Au bout d’une semaine, le vampire fut acquitté de toutes les charges qui pesaient sur lui. Pour se venger du procureur, le haut-roi chargea des prisonniers de rendre infernale la vie d’Asi. De son côté Arthur une fois qu’il fut réhabilité, distribua beaucoup de mauvais points à de nombreux subordonnés. Par exemple il limogea plusieurs des chefs de la première heure de son organisation, la ligue des protecteurs.
Il rétrograda voire révoqua des centaines de subalternes. La punition était proportionnelle selon différents facteurs, les qualités intellectuelles, les relations sociales du fautif, la moralité, mais surtout le niveau de fidélité au vampire. Pour faire simple plus une personne s’était montrée respectueuse et dévouée au haut-roi, plus Arthur se comportait de manière magnanime. Résultat seuls cinq pour cent des punis ne s’en tirèrent pas trop mal, n’écopèrent que d’un blâme léger. Certains coupables eurent le droit à des châtiments très durs, comme la décapitation.
Orunaé échappa aux investigations, et il commençait à se lasser des complots. Aussi il commençait à se concentrer sur des moyens davantage guerriers pour perdre Arthur, il travaillerait désormais à l’humilier lors d’une bataille.
Le vampire se montra relativement clément avec Lancelot, Morgane, et Merlin. Mais même eux trois n’échappèrent pas à un avertissement. Des politiques appelèrent Arthur à se montrer plus modéré dans sa volonté de vengeance. Ils trouvaient normal que le haut-roi éprouve de la rancœur, mais beaucoup de gens estimaient que le vampire en faisait trop, qu’il risquait de passer auprès de certains pour une personnalité tyrannique qui abusait de son autorité.
Arthur remercia certains de ses contradicteurs en les envoyant en prison. Il évita de s’en prendre aux prêtres de Jéhavah qui l’incitaient à faire preuve de retenue, à cause de leur popularité. Mais autrement le haut-roi ne se retint pas pour exprimer qu’il ne ferait pas de concession à ceux qu’il voyait comme des sujets à la loyauté relative. Quand il commença à se lasser de la chasse aux infidèles, il rendit visite à Thérésa enfermée dans un cachot.
Arthur : Pourquoi m’a tu trahi Thérésa ? J’ai pourtant été généreux avec toi, tu étais une des officiers les mieux payées et considérées que je connaisse. De plus n’ai pas le souvenir d’avoir commis d’outrage à ton encontre, ou de t’avoir lésée de quelque façon que ce soit.
Thérésa : Votre haute-majesté, vous avez toujours été très gentil avec moi, mais je n’avais pas le choix, je devais obéir aux ordres d’Asi.
Arthur : Quel moyen de pression disposait t-il sur toi ?
Thérésa : Et bien, c’est-à-dire que, alors, euh.
Arthur : Je te promets de ne pas sévir si ce que tu me racontes est la vérité. En plus tu me dois bien des explications après les torts que tu m’as causé avec ton faux témoignage.
Thérésa : Je me drogue avec du lotus noir, Asi était mon fournisseur, si je ne lui obéissais pas il arrêtait de me fournir mes doses.
Arthur : Le lotus noir est une drogue au prix exorbitant, elle représente un achat ruineux sauf pour les plus riches des elfes. Comment faisais-tu pour en obtenir ?
Thérésa : Asi ne me demandait pas d’argent, il acceptait comme moyen de paiement des services, tels que lui faire part des secrets d’état ou militaires que je connaissais, coucher avec lui.
Arthur : Quel était le prix de ta félonie à mon encontre ?
Thérésa : En échange de mon faux témoignage pendant votre procès pour adoration du Néant, Asi me donnait cent doses de dix grammes de lotus noir, de quoi tenir un an.
Arthur : Thérésa par amitié pour toi, et en considération des nombreux services que tu m’as rendus je suis prêt à te rendre la liberté, cependant il y a deux conditions.
Thérésa : Lesquelles ?
Arthur : Tu dois promettre de renoncer définitivement à prendre du lotus noir, ainsi que de ne plus t’adonner à la consommation de drogue. La deuxième condition est de tenir un mois sans craquer en ayant à côté de toi une dose de lotus noir. Je te préviens si tu brises ton serment le châtiment sera la mort.
Thérésa : Votre haute-majesté je jure de respecter vos deux conditions.
Arthur : Je souhaite de tout cœur que tu réussisses Thérésa, cela me fendrait le cœur de devoir condamner à mort une amie.
Thérésa : Malgré ce que je vous ai fait, vous m’avez pardonné votre haute-majesté ?
Arthur : Non je n’ai pas encore digéré ce que tu m’as fait, cependant je ressens encore de l’amitié pour toi Thérésa. Des affaires importantes m’appellent, je dois te quitter, à la prochaine.
Thérésa : Au revoir, votre haute-majesté.
Thérésa la repentie souffrit le martyre, elle eut de terribles crises de manque, elle faillit à mille reprises inhaler une dose de lotus noir, mais sa volonté de regagner l’estime d’Arthur le haut-roi la poussa à tenir bon. Néanmoins elle dégusta sévèrement, elle eut l’impression de vivre un terrible cauchemar.
Elle pensa d’ailleurs mettre fin à ses jours pour ne plus avoir à songer à sa dépendance au lotus. Mais elle se rappela à l’ordre, en disant qu’elle avait le devoir de se racheter vis-à-vis d’Arthur, qu’elle devait expier ses fautes à son égard. En effet elle lui causa beaucoup de torts, elle révéla de nombreux secrets sur son souverain à ses fournisseurs de drogue. Elle donna des plans de passages secrets de forteresse, elle expliqua les faiblesses de certains dispositifs défensifs, elle révéla l’identité secrète de certains espions elfes. Autrement dit elle favorisa grandement par ses paroles la cause du Néant et d’autres dieux de la destruction.
Elle donna des éléments très positifs à des ennemis acharnés des royaumes elfes, elle trahit avec passion plusieurs serments juste pour satisfaire ses pulsions de droguée. Lorsqu’Arthur revint la voir, il trouva Thérésa à bout de force, incapable de tenir sur ses jambes. En outre les cheveux de la repentie blanchirent complètement, et son visage commençait à afficher un impressionnant réseau de rides, Thérésa avait l’air de ressembler à une vieillarde.
Lutter contre son envie de consommer de la drogue consuma en partie sa beauté extérieure naturelle, et aussi une grande part de sa vitalité. La repentie sombrait d’ailleurs petit à petit dans la folie, elle se mit à avoir des hallucinations. Elle s’imaginait de plus en plus souvent qu’elle n’était pas une elfe mais une truite, elle résistait avec une énergie décroissante à son délire. Après avoir vérifié le contenu de la dose de lotus noir, le haut-roi eut un grand sourire.
Arthur : Thérésa je suis très content de toi, tu as su résister face à une puissante, que dis-je une terrible tentation. D’après ce que j’ai compris quatre-vingt-cinq pour cent de ceux qui ont sombré dans la dépendance au lotus noir sont incapables de résister plus d’une journée, s’ils se trouvent à proximité d’une dose.
Thérésa (d’une voix faible) : Merci votre haute-majesté, je suis contente de vous donner satisfaction. Suis-je libre ?
Arthur : Je n’ai qu’une parole, tu peux dès à présent sortir de prison, cependant un séjour à l’hôpital semble nécessaire.
Thérésa : Une fois remise, me sera-t-il possible de retourner vous servir en tant que soldat ?
Arthur : Impossible, mon droit de grâce me permet d’amnistier les peines de mort et les emprisonnements, mais pas de réhabiliter les personnes accusées de haute trahison. Malheureusement tu continues d’être considérée comme indigne d’exercer une fonction militaire. En outre tu devras subir toutes les semaines une analyse magique, pour vérifier que tu n’es pas redevenue une droguée.
Thérésa (navrée) : Vous ne me faites pas confiance, votre haute-majesté ?
Arthur : Si, mais pour éviter une querelle avec Merlin, j’ai dû faire des concessions te concernant, pour que tu sois libre. Il a été très difficile de le convaincre d’accepter que tu ne sois plus une prisonnière. Le simple fait que tu sois vivante compte tenu de tes agissements passés d’après Merlin était une erreur. J’ai dû aller jusqu’à la menace pour le convaincre de te laisser libre.
Thérésa : Merci votre haute-majesté.
Arthur : Tu ne me dois rien Thérésa, tu t’es racheté de ta fourberie en réussissant l’épreuve que je t’ai imposé. Il est temps pour toi d’aller à l’hôpital, ton état me semble pitoyable voire critique.
Il pouvait paraître surprenant qu’Arthur le vampire laisse une seconde chance à Thérésa l’elfe. Toutefois d’un autre côté elle avait une valeur particulière dans le cœur d’Arthur. Il n’était pas amoureux de l’elfe, mais il éprouvait des sentiments forts à son égard. L’amitié d’Arthur le haut-roi et de Thérésa fut fusionnelle. De plus le vampire estimait avoir des dettes à rembourser à l’égard de l’elfe qui lui rendit de nombreux services quand il étudiait à l’école d’officier. Elle permit par ses conseils et sa présence chaleureuse de rendre beaucoup plus supportable des études dans un environnement souvent hostile pour Arthur.
Bien que la capacité de Thérésa à résister à la tentation de la drogue ait adouci le cœur du vampire, cela n’altéra pas beaucoup le comportement d’Arthur. En effet le haut-roi continua à mener une chasse intense des partisans des dieux de la destruction. Il ne sombrait pas dans la paranoïa, dans le sens qu’il cherchait à rassembler des preuves solides avant de faire condamné quelqu’un, mais il témoignait d’un zèle qui confinait par moment à l’obsession.
Lancelot et Morgane n’auraient pas été contre une modération de la politique de traque des adorateurs des forces de la ruine chez leur haut-roi. Ils comprenaient la rancune d’Arthur, que ce dernier soit très engagé dans la lutte à l’égard des puissances des ténèbres. Mais tous deux avaient peur que leur souverain ne produise un effet désastreux sur le long terme dans le cœur des gens en s’adonnant trop à la traque. Ils admettaient que leur haut-roi demeurait un bon gestionnaire, qu’il continuait à comprendre les mécanismes pour apporter bonheur au peuple et maintenir le prestige des royaumes elfiques.
Cependant Arthur allait quand même loin dans les dépenses pour amener le courroux de la justice sur les adeptes des divinités interdites. Ainsi il doubla en moins d’un mois les effectifs des espions et du personnel en charge de la traque des adorateurs du Néant. Il durcit terriblement les peines contre les adeptes des dieux de la destruction, le simple fait d’avoir assisté une fois à une messe en l’honneur d’un dieu interdit pouvait valoir plusieurs années de prison, voire la mise à mort. Il ordonna aux juges statuant sur les cas de personnes liées aux forces de la ruine, d’ignorer des notions comme les circonstances atténuantes, ou le droit à une seconde chance.
Par contre Merlin de son côté invitait Arthur à témoigner un zèle démultiplié dans la répression contre les alliés des ténèbres. Il considérait même comme un peu molles, les mesures du haut-roi. Il appuyait par exemple le rétablissement de la torture afin d’arracher des aveux. Ainsi la tente des complots devint encore une fois un lieu de débats.
Lancelot : Je trouve que vous allez trop loin votre haute-majesté. La répression que vous menez actuellement, me semble vraiment exagérée.
Arthur : Le Néant se réveille progressivement, et personne n’est à l’abri des manigances des adorateurs des ténèbres.
Morgane : Les temps sont durs, mais la clémence est une vertu appréciée.
Arthur : Je ne suis pas sans mansuétude, je peux tolérer l’opposition politique même radicale. Mais il est hors de question d’adoucir la traque contre les forces de la ruine.
Merlin : À ce propos votre haute-majesté, il faudrait peut-être embaucher des bourreaux.
Arthur : Non Merlin, la justice doit continuer à prévaloir. La simple menace de la torture peut pousser un innocent déterminé à se déclarer coupable.