Pour obtenir des objets et des témoignages qui pourraient servir à compromettre le haut-roi, Hertio l’infâme se livra à des actes écœurants et très immoraux. En plus du viol, il se mit au cannibalisme, aux relations sexuelles avec des animaux, et à d’autres pratiques révoltantes.
Cependant Hertio s’estimait satisfait, en effet s’il ressentit pendant quelques temps une certaine répulsion, cela ne dura pas. De plus il expérimenta des sensations qui lui permirent de briser la monotonie de son existence.
L’infâme s’ennuyait assez facilement, un quart d’heure d’attente sans rien faire était dur à supporter pour lui. De plus Hertio tirait de moins en moins de plaisir de ses activités politiques, et d’autres divertissements comme la lecture. Il ressentit une grande joie quand il se mit à pratiquer les dépravations des adeptes de Slaneste. Il continuait de croire en l’existence de Jéhavah le dieu elfique, mais il estimait qu’il ne craignait rien. Étant donné que l’amour de Jéhavah était infini, il pouvait tout pardonner. La notion d’Enfer s’avérait vraisemblablement une invention des prêtres pour lutter contre la criminalité, et limiter la concurrence d’autres cultes.
Si Hertio s’était plus renseigné, il aurait réfléchi à deux fois avant de se lier à Slaneste la divinité. Ceux qui le vénéraient, payaient un prix très élevé. Ils ressentaient un ennui croissant, et leur quête du plaisir était continuellement plus difficile.
Esinaé le haut-roi des elfes se retrouva accusé de vénération du dieu des plaisirs charnels Slaneste. Il n’y avait que deux témoins pour l’accusation mais ils étaient de poids, Ganelon le serviteur préféré d’Esinaé et le roi elfe Hertio. Le juge dans cette affaire était Arthur. Le haut-roi Esinaé avait choisi de se passer d’avocat, malgré la réputation élogieuse du procureur Asi. Pour éviter que le procès ne suscite des envies de guerre chez les humains, ce fut la tente des complots qui servit de cadre pour le jugement, un lieu réputé pour la sûreté de ses débats confidentiels.
Asi : Témoin, déclinez votre identité.
Ganelon : Monsieur le procureur je suis Ganelon Proditor, le majordome de sa haute-majesté le haut-roi Esinaé.
Asi : Sa haute-majesté avait-il des objets en rapport avec le culte des dieux de la destruction ?
Ganelon : En effet il collectionnait les vases de sacrifice destinés à recueillir le cœur et le cerveau d’elfes. De plus il m’a demandé de lui trouver une dague de cérémonie où figurait une image de Slaneste.
Asi : Avez-vous remarqué quelque chose de particulier sur les objets que vous avez remis à sa haute-majesté ?
Ganelon : J’ai été chargé de nettoyer à plusieurs reprises la dague et les vases, j’ai remarqué de grosses taches rouges. D’après moi il s’agissait de sang, vu l’odeur je dirais du sang d’elfe.
Esinaé : Objection on ne peut pas déterminer la race d’une personne grâce à l’odeur du sang.
Asi : Mon témoin avant d’être majordome a été médecin, il a prélevé des centaines de fois du sang d’elfe, de plus il dispose d’un odorat très supérieur à la moyenne.
Esinaé : Il n’empêche que le sang n’est pas quelque chose qui permet de renseigner sur la race d’une personne, quand on a pour seul outil d’analyse son nez.
Arthur : C’est difficile mais possible pour un elfe de savoir si du sang est d’origine elfique, grâce à son odorat. Objection rejetée.
Après Ganelon, ce fut au tour d’Hertio de témoigner. Il était protégé d’une enquête car Asi le procureur avait passé un accord avec lui, une promotion et cent prostituées à sacrifier. Il était aussi un adorateur des dieux de la destruction.
Asi : Qui êtes-vous ?
Hertio : Je suis Hertio Capet le roi du royaume elfe d’Eldar.
Asi : Est-il vrai que sa haute-majesté le haut-roi Esinaé, vous a invité à participer à des orgies où des elfes de moins de quinze ans étaient offerts en sacrifice à Slaneste ?
Hertio : C’est tout à fait exact mais j’ai refusé d’y participer, je m’en suis tiré en jurant de ne pas dévoiler la vérité sur les exactions de sa haute-majesté.
Asi : Pourquoi avez-vous attendu pour dénoncer votre haut-roi aux forces de l’ordre, alors qu’il commettait des crimes très graves ?
Hertio : Mes fils étaient des complices d’Esinaé, en dénonçant sa haute-majesté je condamnai à mort la chair de ma chair. De plus Esinaé me tenait grâce à un poison magique, il me fournissait un antidote temporaire tous les mois. Cela ne fait que deux semaines que je suis libéré de la menace du poison qui pesait sur moi. Je sais que ce que j’ai fait est inexcusable, mais pour un père aimant, nuire à ses fils est un déchirement.
Asi : Qu’est-ce qui vous a poussé à témoigner aujourd’hui, à mettre en danger la liberté voire la vie de vos fils ?
Hertio : Tous mes fils ont été offerts en pâture à Slaneste.
Hertio l’infâme utilisait un mélange habile de vérité et de mensonge pour enfoncer l’accusé. Il était vrai que les fils de Hertio servirent de sacrifices durant une cérémonie religieuse, mais le principal responsable de leur trépas était l’infâme qui donna sans hésiter et de son plein gré l’âme et le corps de sa progéniture en échange d’avantages comme des pouvoirs magiques et des alliances politiques.
En effet Hertio ne reculait pratiquement devant rien pour obtenir satisfaction, aucun tabou ne semblait l’effrayer. Plus le temps passait plus sa dépravation s’accentuait. Il avait d’ailleurs de très fortes ambitions, quand il régnerait sur la majorité des elfes, il rendra légal le culte des dieux de la destruction pour fournir plus facilement des âmes à ses maîtres les divinités de la ruine.
Il abattrait les temples de Jéhavah pour les remplacer par des cathédrales-bordels en l’honneur de Slaneste le dieu de la luxure. Il s’arrangerait pour que des milliers d’elfes de sexe féminin deviennent des prostituées sacrées qui copuleraient le jour comme la nuit pour la plus grande gloire de Slaneste. Il instaurerait l’obligation de pratiquer l’inceste sur ses enfants dès l’âge de cinq ans, il supprimerait le crime de viol des lois. Les seules personnes qui ne pourraient pas être victimes de meurtres seraient les prêtres de dieux de la destruction.
Donc l’assassinat de quelqu’un n’entraînerait généralement plus de conséquences judiciaires néfastes. Pour faire simple Hertio voulait créer des conditions très favorables à une anarchie totale, favoriser un climat propice pour les vicieux et les pervers.
Tout semblait perdu pour Esinaé, mais Arthur le chevalier veillait. Il pénétra la nuit dans un palais d’Hertio, un édifice de très grande taille se caractérisant par ses vingt tours et ses centaines de pièces. Il espérait rapidement trouver quelque chose qui permettrait de compromettre rapidement l’infâme. Il se joua des patrouilles de gardes grâce à un uniforme d’écuyer, il camoufla son visage grâce à une blessure qu’il s’infligea au visage dissimulé par des bandelettes.
Il se mit à chercher avec ardeur des renseignements de type documents compromettants pour perdre Hertio. Toutefois les investigations se révélaient ardues. Le palais bénéficiait d’enchantements qui empêchaient efficacement de recourir à la magie, et amenuisaient le potentiel physique des gens avec de mauvaises intentions. Or comme Arthur avait clairement envie de nuire à l’infâme il se retrouvait contraint de renoncer à sa force surnaturelle.
Malheureusement à force de fouiller, il attira l’attention de gardes. Il se résolut alors à pénétrer dans une pièce faisant office d’archives, remplie de casiers bourrés de papiers. Il ferma l’unique porte d’accès à clé, et se livra à une ultime prise de renseignements avant de tenter de s’enfuir.
Il tomba sur des rapports mais il s’agissait de langage codé, les documents avaient une certaine valeur mais ils étaient rédigés d’une façon difficile à décrypter. Malheureusement la pêche aux informations s’arrêta quand trois gardes armés d’épées lourdes pénétrèrent. Arthur essaya de s’échapper toutefois, il écopa d’une vilaine blessure, un bras tranché. Les soldats royaux regardaient d’un air mauvais l’intrus, puis ils se figèrent à cause de l’étonnement. Leur ennemi ramassa son bras et le balança dans le lac. Puis le chevalier profita du saisissement de ses adversaires pour s’esquiver par une fenêtre ouverte.
Les gardes s’attendaient à ce que l’intrus soit dévoré par le groupe de trente piranhas du lac, des poissons carnivores de taille d’une main d’homme adulte réputés pour leur voracité et dressés par des sorts pour tuer tout baigneur. Mais Arthur joua finement son coup, en sacrifiant son bras, il fournit un appât de viande qui servit de diversion à l’égard des piranhas. De plus dès qu’il quitta l’enceinte du château, ses facultés de régénération alliées à un enchantement permirent d’annuler le saignement au niveau de son épaule blessé.
Cependant Arthur n’avait que quelques secondes pour nager jusqu’à la terre. Passé ce délai court les piranhas s’en prendraient à lui, ces poissons voraces étaient traumatisés par leur dressage surnaturel, ils perdirent en intelligence. Ainsi ils se concentraient sur une tâche à la fois, ils se focalisaient sur la mastication du bras jeté. Mais ils mangeaient très vite, ils s’avéraient capables de réduire un corps en charpie en un temps record. Comme ils étaient mal nourris, ils consacraient plus de temps que prévu à s’acharner sur le bras tranché du chevalier.
Toutefois ils finiraient très rapidement par ne laisser que des os. De plus Arthur sentait chez ses ennemis animaux, des capacités gênantes, des aptitudes surnaturelles préoccupantes, comme par exemple des protections mystiques rendant d’une résistance extrême aux coups, à la chaleur, et à beaucoup d’autres facteurs. Les bêtes aquatiques passaient pour invulnérables dans l’esprit de nombreuses personnes, vu que ni le fer d’une lame ordinaire, ni la majorité des mages ne représentaient une menace pour elles.
Aussi Arthur considérait comme inapproprié de chercher l’affrontement. Il aimait se battre mais guerroyer dans l’eau était une nouveauté qui pourrait lui coûter très cher. Le chevalier était assez lucide pour juger qu’il souffrait d’un net désavantage dans le milieu aquatique contre des poissons renforcés par la magie. Aussi il se dépêcha de nager, et usa d’un sort pour accélérer sa vitesse de natation. Néanmoins cela fut insuffisant pour lui garantir une absence de confrontation avec le péril des poissons.
En effet le chevalier n’avait parcouru que la moitié du chemin vers la rive quand les piranhas choisirent de s’élancer à sa poursuite. Certains étaient rassasiés mais ils étaient programmés pour tuer les intrus, alors même les créatures aquatiques non motivées par la faim voulaient mordre Arthur.
De son côté le chevalier se démenait avec désespoir pour rejoindre la terre ferme, mais il sera probablement obligé de lutter sous peine de finir dans un triste état. Puis il eut envie de se traiter d’idiot, il connaissait un sort pour courir sur l’eau, et il ne l’employait pas. Il disposait d’un moyen pour aller plus vite qu’à la nage, mais il négligeait de l’utiliser. Il prononça une série de mots et se retrouva à courir sur l’eau.
Cet événement étonna beaucoup les piranhas qui marquèrent un léger temps d’arrêt dans leur déplacement. Ces poissons ne comprenaient pas le spectacle d’un homme qui n’avait pas besoin de nager. Puis ils se rappelèrent leur fonction, et repartirent à l’attaque. Arthur n’était plus qu’à quelques mètres de la rive, cependant les piranhas le talonnaient presque désormais. Il allait probablement être mordu quand il eut une inspiration. Il s’arrêta brièvement et tenta un saut vers la terre. Il se réceptionna convenablement, par contre il déçut profondément des poissons qui auraient bien croqué dans la chair délicieuse de l’intrus.
Le lendemain le chevalier demanda à s’entretenir avec Hertio. Grâce à la magie il avait de nouveau deux bras, et un corps sans cicatrice ou blessure apparente. Il rencontra son ennemi en tête-à-tête dans la tente des complots, suite à l’envoi par pigeon d’un message écrit menaçant.
Arthur : Votre majesté, j’ai connaissance d’un rapport qui vous concerne, il renseigne sur la liaison d’un souverain elfe avec une humaine. Le monarque a abandonné sa compagne dès qu’elle annonça qu’elle était enceinte, la malheureuse et son fils moururent dans la misère.
Hertio : Inutile de tourner autour du pot, quelles sont vos conditions pour que les informations compromettantes me concernant ne soient pas diffusées ?
Arthur : Je veux que vous juriez de ne plus chercher à nuire d’aucune façon à sa haute-majesté. De plus je veux que vous modifiez votre déposition, que vous affirmiez avoir été victime d’un sort de domination lancé par Ganelon.
Hertio : Très bien, vous avez gagné mais un jour, vous me paierez cher vos attaques.