Quelques elfes proposèrent de remonter pour adopter une nouvelle stratégie, préparer une expédition mieux organisée. Mais les agents d’Hertio dirent que le pire était passé, que les rats-serpents étaient le principal obstacle qui devait être franchi. Alors bien que certains militaires étaient plutôt partisans de rebrousser chemin, tous les soldats elfes se remirent en route.
Arthur le fort avait franchement du mal à croire les agents du souverain. Il pensait que les laquais du monarque mentaient. En effet Hertio s’appelait le roi «avance-à-tout-prix», il conduisit plusieurs armées elfiques à continuer le combat jusqu’à l’extermination, bien que la retraite ait été l’option la plus logique. Quand un général proposait au monarque un repli de troupes, avec de la chance il n’était que disgracié. Les jours où Hertio était de mauvaise humeur, il condamnait à mort tout officier qui défendait un point de vue, autre que celui de l’attaque frontale. Même quand le repli était nécessaire pour éviter un désastre complet.
Plus le fort avançait dans les tunnels, plus il estimait que le roi fourra les troupes du général Lancelot dans une situation terrible. Arthur se mit à demander avec intensité au dieu Proélium de lui permettre de mourir l’épée à la main, de ne pas finir comme cobaye dans une expérience menée par les hommes-rats.
Le fort eut une intuition, son sixième sens lui soufflait de se méfier des gros cailloux gris qu’il voyait. Arthur n’y prêta pas attention dans un premier temps, mais en y regardant de plus près il trouvait que de nombreuses pierres arboraient une surface lisse et, semblaient alignées selon un certain ordre.
Arthur le fort se demandait s’il devait informer ses autres camarades de sa découverte. Finalement il décida de se taire, il voulait au moins identifier la nature des cailloux avant d’alarmer ses compagnons. Après avoir descendu continuellement, les elfes commencèrent à monter, la pente d’abord légèrement inclinée vers le haut, devenait assez raide. En outre les tunnels commençaient à s’élargir progressivement.
Le fort proposa de prendre un autre chemin, mais les serviteurs du roi Hertio se moquèrent de lui. Toutefois deux minutes après qu’Arthur le vampire ait mit en garde les laquais du monarque, des rochers dégringolèrent sur l’armée elfique. Les grosses pierres broyaient les bras et les jambes, écrasaient les cages thoraciques, réduisaient en bouillie des corps.
Les skavens ne comptaient pas seulement sur la force physique pour balancer des rochers, ils utilisaient aussi des sorts pour amplifier la vitesse de glissade des pierres. Ainsi les gigantesques rochers donnaient l’impression d’être poussés par des géants. Ils ne firent pas grand mal à ceux qui se trouvaient près du vampire, car Arthur non seulement bloquait les pierres, mais il les renvoyait à leur expéditeur. De plus des mages arrivèrent à empêcher certains énormes rochers d’atteindre leurs cibles, cependant il y eut de nombreux décédés chez les elfes.
En effet plusieurs sorciers skavens, en saturant de pierre malnérale leur corps parvinrent à contrecarrer des magiciens elfes. La glorieuse armée du général Lancelot offrait désormais un triste spectacle, à cause des personnes ayant une partie du corps mise en charpie, ou des militaires réduits à l’état de pulpe sanguinolente.
Les elfes décidés à rebrousser chemin étaient nombreux, ils pensaient que c’était une idée folle de continuer à avancer dans un dédale rempli de pièges et de créatures vicieuses, où le moindre pas pouvait signifier une mort atroce pour un camarade ou soi-même. Un quart des soldats du général Lancelot décida de remonter à la surface, cette décision bien que sensée en apparence signifia leur arrêt de mort.
Une armée de skavens attendait les fuyards elfes qui voulaient cesser de suivre les ordres. Deux minutes après leur départ leurs hurlements se firent entendre. Les laquais d’Hertio n’en menaient pas large, plusieurs soldats voulaient les mettre à mort. Heureusement des officiers tels qu’Arthur dirent qu’ordonner la mort de quelqu’un sans qu’il ait eu un procès était un comportement barbare, que la frustration n’excusait pas un meurtre. Que le roi Hertio était une personne impitoyable, avec ceux qui osaient lever la main sans son autorisation sur ses serviteurs. Les elfes suivirent les ordres mais certains jurèrent que si une nouvelle catastrophe s’abattait sur eux, ils étriperaient les domestiques du monarque.
Les skavens de leur côté avaient envie de tester un dispositif particulier, censé faciliter la défaite d’une armée ennemie.
Les troupes du général Lancelot réputées pour leur discipline, perdirent beaucoup de cohérence et de leur ordre. C’était compréhensible puisque plus de la moitié des soldats étaient morts, à cause de l’imbécilité du roi Hertio. Le monarque pour compliquer les choses avaient remplacé plusieurs officiers compétents, par des personnes inaptes au commandement militaire et à la stratégie, qui se caractérisaient surtout par leur flagornerie, leur aptitude à complimenter.
Le seul officier valable avec le grade de commandant parmi les troupes elfiques s’avérait Arthur, mais il ne pouvait pas faire grand-chose, car il devait jouer les nounous pour les laquais du souverain. Les serviteurs d’Hertio étaient terrorisés, ils auraient succombé depuis longtemps si Arthur ne leur avait pas sauvés la vie. Le fort était de plus en plus tenté d’abandonner les laquais qui non seulement démoralisaient les troupes avec leurs pleurs et leurs simagrées, empêchaient la mise en place d’une stratégie efficace, avaient un degré élevé de responsabilité dans la mort de plusieurs milliers de valeureux soldats, mais en plus ils ne témoignaient aucune reconnaissance pour le fait qu’Arthur leur évita de mourir à diverses reprises.
Les serviteurs d’Hertio estimaient que tout leur était dû, que subir une blessure à leur service était un acte qui ne valait pas un merci, qu’il était tout naturel que le fort les protège sans recevoir un tant soit peu de gratitude. Les laquais du monarque méprisaient tous ceux qui avaient un rang social inférieur au leur, pour eux seul un noble méritait un minimum de considération.
Arthur en avait marre du snobisme, de l’air maniéré et hautain, et de la condescendance des serviteurs du souverain. Il se promit solennellement que s’il sortait vivant des tunnels skavens, il œuvrerait pour corriger les abus des aristocrates elfes corrompus. Il obligerait des nobles orgueilleux à se rappeler que le peuple était tout. Qu’un des premiers devoirs des membres de la noblesse ne s’avérait pas le plaisir personnel, mais le soutien aux gens du peuple.
Arthur le fort trouvait normal qu’il y ait une certaine tension chez ses camarades, mais d’un autre côté il jugeait les elfes trop énervés pour que cela soit naturel. Le fort vit des amis de longue date se bagarrer sauvagement. Il avait de plus en plus de mal à ramener le calme chez ses subordonnés, un de ses subalternes lui cracha même au visage. Les laquais du roi Hertio s’avéraient de plus en plus insupportables. De plus Arthur sentait l’influence caractéristique de la magie noire qui planait autour de lui.
La sorcellerie était à l’œuvre, il devait faire quelque chose, un discours lui semblait un acte futile. Même en déployant des trésors d’éloquence le fort ne pourrait apaiser que temporairement les esprits. Les mots bien trouvés donnaient du courage et de la détermination, toutefois face à une puissante source de magie noire, ils ne pesaient pas bien lourds. Arthur ne voyait qu’une seule personne de susceptible de briser la malédiction ambiante perturbant le mental des gens, il s’agissait de Merlin, qui se situait à des dizaines de jour de marche du vampire, mais tous deux pouvaient parler ensemble grâce à des pierres de communication, un outil magique.
Néanmoins le fort n’appréciait pas l’idée de quémander une faveur à celui qu’il surnommait le vieux bougon. Il avait aussi peur que Merlin impose des conditions humiliantes comme rétribution pour son intervention. Pas forcément le paiement d’une somme importante, car Merlin n’était pas avare, mais il risquait d’exiger par exemple des excuses présentées à genoux pour le fait qu’Arthur ait osé ternir sa réputation en le présentant comme un mage efficace mais aussi au caractère de cochon.
Le fort pour se défouler les nerfs composa une chanson qui devint assez célèbre, et ne flattait pas la valeur de Merlin. Elle reconnaissait son talent en tant que mage, mais elle soulignait beaucoup aussi son côté irritable, et sa tendance à piquer des colères pour des choses peu importantes. Et encore le fait de s’agenouiller n’était pas le pire des scénarios selon Arthur, il se verra peut-être imposer d’autres épreuves comme par exemple de porter un chapeau pendant un mois où il y avait marqué crétin.
Le fort se détendit bien les nerfs quand il composa sa chanson, mais il sous-estima sur le moment les conséquences potentielles de son acte de caricature. Il s’appuyait essentiellement sur la vérité pour composer les paroles, mais la vérité pouvait être un excellent moyen de faire grincer les dents de quelqu’un, de le blesser profondément. Cependant Arthur considérait qu’il n’avait pas le choix, soit il cédait à Merlin, soit il aurait la mort de camarades sur la conscience.
Alors après s’être isolé le fort décida de jouer son va-tout, il allait supplier Merlin le haut-mage de dissiper le maléfice qui pesait sur l’armée elfique.
Arthur : Merlin j’ai désespérément besoin de votre aide.
Merlin : Que veux-tu exactement Arthur ? J’étais en plein milieu d’un rituel délicat.
Arthur : Je voudrais que vous dissipiez un sort de magie noire qui affecte mes camarades soldats, sans votre intervention nous risquons de nous entretuer mutuellement.
Merlin : Je suis désolé Arthur, mais la loi elfique interdit aux haut-mages comme moi de jeter des sorts pour favoriser un camp durant une guerre.
Arthur : Si vous n’agissez pas, des milliers de valeureux soldats serviront de nourriture à des skavens, et leur dépouille sera profanée.
Merlin : Cela me navre, mais je refuse d’enfreindre la loi Torquémada.
Arthur : Vous avez dû bafouer l’éthique et la légalité des dizaines de fois. Pourtant alors que votre action est déterminante pour protéger la vie de braves guerriers, vous rechignez. J’ai du mal à comprendre votre façon d’agir.
Merlin : Je sais que je dois te paraître égoïste, cependant il faut que tu comprennes. Si moi la plus haute autorité parmi les haut-mages elfes je bafoue la loi Torquémada, cela pourrait amener le monde à sa perte. Je peux soigner les blessés d’une bataille quand les combats ont cessé, et favoriser le ravitaillement en nourriture d’une armée, mais il m’est strictement interdit pour une personne avec le titre de haut-mage de s’impliquer au cours d’une bataille.
Arthur : Je ne vous demande pas de jeter un enchantement qui va modifier le climat ou, de causer un cataclysme surnaturel. Je souhaite juste que la haine insufflée par un sort de magie noire soit dissipée.
Merlin : Navré, mais ma réponse est toujours non.