Quant à Babida, il avait déjà quitté Ékulé par la porte du septentrion, sa destination finale étant la rue de la sorcière à Okala.
Il emprunta le même chemin que la première fois qu’il s’y était rendu puis aperçut la demeure de l’enchanteresse. Il y entra et les choses bizarres qui se produisirent à la visite précédente, arrivèrent encore: une obscurité abrupte, un orage lourd, une boule de lumière, et enfin la sorcière en lévitation et jouant du piano virtuel.
Néanmoins, cette fois-ci, il y avait un grand changement. La sorcière l’attendait. Ainsi, elle apparut de bonne humeur.
“Thé noir ou vin de palme, Monsieur Hercule ?” Plaisanta-t-elle.
“Haha! Votre Oracle a beaucoup d’humour. Je m’en délecte. Plutôt du vin rouge, je vous en prie. Cependant, remettons ça à une prochaine fois.” Babida lui rendit la politesse.
“Qu’as-tu dans ta main? Est-ce bien un bracelet de cheville en perles ? Plus précisément, un bracelet de cheville en perles pour femme ?” demanda la magicienne au bûcheron courbé qui tenait le bijou dans sa main droite étendue.
“Rien n’échappe à votre Oracle. Votre Oracle voit tout, entend tout et sait tout.” L’élagueur obséquieux complimenta la sorcière.
“Hummm, un bûcheron avec des manières exquises et qui maîtrise comment parler à un oracle. Ce n’est pas du tout commun,” se répandit l’enchanteresse extrêmement flattée.
“En conséquence, je vais réaliser ton souhait et t’exempter du paiement des dix Bantagi impériaux que j’exigeais en contrepartie,” décida la sorcière qui mit ensuite la main droite dans la poche intérieure de sa tunique noire.
Elle en sortit une baguette magique qu’elle illumina et s’en servit pour former un cercle de lumière. Elle ramena la main vers l’arrière pour prendre un peu d’élan et jeta de toutes ses forces le cercle de lumière dans l’atmosphère avant de disparaître.
Et comme les fois antérieures, la vie reprit son cours normal. Le soleil brilla à nouveau. Les oiseaux sifflotaient dans le ciel. Les habitants d’Okala envahissaient les rues comme d’habitude. Les enfants s’amusaient, les commerçants et les acheteurs négociaient.
Le bûcheron se redressa et ce faisant, il vit un papyrus vierge qui traînait au sol. Il l’épingla et le rapprocha de son visage. L’image de la belle demoiselle qu’il cherchait, s’y dessina petit à petit jusqu’à ce que ses traits devinrent reconnaissables.
Cependant, elle n’arborait plus sa mini-robe rose. Elle était vêtue de manière ordinaire et se baladait candidement dans la maison.
Contre toute attente et au grand désarroi de l’élagueur, l’image de la jeune femme se brouilla et elle n’était plus visible.
Mi-écœuré et mi-content, Babida rangea le papyrus mystérieux dans la poche de son boubou blanc. Il repartit ensuite à la cité impériale Ékulé sans toutefois connaître le lieu de résidence de la jeune demoiselle. Il s’interrogea où son logis pouvait bien être situé dans Ékulé, Okala ou…Okundé, à l’est?
“Hummm, Okundé…! J’avais presqu’oublié ce village.” Babida eut une étincelle alors qu’il cheminait vers Ékulé.
“L’oracle ne m’a pas donné le nom du village dans lequel habite la belle inconnue. Elle m’a simplement laissé un papyrus ensorcelé. Je pus juste y voir la jolie face de la jeune femme en le plaçant près des yeux. Malheureusement, cela ne dura point,” s’attrista-t-il.
“Une seconde!” dit-il à lui-même.
“Ne serait-il pas sage que j’en profite et passe par Okunde avant de poursuivre la route pour la cité impériale Ékulé? Je n’ai qu’à me rendre à la porte orientale d’Okala. Et de là monter à bord d’une pirogue et naviguer jusqu’à la porte septentrionale d’Okunde,” examina Babida.
“Oui, en effet, cela est une excellente idée,” répondit-il puis implémenta sur le champ son nouvel itinéraire.