais en profiter pour démonter le climatiseur et l’étudier! »
Ainsi, il alla tout heureux se livrer à ses opérations de dissections…
❄️❄️❄️
Le cultivateur Tournesol se trouvait dans un hôtel près de la Cité Universitaire de Jiangnan.
Il lui avait fallu le reste de la journée précédente, et pas mal d’efforts, pour se remettre de l’incident de “l’effondrement”.
Pendant ce temps, craignant que Song Shuhang n’apparût soudainement avec cet Aîné pour se venger, il avait changé de vêtements plusieurs fois. Il prit même quelques douches pour travestir ses odeurs corporelles et s’aspergea d’un certain liquide pour se débarrasser de son aura. Il avait beaucoup peiné.
– « Jusqu’à présent, ce Stressé par une Montagne de Livres ne m’a pas retrouvé. Peut-être m’a-t-il vraiment pris pour un passant ordinaire ? »
Il s’assit en tailleur et pratiqua un cycle de cultivation, stabilisant son état mental. En même temps, il réfléchissait à l’incident du jour.
– « Une chose est sûre. Stressé par une Montagne de Livres n’est vraiment qu’un débutant ordinaire. S’il avait été seul, j’aurais facilement pu l’attraper et lui prendre le Cristal du Dieu de Sang. »
Toutefois, l’identité du cultivateur intimidant à ses côtés lui était inconnue. Quelle était exactement sa relation avec le jeune homme ? Était-il constamment à ses côtés ? Allait-il partir après quelques jours ?
Il se frotta les tempes. Il avait demandé à un informateur de la Secte Démons Sans Frontières de lui apporter les dernières informations relatives à sa cible pour voir s’il pouvait trouver des indices.
Son téléphone portable sonna.
– « Allo, Cultivateur Tournesol ? Les données demandées sont prêtes. Venez à l’Hôtel Parmete, nous vous fournirons le rapport là-bas. »
– « Compris. » Il se leva, sortit, et appela un taxi.
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– « Vous allez où ? » Le chauffeur était un homme chauve. Son regard terne clamait sa grande expérience de la vie.
– « Hôtel Parmete. »
– « C’est assez loin vous savez ? »
– « C’est bon, j’ai assez d’argent. »
– « Très bien, mettez-vous à l’aise. » Le chauffeur sourit. Il appuya sur le champignon et la voiture décolla.
Le Cultivateur Tournesol, assis à la place du mort, ne cessait de froncer les sourcils, s’inquiétant du problème nommé Stressé par une Montagne de Livres. Tout son être dégageait une aura anxieuse.
Le conducteur, pensant qu’il était de mauvais poil, demanda : « Quelque chose vous préoccupe ? Est-ce que vous voulez un peu de musique pour vous détendre un peu ? »
Il y réfléchit et hocha la tête. « Si vous voulez. »
Il était en effet bien trop tendu. Écouter une mélodie relaxante pouvait peut-être l’aider à se calmer.
Rapidement… Il regretta sa décision.
Au lieu d’allumer la radio, le chauffeur ouvrit la bouche et se mit à chanter joyeusement.
Normalement, cela ne l’aurait pas particulièrement dérangé qu’il massacrât une ballade de circonstance avec sa voix grave.
Mais il s’était mis à lui déclamer une chanson enjouée, chantée à l’origine par une femme il y avait des années en arrière.
– « Ooh ~ appuyé sur ta poitrine, j’aime ça ~ Ooh ~ Me réveiller à côté de toi, j’aime ça ~ Ooh ~ Tu places ta main sur mes épaules, j’aime ça ~ »
Un vieil homme chauve lui chantait une chanson d’amour… Pire, il semblait convaincu de l’excellence de sa prestation.
Puisqu’il était lancé, ses préférences personnelles furent rapidement apparentes. Il enchaîna les chansons d’amour les unes derrières les autres. Sans exception, toutes étaient du genre “passionnées et langoureuses.”
D’un autre côté, comment lui en vouloir ? C’étaient les chansons qu’il écoutait habituellement. Il était après tout un homme, viril, et avait certainement envie d’écouter les douces voix de jeunes femmes. Au final, il en avait évidemment retenu les paroles.
Le Cultivateur Tournesol, enfoncé dans son siège, sentait sa tension augmenter à vitesse grand V.
– « Stop! » lança-t-il enfin d’une voix grave. « Je veux un peu de paix et de tranquillité! »
Le chauffeur de taxi souffla, l’air de regretter l’ignorance de ce mauvais public.
❄️❄️❄️
À ce moment précis, au-dessus du taxi, un petit pékinois volait avec souplesse.
Un appareil photo high-tech était accroché autour de son cou, avec en mémoire les images de la scène où le Cultivateur Tournesol téléphonait. Doudou regarda l’écran et se sentit fier de son habileté.
En tant que monstre-chien, il était naturellement doué et capable. Pister quelqu’un sans être repéré était un jeu d’enfant. Cependant, il ne prenait ni son enquête, ni cette filature à la légère.
Voilà, nous allons bien voir quel genre d’informations sur Song Shuhang ce Tournesol va obtenir, et quelles seront ses prochaines actions.
Après quelques photos supplémentaires, il se prépara à la suite.
❄️❄️❄️
Le chauffeur de taxi s’arrêta devant l’Hôtel Parmete.
Son client paya le prix de la course et se dépêcha de descendre du véhicule, comme si sa vie en dépendait.
Il entra ensuite dans un cybercafé à côté de l’hôtel pour y retrouver l’informateur de la Secte Démons Sans Frontières.
Sept du Clan Su leur ayant causé des problèmes, ils avaient pris des précautions supplémentaires, craignant d’être suivis jusqu’à leur repaire et causant indirectement l’anéantissement de toute une branche.
Le Cultivateur Tournesol s’installa tranquillement devant un ordinateur, sortit un paquet de cigarettes et naviga sur la Toile.
Environ une demi-heure plus tard, un homme à ses côtés lui murmura : « Voilà toutes les informations concernant Stressé par une Montagne de Livres. Faites attention à ne pas vous laisser surprendre par les gens du Clan Su. Sept est pratiquement devenu fou, beaucoup d’entre nous ont été capturés par ses sbires. »
D’un geste discret, il lui passa une clé USB.
Petit Tournesol la mit rapidement dans sa poche. Au bout d’une demi-heure supplémentaire, il se leva et quitta le cybercafé. De son arrivée jusqu’à son départ, il ne regarda pas une seule fois l’informateur.
– « Si le Clan Su ne faisait pas tout ce bazar, il aurait pu m’envoyer ça par e-mail… »