Fuku No Ikari
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Chapitre 5 – Préparation
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Face à mon bureau, j’attrape un cahier, ouvre un paquet de chips et écris sur la première page.

Le

Courroux

de

Fuku

— Grâce à ce plan, j’obtiendrais la vengeance à laquelle j’aspire tant.

Le moment est venu pour moi de réfléchir à comment supprimer la relation entretenue entre Tsubaki et Kotone.

— La première sentence sera cette destruction. La seconde sera d’exploser leurs sentiments. Et le dernier jugement sera de les rejeter, l’une après l’autre.

Pour ne pas commettre la moindre faute, je dois écrire noir sur blanc chaque étape à suivre. Les respecter à la lettre, et ne faire confiance qu’à moi. Après un weekend de préparation, de réflexion et de note, j’ai pu déclarer ces mots.

Ma vengeance est prête.

Je traverse les ponts, les lampadaires lumineux et les quelques arbres à fleurs rosâtres qui séparent mon domicile du lycée. L’odeur des plantes de cerisiers m’emplit de joie et de motivation, car aujourd’hui.

Mon courroux sera mis en place.

— Sayuri-kun !

— Présidente ?

— Tu peux m’appeler Hoshino !

— Oui, oui Hoshino-chan.

— Bien, assieds-toi. On va démarrer notre réunion.

Dans cette salle lugubre, seules deux présences se sont manifestées, la mienne, et celle de Hoshino Mi. J’ai rejoint le BDE, dont elle est responsable, après son discours. Certes, je suis perdu face à une chose aussi inédite. Mais, de mon point de vue j’ai trouvé ça intéressant de pouvoir se rapprocher de chacun tout en se préoccupant de leurs problèmes. De plus, ce sentiment de pouvoir contrôler l’école est quelque chose de si doux à mes yeux.

— Comme je l’ai déjà dit dans mon discours

Je tape ma main sur la table, et m’écris en ricanant.

— Tu as vu un garçon grandiose dans l’amphithéâtre ?

La jeune fille me scrute, reste silencieuse quelques instants, laissant ses joues s’empourprer. Les rayons du soleil se sont posés sur son visage, me montrant toute la beauté de ce dernier. Les quelques tâches de rousseur embellissent sa figure. Ses yeux couleur améthyste ont rompu mon souffle. Et, c’est lorsqu’une bourrasque a fait flotter sa longue chevelure rousse qu’elle a toussé, sans doute pour reprendre ses esprits.

— Oui, oui. Marre toi, imbécile.

Cette fille est un sakura, c’est certain.

— Désolé de t’avoir coupé, présidente !

— Hoshino, insiste-t-elle.

Je détourne le regard vers les quelques nuages que l’on peut observer à travers les fenêtres et réponds d’une voix embarrassée.

— Oui, oui Hoshino-chan.

— Bien, Sayuri-kun. Prends ce tas de tracts et va les distribuer aux élèves après les cours.

— Qu’est-ce que c’est ?

— Ce sont des petites affiches préparées par mes soins pour mettre au courant l’école que nous organisons un évènement d’intégration à la fin de la semaine. Si tout le monde n’est pas présent, on perdra en crédibilité.

— Je vois.

Elle joue avec l’une de ses mèches rousses et me demande timidement.

— Tu ne devrais pas retourner en cours ?

Je me lève, m’incline, actionne la poignée glaciale de la porte et réponds en la saluant.

— J’y vais, présidente.

Sérieusement, combien de tracts ai-je ? Mon sac est devenu vingt fois plus lourd.

Alors que je monte les escaliers pour rejoindre ma salle de classe. Je reconnais le son d’une voix féminine crier mon nom.

— Sayuri-kun !

Ce son me paralyse sur place, et dresse un sourire narquois sur mon visage.

— Kotone-chan ?

Ses yeux sombres me fixent. Une seule chose me traverse l’esprit : ma haine me submerge.

— J’ai entendu dire que tu étais adjoint du BDE.

— Oui ?

— C’est super d’avoir quelqu’un de si proche des élèves dans la classe, tu ne crois pas ?

— Je pense, oui.

Cette conversation n’est pas un peu bizarre ?

— Qu’es-tu venu me demander, Kotone-chan ?

Ma camarade s’accroche aux balustres, détourne le regard puis me questionne.

— Peux-tu respirer ?

Qu’est-ce qu’elle me raconte ?

— Oui, sinon je serais sans doute mort.

— Moi, j’ai énormément de mal à respirer.

Que faire ? Je suis censé m’intéresser à elle, mais si j’en fais trop, ça peut réduire mon plan à néant. Je n’aurais pas imaginé qu’un aléa se déclenche si tôt.

Je balance mon sac dans un coin et l’admire à travers les barreaux de l’escalier.

— Si tu arrives encore à tenir debout, c’est que tu es quelqu’un qui mérite de vivre. Alors, bats-toi face à cette malédiction.

— Me battre ? Comment ?

Je pose mon doigt sous son menton, le remonte et lui suggère.

— En cessant de regarder le sol. Contemple le ciel et observe ce qui pourrait te permettre de voler.

— Tu es quelqu’un de bon, Sayuri-kun. Sans doute mon opposé, soupire-t-elle.

— Oui, oui. Arrête de dire des bêtises et viens en classe.

Le contact lorsque j’attrape son poignet a ralenti le cours du temps. Les aiguilles se sont figées laissant place à une douce, mais courte pensée.

Vole, idiote.

[…]

— Cours de sport ! On va tester vos capacités !

Sur le chemin du gymnase, Tanaka s’approche de moi et pose son bras autour de mon épaule d’un air ahuri.

— Tu as entendu Sayuri-kun ?

— Oui, oui, je ne suis pas sourd.

— C’est la première fois qu’on a ce cours. Tu aimes ça, toi ?

— Plutôt, oui.

— Sérieux ? Tu es déjà un élève modèle sur les leçons. Et en plus de ça tu es sportif ?

— Oui. Et toi ?

— Tu t’intéresses à tout le monde sauf à moi, marmonne-t-il. Toute la classe sait que mon équipe de basketball m’a nommé capitaine.

— En si peu de temps ?

— J’avais cartonné sur nos matchs au collège, j’imagine que je l’ai remplacé ainsi.

Être élevé à ce rang en deux semaines, ça relève de l’impossible, non ?

— Je vois.

— Où vas-tu, Sayuri-kun ? Nos vestiaires sont par ici, me précise-t-il en pointant l’une des entrées du doigt.

— Aux toilettes, ne m’attends pas.

— Ça marche, fait vite !

C’est encore inconcevable pour moi de me changer avec d’autres garçons dans une si petite pièce. Je ne pensais pas avoir de telles séquelles, mais les faits sont là. Rien qu’observer le mot « vestiaire » au-dessus de la porte m’a paralysé et plongé dans les abysses. Je me suis alors habillé aux côtés d’une cuvette qui, de ce que j’ai observé, est le contraire du terme « propre ».

Foutu passé de merde.

— Sayuri-kun, à ton tour !

Je me mets en position de départ. Mes doigts qui touchent le bitume se contractent. Mon corps est prêt.

— Il est tellement beau !

— On croirait voir un Dieu grec.

À l’instant où le coup de feu est tiré, je m’élance sur la course. Le regard vers l’horizon, je sens la piste ne faire plus qu’un avec ma personne. J’enjambe chacune des haies avec une aisance presque risible.

Les cours de Ryoota-sama portent leurs fruits.

— Top ! Le chrono, Tanaka-san ?

J’inspire profondément et souffle doucement avant d’essuyer la sueur sur mon front.

Ça fait quelque temps que je n’ai pas tant sprinté, j’ai presque oublié le bonheur que c’est.

— Tanaka-san ?

— Quarante-sept secondes et onze centièmes, dit-il silencieusement. Quarante-sept secondes et onze centièmes, répète-t-il en criant.

— C’est presque un record du monde, tu en es certains Tanaka-san ?

— Oui !

Je ressens l’admiration de toute ma classe. Sans doute subjugué par la course que j’ai proposée.

— Tu es incroyable, Sayuri-kun !

— Il est beau, sportif et intelligent, je suis fan.

Kotone et Tsubaki restent silencieuses. À vrai dire, c’est pour ces deux-là que j’ai tout donné.

Le professeur tape dans ses mains et nous demande de retourner en cours.

[…]

Tant pis pour la distribution des tracts. Si je la loupe, je suis mort.

Ces mots m’ont traversé l’esprit lorsque j’ai vu Kotone à deux doigts d’entrer dans son bus.

— Keshi !

Je me cache derrière un arbre et écoute la discussion entre un garçon et la séduisante harpiste.

— Oui, Hichirou ?

Ils s’appellent par leurs prénoms ? Qui est-ce ?

— Tu te souviens de notre rendez-vous ?

— J’avais oublié, je dois retourner à la maison pour réviser mes cours de musique.

— Et pourquoi ne m’as-tu pas applaudi quand j’ai couru tout à l’heure ?

— Je ne sais pas, j’étais dans mes pensées, j’imagine.

Alors que la jeune fille tente de rentrer dans le bus, son interlocuteur l’en empêche en l’attrapant par la main. Puis, il crie de toutes ses forces.

— Et tu ne l’étais pas pour Sayuri-kun !?

— Ne fais pas tant de bruits, on va se faire remarquer, Hichirou.

Il ramène sa camarade en la tirant vers lui. L’autocar, lui, repart sans en demander son reste. La harpiste perd l’équilibre et trébuche. Elle tente de se rattraper contre l’abribus, mais le violent choc lui a provoqué une douleur à la jambe.

— Pourquoi n’y en a-t-il que pour ce mec, sérieux ?

J’observe Hichirou prendre son chemin de son côté et me questionne.

Qu’est-ce que je fais encore ici à me cacher ?

Le lourd sac sur mon dos se réveille, se frotte les paupières, et, après avoir réalisé la situation, s’écrie.

— Sayuri-kun ! Qu’est-ce que tu fais ?

— Je te ramène chez toi.

— Ce n’est pas ce que je voulais savoir. Qu’est-ce que je fais sur ton dos ?

— Je n’allais pas abandonner une blessée dehors, dans le froid.

La harpiste reste silencieuse, laissant ses douces joues rougir. Est-ce la température glaciale qui les a rendues si belles ?

— Tu sais où j’habite ?

— Non, j’erre depuis une heure en espérant que quelqu’un te reconnaisse.

— Prends à gauche. Et dépose-moi au parc, marmonne-t-elle avec une expression gênée.

Je claque des doigts deux, puis trois fois et commence à chantonner en bougeant la tête en rythme.

— Hé, je ne suis pas humain. Vraiment, je suis désolé. Mais je suis conçu pour y ressembler alors on se trompe souvent.

— Qu’est-ce que tu fredonnes ?

— Une comptine de ma grand-mère.

— Elle t’a appris des trucs bizarres, ricane-t-elle.

— Assieds-toi ici au lieu de dire des âneries.

— Merci, Sayuri-kun.

— Qui était le garçon avec qui tu t’es engueulé ?

— Tu nous as entendus ?

— Qui ne vous aurait pas entendu ?

— Tu n’as pas tort, c’est censé être mon petit ami. Il est dans notre classe, c’est Hichirou Hori.

— C’est à cause de lui que tu n’arrives plus à respirer ?

— Pas vraiment non.

— Je vois, dis-je en m’apprêtant à rentrer chez moi.

Sous ce ciel sombre, éclairé par les quelques lampadaires encore allumés, Kotone attrape ma manche et me demande d’une douce voix.

— Tu sais ce qu’est l’amour, Sayuri-kun ?

Je me retourne et sens son parfum sucré venir jusqu’à mes narines. Cette odeur, je ne peux l’oublier. C’est celle de Tsubaki, j’en suis certain.

— J’en ai une vague idée, oui.

Je m’assieds de nouveau à ces côtés et lui tends une barre chocolatée.

— Tiens, tu dois avoir faim avec toute cette aventure.

— Tu es vraiment mon opposé, Sayuri-kun. Tu as le cœur sur la main. En classe tout le monde te place sur un piédestal, mais tu restes humble, tu ne prends pas du tout la grosse tête. Je trouve ça magnifique.

— À quoi ça servirait de se vanter ?

— À se faire voir, j’imagine.

Ce soir-là, les étoiles brillent de tous leurs éclats. Je laisse un silence d’une centaine de secondes s’écouler. Je vérifie aux alentours et ne repère personne. Je retire mon manteau et le dresse sur les épaules de ma camarade.

Brrr, quel parfum envoûtant.

Je m’accroupis face à elle et contemple son visage.

C’est le moment ou jamais.

— Kotone-chan, voudrais-tu sortir avec moi ?



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