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La voiture était garée dans un coin d’une rue achalandée à l’extérieur du magasin d’un négociant d’or très prospère.
Je m’appelle Jack, je suis un policier civil.
Je n’arrêtais pas les criminels.
Enfin, pas des criminels ordinaires en tout cas.
Depuis que j’avais reçu un tuyau, j’attendais ici depuis trois jours, mais aucune cible suspecte n’était encore arrivée.
J’avais regardé ma montre et j’avais remarqué que je pouvais prendre cinq minutes pour prendre un petit déjeuner au restaurant voisin.
J’avais réveillé mon partenaire, un assistant conducteur au ronflement tonitruant de 200kg.
« Surveille un peu, gros lard. Je vais chercher le petit-déjeuner. Appelez-moi s’il y a du nouveau. »
Le gros s’était frotté le ventre en souriant.
« Donnes-moi 3 petits pains, un gressin et du lait de soja salé. »
J’étais sorti de la voiture.
J’avais couru jusqu’au restaurant et j’avais soupiré en remarquant la longue file d’attente.
Les cinq minutes s’étaient écoulées en un clin d’œil.
Mon téléphone sonna. Frustré, j’avais répondu.
« Reviens vite, les cibles sont en mouvement. L’un d’eux est entré dans la boutique d’or. Il y a beaucoup d’otages », m’informa Bouboule.
« Quelle classe ? »
J’avais posé des questions.
Si ce n’était pas urgent, je pourrais encore avoir à manger.
« Classe B. Je vois un lance-flammes. Le tireur d’élite est en position », poursuit Bouboule.
« B ? D’accord. Attends-moi, j’ai presque fini. »
« Nn… non, non. Ramènes-toi vite ici. C’est ur… urgent ! », dit Bouboule en bégayant.
Son ancienne habitude de bégayer revenait toujours quand il était nerveux.
J’avais quitté la file d’attente et je courais vers le magasin d’or.
Sans faire aucune pause, j’avais récupéré mon flingue de ma ceinture.
J’avais désactivé le verrou et j’insérais les balles une par une.
Kachak ! Les huit balles avaient été chargées d’une seule main.
J’avais utilisé l’autre main pour mettre mon appareil Bluetooth.
« Viper appelle le QG », avais-je dit.
« Ici le QG, parlez s’il vous plait, Viper. »
« Où est le sniper ? »
« Dans un immeuble à 400 mètres. Zone cible : la deuxième de la quatrième fenêtre de la boutique d’or. Angle de tir : 6 heures. Possibilité d’agir. »
« Vipère reçue. » J’ai inhalé une bouffée d’air.
Etais-je censé piéger le déviant jusqu’à cet endroit ?
Le cerveau de ces chefs était-il rempli de merde ?
J’avais défoncé la porte de l’atelier.
J’avais levé mon arme et j’avais visé.
« Police ! Que tout le monde lève les mains », ordonnais-je.
J’avais pointé l’arme sur le seul homme debout.
Inutile de penser qu’il devait être le porteur du lance-flammes.
Juste au moment où j’étais sur le point d’appuyer sur la gâchette, on me l’avais arrachée de la main et une force m’avait plaquée au sol.
Etait-ce un homme invisible ?
« Bien joué, Hannah. Garde-le à terre et tues-le s’il bouge », dit le porteur du lance flamme en souriant alors qu’il remplissait son sac de bijoux en or.
Putain de merde.
Je sentais quelque chose de tranchant contre mon cou, mais je ne pouvais rien voir de cet angle.
Je sentais seulement qu’il s’agissait d’un couteau ou d’un objet ressemblant à un poignard. Il y avait au moins un homme invisible et un porteur de lance-flammes dans le magasin.
J’avais maudit d’une voix basse :
« Espèce d’attardé. Tu ne sais pas ce que tu fais ? Comment as-tu pu oublier d’allumer l’imagerie thermique ? »
« Quoi ? »
Une voix de femme retentit près de mon oreille.
Oh, une femme invisible.
« Vous avez une belle voix, madame. », dis-je en souriant amèrement.
« Hein ? Tu ferais mieux de bien te tenir, sinon ma voix sera la dernière que tu entendras », chuchota-t-elle.
À la dernière minute, j’avais reçu un rapport de mon appareil Bluetooth.
« Quartier général, terminé. Le sniper a activé l’imagerie thermique. Nouveau rapport : Deux déviants repérés. Un homme invisible et un lance-flammes. Indice de danger : Classe A. »
« C’est quoi cette voix dans ton oreille ? », demanda la femme avant de décrocher mon récepteur.
J’avais alors vu mon appareil Bluetooth flotter dans les airs.
Elle avait dû le mettre, mais je ne pouvais pas en être sûr parce qu’elle se penchait trop près.
Je n’osais pas bouger de façon imprudente, car je sentais déjà quelque chose couler de mon cou.
J’étais presque sûr que c’était du sang.
« C’est le canal de la police ? », demanda la femme.
Mon visage était devenu pâle.
Je n’avais pas pu localiser mon arme.
« Hannah, c’est le dernier tiroir. Encore 50 secondes et on s’en va. Débarrasses-toi de lui », dit le porteur du lance-flammes.
« Attendez, attendez, attendez. J’ai un dernier souhait », ai-je répondu.
« 5 secondes », dit froidement la femme.
« Je suis encore vierge. C’est impossible de la perdre en cinq secondes, mais peux-tu au moins prendre mon premier baiser ? », demandai-je d’urgence.
Une minute de silence suivit.
« D’accord, puisque tu es décemment beau », la femme parla lentement.
J’avais senti ses lèvres chaudes sur les miennes.
J’avais utilisé la position de l’appareil Bluetooth dans les airs pour juger sa position. Tout en fixant la position de sa tête, je bougeais légèrement mes lèvres.
J’en avais rapidement profité pour prendre un poignard que j’avais gardé dans mon étui et je l’avais poignardé dans son cou.
Du sang rouge suinta et me tacha la main droite.
Le poignard lui avait percé la vertèbre et lui avait coupé les nerfs.
Elle n’avait pas été capable de se défendre.
Le couteau posé contre mon cou s’était détaché.
Je m’étais levé lentement et j’avais récupéré mon flingue.
Les otages avaient gardé le silence et le porteur du lance-flammes n’avait rien remarqué.
Il était en train de remplir son sac avec le maximum de bijoux. Pendant ce temps-là je pointais mon arme sur lui.
J’avais appuyé sur la détente.
Bang !
Le porteur du lance-flammes oscilla un peu avant de s’effondrer.
Les acclamations avaient rempli le magasin.
« Vous pouvez partir maintenant. Sortez en rang, ne vous pressez pas », je leur avais donné des instructions.
Les otages étaient sortis en masse du magasin avant que j’aie pu finir.
Je m’étais touché le cou et j’avais senti un aiguillon.
J’avais arraché l’appareil Bluetooth suspendu et je l’avais remis dans mon oreille.
La femme était restée invisible même après sa mort.
« Venez régler les arrangements. Les deux déviants sont morts », rapportai-je.
« QG bien reçu. Bon travail, Viper. »
J’avais allumé une cigarette et pris une bouffée.
J’avais jeté un coup d’œil sur la femme morte, invisible.
On aurait dit qu’elle n’allait pas se matérialiser de sitôt. Je n’avais pu confirmer sa position que par son sang.
Je m’étais accroupi, j’avais couvert ma main de sang frais et je l’avais étalée sur son visage.
A travers la couche de sang, j’avais vu ses traits.
C’était une beauté. Dommage qu’elle ait eu ce genre de maladie.
C’était une maladie incurable.
J’avais éteint la cigarette, dont je n’avais pris qu’une bouffée, avant de quitter le magasin.
Tout cela remontait à il y a 63 ans.
Un nouveau type de grippe pandémique s’était répandu dans le monde.
Fièvre, pneumonie, défaillance d’organe.
La séquence entière ne prenait pas plus de 3 jours.
Le taux de mortalité n’était pas inférieur à 89%.
C’était une maladie incurable.
Jusqu’à ce qu’un type de médicament unique émerge.
Il devait être administré par injection et s’était révélé très rapide et efficace pour réduire la fièvre.
La majorité de ceux qui faisaient face à la mort avaient été sauvés.
J’avais entendu dire que ce médicament avait été développé à l’origine comme tranquillisant pendant la troisième guerre mondiale.
Il pourrait rétablir la puissance de combat des soldats blessés.
La grippe disparut de la surface de la terre une semaine plus tard.
90% de la population humaine s’était injecté cette drogue, mais un petit pourcentage d’entre eux avaient commencé à ressentir des effets secondaires.
Cela ne représentait pas plus de 10 % des victimes. Ils avaient commencé à développer des pouvoirs surnaturels comme la psychokinésie, la vision aux rayons X, la prévision de l’avenir et la décharge électrique.
Comme la quasi-totalité du monde avait été injecté avec ce médicament, il était difficile de les faire tous passer une liste de contrôle.
10 ans plus tard, des groupes de déviants avaient commencé à faire surface.
Des études avaient prouvé que les individus affectés avaient 90% de chances de transmettre leurs gènes mutés à leurs descendants.
Bien que peu de personnes aient été touchées, la peur était toujours inévitable.
Ils avaient donc lancé un projet sous le nom de code ‘Projet K’.
J’étais un soldat qui avait été formé spécialement pour le projet K.
Un soldat dont le travail consistait à détruire ces personnes dites “malades”.
« J’ai faim, gros lard. Je ne peux plus bouger, va prendre ton petit-déjeuner. Je veux un petit pain à la pâte de haricots et du lait de soja sucré », dis-je en m’affalant sur mon siège.
« Bien sûr, mon héros », répondit Bouboule avec enthousiasme avant d’ouvrir la portière de la voiture.
En regardant sa silhouette décolorée, j’avais inconsciemment posé un doigt sur mes lèvres, me rappelant ces quelques secondes de chaleur un peu plus tôt.