Ce matin, par une brise fraîche, ma sœur me réveille.
— Grand frère, c’est aujourd’hui que t’as ton rendez-vous avec Anzu !
— Oui, oui.
Mon rendez-vous… je flippe déjà…
Je descends prendre mon petit-déjeuner et remarque que ma sœurette m’a préparé une omurice où il y est inscrit, je t’aime, oniisan, avec de la sauce Ketchup.
Je souhaite t’avoir pour toujours, Chizu.
Elle tousse, puis me demande.
— Je pourrais t’aider à te préparer, grand frère ?
Nan.
— Fais pas cette tête. ! Allez, s’il te plaît !
— Jamais !
— Sinon je retire la commande de la figurine que t’as faite hier !
Comment elle est au courant de ça ? Cette petite… Bordel, quel calvaire ! Je vais encore devoir ressembler à un homme d’affaires en 3D, c’est horrible…
J’acquiesce du pouce.
— Merci !
Elle m’apporte une chemise et essaie d’enlever les épis qui se battent sur le coin de mon crâne.
— Tu devrais prendre un peu plus soin de toi, grand frère. Comment tu peux plaire à autant de filles avec tous tes traits d’otaku ?
Sans doute, car Romansuu en a décidé ainsi.
J’ai choisi de changer. Si tous les jeunes de mon âge se forgent une identité, alors je dois en faire de même.
J’affronterai ce harem, et le réduirai à néant !
— Bienvenue sur votre actualité télévisée, aujourd’hui 24 décembre 2016…
Mais avant ça, je vais devoir acheter mes cadeaux de Noël…
Chizu observe mon visage.
C’est quoi cette expression ? Elle possède un scouter et essaie d’analyser ma puissance ?
— T’aurais pas rien acheté à tout hasard, grand frère ?
Perspicace.
— Ouais, ça m’est sorti de la tête…
— T’as le temps d’y aller cette après-midi, t’as rendez-vous que ce soir avec Anzu.
J’ai l’habitude de faire des cadeaux de Noël pour ma sœur, mais je n’ai aucune idée de quoi offrir à mes nouveaux amis.
On se fait des cadeaux entre amis, d’ailleurs ? C’est l’une des nombreuses étapes pour devenir quelqu’un de normal ?
Encore des questions auxquelles je ne peux répondre.
Le centre commercial… aussi appelé le sanctuaire des normies… j’me sens pas du tout à ma place, ici.
Je m’assieds sur un banc et réfléchis à ce que je devrais leur prendre. J’essaie de repérer des boutiques et remarque une librairie.
Parfait pour Masuko, ça devrait même plaire à Yamaguchi et Maeda, ça.
J’entre dans le magasin et achète les deux derniers tomes d’un nekketsu qui venait de sortir.
Ça sera parfait pour les deux idiots.
Je traverse le rayon pour me rendre du côté des romans.
Un livre d’amour, pour notre présidente ça ira, nan ?
J’en retourne un et lis le résumé.
Blablabla, j’comprends rien, blablabla. Allez, ça part en caisse.
— Une bonne chose de faite ! Il manque plus qu’Anzu, ma sœurette et Aneko.
C’était bien plus simple avant que j’entre au lycée, sérieux…
Je vagabonde dans le centre commercial et réfléchis de nouveau.
Qu’est-ce qui pourrait leur plaire ? C’est si dur que ça d’offrir des cadeaux ?
Je balaie le regard de droite à gauche et remarque un panda géant en peluche.
Ça devrait faire plaisir à Chizu, j’imagine.
— Sensei !
Cette voix… Bordel, nan pas elle… Renvoyez-la au prochain tome, j’ai pas le temps, là !
— Salut Yamazaki-kun !
Si seulement, j’étais Subaru Natsuki, si seulement…
— Bonjour.
— Qu’est-ce que tu fous ici, Yamazaki-kun ?
— Mes achats de Noël, et vous ?
— Les fameux achats ! Tu vas y arriver ? me demande Maeda.
Essaie pas de m’amadouer, tu resteras le méchant de cette histoire, idiot.
— Oui, oui.
— On voulait s’installer au café, tu veux venir, Yamazaki-kun ?
Si t’avais le don d’Haruka Kotoura, tu serais surpris, sombre idiot.
— Je termine mes achats et je vous rejoins.
Attendez-moi à jamais.
— Je t’accompagne, sensei !
Putain.
— Tu… Tu peux rester avec eux si tu veux Yoshida-chan.
Elle saute, attrape mon bras me procurant des frissons jusqu’aux épaules, puis me confie.
— Je veux venir avec toi ! On est ami, non !?
Quelle plaie, sérieux…
— Ouais, ouais… Viens si tu veux, alors.
Nous nous rendons à la boutique que j’avais précédemment remarquée, en compagnie de Yoshida pendant que les garçons, eux, sont rentrés dans la cafétéria.
— Tu dois acheter quoi, sensei ?
— Cette peluche-là.
Parfait, plus que les deux idiotes, et je pourrais quitter cet endroit infâme.
— Il te manque quoi, sensei ?
— Un cadeau pour Anzu, et un autre pour Aneko.
Qu’est-ce qui pourrait leur plaire à ces deux héroïnes ?
Mais bien sûr ! Je suis si fort dans cet univers en 3D ! Retirez-moi ce mode facile les admins !
— C’est quoi cette tête, t’as eu une révélation révolutionnaire, sensei ?
Bien plus que ça.
— J’ai eu une idée parfaite ! Tu sais où je peux trouver une boutique de bijoux ?
— Plus loin sur la gauche, je crois, sensei .
Je tomberais sans doute sur quelque chose de séduisant pour l’héroïne des eroge, et pour l’autre, un accessoire qui scintille ne serait-ce qu’un peu devrait la combler de joie.
Nous entrons dans le temple féminin.
Brrr, ça me dégoûte de rentrer là-dedans, sérieux…
Je remarque une barrette de couleur beige, dans une vitrine. La plus flamboyante de celles qui sont exposées.
Parfait, ça sera top pour Anzu.
Dans le rayon suivant, j’ai repéré un bracelet ocre.
C’est séduisant ça ?
Je me dirige vers la caisse, puis nous ressortons de la boutique.
Bordel, j’ai enfin terminé cette épreuve de merde.
Yoshida interrompt ma marche et me demande.
— On peut s’asseoir un petit peu sur le banc, sensei ?
Oh bordel elle est encore là, elle ?
— Si tu veux.
Un banc… t’as bien raison de flipper de ça, Kisaragi Amatsuyu.
Elle s’installe à côté de moi.
Bordel, mais j’y pense, j’ai rien à lui offrir à cette ex-tsundere.
— C’est quoi cette tête, sensei ?
J’fais quoi, moi ? Les magasins sont à deux doigts de fermer… Bordel, j’suis dans de beaux draps…
— Sensei !
— Désolé, j’étais dans mes pensées. À vrai dire… J’ai pas de cadeau pour toi, Yoshida.
— De cadeau pour moi ? Mais tu me l’as déjà offert, sensei !
Qu’est-ce qu’elle raconte ? J’sais quand même mieux que toi ce que je fais, nan ?
— Hein ?
— Merci d’avoir passé du temps avec moi, aujourd’hui, sensei .
Qu’est-ce qu’elle raconte ? Son histoire m’intéresse moins que celle de Yukki.
Mon ventre crie famine.
— Je vais acheter des onigiri, attends-moi ici, sensei .
Elle sait se montrer agréable de temps en temps.
— Tiens !
— Merci, Yoshida.
Un vrai délice.
Elle approche son visage du mien, ses lèvres atteignent ma joue puis elle me lèche.
— T’avais un grain de riz sur les pommettes, otoutosan .
Un vrai délice.
— Yoshida ?
— Pardon, répète-t-elle à plusieurs reprises, c’est une habitude de travail !
A l’aide de ses mains, elle a tenté de cacher ses pommettes qui se sont empourprées à vue d’œil.
— C’était pas désagréable.
J’ai baissé ma garde.
— Sensei ?
— Oui ?
— Je réfléchissais à ça, dernièrement. Je crois que je suis tombée amoureuse de toi pour plusieurs raisons, finalement.
Qu… Qu’est-ce qu’elle raconte ?
— C’est toi qui m’as aidé à réaliser mon rêve et c’est toi qui m’as sauvé dans le bus.
— Ton rêve ?
— Celui d’évoluer, grâce à toi je peux être bien plus libre qu’avant, et ça, je t’en suis éternellement reconnaissante.
— Alors tant mieux, Yoshida-chan.
Elle rougit, baisse la tête, et m’avoue d’une voix délicate.
— Tu sais, c’est assez bizarre tout ça. C’est comme si t’étais arrivé dans ma vie en chamboulant tout mon quotidien, en renversant ma personnalité, et en rendant tout ça bien plus magnifique. Je crois que la seule chose qui m’énerve dans toute cette histoire c’est que tout le monde te tourne autour. Je les aime bien les filles, mais… je sais pas. T’as jamais eu cette impression que ton cœur s’arrachait d’un coup quand tu vois la personne que t’aimes avec une autre ? Moi, ça me le fait souvent ces temps-ci, et crois-moi, ça fait mal, très mal.
Des larmes commencent à couler sur son visage, elle les sèche en caressant ses joues, puis soupire, avant de continuer.
— Le pire là-dedans, c’est que j’ai une vision de la vie assez différente des autres. Je pars du principe que chaque chose à une fin, et que cette fin peut arriver à tout moment, que par malheur ma vie peut se détruire, que ce soit par un accident, une maladie, n’importe quoi. Et si ma vie était réduite à néant dès demain, alors j’aurais des regrets intenses de ne pas avoir pu t’ouvrir mon cœur. Mais maintenant, c’est réglé, maintenant tu sais que je t’aime plus que n’importe qui, et si tu l’as toujours pas compris, j’te l’enfoncerais dans le crâne jusqu’à ce que tu m’aies dans la tête chaque seconde. J’te prouverais que tu peux faire confiance à quelqu’un comme moi. Tu peux en être certain, sensei.
Je suis confus, perdu, véritablement pommé, mais j’suis certain d’une chose, c’est que j’ai jamais rien entendu d’aussi beau.
Bordel, cette fille a combien de personnalité différente, c’est n’importe quoi, mais en même temps… Elle me fait craquer…
Nos joues s’empourprent sous un doux silence. L’obscurité commence à tomber, seuls les quelques lampadaires éclairent encore le centre commercial.
Bordel, je vais être en retard !
— Yoshida !
— Oui, sensei ?
— Tu dois prévenir les garçons que j’organise une fête ce soir chez moi. Prends ça, lui dis-je en lui transmettant mes cadeaux, amène-les à mon sanctuaire, ma petite sœur vous accueillera !
— Une soirée avec mon sensei ! Je suis tellement heureuse !
J’accourt au parc d’attractions, traverse les arrêts de bus, le port et la rue commerçante.
Pourquoi j’ai l’endurance de Fuutarou Uesugi… Sérieux, quel calvaire.
— Le voilà !
Personne ? J’suis arrivé à temps !
Mon téléphone vibre.
Le père d’Anzu est là dans cinq minutes.
Cinq minutes, c’est trois cents secondes, c’est le temps de lire un chapitre d’un manga, c’est super court !
J’ai pas le temps de stresser.
J’essaie de me recoiffer, de remettre ma chemise bien droite, m’accoude à la barrière, et réfléchis.
J’dois faire quoi ? Lui dire que je connais son secret ? Attendre qu’elle me le dévoile ? Putain d’univers en 3D… Pourquoi j’me pose autant de questions ?
J’ai eu le temps de stresser.
— Kinari !? Qu’est-ce que tu fais là !?
Elle ferme la porte de la voiture.
Son regard croise le mien.
Pourquoi elle pleure ?
Elle enjambe une barrière, tend ses bras vers moi et m’étreint.
— Qu’est-ce que tu fais là, idiot ! Personne m’a prévenu !
Son parfum à la menthe se propage jusqu’à mes narines, une odeur que je ne pouvais oublier. Je sors l’épingle à cheveux que j’avais mise dans mon porte-monnaie et la dépose dans ses mèches.
— Joyeux Noël, Sakai .
Quel charisme tu as, tu dépasserais presque celui d’Ayanokôji Kiyotaka, prononce Kinari otaku.
Elle retire sa barrette et l’admire. Ses yeux sont devenus éblouissants. Elle tente de cacher ses joues pourpres avec son écharpe puis me demande.
— Tu le sais depuis longtemps, Kinari ?
— Depuis une semaine… Ton père est venu à la maison en m’avouant tout.
— Moi, je l’ai compris dès le premier jour ! Quand je suis arrivé au lycée, je t’ai cherché partout. Et finalement, t’étais là, juste derrière moi. J’avais peur de te dire toute la vérité, je savais pas comment tu le prendrais, désolée ! J’étais tellement effrayée, mon cœur battait si vite, je voulais tout te dire, tout, absolument tout, mais mon corps refusait d’agir…
C’est donc vraiment Sakai…
— Je t’avais promis un rendez-vous pour Noël, alors le voilà !
J’attrape sa main, et déclare.
— Le directeur du parc d’attractions nous a donné deux heures pour faire ce que l’on veut !
Ses yeux scintillent autant que son écharpe.
— C’est génial Kinari !
Nous nous rendons aux UFO Catchers. Anzu insère une pièce dans la cabine et réussit à obtenir une peluche.
Quelle doigtée ! Combien d’années elle s’est entraînée pour avoir un tel talent ?
Elle baisse la tête, me l’offre, puis me souffle.
— Joyeux Noël, Kinari.
— Merci.
Un manchot ? Pourquoi pas.
— Elle te ressemble, je trouve, ricane-t-elle.
Ce truc-là me ressemble ?
Elle agrippe ma manche, et s’apprête à courir.
— Laisse tomber, idiot. Suis-moi !
J’adore ce Noël.
La jeune fille cache ma vue avec ses doigts, et me demande.
— Regarde pas, Kinari !
Je vais pas pouvoir faire grand-chose, là, idiote.
— Attention à la marche !
Elle m’amène où, exactement ?
Elle retire ses mains.
— La grande roue !
Je balaie le regard à travers l’horizon et admire le paysage illuminé par les quelques lampadaires du parc d’attractions.
— Ça te plaît ?
— Ouais !
Elle se dandine dans son siège, caresse ses mèches, me regarde droit dans les yeux, puis m’avoue.
— Là, c’est certain. Je suis à deux doigts de réaliser l’entièreté de mon rêve. Cette fille que t’as vue il y a dix ans c’est moi ! C’est moi et rien que moi.
Elle se lève, s’accoude au rebord d’une vitre, pose son regard en direction de la lune et crie d’une puissance phénoménale.
— Tu m’as tellement manqué, Kinari !
Ses joues rougissent, puis elle continue.
— J’ai pensé à toi chaque seconde de ma vie après mon départ, chaque minute j’imaginais toutes les choses qu’on aurait pu faire ensemble, chaque heure, j’imaginais toutes les aventures incroyables qu’on aurait pu vivre. Mais, toute ma motivation s’est très vite transformée en un calvaire. Chaque jour, chaque semaine, chaque mois, et chaque année qui passait, mon cœur se refermait, et je ne faisais que me remémorer tous ces moments qu’on a passés ensemble.
Ses larmes commencent à couler le long de ses pommettes pourpres, et elle ajoute d’une voix presque brisée.
— Je dorlotais la peluche que tu m’as offerte, contemplais les photos que j’avais de toi. Dix ans, hein. C’est long, c’est vraiment trop long, et j’ai réussi à tenir tout ce temps sans te sortir une seule fois de ma tête grâce à mes sentiments pour toi, parce que je savais très bien au fond de moi que si nous nous retrouvions mon cœur allait battre de nouveau à la chamade.
Elle saute dans mes bras, m’étreint, presse mon buste contre sa poitrine, et termine.
— Maintenant que je t’ai à mes côtés, je ne veux plus jamais partir, je ne veux plus jamais être séparé de toi, écoute-moi bien, j’vais te l’ancrer dans le crâne si fort que mes paroles résonneront dans tout ton corps.
Elle me regarde droit dans les yeux, rougit, embrasse mon front, et m’avoue.
— Je t’aime Kinari.
Ses douces lèvres… Je… Je sais plus quoi faire…
Elle caresse de nouveau ses mèches, et me murmure au coin de l’oreille.
— Je ne veux pas de réponse, car je te connais, et je sais très bien que tu te cherches encore, alors quand tu auras la réponse, vient me voir. Je t’attendrais, Kinari.
Ma vie est devenue un voyage, un rêve dans lequel j’aimerais rester pour toujours.
Scouter : Équipement utilisé par les saiyen pour mesurer la puissance d’un adversaire. ( Dragon Ball Z )
Subaru Natsuki : Personnage principal ayant la capacité de mourir et de se réincarner dans le passé. ( Re:Zero Restart in the Another World )
Haruka Kotoura : Personnage principal pouvant lire dans les pensées. ( Koutoura-san )
Kisaragi Amatsuyu : Personnage haïssant les bancs. ( Oresuki )
Yukki : Personnage ayant une histoire à dormir debout. ( Mirai Nikki )
Fuutarou Uesugi : Personnage principal facilement épuisé. ( The Quintessial Quintuplets )
UFO Catchers : Machine attrape-peluche.