Traductrice : Moonkissed
Auteur : Exallion
Jour 41 – 1h15 – Manoir Salvador, District Intérieur, Colonie du Port de l’Est , Baranagay Dinahican, Infanta, Quezon
« Annica ! Tu vas bien ?! »
L’actuel chef de la famille Salavador, Darren Bryce Salvador, s’était précipité vers la porte de sa fille. Un rapport soudain était arrivé, il était donc au premier étage du manoir, même s’il était tard. C’est pour cette raison qu’il avait pu se précipiter au troisième étage et qu’il était arrivé juste après que les gardes, sa femme et ses deux fils soient déjà entrés dans la chambre de sa fille.
Darren était un homme plutôt en forme qui avait déjà dépassé la quarantaine. Comme d’autres riches hommes d’affaires, il avait hérité de l’entreprise familiale de ses parents, mais à la différence de ces derniers, il était né avant même que leur famille n’ait commencé à travailler. En bref, c’était un homme d’affaires prospère d’origine modeste. En raison de ses origines, il ne méprisait pas les faibles et les pauvres.
Pourtant, s’il était un homme sérieux et sévère en dehors de la maison, il était un mari et un père strict, aimant et protecteur pour sa famille. La nouvelle de l’infiltration de la chambre de sa fille avait fait battre son cœur à tout rompre. Il avait même quitté le bureau et ses subordonnés sans avoir entendu tout le rapport.
« Chérie, ne crie pas. » Maitea, l’épouse de Darren, une femme d’une quarantaine d’années à l’air aimable, réprimanda Darren pour avoir crié alors qu’il entrait dans la chambre. « Ta fille va bien. Il ne lui est rien arrivée, tu vois ? »
Darren regarda sa fille, Annica, qui était assise sur son lit, entourée de sa femme et de ses deux fils. Il balaya ensuite la pièce du regard et vit les gardes qui avaient répondu en premier et qui contrôlaient les animaux qui ne bougeaient pas dans la pièce.
« Annica, que s’est-il passé ? Tu n’es vraiment pas blessée ? Est-ce que tes animaux sont morts ? »
Darren s’approcha du lit de sa fille et lui caressa doucement la tête. Annica secoua alors la tête.
« Papa, je vais bien. La personne qui est entrée dans ma chambre ne m’a rien fait. Mes animaux ne sont pas morts non plus, je crois qu’ils se sont évanouis.
– Dieu merci. Pourquoi quelqu’un s’infiltrerait-il dans ta chambre si cette personne n’est pas venue pour toi ?
– Papa. Le fils aîné, Raybert, prit la parole. Cette personne a pris les limaces que nous avions achetées aux marchands qui venaient de la Vallée de la Mort.
– Quoi ? Pourquoi quelqu’un… Attendez… »
Darren s’arrêta de parler et se tapa le menton en réfléchissant.
« Tu t’es rendu compte de quelque chose, papa ? »
demanda le deuxième fils, Riley.
« La raison pour laquelle j’étais en retard, c’est que deux membres du personnel que nous avions dans le District Extérieur ont donné deux rapports différents. D’abord, ils ont vu Mlle Karlene Bautista et Mlle Alana Garces entrer dans la colonie avec un homme que l’on soupçonne d’être la personne qui a fait l’objet des rumeurs en provenance de l’armée.
– Papa, c’est l’homme qui s’est battu avec la horde et qui a un dragon comme animal de compagnie ? »
Annica se rapprocha soudain de son père, les yeux remplis d’impatience.
« Chérie, qu’est-ce que cet homme dans les rumeurs a à voir avec ça ? Serait-ce l’homme qui a volé les animaux de notre fille ?
– C’est très probable. Vous vous souvenez de la famille du district extérieur qui gardait aussi un slime comme animal de compagnie ? demanda Darren, ce qui fit hocher la tête aux autres. Bien que cela n’ait pas été confirmé, il semble que le même homme soit venu prendre le slime à cette famille.
– L’a-t-il aussi volé ? »
demanda Maitea.
« Il ne semble pas que ce soit le cas. Il semble que la famille l’ait donné de son plein gré et que l’homme se soit occupé des harceleurs qui harcelaient cette famille depuis un moment déjà.
– Puisque papa sait qui est entré dans la chambre d’Annica, devrions-nous le poursuivre et l’attraper ? »
suggèra Raybert. De façon inattendue…
« Non ! Ne faites pas ça ! »
cria Annica en signe de protestation.
« Pourquoi ? Je pense que ces rumeurs ne sont que des mensonges inventés de toutes pièces. Je ne crois pas qu’avec nos forces, nous ne puissions pas maîtriser ce type. Nous ne pouvons pas le laisser partir après avoir pénétré dans ta chambre. »
Raybert insista d’une voix sévère.
Cependant, le père ne considéra pas l’idée de Raybert et regarda Annica qui paniquait à la suggestion de son frère aîné.
« Annica, qu’as-tu vu ? »
demanda Darren d’une voix sévère.
Annica regarda son père et prit la parole.
« Nous ne pouvons pas gagner. C’est le Mutateur le plus fort que j’ai vu. En plus de l’énergie des mutateurs qu’il possède, il a aussi plusieurs énergies dans son corps que j’ai vues pour la première fois. Toutes ces énergies circulent paisiblement dans son corps et c’est magnifique. »
Elise Annica Salvador, la jeune fille de quatorze ans de la famille Salvador. En tant que mutatrice, elle était capable de voir les énergies circuler dans le corps de la personne ou de l’animal qu’elle observait. Cependant, elle avait aussi une autre capacité en tant que médium, celle de former des liens mentaux avec les animaux qui la reconnaissaient comme leur propriétaire ou leur maître.
« Alors, on va laisser tomber ? »
demanda Riley, ce qui rendit tout le monde silencieux à part Annica.
« Papa, je veux voir cette personne. » Elle demanda sérieusement. « S’il me laisse voir le dragon, je lui donnerai les slimes car je ne peux pas les apprivoiser quoi que je fasse. De plus, je n’ai pas vu ma grande sœur Karlene et ma grande sœur Alana depuis plusieurs semaines déjà. Je veux les rencontrer. »
***
Jour 41 – 1h20 – Rivière Sabang, Baranagay Dinahican, Infanta, Quezon
Mark était assis au bord de la rivière, dans une forêt assez éloignée de la colonie.
Après avoir fui le manoir Salvador, Mark s’était rendu directement à cet endroit pour deux raisons. La première était d’aller chercher de l’eau avant de rentrer et la seconde était de créer un conteneur temporaire pour les cinq [Enfants du sang] qu’il venait de récupérer et de les mettre dans son sac.
Il chercha un animal dans les environs et trouva facilement un chien sauvage évolué après avoir laissé l’odeur de son sang se répandre dans la zone. Le pauvre chien devint un matériau pour le récipient des petites créatures et un gallon assez grand pour l’eau qu’il était venu chercher.
Alors qu’il venait de terminer les récipients et qu’il allait commencer à fabriquer le gallon, il entendit des bruits non loin de lui. De toute évidence, il s’agissait d’une personne. Qui viendrait dans une forêt dangereuse au milieu de la nuit ? Bien sûr, il s’agissait soit de personnes qui n’avaient pas d’autre choix que de traverser la forêt, soit de personnes qui souhaitaient mourir.
Contre toute attente, il s’agissait en fait de ces derniers. De plus, Mark savait de qui il s’agissait.
Il s’approcha furtivement de la zone d’où provenait le bruit et vit la personne. C’était Edzel qui était en train de frapper un arbre comme un personnage d’un jeu de blocs. Malheureusement, l’atmosphère autour de lui n’était pas légère et son visage était rempli de remords. De plus, il jetait de temps en temps un coup d’œil à la rivière toute proche, comme s’il pensait à quelque chose et qu’il hésitait en même temps.
Mark sentit ce qu’il pensait.
Quelle personne faible !
pensa-t-il.
Après avoir été trahi par sa bien-aimée, il pensait se tuer dans cette rivière profonde au courant puissant. Mais il n’était pas assez déterminé pour le faire. Le pauvre homme ne pouvait que déverser ses frustrations sur l’arbre qui ne pourrait jamais se défendre.
En voyant cela, Mark ne put s’empêcher de s’étonner de sa coïncidence. Il avait pensé recruter cette personne pour certaines raisons, mais penser qu’elle viendrait dans cette forêt pour tenter de se suicider à proximité de l’endroit où il travaillait. Si ce n’était pas le cas, il était probable qu’il ne pourrait pas retrouver cette personne.
Puisqu’il avait l’intention de recruter cette personne, c’était assez pratique de le faire cette fois-ci.
« Tu peux frapper cet arbre jusqu’à ce qu’il se brise, mais tes frustrations ne diminueront pas du tout, tu le sais ? »
Mark sortit de sa cachette et prit la parole. Pourtant, le garçon fut surpris par l’apparition soudaine d’une personne au milieu de la forêt et tituba en arrière.
« Qui ?! »
Sans réfléchir à ce qu’il devait dire, Mark prit la parole.
« N’aie pas peur, je ne suis pas quelqu’un de suspect. »
Et il faillit se gifler. Tous ceux qui disaient cela étaient des gens plutôt suspects. En fait, Edzel se méfiait encore plus de lui.
Soupirant pour son erreur, il reprit.
« Qu’est-ce qui te fait peur ? Tu n’as pas déjà pensé à te suicider après que ton amant t’ait quittée ? »
Edzel comprit alors de quoi Mark parlait et ne put que laisser échapper un sourire amer alors que des larmes s’accumulaient au coin de ses yeux.
« Tu es un homme, n’est-ce pas ? Un vrai homme ne devrait pas pleurer quand ce n’est pas lui qui a tort. Ce n’est pas toi qui as tort.
– Non, je suis aussi dans l’erreur. Mon erreur est de ne pas avoir pu fournir ce dont Pearl avait besoin et ce qu’elle voulait. »
Mark sourit alors.
« Parce que tu es faible ?
– Tu… ! »
Edzel regarda Mark les yeux écarquillés. Il pensait que la voix de Mark lui était familière, mais quand il avait dit cette raison, il s’en était souvenu. Le murmure qu’il avait entendu auparavant venait de la personne en face de lui.
Ignorant l’expression surprise d’Edzel, Mark continua.
« Vraiment, ce n’est pas toi qui as un défaut dans ta relation. Dis-moi. N’as-tu pas fait tout ce que tu pouvais pour elle ? Même si tu es faible comme une personne normale, tu as fait des choses peu importe la difficulté pour la satisfaire, n’est-ce pas ? »
Mark énuméra ses hypothèses à partir des émotions qu’il pouvait détecter et absorber chez Edzel.
Le garçon en question ne pouvait que baisser les yeux en réfléchissant à ses actions passées. Ce qu’il venait d’entendre de la personne en face de lui était vrai. Il avait fait beaucoup de choses pour elle et pour la satisfaire, même des choses dangereuses pour obtenir ce qu’elle voulait et ce dont elle avait besoin. Et pourtant, voulant s’en sortir facilement, elle l’avait quitté.
« Parce que je suis faible par rapport à eux… »
marmonna Edzel.
« Ouais ». Mark acquiesça. « Tu es une personne normale, donc tu es faible. Comparé aux Évolués et aux Mutateurs, tu n’es rien d’autre qu’un enfant. Tu ne peux même pas comparer ce que tu peux faire à ce qu’ils peuvent faire. »
Le garçon se sentait encore plus impuissant alors qu’il appuyait son dos contre l’arbre qu’il venait de frapper et qu’il glissait vers le sol. Mais alors… Il entendit une phrase qui figea tout dans son esprit.
« Mais cela ne veut pas dire que tu resteras faible pour toujours, n’est-ce pas ? Tu es encore jeune et ce que tu peux faire en ce moment est bien meilleur que les autres personnes normales du même âge que toi. Dis-moi… »
Mark sourit tandis que ses yeux deviennent rouges et brillent d’une lueur glaciale.
« Veux-tu devenir plus fort ? »
Il laissa échapper une phrase que les démons disaient toujours pour attirer les gens désespérés.
« Si tu me suis et que tu me donnes ta loyauté, je te promets que tu pourras faire regretter à cette fille ingrate sa décision d’aujourd’hui. Je te promets que tu n’auras plus besoin de frapper un arbre sans défense et que tu frapperas directement les gens qui t’ont fait souffrir. »
Edzel leva les yeux et vit le regard diabolique de Mark. Pourtant, il n’avait pas peur, il avait plutôt l’impression que cette lueur diabolique était sa voie de salut.
« Tu peux vraiment faire ça ?
– Je suis quelqu’un qui ne rompt pas ses promesses. Suis-moi et quitte cet endroit. Quand tu reviendras ici, tu n’auras plus besoin de demander la faveur des gens et ce sera l’inverse. »
Mark tendit alors sa main droite vers Edzel et le garçon accepta l’opportunité qui lui était offerte.
« Retourne d’abord au campement et prépare tes affaires. Je te retrouverai avant notre départ.
– Oui… Comment dois-je t’appeler ?
– Mark. Mais comme tu vas me suivre à partir de maintenant, tu peux m’appeler Boss comme les autres.
– Oui, Boss ! »
Edzel se sentit gratifié. Il ne savait pas si ce que Mark avait dit était vrai ou pourquoi Mark l’avait choisi, mais il voulait cette opportunité. Au fond de son cœur, il aimait toujours Pearl, mais il voulait aussi qu’elle regrette sa décision de le quitter. En se souvenant de la façon dont cet homme s’était éloigné de Pearl, son amour pour elle avait commencé à s’éteindre.
Après qu’Edzel ait quitté la forêt en toute sécurité grâce aux conseils de Mark, ce dernier soupira.
« Tu peux sortir maintenant ? C’est ton fils, non ? Pourquoi ne fais-tu rien et ne fais-tu que regarder en te cachant ? »
Mark parla en regardant un arbre à proximité.
Sachant qu’il était exposé, un grand et bel homme non musclé aux cheveux dorés, à la peau pâle, aux yeux pâles et aux oreilles en forme de feuilles sortit de sa cachette. Il portait une couronne tribale dorée et ne portait rien d’autre qu’un pagne tribal pour couvrir ses parties intimes.
En regardant l’homme, Mark comprit. Ce n’était pas un humain. Il s’agissait d’un peuple élémentaire des Philippines appelé Tamawo.