La planète X-C100 était l’équivalent d’une plateforme de transport dans le Secteur X. Les correspondances entre les Secteurs divisés par la Star Alliance se produisaient pour l’essentiel sur la planète X-C100. Chaque jour, il y avait des dizaines de milliers d’astronefs et de vaisseaux spatiaux qui atterrissaient et qui décollaient dans la zone, et la destination de Cillin se situait entre les Secteurs D à M ; les Secteurs qui étaient catégorisés comme étant les dix qui développaient rapidement le ‘libre échange’. Le Secteur X était au mieux un Secteur arriéré.
D’un autre côté, les Secteurs de A à C n’étaient pas des endroits où l’on pouvait facilement s’insérer durablement. Le Secteur A était peuplé par les organisations politiques, et l’on pouvait trouver dans cette zone le gouvernement de coalition de l’Alliance Galactique. Le Secteur B était célèbre pour ses nombreuses académies et ses centres de transactions financières. Quant au Secteur C, pratiquement tout le terrain était sous restriction militaire, et la plus célèbre académie militaire de la GA – la GA Military Academy – se trouvait exactement là. Les Secteurs A, B et C étaient connus par la population comme étant les « Trois Secteurs Brillants », et ils n’étaient pas des lieux où tout le monde pouvait aller. Les eaux étaient insondables, et il était impossible de dire si quelqu’un pouvait être éliminé pour quelques raisons inexplicables.
Assis à l’intérieur d’un restaurant près du spatioport, Cillin soutenait son menton et regardait le paysage à l’extérieur. Comparé au chaos animé de Terre Brune, la planète terminal X-C100 semblait être méthodique et en ordre parfait partout ; que ce soit aussi gros qu’un cargo ou aussi petit que les voitures volantes qui se déplaçaient rapidement sur les routes. La plateforme de transport du Secteur X était certainement à la hauteur de sa réputation.
Cillin acheta un tabloïde. Les animations scintillantes et les noms accrocheurs pouvaient toujours injecter un peu de fraîcheur dans la vie de tous les jours des gens. Le ticket pour le Secteur K avait déjà été acheté, et tout ce que Cillin avait besoin de faire, c’était d’attendre. Pendant ce temps, Cillin dégustait sa tasse de thé.
Que ce soit assis, en buvant, ou encore sa posture de lecture, l’impression que donnait Cillin, c’était celle d’une personne très cultivée. C’était quelque chose qu’il avait cultivé en suivant Genya depuis son jeune âge, et il n’avait pas du tout l’air d’une personne de la zone pauvre. Mais bien sûr, cela n’était qu’un déguisement pour concorder avec son apparence actuelle. Il pouvait facilement donner l’impression d’être un ruffian s’il le voulait.
« Hé, mon chou, il y a une table libre pour moi ? »
Un jeune homme avec des cheveux bouclés jusqu’aux épaules, portant une paire de lunettes de soleil et des vêtements quelque peu fantaisistes, marcha dans le salon en portant une grosse mallette noire. Les deux boutons du haut de sa chemise étaient défaits, révélant des muscles bien dessinés comme un témoignage de sa virilité explosive. Il taquina la serveuse qui le servait : il lorgnait sans vergogne sa poitrine bien galbée.
Il était juste à côté d’un robot-serveur, et pourtant il avait questionné la serveuse de l’autre côté du comptoir. Mais ce genre de flirt était assez commun, et la serveuse elle-même, à l’évidence, n’était pas surprise par la situation alors qu’elle continuait à lui répondre avec un sourire. « Je suis vraiment désolée, mais nous n’avons plus de table libre pour le moment. Cependant, il reste des sièges vides, alors préféreriez-vous attendre ou vous rendre à une autre table… »
« Aie, mince ! Donc il n’y a plus de table libre ! Quelle malchance ! »
Le jeune homme regarda autour dans le salon à travers ses lunettes de soleil avant de finalement s’arrêter sur la table de Cillin.
« Cette table fera l’affaire. Je suppose que je devrais me serrer avec ce petit gars là-bas. »
« Très bien. Par ici s’il vous plaît. »
Le sourire de la serveuse était un peu figé. C’était une table standard pour six hommes et il n’y avait qu’une seule personne qui y était assise ; deux en l’incluant. Pourquoi donc aurait-il besoin de se serrer ?
Bien qu’il y ait plusieurs tables dans le salon qui n’étaient occupées que par une ou deux personnes, Dias avait choisi cette table particulière intentionnellement. Le gamin lui avait donné un sentiment très étrange – l’un de ceux qu’il ne pouvait pas décrire – et pour une quelconque raison il lui semblait vaguement familier ; bien qu’il ne puisse pas, malgré tout ses efforts, se souvenir où il l’avait vu à ce moment précis.
En plaçant sa mallette sur le côté négligemment, Dias s’assit du côté opposé à Cillin. Il n’avait pas l’intention d’ôter ses lunettes de soleil même s’il était à l’intérieur du salon. Il tentait de définir cela comme ‘se la jouer cool’.
En recevant le menu de la serveuse, ses doigts glissèrent répétitivement à travers sa surface pendant qu’il tapait et sélectionnait parmi des écrans de menus variés.
« Hmm, commandons ceci pour l’instant. »
« Très bien, veuillez attendre un moment s’il vous plaît. »
Après avoir terminé de commander, Dias regarda vers Cillin qui lisait et dit : « Hé p’tit gars. Tu attends ton vol ? »
Cillin leva la tête, sourit gracieusement, et avec un air de ‘je suis très cultivé’ lui répondit : « Oui, Oncle. »
On…Oncle ? Est-ce que cet enfant de salaud vient juste d’appeler un homme beau, charmant, brillant et attirant comme moi un ‘Oncle’ !? Si Cillin avait été l’un de ses hommes, il lui aurait déjà donné un goût de la plante de ses pieds, mais, hmmm. Intéressant.
à partir du moment où Dias était entré dans le salon, Cillin avait gardé un œil sur lui. Il pouvait bien ne rien connaître à propos de ce jeune homme, mais Cillin avait le sentiment que cet homme était très puissant ; plus puissant que n’importe qui qu’il avait rencontré auparavant. Même si l’autre partie l’avait appelé, lui, une personne de dix-sept ans, ‘p’tit gars’, Cillin n’avait pas réagi de colère et au lieu de ça, l’avait contré avec un ‘Oncle’.
Dias émit un petit rire et pris sa boisson qui venait de lui être servie. Il but cul-sec. « La même chose. J’ai déjà acheté le ticket pour le Secteur K. Et toi ? »
« Moi aussi. »
« Quoi, il semble que nous deux soyons liés par le destin. »
La serveuse qui servait les pâtisseries roula des yeux intérieurement quand elle l’entendit. Liés par le destin, mon cul ! Quatre-vingts pour cent des gens qui traînent ici attendent le vol pour le Secteur K. S’il est la seule ‘personne’ dans cette salle qui est liée à toi par le destin, alors, est-ce que ça signifie que tout les autres ici sont des singes sous-développés ?
« Merci beaucoup, mon chou ! » Pendant qu’il parlait, Dias avait même légèrement passé la main sur le dos de la douce main blanche de la serveuse d’une manière on ne peu plus charmeuse.
« Mais de rien. » Elle sourit et l’ignora complètement.
Dias ne s’en souciait pas vraiment. Tournant la tête, il commença à bavarder de manière décontractée avec Cillin et faisait quelques petits commentaires à propos des nouvelles sur les journaux du matin. La majorité d’entre-eux étaient méprisants et critiques. La plupart du temps, Cillin jouait le rôle d’un auditeur calme, et ce n’était que lorsque Dias lui demandait quelque chose qu’il hochait la tête une fois ou donnait une ou deux courtes réponses. Pendant ce temps, Dias s’arrangeait pour se rapprocher de plus en plus de Cillin, et bien que Cillin apparut relaxé, il était tendu intérieurement ; ses muscles étaient prêts à réagir au moindre problème.
« Hélas, j’ai oublié de me présenter. » Dias se pencha en avant vers Cillin avec un air suspicieux tout en disant avec une fierté non déguisée : « Je suis Dias. »
Une fois qu’il eut terminé, Dias se pencha en arrière contre le fauteuil douillet, croisa les bras et sourit d’un air satisfait. Si quelqu’un traduisait son expression, ce serait : Révère-moi ! Adore-moi ! Ton dieu est juste devant toi !
Il y avait des panneaux de lumière invisibles entourant chaque table, de manière à ce que les personnes de l’autre côté des panneaux de lumière ne puissent entendre leur conversation. De plus, pendant que Dias parlait, il se couvrit nonchalamment avec son bras de façon à ce que personne au-dehors ne puisse lire sur ses lèvres. Naturellement, il était impossible de déterminer ce qu’il avait dit par ses lèvres.
Cillin cilla. Pendant un moment, il ne put deviner de quoi ce type était si fier. « Oh, je suis Cillin. »
« … »
Dias s’étouffa un peu en voyant les réactions de Cillin.
Ce n’est pas possible. S’il vient d’une de ces familles, alors il n’y a pas moyen qu’il n’ait jamais entendu parler de moi.
Dias jeta un regard étrange sur Cillin, mais ensuite il répondit immédiatement avec un vif intérêt. « Tu es si drôle ! »
Cillin : « … »
Et d’où venait exactement ce ‘drôle’ ?
« Humm, de toute manière, je suppose que nous nous connaissons maintenant. Heureux de faire ta connaissance, Cillin. » Dias tendit la main.
Cillin regarda la main tendue de Dias d’un air ahuri pendant une seconde, avant de sourire et de lui répondre : « C’est un plaisir de vous rencontrer aussi, Monsieur Dias. »
La poignée de mains ne dura qu’un bref instant, mais intérieurement, Cillin était bel et bien choqué. Une fois le contact effectué avec l’autre partie, ses bio-puces lui donneraient des informations en retour, et à travers ces informations, Cillin avait découvert que ce Dias était en fait un génotype de classe A !
Cillin était entré en contact avec plusieurs personnes précédemment, mais ils étaient au mieux de classe B. Quand on pensait que cette personne en face de lui était réellement de classe A ; Cillin ne s’attendait pas à rencontrer un personnage de ce niveau si tôt.
Est-il un Hunter ?
De façon générale, une poignée de mains n’était pas un rituel commun. Mais les Hunters adoraient pas mal les accolades et les poignées de mains parce qu’il y avait une forme de compétition pendant le processus. La compétition de force était un moyen efficace que la plupart des Hunters employaient quand ils interagissaient entre eux, et pas tout le monde avait le courage et la perspicacité d’accepter ces rituels. Ceux qui se surestimaient pouvaient se retrouver avec des blessures sévères ou même causer leur propre mort.
Mais tout ce que Dias vit de Cillin, c’était une surprise momentanée avant qu’il ne se plie à l’étiquette. Il se dit en lui-même, ce gars n’est pas trop mauvais. Bien que Dias n’ait joué aucun mauvais tour pendant la poignée de mains, il pensa que Cillin était un garçon drôlement intéressant pour lui retourner la poignée si calmement et sans peur. Devrait-on dire qu’il avait un boulon dévissé dans la tête ? Où était-il un livre différent de sa couverture ?
Probablement la dernière possibilité, Dias se dit à lui-même. Mais à en juger par les réactions de Cillin, il apparaissait qu’il ne le connaissait réellement pas. Mais d’où donc pouvait bien venir ce petit gars ? Cillin lui avait dit franchement qu’il s’appelait ‘Cillin’ ; quant à son nom de famille, Cillin ne l’avait pas mentionné du tout, donc il ne serait pas correct que Dias le lui demande non plus. C’était vraiment très curieux.
Ce fut à ce moment là que l’annonce du vol résonna, et plus de quatre-vingts pour cent des gens à l’intérieur du salon se levèrent et se dirigèrent vers la gare. Dias suivait Cillin comme un pot de colle alors qu’ils entraient dans la gare ensemble. Il y avait quelques milliers de gens qui embarquaient sur ce vol. Cillin ne choisit ni la cabine de première classe ni la cabine de troisième classe, mais choisit plutôt une place dans la cabine de classe moyenne. À sa surprise, Dias avait aussi choisi une place dans la cabine de classe moyenne, et il avait délibérément échangé sa place avec une autre personne et s’était assis à côté de Cillin. Même s’il était à l’intérieur de la cabine, Dias ne montrait aucune intention de retirer ses lunettes de soleil.
Cillin eut le sentiment que ce vol ne serait pas si tranquille que ça.