Gabel n’était pas le seul à la regarder avec admiration, les autres chevaliers étaient également ébahis par la jeune sœur de Maximillian. Uslin Rikaido leur lança un regard mécontent, voyant comment ils étaient bouche bée.
“Nous sommes ici pour régler les questions relatives à la dispute. C’est pathétique de reluquer les femmes au milieu d’une guerre.”
“Qui est bouche bée ?”
Gabel grommela avec une expression embarrassée et fixa sa posture et à la mention de “guerre”, son visage s’assombrit instantanément. Juste avant de venir à Croix, ils ont dû livrer une bataille féroce contre près de trois fois le nombre habituel de bandits et Gabel a perdu l’un de ses apprentis chéris au milieu de celle-ci. Bien qu’il ait sarcastiquement déclaré que l’apprenti tombé n’était pas digne de porter l’armure du Chevalier Remdragon pour avoir perdu la vie à cause d’une bande de bandits, il lui a payé des funérailles coûteuses. Gabel n’était même pas le seul à avoir perdu un apprenti.
Les bandits de Dristan, qui n’étaient rien de plus qu’une bande armée désorganisée, se transformaient rapidement en une armée organiser. Et comme un groupe de rats dans un entrepôt de nourriture, ils continuaient d’arriver en troupeaux de quelque part, peu importe le nombre d’entre eux qu’ils massacraient et chassaient. Il était assez évident qu’ils avaient le soutien de la maison royale de Dristan. Où est-ce que des paysans, qui mouraient de faim, pouvaient-ils obtenir de puissants chevaux de guerre et mettre la main sur des armes en acier ? Le fait que vingt mille hommes deviennent à eux seuls des soldats et soient contrôlés par un certain système de commandement était menaçant.
“Par ici.”
Le majordome qui les guidait les conduisit jusqu’au troisième étage au lieu de la réception. Riftan le suivit et jeta un dernier regard à Maximillian Croix. Son visage avait soudainement une expression anxieuse et elle se cachait dans les ombres. Riftan pouvait clairement voir ses yeux se troubler comme une brume, son visage rond était d’une pâleur fantomatique, et son petit corps revêtu d’une simple robe brun-rouge se raidissait de nervosité. Il détourna à nouveau le regard. Il voulait croire que si elle le regardait si méchamment, c’était parce qu’elle était inquiète des nouvelles que les chevaliers allaient apporter.
“Veuillez attendre un moment. Je vais demander la permission au Duc et revenir.”
Le majordome leur a demandé d’attendre au bout d’un couloir carrelé de marbre et a franchi une énorme porte en acajou qui faisait au moins 10 kvets (environ 3 mètres). Riftan se tenait calmement devant la porte du bureau qui s’était refermé de façon humiliante sur son visage la dernière fois, attendant que sa demande d’audience soit accordée.
Le Duc de Croix leur a permis d’entrer après un long moment, laissant la vapeur refroidir suffisamment sur sa tête, et Riftan a franchi la porte rouge avec ses chevaliers. Le Duc s’est assis sur une chaise exquise ornée d’une fourrure de lion et lui a lancé un regard froid de ses yeux verts.
“J’ai entendu dire que vous êtes venu porter un message de Sa Majesté.” Il croisa les bras au-dessus du bureau et afficha un air mécontent sur son visage. “Pourquoi n’a-t-il pas envoyé un messager directement dans mon château ?”
“Sa Majesté voulait transmettre une conscience claire de ce qui se passe aux frontières orientales. C’est aussi la raison pour laquelle nous faisons régulièrement des rapports sur la situation.”
Riftan s’est approché du bureau du Duc et a parlé d’un ton monotone, mais il a répondu de manière sarcastique, sa moustache soigneusement entretenue tressaillant.
“Eh bien, quels ordres vous a donné Sa Majesté ?” ( Il dit vous parce qu’il parle à tous les chevaliers, dire tu serais insultant, bien que je vois bien ce *** le faire )
“Sa Majesté s’inquiète de la possible prolongation de la dispute actuelle. L’armée royale de Dristan intervient et il y a de fortes chances que ce conflit dégénère en une guerre totale. Sa Majesté ne souhaite pas que la situation s’aggrave.”
“S’il est prouvé que les royautés de Dristan soutiennent les bandits, alors ils sont punissables selon le traité de paix.” Le duc s’est appuyé sur sa chaise et a rétorqué sans ambages. “Je ne peux pas m’entendre avec des gens qui ont envahi mon territoire. Même le roi ne devrait pas m’imposer une telle humiliation.”
“Alors comment diable allez-vous punir ces souverains de Dristan ?” Riftan lui a répondu avec véhémence. “Serez-vous celui qui conduira une armée aux frontières orientales et mettra le roi Turben sur le siège du procès à Osyria ?”
Le visage du Duc rougit. “Les autres monarques des six royaumes m’aideront !”
“Le traité de paix est appliqué par les monarques des sept royaumes. Croyez-vous vraiment que ces monarques vont amener le souverain de Dristan devant la justice ?” Riftan a continué à parler de manière calme, en baissant son hostilité autant que possible. “Dristan détruira le traité de paix des sept royaumes et il sera utilisé comme un moyen de déclencher la guerre par tous les autres royaumes. Les rois ne pensent pas que le Saint Pape a le droit de les juger.”
“Comment oses-tu… tu essaye de me faire la morale ?”
“Je ne fais que transmettre la volonté des monarques.” Malgré l’expression enragée du duc, Riftan est resté calme. “Sa Majesté a déclaré que menacer de perturber la paix est absolument inacceptable. Ainsi, je vous encourage à mettre immédiatement fin à ce conflit et à mettre un terme à la querelle avec Dristan.”
Il sortit de ses robes une lettre portant le sceau royal et la posa sur le bureau. Au lieu de la ramasser, le Duc la fixa avec une colère glaciale dans ses yeux vert pâle. Puis, il s’exclama d’un ton tranchant.
“Si vous avez fini de délivrer votre message, partez !”
Riftan sortit de la pièce en compagnie de ses chevaliers, sans tarder. Gabel laissa échapper un long soupir alors qu’ils marchaient dans le couloir.
“C’est bien que tu lui aies utilisé une attitude aussi ferme ? Il vaut mieux rester hors du champ de vision de cette personne, sinon ça va être gênant…”
“Je lui ai montré une quantité décente de respect.” ( En effet, j’aurai pas cru qu’il serait resté là comme ça aussi longtemps sans le frappé mdr )
Riftan a répondu sans ambages et a descendu les escaliers. Les femmes qui s’étaient rassemblées devant la rampe d’escalier du deuxième étage n’étaient plus là. Il jeta un coup d’œil à l’endroit où se cachait Maximillian et descendit tranquillement la dernière volée de marches. Lorsqu’ils atteignirent le rez-de-chaussée, des domestiques s’approchèrent d’eux et les conduisirent aux chambres d’amis.
“Nous allons préparer un repas et apporter de l’eau pour un bain tout de suite.”
Lorsque les serviteurs sont partis, Riftan a enlevé son armure et s’est approché de la fenêtre pour contempler les jardins. Le pâle soleil d’hiver éclairait faiblement les conifères vert foncé, et les oiseaux récoltaient des graines dans les parterres de fleurs où l’herbe était morte et jaune. Il ouvrit les fenêtres et parcourut le jardin où Maximillian se promenait souvent et soupira en s’appuyant contre le mur. Il avait l’impression d’avoir vieilli de trois ou quatre ans au cours des derniers mois. Riftan se laissa tomber sur le lit et laissa échapper un autre soupir de lassitude.
***
Le Duc a finalement décidé d’accéder aux négociations avec Dristan, il n’y avait pas d’autre option de toute façon. Riftan a escorté les messagers du Duc jusqu’aux frontières où ils ont négocié avec l’armée royale de Dristan. Alors qu’ils faisaient des allers-retours entre le château de Croix et les frontières, la saison des pluies est arrivée.
Lorsque les négociations pour mettre fin au conflit se sont terminées en douceur, le duc a invité les nobles de l’Est et les messagers de Dristan à un grand banquet. Celui-ci fut organisé dans l’intention d’apaiser les griefs des vassaux qui avaient été affectés par des mois de conflit déchaîné. La salle de banquet était décorée plus luxueusement que jamais, la nourriture était assaisonnée d’épices rares et toutes sortes de fruits remplissaient infiniment les tables.
Les lèvres de Riftan se sont cyniquement écartées sur le côté alors qu’il observait le Duc de Croix sur le podium. L’homme qui s’était montré autoritaire durant tout le processus de négociation était assis à côté des messagers de Dristan, agissant de manière naturellement amicale et partageant même des rires. Cependant, l’humeur désagréable de Riftan s’estompa aussitôt lorsqu’il posa les yeux sur Maximillian qui était assise modestement à côté de son père.
Il la regarda attentivement manger des raisins morceau par morceau, puis il prit une longue gorgée de vin, sentant sa gorge brûler à cette vue. D’une certaine manière, elle devenait de plus en plus jolie à ses yeux chaque fois qu’il la regardait. Récemment, le simple fait de la regarder lui faisait ressentir une douleur intérieure. Il laissa échapper un soupir troublé et appela un serviteur pour remplir son verre vide. Hebaron fit claquer sa langue en regardant la vue de Riftan.
“Celui qui te voit dans cet état pourrait penser que nous avons perdu. Pourquoi as-tu l’air d’être en train de mourir ?”
“…on n’a pas vraiment gagné.”
“C’est un exploit d’avoir arrêté 20 000 bandits avec seulement 4 000 soldats et d’avoir tenu bon pendant six mois. Les négociations se sont déroulées plus facilement que prévu et Sa Majesté est satisfaite des résultats.”
Hebaron marmonnait en suçant ses doigts dégoulinants de jus de la nourriture grasse. “Personne ne peut nier les efforts louables du vice-commandant. Une cérémonie sera organisée pour annoncer le nouveau commandant des chevaliers à notre retour, alors sois prêts.”
Riftan ne répondit pas et Hebaron le regarda avec de la suspicion dans les yeux. “Tu ne penses pas à rompre ta loyauté, n’est-ce pas ?”
” Une fois que je serai le commandant des chevaliers de Remdragon, tu deviendras alors au service d’Anatol. Serais-tu satisfait de servir un seigneur d’un simple territoire dans les faubourgs ?”
“Qu’est-ce que tu racontes maintenant ? De toute façon, la plupart des chevaliers ne sont pas en mesure d’acquérir un fief, étant des bâtards, des roturiers, des nobles déchus ou des fils cadets de familles nobles moins importantes.” Hebaron a émis un fort grognement. “Si je me souciais vraiment de cela, le vice-commandant aurait été évincé depuis longtemps.”
Riftan voulait remettre en question de façon sarcastique la capacité d’Hebaron à faire cela, mais il s’est retenu. Hebaron sirote sa bière et continue de parler calmement.
“De plus, tout le monde est au courant que le vice-commandant fait des efforts pour reconstruire ce petit bout de terre. Nous sommes tous impatients d’y séjourner.”
Puis, les lèvres d’Hebaron se sont tirées sur les côtés alors qu’il fixait le siège où se trouvait Uslin Rikaido, l’homme le regardait avec des yeux désapprobateurs.
“Bien sûr, il y en a qui semblent s’attendre à ce que le vice-commandant établisse une position dans le palais du Drakium.”
“…”
“Cependant, c’est le vice-commandant qui prend la décision. Quant à nous, nous avons déjà pris la décision de suivre la volonté de Rifan Calypse.”
L’homme exigea silencieusement une réponse de son regard et Riftan baissa les yeux sur son verre de vin avec une expression indéchiffrable, puis soupira lourdement.
“Je n’ai pas l’intention de l’éviter cette fois-ci. Quand le roi Ruben abaissera son épée sur moi¹, je l’accepterai.”
Hebaron lui adressa un sourire satisfait et posa un verre de bière plein devant lui avec un bruit sourd. “Lorsque le vice-commandant prendra la place de notre commandant, je le traiterai très gracieusement.”
“… Je suis impatient de voir ça.”
Riftan soupira et prit le verre qu’Hebaron lui tendait. Boire avec lui durait généralement jusqu’à la fin du banquet, parfois même jusqu’à l’aube. En temps normal, il aurait été dégoûté et aurait rejeté son offre, mais ce jour-là, Riftan était également prêt à le défier avec de l’alcool.
Comme ils devenaient de plus en plus bruyants, certains nobles leur jetaient des regards méprisants. Cependant, il était assez désespéré pour faire n’importe quelle folie s’il pouvait soutenir le regard de Maximillian pendant une minute. Riftan engloutit les boissons qu’Hebaron ne cessait de lui tendre alors qu’il sentait son regard curieux l’atteindre. ( … tu crois que c’est une bonne idée d’attirer son attention alors que t’es presque ivre )