Max sentit la chaleur du corps de Riftan, son menton entrant en contact avec ses cheveux rebelles tandis qu’il passait un bras autour de son cou. Elle se doutait bien qu’il faisait ça parce qu’il pensait qu’elle avait froid, et elle le regardait par-dessous ses cils, ne sachant pas quoi faire.
Fidèle à ses paroles, personne n’a prêté attention à leur proximité, peut-être ont-ils fait semblant de ne pas le faire. Pourtant, Max n’avait pas le visage assez épais pour être si proche d’un homme en public… même si c’était son mari.
Sa langue rassembla les mots appropriés pour dire, se méfiant de sa possible colère. “Je vais bien. Je, je veux dire… peux-tu t’éloigner un peu…”
“Tu la dérange. S’il te plaît, sois prévenant.”
Max a levé la tête à la voix soudaine qui les a interrompus. Non seulement cela semblait normal, mais c’était un subordonné réprimandant Riftan, leur supposé capitaine. Elle constata qu’elle provenait d’un jeune homme mince, semblant avoir une vingtaine d’années, se tenant à trois ou quatre pas de là, une petite lampe à la main.
“Ne sois pas curieux, Ruth. Pars.” Riftan soupire, presque avec impatience.
Sans se laisser impressionner par son accueil froid, Ruth a réussi à répondre froidement.
“Combien de temps vas-tu continuer à grogner comme un barbare. Je ne vais pas te déranger, alors tu peux cesser de le faire.”
À ces paroles effrontées, Max ouvre de grands yeux de surprise. L’homme qui s’est acharné à parler contre Riftan a aperçu son regard, et cette fois, ses yeux se sont tournés vers elle. Ayant l’impression de l’avoir vue faire quelque chose de discourtois, Max se lève précipitamment.
Comme tenu par une ficelle, Riftan la suivit, s’asseyant à contrecœur.
“…en quoi ça te regarde ?” dit-il enfin, le ton un peu plus doux qu’avant.
“Je l’ai apporté.” il a levé la lumière rougeoyante, “Parce que je pensais que vous auriez froid.” Bien que le “vous” en question ne soit pas précisé, il était évident que c’était à Max qu’il faisait référence.
Ses mains ont alors plongé dans les poches de ses flancs, fouillant pendant un bon moment avant de la ressortir. De minuscules cailloux qui émettaient des lumières douces illuminaient la paume de l’homme. En les voyant, Max a senti la tranquillité l’envelopper.
Les lumières se rapprochaient avec les pas de l’homme.
“La Pierre de Mana de Feu. C’est un sort pour te garder au chaud. Tenez, prenez-la et gardez-la près de vous.” a-t-il dit.
Max se sentit instantanément désorientée, “M-moi… Monsieur, c’est pour moi ?”
Elle ne pouvait s’empêcher de montrer sa surprise devant cette gentillesse inattendue, ce qui fit lever les sourcils de l’homme à son tour.
“Qui d’autre ? Les personnes réunies ici sont des hommes forts qui peuvent même rester nus sous le gel.” cracha-t-il avec une attitude insouciante, sans se soucier le moins du monde que ce soit une femme qui reçoive ses paroles.
Il a ensuite continué à expliquer, “Mais vous êtes différente. On dirait que vous n’avez pas beaucoup d’endurance non plus… De toute façon, cela me retombera dessus si vous attraper un rhume ici. Considérez ça comme une mesure préventive.” ( Mieux vaut prévenir que guérir, gg Ruth )
En entendant qu’elle pourrait être un fardeau, Max l’accepta dans ses mains sans un mot de plus. L’air chaud enveloppa doucement tout son corps dès que la pierre fut entre ses mains, comme il l’avait expliqué. Pendant un moment où elle ne faisait que regarder la pierre avec émerveillement, elle se rendit vite compte qu’elle ne l’avait pas encore remercié pour sa générosité.
Elle lève la tête, paniquée. “Merci… Monsieur, Messire Ruth.”
Le visage taciturne de l’homme s’adoucit à sa gratitude bredouillée. “Je ne suis pas un chevalier mais un sorcier. Vous pouvez m’appeler juste Ruth.” dit-il.
L’homme se tourna alors et retourna s’asseoir de l’autre côté, comme s’il en avait fini avec le but qu’il poursuivait. Riftan, qui avait observé leur échange en silence, se rallongea et l’entraîna avec lui. Max pouvait sentir le tremblement dans son toucher et la nervosité qui l’accompagnait.
“Tu es fatiguée.” Il commence : “Tu dois dormir. Nous partirons demain dès les premières lueurs de l’aube.”
La main de Riftan s’est alors déplacée pour éteindre la lumière de la lampe à huile posée à ses côtés. Comme si les autres chevaliers l’avaient attendu, les lumières de la pièce s’éteignirent en dominos, submergeant le lieu dans une obscurité lugubre. Max, qui se tortillait inconfortablement dans les bras de l’homme, ne supporta pas la terrible fatigue qui venait et ferma les yeux.
Le tambourinage régulier de la poitrine avec laquelle sa joue était en contact ressemblait beaucoup à une berceuse. Et instantanément, ses inquiétudes de dormir dans un tels endroit s’estompèrent, remplacées seulement par un profond sommeil.
*
Au matin, ce qui était l’apparence effrayante du village de la nuit dernière a disparu, remplacé par une lueur vive. Devant leurs yeux, une magnifique vue panoramique de la forêt de Yudical s’étendait au-delà de la rangée de huttes comme une toile de fond. D’interminables champs de blé dorés s’étendaient devant sa vue, se déplaçant comme les vagues de l’océan par un matin calme.
Max a quitté l’entrepôt pour se laver le visage avec le seul ruisseau disponible. Au petit matin, l’eau était assez froide pour lui geler les mains. Elle en mouilla ses longs cheveux emmêlés comme une vigne, la brise fraîche embrassant son visage humide et faisant surgir la chair de poule de sa colonne vertébrale au moindre vent.
Ne pouvant pas se toiletter complètement, Max retourna à l’entrepôt, essuyant soigneusement l’eau sur son visage avec les manches de sa robe. Elle vit que les chevaliers s’étaient déjà rassemblés devant la voiture à son retour, prêts à partir.
Riftan fut le premier à l’apercevoir. “Hé, ne te promène pas seule.”
“Je… je suis désolée.” À sa voix sévère, elle a baissé la tête et s’est précipitée en avant. Riftan l’a alors soulevée jusqu’au carrosse, les sourcils toujours froncés, comme s’il avait encore une leçon à lui donner.
Et comme prévu, il a ajouté : “N’agis jamais par toi-même. Les bois de Yudical abritent beaucoup de monstres.”
Max tremble, se rappelant les êtres horribles qu’elle avait vus le premier jour. Cependant, c’est son impuissance face à leurs attaques qui la faisait trembler de peur.
“Oui, je ferai attention.”