Livre 3, Chapitre 37 – Fer de lance

Cloudhawk attaqua sans hésiter, balayant avec Carnage silencieux et lançant un jet d’énergie de sa lame. Elle se dirigea vers Visage rouge en un arc de cercle vers le haut – si le sable pouvait être vu comme un océan, alors le coup de lame de Cloudhawk était comme l’aileron d’un requin qui se rapproche. Le sable s’était fendu en passant à toute vitesse, laissant un sillon.

Il leva ses marteaux pour se protéger. L’impact le fit reculer.

Après avoir repoussé le bandit à une certaine distance, Cloudhawk se baissa pour voir comment aller Barb. Il sortit une pastille médicinale élyséenne d’une pochette et la mit dans sa bouche. « Je ne pensais pas que tu avais ça en toi. D’où est-ce que ça vient ? Rappelle-moi de ne jamais te faire chier. »

Barb était un peu gênée. Elle toussait faiblement, trop battue pour être utile dans un combat. Avec un visage rempli de honte, elle leva les yeux vers lui. « Je suis désolée. Je suis inutile. Tout est de ma faute, mais vous êtes quand même venu m’aider. »

« Oh la ferme. C’est un bon coup ! Pas de problème du tout. » Cloudhawk se redressa. « Tu as fait une bonne percée. Maintenant, laisse-moi faire le reste. J’avais besoin d’un peu d’exercice de toute façon. »

Ce jeune étranger était capable de faire reculer Visage rouge d’un petit coup de bras. Il ne pouvait pas être un clochard normal. De la façon dont il s’était présenté à son style de combat puissant, il devait être un chasseur de démons.

Mais ce qui avait vraiment impressionné le public, c’était la dernière attaque de Barb. Les spectateurs n’avaient pas pu s’empêcher de se mettre à la place de Visage rouge. Si c’était eux qui avaient résisté à sa terrifiante attaque, auraient-ils pu survivre ? En bref, la plupart d’entre eux n’auraient pas pu. Même si elle ne les tuait pas complètement, ils n’en sortiraient pas indemnes non plus.

Ils n’enviaient pas Visage rouge. D’après ce qu’ils voyaient, cette femme était une terreur contre laquelle personne n’avait envie de se battre.

Pendant qu’ils regardaient, les autres clients de l’hôtel faisaient des calculs au fond d’eux-mêmes. Il était toujours préférable de faire face aux menaces tôt, mais cette fille et son amie étaient un mystère dont ils ne savaient rien.

Visage rouge n’allait pas prendre de risques. Il recula de dix mètres supplémentaires, le corps tremblant, et fixa Cloudhawk d’un air venimeux. « C’était un combat loyal. Ton excellence t’interrompt. Tu te pointes à la fin pour prendre l’avantage après que j’ai été épuisé. Je ne suis pas prêt à me battre contre ces conneries. On dirait que les Élyséens ne peuvent pas mener leurs propres batailles, hein ? C’est comme ça que les chasseurs de démons agissent ? »

« Dis ce que tu veux. » Cloudhawk retira son épée et la reposa sur son épaule. Il se tenait sans surveillance, comme s’ils faisaient une belle promenade d’après-midi. Il était différent des Élyséens, c’était certain, et ne partageait pas leur sens guindé des convenances. Rien de ce que disait le bandit n’allait l’énerver. S’il cherchait à le déstabiliser par des insultes, il allait être déçu. Il répondit d’un air presque paresseux : « Je ne suis pas déraisonnable, mais la raison est une chose que l’on utilise avec d’autres personnes. Tu vois un chien enragé qui cause de la merde, tu le fais taire avec la pointe d’un couteau. Tu peux essayer de raisonner un clébard jusqu’à ce que tu aies le visage bleu, mais ça ne te servira à rien. »

Les mots insultants de Cloudhawk firent gonfler les veines sur les côtés de sa tête. « Quelle putain d’arrogant Élyséen. Sous-estimer la puissance d’un frontalier va te coûter cher. »

« Ne parle pas comme si tu étais une merde chaude. Tu ne représentes pas les terres désolées. » Cloudhawk commençait à s’impatienter. « D’accord, mon temps est précieux. Viens me voir si tu penses pouvoir, mais si tu continues à faire le con, je ne serai pas tendre avec toi. »

Visage rouge ravala l’injustice. Un combat était un combat.

Si ça devait être deux combats, alors ainsi soit-il. Ce type avait l’air plutôt jeune, alors comment pouvait-il être vraiment fort ? Mais, pour être sûr, le chef des bandits fit signe à ses hommes le long du mur. Une demi-douzaine d’entre eux dégainèrent leurs armes et se laissèrent tomber pour le rejoindre dans le combat. Cloudhawk les regarda froidement. « Tu appelles des amis ? C’est tout ce qu’il te reste ? »

« Tu as enfreint les règles en premier. Ne me reproche pas de prendre une page de ton livre ! » Visage rouge sourit et ordonna à ses hommes d’attaquer. Lui et le reste de sa bande étaient passés à l’attaque. Avec ses marteaux levés haut, il chargea. « Je te montrerai à quel point la meute fantôme est forte ! »

Les hommes qu’il avait avec lui étaient les meilleurs de son équipe. Prenez n’importe lequel d’entre eux au hasard et il serait une menace considérable pour les friches. Après leur temps de pillage sur la route, ils avaient une bonne synergie. Et avec leur chef en tête, ils étaient une force avec laquelle il fallait compter.

Le tireur d’élite du groupe avait été le premier à tirer. Sa paire d’armes de poing tira huit coups en succession rapide pour s’assurer qu’il ne pourrait pas fuir d’un côté ou de l’autre. Au lieu de reculer, il fonça, son épée étincelante. Les balles avaient ricoché loin de lui comme si elles avaient essayé de percer un rideau de fer, et le gardien était passé à travers sans problème. Whoosh ! En un clin d’œil, il était au milieu d’eux.

Cloudhawk n’était ni grand ni intimidant, mais son empreinte s’enfonçait néanmoins profondément dans le sable tandis qu’il fonçait. Même l’air semblait chauffer autour de lui, le faisant scintiller et se déformer. Une armée et sa forteresse ne pouvaient pas se mettre en travers de son chemin.

Rapide comme le feu et fort comme le fer, il s’était abattu sur eux avec une pression d’une tonne et un coup de tonnerre.

Dans l’instant qui précéda la rencontre des deux camps, Cloudhawk fit tournoyer son épée. Il semblait couper le ciel en deux. Les spectateurs pouvaient clairement voir la friction de son passage cracher des étincelles. La relique bourdonnait également d’une aura violette, ce qui augmentait sa portée et sa puissance.

Fort. Si fort !

C’était incroyable qu’il puisse rassembler autant de force en si peu de temps. Ce que les spectateurs voyaient de Barb était incroyable mais posé. La charge frontale de ce type semblait pouvoir mettre en déroute une armée. Quelques personnes dans la foule l’avaient reconnu pour ce qu’il était : Fer de lance !

Le fer de lance était une technique martiale enseignée aux membres de l’armée élyséenne. Généralement, seuls leurs officiers les plus compétents étaient capables d’en connaître le secret. Elle était utilisée pour pénétrer la première ligne de l’ennemi et mettre en déroute ses défenses. Voilà comment on l’appelle Fer de lance.

Cela signifie-t-il que ce jeune homme était un soldat ? Il devait l’être. Sinon, comment pouvait-il savoir comment exécuter un mouvement comme celui-ci ?

Visage rouge pensait avoir les choses sous contrôle jusqu’à ce qu’il voit la scène inattendue se dérouler. Ce jeune chasseur de démons était bien plus fort qu’il ne l’avait cru. Cloudhawk traversa le groupe, percuta l’un d’entre eux et le réduisit en pièces. Lui et son épée noire mortelle continuaient à avancer, dans sa direction.

Ce dernier n’avait d’autre choix que de se cacher derrière ses marteaux. Un énorme BANG retentit.

Visage rouge utilisa intelligemment les techniques qu’il connaissait pour dévier la plupart de la force du coup. Il synchronisa le coup avec la force de Cloudhawk pour l’écarter de son chemin. Pendant ce temps, les bandits restants se précipitaient pour l’encercler. Après avoir utilisé toutes ses forces, c’était l’occasion parfaite pour se regrouper.

Cloudhawk ne leur prêta pas attention. Il était entièrement concentré sur leur chef. Alors que Visage rouge battait en retraite, Cloudhawk posa ses pieds sur le sol et souleva une vague de sable. La série d’attaques avait commencé à l’épuiser, mais le gardien ne s’était pas arrêté. Avec une nouvelle poussée de puissance, il fonça vers lui.

Fer de lance ? Encore ? ! Comment ? !

Le chef de l’équipe de bandits connaissait un peu le Fer de Lance, au moins assez pour savoir quel genre de tension il mettait sur le corps. C’était censé être intense, épuisant, une sorte d’attaque unique pour écraser l’ennemi. Pour autant que l’on sache, on ne pouvait pas le refaire avant d’avoir récupéré. C’était l’un des inconvénients majeurs de cette technique.

Pourtant, il s’était lancé dans un second Fer de Lance quelques instants seulement après avoir utilisé le premier. C’était du jamais vu !

Carnage silencieux se rapprochait, décrivant un arc menaçant dans l’air !

La deuxième charge était encore plus forte que la première. L’impact fit tomber les marteaux de ses mains.

Les bras du bandit ne pouvaient pas supporter la charge et il sentit une douleur lancinante les traverser. L’impact devait lui faire craquer les os. La douleur et la surprise firent sortir un cri de sa gorge, et d’une voix stridente, il demanda grâce. « Arrête ! Je me rends ! »

« La reddition ne m’intéresse pas. »

Cloudhawk se précipita en avant avec un troisième fer de lance. Même l’air autour de lui avait du mal à le supporter et semblait presque bouillir. Son troisième coup d’épée libéra chaque once de puissance de son corps d’un seul coup. Il résonnait également avec l’aura de sa relique. Le coup de force suivant coupa Visage rouge en deux comme s’il était en papier.

« Je veux ta putain de vie. »

Il tomba au sol en deux morceaux, coupé à la taille. Avant que la perte de sang ne l’emporte, il fixait avec des yeux écarquillés et incrédules le désordre de viande et d’organes où se trouvait son abdomen. Il n’avait jamais eu la moindre chance ! Il avait été complètement annihilé !

Contre Barb, il avait pu utiliser son agilité supérieure pour se protéger de ses coups violents. Cela n’avait pas fonctionné contre cet homme. Bien que jeune, c’était un expert. Son corps était une arme. Il n’avait pas trouvé une seule faille dans sa série d’attaques.

Si jeune, si fort, si puissant… qui était ce gamin ?

Cloudhawk transpirait et respirait lourdement après les coups successifs. Il avait appris Fer de lance avec Drake, et l’instructeur Skinner lui avait enseigné les spécificités de l’utilisation de la vraie force de son corps. Une grande partie des trois années qu’il avait passées dans la vallée des enfers avait été utilisée pour maîtriser cette compétence. Exécuter Fer de lance de cette façon était plus faible que d’habitude, mais beaucoup plus polyvalent.

Après tout, il ne combattait pas des armées. Il n’avait pas besoin de traverser des rangs de soldats. Il ne visait qu’un seul homme. L’agilité était plus importante que la force brute. Chaque utilisation successive de Fer de Lance empruntait également l’élan de la précédente. En conséquence, chaque charge était plus forte et plus rapide que la précédente. Il ne laissait à sa cible aucun moyen de se défendre.

Jusqu’à ce que finalement, il le coupe proprement en deux.

Incroyable. Visage rouge était un nom que les hommes craignaient dans les landes du nord, un bandit qui – pour le meilleur ou pour le pire – était bien connu ici. Pourtant, malgré sa réputation, un inconnu l’avait écrasé aussi facilement qu’un insecte.

Les spectateurs avaient eu du mal à l’accepter. Visage rouge avait peut-être utilisé une bonne quantité d’énergie dans son premier combat, mais il n’avait même pas tenu trois rounds dans le second. Le fossé entre les deux hommes était manifestement trop grand pour le bandit. C’était tout simplement incroyable.

Le reste de l’équipe de Visage rouge savait que c’était enfui. Ils ne s’étaient même pas retournés, de peur d’attirer l’attention de l’homme.

Bien sûr, Cloudhawk ne se souciait pas de ces petites frites. Il retourna vers Barb et l’aida à se lever. Elle le regardait avec des étoiles dans les yeux, prête à s’agenouiller devant lui pour l’adorer. Elle savait qu’il était capable de choses étonnantes, mais elle en voyait maintenant l’étendue par elle-même. C’était bien au-delà de ce qu’elle attendait.

Barb ouvrit la bouche pour dire quelque chose, mais avant qu’elle ne puisse le faire, le son d’un coup de feu résonna dans le mur.

Il avait réussi de justesse à lever son épée et à éloigner la balle. La surprise l’avait fait reculer d’un pas. Les yeux durs et le sourcil froncé, il jeta un regard vers le mur où se trouvaient les spectateurs. Ils le regardaient tous avec une terreur abjecte.

Une voix s’éleva de la foule. « Ce type est bon, mais si on le laisse partir sans une égratignure, ce sera comme s’il avait craché au visage de tous les habitants du désert ! Visage rouge n’allait pas le supporter et nous non plus ! »

Cet instigateur essayait manifestement de rassembler tout le monde pour éliminer Cloudhawk du tableau.

« Vous n’avez aucune honte, bande de connards ? » Barb répondit en criant.

À peine avait-elle répondu qu’un autre groupe d’hommes se détachait du mur, armes dégainées. Soudain, la bande de terre à l’extérieur de l’auberge Dust Bowl était devenue un champ de bataille où des voyous opportunistes s’étaient positionnés pour se battre. Dans une tournure inattendue des événements, l’inévitable conflit pour le droit d’entrer dans le quartier des poissonniers avait commencé.

« Bien ! Si on doit le faire de toute façon, autant le faire aujourd’hui ! » Cloudhawk reconnaissait qu’il ne pouvait pas se cacher. Mais, alors que ses ennemis se disposaient devant lui, les yeux du gardien se levèrent lorsqu’il vit une silhouette discrète sur le mur. C’était l’ivrogne. « Hé, vieil homme, et toi ? »

« Oh, je n’ai pas envie de me joindre à la fête. » En signe de désintérêt, l’ivrogne se gratta le cérumen avec un doigt. De toute évidence, il était juste là pour le drame. « Mais, puisque tu m’as payé quelques verres, je te promets de m’occuper de tes amies quand tu seras mort. Tu n’as pas besoin de t’inquiéter pour ça. »

Cloudhawk répondit par une série de jurons de choix.