Ma chère petite disciple !

Secouant la tête, Zhang Xuan vola vers Zhao Ya et observa le livre qu’elle regardait. À sa grande surprise, il s’agissait de son manuel manuscrit, la technique de cultivation qu’il avait préparée à son intention alors qu’ils avaient encore été dans le Royaume de Tianxuan. Son objectif ayant été de résoudre les troubles dont elle avait souffert en raison de sa constitution unique, il n’était alors plus d’aucune utilité.

Pourtant, il était encore en parfait état. Pas une de ses pages n’était écornée. Il était évident qu’elle en avait pris grand soin.

Quand il le lui avait donné, il lui avait demandé de le détruire après en avoir mémorisé le contenu. Qui aurait pensé qu’elle l’aurait gardé jusqu’à ce jour !

Il la regarda. Le proverbe ne disait-il pas qu’une jeune femme se métamorphose à dix-huit ans ?

En six mois, elle était devenue plus grande et bien plus élégante. L’éveil de son Yin Pur l’avait également encore rendu beaucoup plus belle qu’auparavant.

À sa connaissance, la seule personne qui lui était supérieure était Luo Ruoxin.

Il semblait que la Cour de la Plaine du Glacier l’avait bien traitée, du moins au début. Sans quoi elle n’aurait pas été capable d’éveiller autant sa constitution si particulière.

Zhang Xuan évalua son état de ses yeux perçants. Il fronça les sourcils.

Même si elle n’était pas physiquement liée, sa cultivation paraissait bloquée. Elle n’était alors pas différente d’un simple mortel, sans la moindre once de zhenqi.

– « Professeur, est-ce que… vous allez bien ? » marmonna-t-elle tandis qu’il essayait de comprendre ce qui lui arrivait.

Il hocha la tête en réponse. « Mais oui, je vais parfaitement bien ! »

– « Qui est là ? » sursauta-t-elle, alarmée. Elle bondit rapidement sur ses pieds et croisa les bras devant elle, prenant une posture défensive.

– « Qui cela pourrait-il être d’autre que moi ? » Puis il laissa progressivement apparaître son visage. Après avoir été affiné par la foudre, son Esprit Primordial s’était tellement renforcé qu’il pouvait littéralement le matérialiser. Le seul problème étant qu’il faisait plus de vingt mètres de hauteur, un véritable géant.

– « Professeur… » En percevant le visage et l’aura lui étant si familiers, ses yeux s’embuèrent.

Il n’avait pas un seul jour quitté ses pensées. Elle avait d’innombrables choses à lui dire, jurant de les lui transmettre quand, enfin, ils seraient à nouveau réunis. Pourtant, alors que le moment était venu, elle se retrouva à sa propre surprise en plein désarroi, incapable de construire la plus simple phrase.

– « Oui, c’est moi. Dites-moi, que se passe-t-il ici ? N’êtes-vous pas le Jeune Maître de la Cour de la Plaine du Glacier ? Pourquoi avez-vous été emprisonnée ? »

Il n’avait pas beaucoup de temps devant lui. Il devait apprendre ce qu’il en était exactement pour préparer un plan afin de la sauver.

– « Professeur… est-ce que c’est vraiment vous ? Attendez… Vous… Vous avez entendu ce que je viens de dire ? » rougit-elle.

– « Entendu quoi ? »

– « Je… Rien ! » Agitant vivement la main devant elle, elle lui jeta un coup d’œil. Voyant qu’il ne semblait pas vouloir creuser la question, elle poussa un soupir de soulagement. Elle tomba alors genoux et s’inclina devant lui : « Je sais qu’il ne convient pas qu’un disciple mette son enseignant en danger, mais je suis incapable de trouver comment me sortir de là. Je n’avais pas d’autre choix que de vous appeler au secours ! »

– « Si je suis venu, c’est pour vous aider. Dites-moi ce qu’il se passe. » Après tout, il avait été prêt à aller jusqu’à offenser le Clan Zhang et le Sanctuaire des Sages pour son bien-être.

– « J’ai… accidentellement découvert un secret de la Cour de la Plaine du Glacier. » Elle se mordit les lèvres. « Ma mère est en fait le précédent Maître de la Cour de la Plaine du Glacier ! »

– « Votre mère ? » Zhang Xuan fut surpris par cette révélation. Quel rapport avec sa situation ?

Zhao Ya était la fille du Seigneur Zhao Feng de la ville de Baiyu, et elle avait un majordome nommé Yao Han. Mais il était vrai qu’il n’avait jamais entendu parler de sa mère.

Dire qu’elle avait en fait été à la tête de la Cour de la Plaine du Glacier, une puissance comparable aux plus grands Clans Sages ! Comment avait-elle pu rencontrer un petit seigneur dans un endroit aussi reculé que le Royaume de Tianxuan ?

– « Ici, chaque Maître de Cour doit posséder le Corps de Yin Pur, et il se trouve que ma mère le possède aussi ! Un jour, elle a quitté la Cour de la Plaine du Glacier et a scellé sa propre cultivation avant de fuir aussi loin que possible, là où il n’y a aucun Maître Enseignant : le Royaume de Tianxuan. C’est là qu’elle a rencontré mon père, et ils se sont trouvés de nombreux points communs. D’amis, ils sont devenus amants et se sont mariés. Mais en me donnant naissance, elle n’a pas réussi à maîtriser son pouvoir, et un soupçon de son aura a fui. La Cour de la Plaine du Glacier l’a donc rapidement retrouvée, et afin d’éviter qu’il nous arrive malheur, à moi et à mon père, elle s’est rendue. »

– « Vous dites que votre mère est ici ? »

– « Oui. Tout comme moi, elle est emprisonnée quelque part dans la Cour de la Plaine du Glacier. Je l’ai cherchée, mais je ne l’ai pas trouvée ! »

Elle serra les poings, amère. Depuis son plus jeune âge, son père lui avait raconté de nombreuses choses sur sa mère, et toutes ces bribes avaient tissé l’image d’une mère aimante dans son esprit. L’idée même qu’elle pouvait souffrir la plongeait dans une profonde détresse, mais malgré tous ses efforts elle avait été incapable de la localiser.

– « Est-ce à cause de cela que vous avez été enfermée ? »

Il fronça les sourcils. Même si la précédente dirigeante était sa mère, cela n’aurait pas dû être une raison de l’emprisonner également. Après tout, la Cour de la Plaine du Glacier comptait sur la venue d’un Maître de Cour pour gagner en puissance. Il n’était pas facile de trouver une personne avec le Corps de Yin Pur, comment toutes ces femmes auraient-elles pu être assez hystériques pour briser leur propre espoir d’un avenir radieux ?

– « Ce n’est pas cela. La raison pour laquelle j’ai été capturée, c’est parce que j’ai découvert quelle est la dernière étape pour éveiller complètement mon Yin Pur ! » Alors, elle devint livide, et ses poings serrés commencèrent à trembler.

– « C’est-à-dire ? »

Il était perplexe devant une telle réaction. Puisqu’elle devait de toute façon l’éveiller pour devenir Maître de Cour, il était ridicule pour les Doyennes de l’emprisonner pour la simple raison qu’elle avait appris prématurément comment cela allait se passer.

– « Le Corps de Yin Pur est la manifestation du Yin le plus pur au monde dans le corps d’une femme. Même dans l’ensemble du Continent, il est extrêmement rare, au point que seules ma mère et moi possédons probablement une telle constitution. Une fois parfaitement éveillées, notre cultivation progresse incroyablement vite. Qu’il s’agisse de techniques de combat ou de techniques de cultivation, nous pouvons les maîtriser rapidement sans faire beaucoup d’efforts. Cependant, le monde tend vers l’équilibre. Les cieux ne permettent pas à un mortel de croître au-delà d’un certain point. Comme le dit le dicton : “Un Yin solitaire ne grandit jamais, un Yang isolé ne fleurit jamais.” Ces deux derniers n’existent pas en tant qu’entités séparées. Ce sont des puissances complémentaires, nées et détruites par paires. Malgré la nature opposée des deux forces, elles sont nécessaires à l’existence de l’autre… » Se souvenant de ce qu’elle avait lu à ce sujet, elle fut prise d’un frisson. « Aussi, la dernière étape pour éveiller le Corps de Yin Pur est de brasser le Yin et le Yang pour les fusionner ! »

– « Les brasser ? »

– « Oui. À part les femmes pratiquant les techniques de culture d’attribut Yin, une petite poignée de disciples masculins en pratiquent une d’attribut Yang. Afin de parvenir à éveiller complètement ma constitution, je suis censée les considérer comme de simples réceptacles et récolter directement leur énergie Yang de leur corps ! »

– « Ces hommes sont considérés comme de simples réceptacles ? La Cour se repose sur des pratiques aussi ignobles ? »

Ces êtres humains n’étaient vus que comme de simples outils. Une fois vidés de leur énergie, ils se fanaient et mouraient. Il s’agissait exactement du genre de pratiques que le siège du Pavillon des Maîtres Enseignants combattait. La raison pour laquelle les Oracles des Âmes avaient été exterminés était justement leurs techniques cruelles, dont la possession du corps d’autres pratiquants et la transformation d’individus en Humanoïdes de métal sans âme !

Dire que telle était la dernière étape pratiquée par la Cour de la Plaine du Glacier pour éveiller le Corps de Yin Pur. Il trouvait cela glaçant !

– « Oui. J’ai refusé de me plier à cette horreur. En conséquence de quoi, la Première Doyenne a ordonné mon emprisonnement dans l’espoir de me forcer à changer d’avis ! »