– « Ils sont sans doute les plus beaux amoureux du Firmament… »
Chaque fois que la Fée Linglong se souvenait de Zhang Xuan, de Nie Lingxi et de Luo Qiqi, qui étaient partis en volant avec la bénédiction de nombreux cultivateurs, elle ne pouvait s’empêcher de se sentir profondément envieuse.
Née parmi les Dieux Monarques, elle était destinée à vivre une existence très différente de celle des autres. Pourtant, elle avait soif de l’amour des mortels. Cela faisait longtemps qu’elle espérait rencontrer un homme bien plus fort qu’elle sur qui elle pourrait s’appuyer.
Cependant, les Dieux Monarques étaient pour la plupart à peu près à son niveau, et certains lui étaient même légèrement inférieurs. Même si certains lui avaient déclaré leur flamme, ils ne l’intéressaient tout simplement pas. Ce n’était pas qu’elle était trop ambitieuse, mais ce dont elle avait envie, c’était d’un amour romantique et passionné réservé aux représentants du monde des mortels. Ce n’était pas quelque chose que le Monarque Dragon-Nuage et les autres pouvaient lui apporter. Elle les connaissait tout simplement trop bien. Elle ne pouvait pas se résoudre à se livrer à l’un d’eux.
Le Monarque Dragon-Nuage était un coureur de jupons, il avait d’innombrables descendants dispersés partout à travers le monde.
Le Monarque Impérissable passait ses journées à réfléchir à la façon dont il pouvait se suicider, comme s’il était un asocial enfermé dans sa dépression. De plus, il ne s’intéressait pas du tout aux femmes.
Le Dieu Monarque Fumeng était très colérique, il n’avait pratiquement aucune patience.
Le Monarque Démon Qiankun était trop efféminé à son goût.
Le Dieu Monarque Zhuoyang était imprudent et insensible, il avait tendance à négliger les détails. On racontait même que souvent, il ne mettait pas de sous-vêtements. Beurk !
Le Dieu Monarque de l’Épée Divine était amoureux de sa lame. Avait-il besoin d’une dame ?
Le Monarque Subjuguant le Ciel n’avait pas le moindre désir de fonder une famille, il était pire qu’un moine.
Et le Dieu Monarque Lingxi était une femme…
Et voilà ! Il n’y avait tout bonnement personne qui lui convenait parmi les Dieux Monarques, ce qui était la raison pour laquelle elle était restée célibataire au fil des millénaires.
Mais… Alors qu’elle observait à quel point certains couples étaient heureux, elle ne pouvait s’empêcher de se demander quand viendrait son temps.
En tant que femme, elle espérait sincèrement avoir quelqu’un de fiable pour se tenir à ses côtés, quelqu’un qui l’écouterait parler de toutes les situations qu’elle vivait. Elle était certes un Dieu Monarque, mais elle n’était pas un être détaché. Peut-être était-ce à cause de son désir irrésistible d’avoir un compagnon qu’elle souffrait d’insomnie. Peu importait ses efforts, elle n’arrivait tout simplement pas à fermer les yeux.
Elle trouvait cela vraiment frustrant.
Voilà pourquoi elle était jalouse en voyant Luo Ruoxin et Luo Qiqi se marier.
Comme elle aurait aimé être à leur place !
Elle soupira, puis chassa ces pensées de son esprit. Elle marchait dans les rues de la Cité Royale Exquise. Un mois avait passé depuis le grand mariage de Zhang Xuan et du Dieu Monarque Lingxi, mais l’agitation ne s’était toujours pas calmée. De nombreuses personnes en parlaient encore avec enthousiasme.
Elle écouta les potins un moment avant d’entrer dans une taverne relativement haut de gamme.
Elle s’était déguisée avant de s’aventurer dans la rue, personne ne pouvait donc la reconnaître.
Les Dieux Monarques ne restaient pas toute la journée dans leurs palais massifs et glaciaux. Une telle vie aurait été vraiment ennuyeuse ! Ainsi, de temps en temps, ils se déguisaient en mortels et déambulaient.
Elle s’assit près de la fenêtre et passa commande. Elle mangea lentement, savourant sa nourriture.
Alors que sa frustration commençait enfin à se dissiper, un groupe important de personnes vêtues d’uniformes similaires entra dans la taverne.
– « C’est lui ! » dit l’un d’eux d’une voix étouffée.
Les dizaines d’individus qui venaient d’arriver tournèrent immédiatement la tête vers un homme d’âge moyen assis non loin d’elle. Légèrement potelé, il lui tournait le dos, elle était donc incapable d’apercevoir clairement son visage.
Cet inconnu semblait ignorer le fait que beaucoup de gens le regardaient. Il tenait toujours son verre de vin et le sirotait calmement, l’air détendu. Il avait commandé de la poitrine de porc braisée, ainsi que quelques pieds de porc. Il mangeait avec enthousiasme, la graisse coulant le long de ses lèvres.
– « Encerclez-le ! » Après avoir identifié leur cible, le chef du groupe, un homme d’âge moyen, fit signe à ses hommes en levant la main.
Huala !
Ils l’entourèrent aussitôt. Alors même qu’ils n’avaient pas encore attaqué, une terrifiante soif de sang était déjà perceptible.
Le meneur salua les clients tout autour d’eux. « Chers amis, je dois régler une certaine affaire, je vais donc devoir vous demander de sortir un instant. Sachez que vous pourrez me demander de vous rembourser ce que vous avez payé aujourd’hui ! »
– « Oui, oui, nous partons tout de suite… »
– « Ils sont du Clan Shangguan ! »
– « Le clan Shangguan ? »
– « Oui ! Après la mort du Dieu Roi Gouverneur Baiye Qinghong, ce Clan a fini par devenir la puissance dominante de la Cité Royale Exquise. Il ne faut les offenser à aucun prix ! »
– « Qui est donc ce gros lard ? Pourquoi veulent-ils le capturer ? »
– « Je n’en sais rien, mais il ne me semble pas sage de mettre le nez dans leurs affaires. Dépêchez-vous, allons-y ! »
…
Au milieu de discussions feutrées, la foule quitta précipitamment la taverne.
Cette affaire ne les concernait pas et il était sage de ne pas se mêler de ce qui ne regardait que le plus grand Clan de la Cité Royale.
Les seuls qui restèrent furent le groupe du Clan, l’obèse, et la Fée Linglong.
Cette dernière n’était pas de bonne humeur. Il ne lui avait pas été facile de trouver un endroit où souffler. Elle refusait de quitter sa chaise.
Voyant que quelqu’un n’était toujours pas parti, le meneur fronça les sourcils. « Dites ! Notre Clan Shangguan a quelque chose à régler avec cet homme. J’espère que vous quitterez les lieux rapidement, sinon nous pourrions finir par vous blesser accidentellement. Ce serait vraiment regrettable, n’est-ce pas ? »
– « Faites ce que vous voulez. Considérez que je ne suis pas là… » dit-elle en se versant un nouveau verre de vin.
Mais avant de pouvoir finir sa phrase, une immense ombre se dressa au-dessus d’elle. Levant les yeux, elle vit le gros s’asseoir en face d’elle et lui tendre une assiette de pieds de porc. Un sourire aux lèvres, il dit : « Jeune femme, il serait préférable que vous quittiez la taverne. Ils sont là pour s’occuper de moi, ce serait terrible s’ils vous blessaient par accident… »
Ce ne fut qu’à ce moment-là qu’elle parvint enfin à voir clairement son visage. Il avait l’air amical. Même si elle ne l’aurait pas qualifié de beau, il avait un charme unique.
Au lieu d’accepter l’assiette, la Fée Linglong le regarda et demanda avec curiosité : « Ils sont du Clan Shangguan. Ne les craignez-vous pas ? »
Avec son discernement, elle pouvait affirmer que cet individu n’était qu’un Dieu Céleste de palier supérieur. Pourtant, il n’avait pas l’air apeuré. Il prenait même le temps de s’inquiéter pour elle. Il lui semblait plus noble qu’elle ne l’avait initialement pensé.
– « Les craindre ? Qu’y a-t-il à craindre à leur sujet ? » répondit-il en riant. « Ce ne sont qu’une bande de lâches qui se sentent pousser des ailes quand ils sont en groupe ! »
Sentant qu’il pensait vraiment ce qu’il disait, elle devint encore plus curieuse.
Shangguan Yunwan était quelqu’un qu’elle avait nommé. Même si elle n’était pas mariée, cette femme avait sept frères plus jeunes qu’elle. Pour cette raison, le Clan Shangguan était énorme, même comparé aux autres grands groupes du Firmament.
Ce gros bonhomme n’était qu’un Dieu Céleste de palier supérieur, pourtant il était intrépide. D’où lui venait sa confiance ?
En l’entendant, les sourcils du chef du groupe se haussèrent. Il fixa Sun Qiang avec un regard qui aurait pu tuer. « Vous cherchez la mort ! »
Sun Qiang savait qu’une bagarre ne pouvait être évitée. Il posa donc son assiette de pieds de porc avant de se lever. Il retroussa ses manches et lança à la foule autour de lui, l’air nonchalant : « Je ne connais pas cette jeune femme ici, et elle n’a rien à voir avec moi. Battez-vous avec moi, mais ne lui faites pas de mal. »
Voyant qu’il pensait toujours à la protéger malgré le danger, elle ne put s’empêcher de le voir sous un nouveau jour. Indépendamment de savoir qui avait raison dans leur différend, son attitude et son tempérament le plaçaient au-dessus de ce groupe du Clan Shangguan. Gentilhomme et attentionné, il avait dû être un véritable tombeur dans sa prime jeunesse.
C’était la première fois que Fée Linglong vivait une telle situation malgré sa longue vie.
– « Hum ! De toute façon, nous sommes là pour vous ! » grogna son interlocuteur avant de faire signe à ses subordonnés.
À cet instant, d’innombrables vagues de Qi d’épée filèrent vers leur cible.
Pas le moins du monde anxieux, celui-ci sourit en glissant entre les attaques. Il bougeait avec la même aisance que les papillons fondant sur une grappe de fleurs. Étonnamment, pas une seule frappe ne le toucha.
Peng peng peng peng !
Après quelques bruits sourds, les dizaines de Dieux Célestes de palier intermédiaire se retrouvèrent allongés sur le sol, gémissant de douleur.
– « Quel incroyable sens du combat ! » La Fée Linglong hocha la tête en signe d’approbation.
Avec sa perspicacité, elle avait facilement décortiqué ce combat. Cet homme semblait être un Dieu Céleste de palier supérieur ordinaire, mais grâce à sa profonde maîtrise de l’art du combat, il était capable de surmonter un désavantage numérique pour dominer facilement tant de Dieux Célestes de palier intermédiaire. Elle avait l’impression qu’il pouvait repérer les défauts de chaque technique, ce qui lui avait permis de prédire les actions adverses et de riposter en conséquence.
Ainsi, les membres du Clan Shangguan avaient été incapables de le blesser, même s’ils l’avaient attaqué tous ensemble. Tous avaient été rapidement vaincus.
– « Ces idiots… N’osez pas vous réjouir simplement parce que vous avez vaincu mes subordonnés ! » Voyant que ses hommes avaient été vaincus si facilement, le visage du meneur s’assombrit. Il fit un pas en avant et révéla sa cultivation, celle qu’un pratiquant à un pas d’être un Dieu Roi.
Dans sa cultivation comme dans sa force, il était bien plus puissant que son adversaire. À en juger par l’exquise souplesse de ses mouvements, il avait probablement bénéficié de l’héritage de la branche principale du Clan Shangguan. Cela signifiait qu’il était l’un des membres les plus haut placés de l’organisation.
Hu hu !
Sans aucune hésitation, il lança un barrage de Qi d’épée vers le gros bonhomme.
Malgré son talent au combat, ce dernier avait du mal à tenir bon face à tant de Qi d’épée, il fut donc forcé de reculer encore et encore.
– « Soyez prudent, » lui dit Fée Linglong en fronçant les sourcils. Cet homme lui avait fait très bonne impression, elle ne souhaitait donc pas le voir blessé.
– « J’apprécie votre inquiétude, mais je vais bien. Comme je l’ai déjà dit, ce ne sont que des lâches ! » Il rit, recula d’un pas, et attrapa un pied de cochon sur la table. Il en prit une bouchée avec enthousiasme avant de regarder d’un air hautain le chef à l’aura d’un vaillant guerrier. « Laissez-moi voir à quel point vous êtes fort ! »
Alors, il se jeta en avant, son corps semblable à une montagne.
– « Cela doit être cela qu’ils appellent… l’aura d’un héros, » murmura la Fée Linglong avec des yeux pétillants. Elle sentait quelque chose de spécial s’épanouir dans son esprit, dans son mental resté si calme et si placide pendant de si nombreuses années.
Elle avait pensé qu’il lui serait impossible de tomber amoureuse d’un homme. Qui aurait pu imaginer que ce gros lard à l’air moyen la captiverait autant ? Il était certes faible, mais il avait assez de confiance et d’assurance pour rester imperturbable face à des êtres bien supérieurs.
Il n’était certainement pas un homme ordinaire.
Ébranlé par les réactions de son adversaire, le meneur recula d’un pas. Il serra les dents avant de charger à son tour.
Peng peng peng !
Après quelques échanges, le gros confiant fut encore repoussé. Son zèle ne suffisait pas à compenser son manque de force.
– « Quelle audace ! Comment osez-vous lever la main sur moi ! Est-ce que vous savez qui je suis ? » beugla-t-il, féroce comme un lion.
– « Qui… ? » répéta l’autre, légèrement déconcerté. Son opposant lui semblait si sûr de lui que, malgré le soutien du Clan Shangguan, il commençait à s’inquiéter. Certes, le Clan était puissant, mais il y avait encore un certain nombre de personnes que ses membres ne pouvaient se permettre d’offenser. Par exemple, s’ils avaient méprisé Baiye Qinghong avant sa chute, cette femme vindicative aurait sûrement fait terriblement souffrir leur Clan.
– « Je suis le majordome des cieux ! » déclara le gros lard en regardant de haut le meneur, comme si personne n’était digne de lui tenir tête. « En osant lever la main contre moi, vous levez la main contre le Firmament lui-même. Essayez-vous de vous rebeller contre le ciel ? Vous l’aurez cherché ! »
Hula !
D’un simple mouvement de son poignet, il fit apparaître un jeton qu’il tint dans sa paume. Malgré sa petite taille, ce dernier semblait aussi lourd que les cieux. Quiconque oserait agir de manière inappropriée devant lui subirait un châtiment divin.
– « C’est… l’aura du Seigneur Zhang Xuan ? » La Fée Linglong était déconcertée, reconnaissant cette sensation.
Ce petit gros qui avait touché son cœur était-il lié au prodige ?
Peng !
Alors qu’elle fronçait les sourcils, perplexe, le rondouillet compta sur la puissance du jeton pour prendre rapidement l’avantage et corriger son adversaire. Après quoi, il secoua la tête d’un air déçu. « Encore un autre insolent à mon palmarès… »
Il reposa le pied de porc dans l’assiette, plaça ses mains dans son dos et s’éloigna d’un pas si léger qu’il donnait l’impression qu’il ne s’était rien passé.
– « Cher ami, s’il vous plaît, attendez un instant ! » C’était la première fois que la Fée Linglong rencontrait quelqu’un d’aussi insouciant. Incapable de se retenir davantage, elle se leva rapidement et l’interpella. « Puis-je connaître votre nom ? »
– « Je suis… » Il releva le menton et ses yeux étincelèrent, manifestant sa confiance. « … Sun Qiang ! »
– « Sun Qiang ? » Elle grava son nom dans son esprit. Avec un sourire, elle fit un geste en direction de la table et demanda : « Vos pieds de porc… »
Il tourna froidement la tête. « Ce sont les vôtres désormais… »
Le visage de la Fée Linglong rougit légèrement.
…
Un an plus tard, la Fée Linglong et Sun Qiang célébrèrent un grand mariage.
Et à partir de ce jour, elle ne dormit plus jamais la nuit.