Je m’appelle Jobs, je suis le plus jeune séraphin à six ailes de Dieu.
Dieu avait pris grand soin de moi. Au cours de la soixante-troisième année de mon mandat, il m’avait envoyé sur Terre pour patrouiller dans le monde des humains.
Je tournoyais en l’air, tout en ayant la Terre en vue. L’architecture médiévale était restée plus ou moins la même partout.
Au milieu de la foule en délire, j’avais vu deux types étranges.
Ils semblaient se disputer. J’atterrissais sur un toit afin de les observer.
Tandis qu’ils se disputaient, chacun sortait le long et tranchant bâton de sa taille.
C’était quelque chose de nouveau. L’homme n’avait-t-il pas lutté à mains nues dans le passé ?
Ils avaient commencé leur combat, se balançant leurs bâtons d’une manière rythmique.
J’étais intéressé de savoir quel était exactement le sujet de leur dispute.
Je m’étais mêlé à la foule et je m’étais renseigné à ce sujet.
Plus tard, j’avais trouvé un forgeron. Ces longs bâtons tranchants étaient en réalité des épées occidentales.
Les hommes fixaient leurs épées sur leur taille pour en faciliter l’accès et l’utilisation.
« Où puis-je trouver la meilleure épée occidentale ? » Avais-je demandé.
« Je dois l’avoir ici. La meilleure de la ville », répondit-il.
Révélant mon identité, j’avais demandé dix épées à ramener au Ciel. En les recevant, j’avais doucement palpé l’une d’elles.
Sa renommée était justifiée. Il serait beaucoup plus efficace d’utiliser les épées que les poings lors des batailles.
J’avais ramené ces épées occidentales, dans l’intention de saluer Dieu avec elles.
J’allais recevoir des éloges, c’était sûr.
Dieu avait vu les épées et avait souri.
« C’est vraiment pas mal. »
J’étais ravi.
Ensuite, Dieu remit les épées à un ange du trône qui était à côté de moi.
Dieu lui fit faire des copies des épées pour les anges du Ciel.
Je cherchai secrètement l’ange du trône pour récupérer une épée.
L’ange du trône sourit et dit :
« Je ne l’ai pas encore modifiée. Ceci doit être mis à la taille. Tu as trois paires d’ailes, alors comment vas-tu garder cette épée occidentale ? »
C’était à ce moment-là que je réalisais que mon aile inférieure droite obstruait la partie de ma taille où l’épée devait être placée.
« Je sais ce que je dois faire, ne t’inquiète pas. »
Incapable d’argumenter d’avantage, l’ange du trône me la donna.
J’avais coupé mon aile inférieure droite pour faire une place à ma nouvelle épée. Je l’avais gardée serrée contre ma taille.
C’était douloureux mais ça valait le coup.
L’année suivante, Dieu m’avait de nouveau fait descendre.
J’avais découvert quelque chose.
Les hommes s’étaient améliorés dans leur art.
Les épées que j’avais portées au Ciel ne valaient plus grand-chose en comparaisons des nouvelles que j’avais vues.
Les nouvelles épées n’étaient plus en bronze mais en fer brut.
Et les épées occidentales en fer brut pouvaient facilement briser celles en bronze.
C’était à ce moment que je réalisais à quel point mon épée était obsolète.
Ces nouvelles épées avaient deux tranchants, l’un pour percer et l’autre pour fendre.
C’étaient des épées à double tranchant.
Avec un sourire amer, j’en avais demandé dix.
Cette fois, Dieu rida ses sourcils, apparemment peu convaincu. Il n’y avait pas eu d’éloges.
Il les remit une fois de plus à l’ange du trône.
Et j’en avais cherché une.
L’ange du trône rit en me voyant.
« Je n’arrive pas à croire que c’était ta solution. »
« Ça ne te regarde pas », avais-je marmonné.
Je ne pouvais supporter l’idée de lâcher ma première épée, mais l’épée à double tranchant était magnifique.
Impuissant, j’avais coupé mon aile inférieure gauche.
Une nouvelle année allait commencer, mais Dieu ne m’avait pas envoyé sur Terre.
Néanmoins, j’étais intéressé de voir comment les épées avaient évolué.
J’étais donc descendu sur Terre en cachette.
Il n’y avait pas eu beaucoup de changements à part l’invention d’une nouvelle méthode de production, la forge.
La forge de la fonte avait rendu les épées plus solides. Ainsi, une nouvelle sorte d’épée longue, venue d’un pays lointain, était arrivée.
Cette longue épée était plus large qu’une épée à double tranchant et devait être portée sur le dos.
Elle était beaucoup plus puissante aussi, mais elle exigeait plus de force de la part de l’homme.
J’en avais demandé une et j’avais coupé mon aile supérieure droite.
Je l’avais portée sur mon dos avec un sourire amer sur mon visage.
C’était bon, il m’en restait trois.
Et elles trois me suffirent pour retourner au Paradis.
Mais Dieu n’était pas heureux.
J’avais été enfermé pendant un an, mais au moins j’avais trois grandes épées sur moi.
Une autre année s’était écoulée en un clin d’œil.
Dieu m’avait appelé.
« Tu crois que ça en valait le coup ? »
J’avais souri.
« Ne m’en reste-t’il pas trois ? »
« Alors, veux-tu encore savoir comment l’homme a progressé ? »
J’avais acquiescé de la tête avec enthousiasme.
Dieu m’avait libéré en me donnant cet avertissement.
« C’est la dernière fois. Tu n’auras plus le droit de redescendre après ton retour. »
L’homme ne m’avait pas déçu. Ils avaient créé ce que l’on appelle le poignard.
Un poignard était plus large qu’une épée mais n’avait qu’un seul tranchant.
J’avais forcé un sourire tandis que je coupais mon aile supérieure gauche.
J’avais ajouté le poignard à ma collection.
Alors que j’étais sur le point de partir, l’homme avait inventé une autre arme – la lance.
C’était tout simplement trop long et il ne me restait que ma dernière paire d’ailes.
Je ne pouvais pas les couper, n’est-ce pas ?
Je cherchais le forgeron le plus habile.
Je voulais savoir exactement à quoi ressemblerait la meilleure des meilleures armes.
Il m’avait fallu deux mois pour trouver le forgeron le plus remarquable.
Je lui avais demandé un moyen de fabriquer l’arme ultime.
« La meilleure arme, c’est le temps. »
Je n’avais pas compris.
Il m’avait montré sa propre collection.
À l’intérieur se trouvait l’évolution des épées, de la première épée en bronze à la plus récente épée en fer brut.
Il m’avait dit que ce que j’appelais “la meilleure arme” n’existait pas dans ce monde, parce que le temps régnait en maître.
Et j’en possédais une quantité infinie.
J’avais coupé mes ailes restantes et j’avais commencé à apprendre de ce forgeron.
En découvrant que j’étais un ange immortel, il avait été gratifié. Il m’avait appris à forger des armes.
Lui aussi voulait savoir à quoi ressemblerait la meilleure épée du monde.
Bien que je fusse maladroit, le temps avait tout compensé.
J’avais hérité de tous les enseignements de ce forgeron avant sa mort.
Je commençais aussi à m’habituer à la vie sur Terre, vivant incognito dans cette ville.
J’avais offert mes meilleures armes aux vaillants soldats.
Parce que je ne pouvais plus voler, j’avais arrêté de me soucier des affaires du Ciel.
J’avais réussi à obtenir des nouvelles du ciel bien plus tard par le biais des églises.
Lucifer avait pris un tiers des anges avec lui pour commencer une révolte contre Dieu.
Après trois jours et trois nuits de guerre, les rebelles avaient finalement été jugés et jetés dans l’abîme.
Et les armes qu’ils avaient utilisées pour la guerre avaient été fabriquées par l’ange du trône, elles étaient les copies des épées que j’avais envoyées au Ciel.