Les Chroniques d'un Pilleur de Tombes | Grave Robbers' Chronicles | 盗墓笔记
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Chapitre 21 – Les flèches
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Les pointes de flèches ne s’étaient pas totalement enfoncées dans mon corps, mais j’avais fortement mal à la poitrine. Terriblement paniqué, je ne pouvais croire à ce qui venait de m’arriver. J’étais si jeune, je n’avais même pas encore touché la main d’une femme. Allais-je vraiment mourir dans cette tombe inconnue ? Si cela se produisait, on ne retrouverait pas mon corps avant des centaines d’années. Une telle issue serait vraiment trop tragique.

Les flèches continuaient de pleuvoir sur nous. J’ignore quel genre de mécanisme était à l’origine de cela, mais elles arrivaient si vite qu’il n’y avait aucun moyen de les esquiver. Gros-lard, utilisant son sac à dos comme bouclier, se précipita devant nous pour en bloquer certaines. Quand je vis l’état de son dos, j’eus le souffle coupé. Il était criblé de plus d’une douzaine de flèches, ce qui lui donnait l’aspect d’un brûleur d’encens. Il aurait dû être mort, mais sans que je comprenne pourquoi, il ne semblait pas souffrir le moins du monde.

Je me souvins avoir lu des romans où les gens se prenaient tant de flèches qu’ils ressemblaient à des hérissons. Je n’avais jamais vu cela auparavant, mais maintenant que j’en étais le témoin direct, je ne pus m’empêcher de me maudire.

Tout à coup, quelqu’un attrapa mes vêtements et me traîna le long du couloir. Pris par surprise, je jetai un coup d’œil derrière moi et vis qu’il s’agissait de A Ning. Mais devant son regard froid et menaçant, j’eus aussitôt un mauvais pressentiment et tentai en toute hâte de me débarrasser d’elle. Voyant que j’essayais de m’échapper, elle me donna, sans la moindre pitié, un coup de genou dans le bas du dos. La douleur fut bien pire que celle causée par les deux flèches plantées dans ma poitrine. Vidé de mon énergie, j’étais incapable de me soutenir. Profitant de la situation, elle se servit de moi comme d’un bouclier humain et se dirigea vers la grande porte de jade située au centre. Tandis qu’elle me traînait, d’autres flèches transpercèrent mon épaule, mon estomac et ma poitrine. C’était si douloureux que je faillis m’évanouir.

On prétend qu’il n’y a pas plus cruel qu’une femme. Je n’y avais jamais vraiment cru, ne pouvant imaginer que les femmes puissent être aussi vicieuses. Qui aurait pu s’attendre à ce qu’A Ning, qui m’avait montré sa peur et sa faiblesse, change ainsi en un clin d’œil et se serve de moi pour arrêter la pluie de flèches ?

Je n’allais tout de même pas me montrer à ce point magnanime. Etant plus fort qu’elle, je me contorsionnai de toutes mes forces, parvins à me libérer de son emprise et tombai dans la tranchée « d’éclairage » toute proche. A Ning, voyant qu’elle avait perdu son bouclier, se retourna immédiatement, esquiva simultanément plus d’une douzaine de flèches, puis me regarda fixement.

Merde, tu as encore le culot de me fixer comme ça après le coup que tu viens de faire ? !

Je poussai un cri et me précipitai pour tenter de l’attraper. Elle eut un ricanement, roula sur le côté, puis, utilisant le mur comme tremplin, sauta dans les airs pour atteindre un endroit sûr, à l’abri des flèches. Ses gestes étaient si précis et agiles que je n’eus même pas le temps de réagir.

Voyant qu’elle n’avait même pas été touchée, je tapai du poing sur le sol, furieux. Elle tourna la tête vers moi, m’envoya un baiser plein de dédain, alluma sa lampe torche, puis se faufila par l’embrasure de la porte.

J’étais si en colère que je faillis vomir du sang. Cependant, je n’avais d’autre choix que de me cacher dans la tranchée, et d’écouter le bruit des flèches qui passaient au-dessus de ma tête et frappaient les murs avec grand fracas. Cette pluie de projectiles se poursuivit durant encore cinq minutes, puis cessa. Je jetai un œil à Gros-lard qui, derrière moi, ressemblait à une boule criblée de flèches et titubait comme s’il était sur le point de tomber. Je me relevai aussitôt pour l’aider, mais d’un geste de la main, il me fit savoir que tout allait bien.

― Jeune Wu, dit-il, il y a un truc bizarre avec ces flèches. Comment peuvent-elles pénétrer si profondément sans que cela soit douloureux ? Retires-en quelques-unes et jettes-y un coup d’œil.

J’avais la même impression, car les blessures occasionnées par les flèches auraient dû être bien plus graves qu’elles ne l’étaient. Ma respiration était toujours aussi fluide, mais comme je n’avais encore jamais été tué par des flèches, j’ignorais ce que ça pouvait faire.

Je n’avais vraiment pas le courage de les retirer, aussi restai-je là, devant Gros-lard, à hésiter un long moment.  C’est alors que Zhang le Chauve, qui était assis derrière lui, serra les dents et se leva. Il était si bien protégé qu’il n’avait pas été touché. Voyant l’état où se trouvait le gros, criblé de flèches, il lui dit :

― Ne t’inquiète pas, ça va aller.

Gros-lard et moi en restâmes stupéfaits. Non seulement la voix de Zhang avait changé, mais comment était-il possible qu’elle nous soit si familière ? Il s’étira ensuite de tout son long. Nous entendîmes alors des claquements, des éclatements et sa taille augmenta de plusieurs centimètres. Usant de la même force, il fit de même avec ses bras qui s’allongèrent eux aussi.

Je crus que ma mâchoire allait se décrocher. N’est-ce pas une contraction des os ? me demandai-je. Je n’avais fait que parcourir cela dans les notes de mon grand-père. C’était une des techniques de base qu’utilisaient, dans les temps anciens, les pilleurs de tombes lorsqu’ils avaient à passer par des espaces très étroits, entre les poutres du toit des palais souterrains ou encore dans les espaces vides sous terre. Une compétence que l’on pouvait utiliser partout. N’ayant jamais compris le principe de cette technique, j’avais toujours pensé que c’était une plaisanterie. Si je ne l’avais pas vu de mes propres yeux à l’instant, jamais je n’aurais pu imaginer qu’une capacité surnaturelle comme celle-ci puisse exister.

(Ces dernières années, j’avais entendu dire que certains habitants de Luoyang, l’un des villages où vivaient les pilleurs de tombes, utilisaient encore cette technique. Ils creusaient des tunnels très étroits et recouraient à la contraction des os pour pouvoir s’y glisser. Lorsque la police passait par là, elle pensait simplement qu’il s’agissait d’un trou de fouine. Et quand bien même ils découvriraient qu’il s’agissait d’un tunnel de pilleurs de tombes, jamais les agents n’auraient pu y descendre pour arrêter les malfaiteurs. En effet, pendant que les policiers agrandissaient le trou pour pouvoir y passer, les voleurs, à l’intérieur, en avaient déjà creusé un autre et s’étaient enfuis. Malheureusement, cette compétence était très dure à maîtriser et même en s’entraînant depuis son plus jeune âge, il était difficile de réussir si l’on ne parvenait pas à coordonner tous ses os.)

Zhang le Chauve laissa échapper un long soupir, puis, passant la main derrière son oreille, il arracha son masque de peau humaine et révéla son vrai visage. J’en restai bouche bée. C’était Poker-face ! Je restai là un moment, figé, puis une vague de colère me submergea... Quel bon acteur ! Tu aurais pu gagner un Oscar. Je n’ai vraiment rien soupçonné !

Poker-face secoua les bras comme s’il ne les avait pas bougés depuis longtemps. Tout comme moi, Gros-lard en restait muet. Il lui fallut du temps pour reprendre ses esprits, mais une fois remis, il attrapa Poker-face :

― Qu’est-ce que ça signifie, petit frère ? Tu te moquais de nous ?

Sans un mot, Poker-face lui tapota l’épaule et l’invita à s’asseoir. Il saisit alors l’une des pointes de flèche sur le dos du gros, la tordit fortement et l’arracha sans peine. Je me penchai pour regarder et vis que Gros-lard n’avait pas la moindre blessure, juste une légère marque rouge.

Quoique surpris, je fus ravi d’apprendre que je n’aurais peut-être pas à mourir. J’appris rapidement la technique de Poker-face et entrepris de retirer les flèches fichées dans mon corps. Ce n’était vraiment pas difficile. J’examinai celle que j’avais à la main et vis que sa pointe avait été habilement conçue. Sitôt qu’elle entrait en contact avec quelque chose, celle-ci se rétractait, puis des griffes, comme des crochets de fer, venaient s’accrocher à la chair.

Poker-face observa l’amas de flèches qui jonchaient le sol et murmura :

― Cette femme a délibérément marché sur le piège. Il semblerait qu’en plus d’avoir foi en ses propres compétences, elle comptait bien se débarrasser de nous.

Je repensai au baiser qu’elle m’avait envoyé : il était évident qu’elle se moquait de moi. J’étais si furieux que je me mordis la lèvre jusqu’au sang. Pour sûr, on ne pouvait faire confiance aux jolies femmes. Je ne ferais certainement plus jamais cette erreur !

Gros-lard, dont le dos était presque entièrement couvert de marques rouges, eut une grimace :

― Heureusement que ces putains de flèches étaient inoffensives, sans quoi elle aurait réussi. Si j’étais mort criblé de flèches tel un hérisson, cela aurait entaché ma réputation et j’aurais été la risée de tous.

Je regardai les étranges flèches :

― Pourquoi toutes les pointes sont-elles ainsi ? Dans quel but ?

― Je n’en sais pas plus que toi, répondit Poker-face, mais j’ai su qu’elles étaient inoffensives à la seconde où l’une d’elle t’a touché. Il n’y a qu’une seule explication possible à mon sens : le propriétaire du tombeau voulait peut-être nous donner une chance de battre en retraite au lieu de nous tuer d’emblée.

Je trouvai tout cela très étrange, cela n’avait aucun sens pour moi. Mais ce n’était pas le moment d’en discuter. Cette A Ning avait peut-être déjà pénétré dans la chambre funéraire principale, et nous ne pouvions laisser cette garce prendre la marchandise et s’enfuir si facilement. À cette pensée, je voulus me lancer à sa poursuite, mais Poker-face eut tôt fait de me retenir. Il secoua la tête :

― Si le fantôme de la jarre voulait que nous allions d’abord dans la chambre funéraire de gauche, c’est qu’il y a une raison. On va faire ce qu’il dit. Nous sommes sur son territoire à présent, ne faisons pas n’importe quoi sans réfléchir.

Je rongeai mon frein. Si nous ne suivions pas cette femme et qu’elle finissait par s’enfuir, rien ne nous disait que nous la retrouverions un jour.

― Ne t’inquiète pas, dit le gros. Retournons d’abord cacher tout l’équipement de plongée. On verra bien si elle peut retenir sa putain de respiration assez longtemps pour s’en sortir !

Son cerveau était étonnement efficace dans les moments critiques. Pourquoi n’y ai-je pas pensé ? Me demandai-je en acquiesçant d’un signe de tête. Nous courûmes aussitôt jusqu’à la chambre auriculaire. Je braquai ma lampe de poche vers l’endroit où nous avions posé nos affaires et restai là, à regarder bêtement :  Il n’y avait plus rien, nos bouteilles d’oxygène avaient disparu !



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