La Tour des Mondes
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Chapitre 102 – Icarus
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De retour dans les rues je tue un guerrier puis un autre sans trop rester en place pour limiter le risque d’être encerclé. L’archer sur le toit continue de me couvrir tout en essayant le plus possible d’économiser ses munitions. Je passe dans une maison en tuant les guerriers qui s’y trouvent et en demandant aux quelques villageois de fuir. Je passe à la suivante tout en me frayant un chemin le plus discrètement possible.

Comme le garde je dois moi aussi m’économiser. Que ce soit mes potions, fumigènes ou encore mes forces et mon mental, la soirée s’annonce longue et je dois agir en conséquence. J’aimerais ne pas être aussi fragile, mais je ne suis pas fait pour des batailles ouvertes comme celle-ci. J’ai tué une bonne quinzaine de guerriers maintenant.

Les projectiles s’arrêtent soudainement de tomber du ciel. Peut-être n’ont-ils plus de munitions ? Ou alors ils se sont rendu compte que c’était inutile pour un village de ce genre d’utiliser des armes de guerre ? Le village est de toute façon bel et bien en feu même si les flammes n’ont pas trop tendance à se répandre vu la distance entre chacune d’elles, le nombre de projectiles qu’ils ont envoyé compense malheureusement et au moins une maison sur deux est en flamme. Le cor de guerre retentit alors suivi d’une grande clameur qui se répand dans les rues ainsi que le bruit d’une foule en train de charger. Je passe ma tête à l’angle d’un mur pour voir des dizaines de guerriers courir à travers le village et par réflexe je grimpe sur un toit pour éviter de faire une cible facile. Pourquoi sont-ils aussi nombreux maintenant ? Est-ce qu’Emy a échoué ? Ne me dites pas qu’elle est morte ? Je…

Non, c’est impossible. Emy ne peut pas perdre, pas d’après ce que j’ai vu… Les projectiles se sont arrêtés de pleuvoir sur le village et c’est sans doute pour ça qu’ils attaquent maintenant.

Je fais un signe au garde sur le toit pour lui expliquer que je ne peux plus rien faire s’ils sont aussi nombreux et il a l’air de comprendre ce que je veux dire, mais semble figé. J’aurais peut-être dû m’abstenir vu la détresse que je peux lire sur son visage.

Malheureusement, je ne peux rien faire pour les villageois dans de telles conditions… Je suis un Dresseur et un Assassin pas un combattant, ou encore un magicien capable de changer les choses. Mais s’il y a bien une chose que je peux faire, c’est trouver le responsable et le tuer. Le guerrier que j’ai interrogé a parlé de quelqu’un qui s’appelle Icare. Si je le trouve et que je me débarrasse de lui, peut-être que les autres guerriers partiront ou au moins seront désorganisés. Je n’ai pas vu de chaîne de commandement et rien qui puisse me dire que si je tue le chef ils s’en iront sans sourciller, mais c’est le meilleur plan que j’ai.

Il faut que je m’approche du port pour savoir ce qui est en train de s’y produire. Et ensuite, il faut que je trouve le boss.

Aussitôt que je pense ça, des guerriers se mettent à hurler « ICARE » à l’intérieur du port.

Quel que soit ce dont il est capable, j’ai un mauvais pressentiment…

*

Le soleil se couche lentement sur l’horizon. Le village est en flammes. Sur les navires de guerre, les soldats restent immobiles, les dents serrées tandis qu’ils regardent la plage. L’ambiance a changé lors de l’attaque, depuis l’apparition d’une sorte de démon aux cheveux rouges. Un monstre armé d’un marteau géant. La rumeur s’immisce doucement parmi eux : Une grimpeuse.

Le ton employé n’est pas celui de la simple déclaration. C’est effrayé que la plupart des guerriers en parlent depuis les navires, nerveux, et les lèvres tremblantes.

Plus de la moitié des hommes viennent de se répandre dans les rues du village après le cessez-le-feu et ce n’est pas la futile résistance des quelques gardes et des pêcheurs qui pose problème. Mais la sienne oui.

D’abord, ils auraient pu en rire, une femme même grimpeuse ne peut pas faire le poids contre autant d’hommes entraînés au combat et même si certains des guerriers sont encore jeunes et inexpérimentés, quelques hommes auraient dû suffire à l’arrêter. Une dizaine de guerriers se sont jetés sur elle sans ménagement à son arrivée dans le port et d’un seul coup quatre d’entre eux sont tombés. Rien d’étonnant venant d’un grimpeur, les plus forts sont censés être capables de ce genre de chose, mais un guerrier ne reste un guerrier. En quinze ans depuis la première apparition des grimpeurs, l’art de les tuer s’est répandu sur Galatia. Mais pour elle…

Les guerriers tombent par poignées à chaque coup et ne se relèvent pas. Broyés par sa force malgré les protections et les boucliers. Les flèches rebondissent sur son corps tandis que les flammes des incendies derrière elle montent jusqu’au ciel. Même les jarres remplies d’huile projetées par les catapultes se sont montrées inefficaces.

Rien ne semble fonctionner. La grimpeuse fait reculer les plus braves devant elle.

Elle expédie l’un des guerriers dans l’eau du port d’un coup de pied en le projetant au-dessus des têtes sur plus d’une quinzaine de mètres puis se fige quelques instants pour sourire et dévisager chaque homme qui hésite à avancer. Derrière elle, la dernière ligne de résistance du village la regarde d’un air perdu. Ils ne savent pas quoi faire et s’ils sont vraiment capables de l’aider ou s’ils ne seront que des nuisances.

On la menace de la pointe de l’épée, on brandit des arcs et des lances dans sa direction, mais à elle seule, elle a changé la situation dans le port et sans subir aucune blessure.

Les guerriers sont en ligne devant elle, vociférant et cherchant à se donner du courage alors qu’aucun d’entre eux n’ose l’approcher.

Soudainement, elle crie et le village entier l’entend sans que ce ne soit possible de faire autrement. Ce cri de guerre n’a rien à voir avec aucun de ceux qu’ils ont entendus jusque là et pourtant beaucoup d’entre eux n’en sont pas à leur première campagne. Villageois, guerriers ou encore les quelques hommes au sol, blessés : ils entendent tous ce cri qui sonne comme un ralliement pour certains et comme une malédiction pour d’autres.

Les guerriers semblent perdus et partagés entre l’affronter et fuir, mais soudainement résonne un cor de guerre et la stupeur temporaire chez les guerriers se transforme en une charge générale.

D’un simple mouvement de son marteau, elle jette une dizaine de guerriers dans les airs. Un démon rouge inarrêtable en marche. Malgré la charge des guerriers, rien ne change, ceux qui s’approchent d’elle sont projetés dans les airs. Rien ne semble l’atteindre. Les flèches, les armes, les cris de bataille…

Elle reste là imperturbable en maintenant la pression sur l’armée devant elle.

Les guerriers reculent à nouveau alors que de l’arrière du groupe et de l’intérieur des bateaux résonnent les cris des guerriers.

À travers les rangs, une sorte de clameur se répand en direction de la ligne de front. Les hommes font de la place et il ne tarde pas à apparaître.

Emy semble étonnée devant l’agitation et attend tout en resserrant la prise sur son arme. Qui que ce soit, il peut approcher. Elle ne reculera pas.

Le premier rang finit par se diviser en deux et un homme encapuchonné apparaît devant elle tandis que les guerriers agitent leurs armes et frappent les boucliers en cadence en criant le nom de l’homme qui s’approche. Ils sont au moins une cinquantaine à le faire de plus en plus fort.

Les quelques gardes et pêcheurs survivants semblent inquiets eux aussi. Jusque là, le combat semblait gagné grâce à la grimpeuse et sans ce changement, les guerriers auraient bien fini par battre en retraite, mais cet homme semble avoir changé les choses.

Celui-ci se contente de dévisager Emy de ses yeux bleus en gardant un sourire amusé au coin des lèvres. Il retire sa capuche dévoilant des cheveux courts d’un blond presque platine.

Il semble avoir dans les trente ans ce qui en fait son aîné de plusieurs années, mais ce n’est pas le genre de chose qui l’intéresse. Son visage l’irrite en tout cas, le gars ressemble à un boxeur qu’elle avait vu dans un film des années 80, mais au physique beaucoup moins imposant, ce qui est un peu décevant puisqu’elle risque de finir ça en un coup de marteau.

Ils se dévisagent sans que la tension installée par les guerriers criant le nom Icare de toutes leurs forces ne redescende.

— Icare c’est ça ? Je peux savoir ce que tu veux ?

— C’est juste un surnom, mais ce n’est pas important. Tu aurais du prendre une autre porte la rousse, mais j’imagine que tu ne pouvais pas savoir que tu tomberais sur moi. Je te laisse le choix, tu peux partir maintenant ou mourir.

— Beh voyons. Tu n’as pas regardé le spectacle jusque là ? Toi et tes petits copains vous feriez mieux de partir avant que je ne m’énerve vraiment.

— Comme tu veux.

Icare retire alors une broche de sa cape et celle-ci tombe par terre en révélant un mécanisme impressionnant dans son dos dont Emy ne sait pas quoi penser. Icare tire alors sur une ficelle et le mécanisme se déploie entièrement. Des ailes blanches de plus de trois mètres de longueur s’étendent dans son dos. Les guerriers reculent, mais continuent de crier son nom comme s’ils avaient l’habitude. Pour Emy, c’est une surprise intéressante qui la ferait presque sourire. Elle est en plein champ de bataille et voilà qu’un ange débarque.

Icare s’échauffe alors les épaules et la nuque comme s’il n’était pas pressé de commencer le combat.

« C’est bon ? On peut commencer ? Où je dois encore attendre longtemps ? J’ai un village en feu à sauver là. »

L’homme se contente de faire une grimace devant la remarque d’Emy. Les ailes se plient comme pour se contracter et d’un geste il fonce vers le ciel comme un oiseau.



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