Le Maître des Secrets | Lord of the Mysteries | 诡秘之主
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Chapitre 48 – Les Chroniques
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Chapitre 48 – Les Chroniques

Le Cauchemar apparut près de la longue table de bronze.

C’était un homme d’une trentaine d’années aux cheveux noirs et aux yeux bleus, au visage long et fin et aux sillons nasogéniens évidents. Il portait, encadrant la bouche et le menton, une barbe pas trop épaisse.

Alors que la douleur et la distorsion en lui s’atténuaient, il pressa la main sur sa poitrine et fit une révérence solennelle.

Ce Cauchemar n’était manifestement pas aussi confus ni faible, une fois libéré, que le Sans-Visage. Nul ne savait si l’amélioration de l’âme par la voie de la Nuit Éternelle était plus forte que celle de la voie du Voyant ou si c’était parce que le processus de Broutage n’avait eu lieu que récemment.

Klein soupira intérieurement et lui demanda par channeling :

– « Pourquoi Qilangos vous a-t-il tué ? »

Le Cauchemar eut un sourire amer.

– « Je suis un Gant Rouge des Faucons de Nuit. J’étais à la recherche de chroniques anciennes provenant d’un tombeau impérial de Balam. Nous pensions qu’elles étaient liées à la chute de La Mort.

« Ayant découvert qu’une partie de ces documents était tombée entre les mains d’un certain magnat, j’ai pris avec moi deux de mes coéquipiers et nous sommes montés à bord du navire sur lequel il se trouvait. Malheureusement, nous avons été attaqués par la flotte de Qilangos alors que nous étions sur le point de lancer une enquête. »

– « Qu’est-il arrivé à vos compagnons ? » demanda instinctivement Klein.

– « Nous avions l’opportunité de quitter le navire et même de tuer Qilangos grâce à notre habile travail d’équipe, mais le bateau a coulé et nous avons dû embarquer sur un canot de sauvetage. Tous, nous sommes tous morts…ou plutôt avons été tués dans l’exercice de nos fonctions ! »

Que la déesse vous bénisse… pensa Klein en traçant mentalement sur sa poitrine une lune cramoisie.

Cela le rendit plus conscient de la grande différence qui existait entre le combat en mer et le combat sur terre : les facteurs environnementaux étaient d’une importance cruciale.

Les Transcendants n’appartenant pas à la voie du Marin devaient être terriblement désavantagés !

Si le Tapis Volant n’avait pas été aussi immense, encombrant et lent – ce qui faisait de lui une cible facile – Klein aurait préféré le garder et donner de l’argent à Danitz.

Heureusement, j’ai cette vessie de murloc. Je pourrais trouver un Artisan pour me créer un objet occulte qui me permette de nager sous l’eau… Malheureusement, il est très difficile d’en trouver un. La plupart appartiennent à l’Église du Dieu de la Vapeur et des Machines, et il n’y a pas beaucoup d’Artisans non affiliés. Dans le cas contraire, les objets occultes ne seraient pas aussi rares. Si la situation l’exige, je demanderai de l’aide au Pendu…

Klein regarda ce Cauchemar qui avait été tué dans l’exercice de ses fonctions, s’adossa à sa chaise et lui demanda d’une voix douce :

– « Quel est votre nom ? Avez-vous des souhaits qui n’auraient pas été exaucés ? »

Déjà, la silhouette se dissipait lentement. À la question de Klein, il répondit en souriant :

– « Je me nomme Davy Raymond. J’ai perdu mes parents, ma femme, et mes frères et sœurs lors d’un incident lié à la magie noire. Il ne me reste que ma fille, Neelu. Elle est née en 1330 et c’est une très jolie personne. Je suis désolé d’avoir à le dire, mais c’est pour enquêter sur cet incident de magie noire que j’ai rejoint les Faucons de Nuit puis suis devenu un Gant Rouge. Je n’ai jamais pu passer du temps avec elle et de fait, elle a perdu son père en même temps que sa mère.

« Je pense que l’Église lui versera ma pension et lui apportera discrètement son aide. Je ne m’inquiète pas pour sa vie, j’espère seulement la voir entrer dans la salle des mariages sous le regard de la Déesse, afin qu’elle puisse avoir une famille et ne soit plus jamais seule. »

– « Nous sommes en 1350. Elle a peut-être déjà trouvé quelqu’un », soupira Klein avec nostalgie.

– « Le temps passe si vite… », murmura Davy Raymond. « Dites-lui que tous les coupables ont été punis et que je suis mort par accident. Il n’y a plus lieu de haïr qui que ce soit. Dites-lui aussi que papa l’aime et qu’il est désolé… »

Sa silhouette devenait de plus en plus transparente et il était sur le point de disparaître.

Klein ferma les yeux.

– « Où habite-t-elle ? » demanda-t-il ? « Et Quel est le nom du magnat qui a récupéré les chroniques de La Mort ? »

– « Nous vivions à Conant, dans le Comté de Desi. C’est une belle ville en bord de mer avec de riches plantations de caoutchouc à proximité. Si elle n’a pas déménagé, elle habite au 67 Rue de l’Indus Rouge. Le magnat s’appelle Jimmy Necker, mais il a dû lui aussi tomber entre les mains de Qilangos… »

Davy Raymond n’avait pas terminé sa phrase que déjà, sa silhouette avait complètement disparu. Il ne restait plus, sur le gant, qu’un objet d’un noir profond semblable à une gemme.

Klein observa tranquillement et après quelques secondes, se tapota quatre fois la poitrine dans le sens des aiguilles d’une montre.

– « Si j’en ai l’occasion, je rendrai visite à votre fille pour voir comment elle va. »

Dans ce palais qui évoquait la résidence d’un géant, le brouillard était infini, sans aucune ondulation et éternellement immuable.

Klein rangea la caractéristique Transcendante de Davy Raymond, se frotta le front et reporta son attention sur les chroniques de La Mort.

La voie de La Mort et celle de la Nuit Éternelle peuvent être interverties à des séquences élevées. Je ne vois rien d’étrange à ce que l’Église envoie du personnel pour enquêter sur les chroniques… Je me demande si Jimmy Necker est mort ou pas. Je vais devoir m’en assurer… S’il a péri dans une affaire tragique et que la chose est tombée entre les mains de Qilangos, il faudra que j’enquête du côté des pirates… L’équipage de Qilangos appartient désormais à la vice-amirale Maladie, à savoir Tracy…

S’agissant de La Mort, cela pourrait aider M. Azik. Klein décida de vérifier lui-même en passant, et s’il rencontrait des difficultés, il pourrait écrire directement à ce grand personnage.

Après avoir fait le vide dans son esprit, il retourna rapidement dans le monde réel et utilisa le rituel pour rappeler la Faim Rempante.

Lorsque tout fut terminé et voyant qu’il commençait à se faire tard, il abandonna l’idée d’essayer de rattraper son sommeil. Il décida de résumer les expériences et leçons tirées de l’opération de la nuit précédente.

La plus grande leçon qu’en ait tiré Klein était qu’il avait surestimé la patience des Punisseurs Mandatés.

Au départ, il espérait que, même s’il y avait eu un accident au début, ces derniers auraient été en mesure de le maîtriser et d’attendre que la véritable cible, le véritable protagoniste, à savoir Steel Maveti, fasse son apparition.

Dans ce cas, ils auraient certainement utilisé l’Artefact Scellé capable d’entraîner de nombreuses personnes dans un rêve pour retenir tous les Transcendants non affiliés qui s’étaient impliqués dans cette attaque. Quant à moi, ma singularité m’aurait permis de déceler que j’étais endormi et donc de m’échapper… J’aurais alors pu m’occuper de Steel Maveti et de ses assistants en toute sérénité, accomplir un exploit en tuant instantanément et ramener avec moi deux cadavres… Mais au moment même où l’incident s’est produit, cette bande de potes irascibles a débarqué en trombe. Ils n’ont même pas prévu d’équipe de secours pour parer à toute éventualité. Tout au plus ont-ils laissé le détenteur de l’Artefact Scellé en périphérie, avec un ou deux gardes…

À mesure qu’il y réfléchissait, le jeune homme ne savait plus s’il devait en rire ou en pleurer.

Si le groupe de pirates de Steel, plus prudent, n’avait pas bénéficié d’au moins deux Transcendants ainsi que de tous leurs pantins et zombies pour arrêter les Punisseurs Mandatés qui les poursuivaient, Klein se serait probablement retrouvé dans une situation deux contre cinq. Dans ce cas, il aurait renoncé et aurait aussitôt changé de stratégie.

Mais le plus satisfaisant à ses yeux était qu’il avait fait un bon travail de préparation spécifique.

Une habitude professionnelle de Magicien !

Comme il connaissait depuis longtemps – grâce à Mlle Sharron et à Maric – les caractéristiques des cinq premières Séquences de la voie du Mutant, Klein savait parfaitement que Steel Maveti, qui avait traversé la phase Lunatique, pouvait utiliser des facteurs irrationnels pour résister à toute perturbation et influence Transcendante sur son esprit. Il avait une très forte résistance dans ce domaine. Il avait donc renoncé à l’idée d’utiliser la Puissance du Dragon et la Frénésie du Psychiatre, ainsi que le Cauchemar qui était clairement plus faible que l’Artefact Scellé du Punisseur Mandaté, pour se concentrer sur la Perforation Psychique de l’Interrogateur et les pouvoirs de purification du Prêtre de la Lumière.

La Perforation Psychique n’était pas un pouvoir Transcendant qui perturbait les pensées et affectait l’âme, mais un moyen d’attaquer directement le Corps Spirituel. En substance, l’autre effet agissait sur le Corps du Cœur et de l’Esprit, et visait le Corps de l’Âme. Il y avait une nette différence entre les deux.

Si l’un des éléments de ce combo ne s’était pas enchaîné, Steel Maveti aurait pu se rétablir, ce qui m’aurait empêché de le tuer rapidement. Et dans cet environnement, c’est l’échec assuré. Et… J’ai également joué sur cette caractéristique de la voie qui consiste à se perdre dans ses désirs, ce qui permet de saisir facilement les émotions. Je pensais qu’une fois qu’ils auraient subi une attaque psychique, il y aurait de fortes chances pour qu’ils ripostent dans la folie, sans aucune considération pour le reste…

En fait, le moyen le plus sûr de faire face à un Zombie est de mettre en place des allumettes ou de bénéficier de Danitz. J’utiliserais alors Le Saut Enflammé et la Lumière de Sainteté contre Maveti. Cela lui donnerait envie de se battre mais il serait totalement incapable d’atteindre son adversaire. Il ne pourrait pas s’échapper quand bien même il le voudrait. Il suffirait d’envoyer une boule de feu et je le rattraperais. Malheureusement, ç’aurait été une perte de temps, et la situation ne le permettait pas…

Klein soupira, sortit sa montre à gousset, l’ouvrit d’un coup sec et la consulta.

Voyant qu’il était presque neuf heures du matin, il sortit de sa chambre.

Allongé dans un fauteuil, Danitz ronflait à tel point qu’on aurait dit qu’il y avait dans la pièce une machine à vapeur en fonctionnement.

Il était cependant alerte, car sitôt qu’il entendit Klein, il ouvrit les yeux et s’assit.

– « … Vous sortez ? » demanda-t-il en voyant Gehrman Sparrow prendre son chapeau sur le porte-manteau.

– « Oui. »

Fidèle à son personnage, Klein s’abstint d’expliquer qu’il tentait de jouer son rôle en aidant quelqu’un à se confesser.

Et moi ? Steel Maveti et ses hommes sont presque tous morts, je n’ai donc plus à m’en soucier… Si le journal ne publie pas la nouvelle, je peux toujours la diffuser moi-même. Il y a toujours des pirates et des aventuriers désœuvrés qui s’en serviront pour se vanter, répandront l’affaire en mer et finiront par en informer le Capitaine. Cette bande de bouseux ne sait rien faire d’autre que boire et se vanter, mais malgré tout, ils ont leur utilité…

Danitz réfléchit un moment, puis, une certaine peur au ventre, demanda :

– « M. Sparrow, puis-je partir à présent ? »

Klein eut un léger sourire.

– « Vous avez toujours été libre. »

C’est vrai… Ce n’est pas lui qui m’a attrapé cette fois, c’est moi qui avais besoin d’aide… J’ai toujours été libre !

Le moment de stupéfaction passé, Danitz s’en réjouissait lorsque soudain, il entendit la voix de Gehrman Sparrow qui flottait légèrement vers lui.

– « Mais c’est terminé à présent. »

Hein ? Quoi ? Le pirate semblait confus.

Il ne lui fallut pas moins de trois secondes pour comprendre ce que Sparrow voulait dire.

Il était à nouveau captif !

– « Pourquoi ? » demanda-t-il, agacé et furieux.

Klein mit son chapeau et répondit à voix basse :

– « Je veux rencontrer votre capitaine ».

Danitz écarquilla les yeux, se leva brusquement et s’écria :

– « Que lui voulez-vous ? »

Ce type est un peu trop agité… pensa Klein qui répondit calmement :

– « J’ai des choses à lui demander. »

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