Le samedi 10 Septembre, vers 17h30, Deshya arrive avec ses deux parents et la petite Korone à la fête de Colin et Mona Furas, une fête annuelle pour leur anniversaire de mariage. Après avoir quitté l’hôtel ‘Beleza Verde’ et avoir dit au revoir à ses quatre amies, elle arrive chez elle et se prépare d’une belle robe orange, noire et blanche pour aller à cette fameuse fête. Arrivés là-bas, ils sont arrêtés par les gardes devant la porte d’entrée de la villa, vu que Korone n’est normalement pas invitée, mais cela pour peu : Colin vient à leur rencontre et les laisse passer. La petite fille peut admirer l’intérieur de la grande maison et voit même la salle de fête, là où un peu plus de deux-cents personnes mangent, discutent et s’amusent. Ils rencontrent Annie, la docteure policière… quand les lumières s’éteignent. D’une entrée grandiose et extravagante, ‘Mariah Sukeni’, une détective qui aime montrer ses formes à tous, arrive sur un tapis rouge, depuis de la fumée qui sort de nulle part. Les lumières s’allument à nouveau et Colin s’excuse pour ce moment ‘étrange’, avant que Mariah se présente à Deshya et Korone. L’homme derrière elle, qui jetait des pétales de fleurs de toutes les couleurs, s’appelle ‘Dash Tarway’ et est un réceptionniste de la police de Tetazo. Un homme très musclé, à la peau foncée et aux cheveux colorés en un rouge clair. Après des présentations mouvementées, Deshya et Korone se dirigent vers le buffet pour manger un petit bout…
Mais au même moment, Korone ressent un horrible frisson qui la traverse de partout.
Elle est oppressée, comme si des regards la fixaient avec violence et haine. Elle ne sait pas ce qu’elle ressent exactement, mais cela la choque tellement qu’elle est emmenée aux toilettes par Deshya et y vomit. À l’extérieur des toilettes, une personne attend patiemment qu’elles sortent, mais lorsqu’une femme arrive dans le couloir, cette personne s’échappe en s’excusant, évitant d’être vue par Deshya et Korone qui sortent des toilettes juste après. Ensuite, elles retournent à la fête, mangent un petit bout et discutent avec Mariah, Dash et les autres invités. C’est à ce même moment que Colin prévient les invités : un petit film de 20 minutes va être visible depuis le mur de la salle. Les invités vont donc le visionner dans le noir total, avec les tentures qui sont toutes fermées, les lumières éteintes ainsi que toute source de lumière interdite. C’est dans l’obscurité totale qu’ils commencent le film…
Cependant, le calme et la sérénité sont rapidement brisés.
Un bruit de verre brisé retentit. Ensuite, un homme hurle et finalement, un nouveau bruit de verre brisé est à nouveau entendu. Deshya se retourne et les tentures du fond de la salle dansent furieusement, laissant des rayons de la lune montrer la scène : la vitre est brisée et un homme est couché par terre… baignant dans son propre sang. Mariah, la détective aux cheveux noirs et roses, ordonne qu’on allume les lumières et fonce vers la scène du crime. Deshya l’imite et lorsqu’elles arrivent là-bas, elles peuvent voir l’atrocité : un homme âgé est bel et bien mort.
– Que personne—
Mariah veut terminer sa phrase, mais des cris de terreur retentissent, Certaines personnes commencent à courir en dehors de la salle et Mariah agite violemment la main vers Dash.
– QUE PERSONNE NE PART DE LA SALLE !!” crie-t-elle. DASH, RATTRAPE LES PERSONNES QUI VIENNENT DE FUIR !!
– RESTEZ TOUS OÙ VOUS ÊTES !!!” hurle Gatito.
Les cris continuent de retentir, mais Annie, dont Gatito, arrivent à gérer une partie de la foule. Certains les aident et Dash court à l’extérieur de la salle pour rattraper ceux qui viennent de fuir. Korone observe la scène de crime depuis la table où elle est debout, mais d’un coup—
– Kh !!
Elle se tient la poitrine et scrute les environs en hyperventilant : quelqu’un vient de la fixer. Elle saute de la table et se cache dans la foule, son cœur battant à la chamade.
– Quelqu’un… On va… Qu’est-ce qu’il se passe…
Alors qu’un meurtre a été commis dans une salle de plus de 200 personnes, Korone ressent toujours une personne qui l’opresse rien qu’avec un regard. Elle fonce dans les bras de Pera et la femme lui dit que tout va bien se passer. Pour la femme rousse, la petite Korone doit avoir peur du crime qui vient d’être commis, mais la réalité est toute autre. Deshya et Mariah forcent tout le monde à s’éloigner du corps et Annie s’approche, la foule désormais calmée. Elle s’agenouille et vérifie l’état du corps.
– Une balle dans le dos. Elle a très fort probablement transpercé son cœur… Il est mort sur le coup.
Tout en touchant son artère carotide, elle lâche sa supposition avant de secouer la tête. Deshya regarde la fenêtre qui a été brisée et grince des dents.
Il est fort plausible qu’une personne a tiré depuis l’extérieur, tuant cet homme d’une balle. Cependant, ce qu’elle ne comprend pas…
C’est pourquoi la vitre a été brisée une deuxième fois.
CHAPITRE 40
⎾Pure Neige * Le Coup de Feu Invisible ; Mystérieux Meurtre⏌
– J’ai réussi à ramener tout le monde !
Cinq minutes plus tard, Dash revient avec un total de sept personnes : 2 femmes et 5 hommes. Mariah le remercie et avant de s’approcher d’eux, elle se retourne vers Annie et Deshya.
– Je vais leur poser des questions pour savoir pourquoi ils ont couru, ainsi que savoir où ils se trouvaient au moment où la victime a été tuée,” dit-elle. Deshya, si tu trouves quoi que ce soit, tu me le dis, d’accord ?
Deshya montre son pouce et acquiesce. Sa main est vêtue de gants que lui a donnés Mariah, vu qu’elle tombe toujours sur des affaires : comme lui avait dit Hanoka, il serait mieux qu’elle en garde sur elle au cas où. Annie se relève et regarde Colin Furas, l’organisateur de la fête.
– Reconnaissez-vous la victime ?” demande la dame.
Colin observe l’homme avec difficulté, un cadavre lui étant une vue insupportable, surtout lors de son anniversaire de mariage. Cependant, il prend son courage à deux mains et observe le visage macabre de l’homme sans vie. Il ne prend pas longtemps avant de savoir l’identité de la victime :
– C’est Georges… !
– Georges ?” répète Annie.
– ‘Georges Hedown’, un chef de magasins de friandises et bonbons. Pourquoi… Pourquoi est-il…
Colin recule de deux pas, ensuite attrapé par sa femme qui lui caresse ses cheveux, cherchant à le calmer comme elle le peut. Annie ne veut pas le presser avec des questions, mais heureusement pour elle, l’une des sept personnes qui était questionnée par Dash Tarway s’avance vers elle et lui répond.
– Il s’appelle Georges Hedown et comme Colin a dit, il travaille en tant que chef d’une chaîne populaire de magasins de friandises. Il a 49 ans et est venu tout seul : je l’ai croisé dans le parking, vu que nous sommes arrivés en même temps.
C’est un homme dans sa trentaine aux cheveux blonds propres et soignés. Un petit sac à dos tenu d’une corde sur l’épaule. Annie se tourne vers lui et lui demande de décliner son identité.
– Je m’appelle ‘Antoine Darrain’, mais je ne pense pas avoir à trop parler, vu que la femme derrière m’a dit qu’elle allait nous interroger pour avois nos alibis. Pourtant, le criminel a fui par la fenêtre, non ?
L’homme se tourne vers la vitre brisée et soupire doucement.
– J’ai fui parce que j’ai vu le corps de mon ami comme ça… Même si j’ai réussi à reprendre mon calme, pourquoi…
Deshya reste silencieuse et observe la fenêtre. Elle plisse ensuite les yeux.
– Si le coupable s’est réellement enfui à l’extérieur en sautant par la fenêtre ou en la brisant d’une façon ou d’une autre, alors pourquoi est-ce que la vitre a été brisée une première fois ?
Deshya se touche le menton.
– Est-ce que le tir a été fait depuis l’extérieur, brisant donc la vitre ? Cela expliquerait une seule partie de l’histoire, mais c’est fort probable, vu que la victime a hurlé de douleur à ce moment-là. Mais alors, pourquoi avoir brisé la vitre une nouvelle fois ?
Deshya ne comprend pas la logique derrière les deux bruits qu’ils ont entendus. Cependant, ce n’est pas en restant sur place qu’elle compte trouver des réponses. Avant de vérifier l’état de la vitre, Deshya se dirige vers les sept personnes qui se sont enfuies. Mariah discute toujours avec eux, mais en voyant la fille à la robe renard s’approcher, elle sourit et se retourne vers elle.
– Ah, c’est un bon timing !” avoue-t-elle.
Deshya cligne des yeux.
– Ah ?
Mariah approuve et dépose ses deux mains sur ses hanches.
– Sur les sept personnes qui se sont enfuies, quatre semblent suspectes. Cependant, avant de pouvoir déduire cela, il faut savoir si le coupable vient de l’extérieur ou de l’intérieur. Tu as trouvé quelque chose ?
– Je n’ai pas cherché grand-chose, mais…
Deshya chuchote dans l’oreille de Mariah ceci :
– En réfléchissant, je pense que la première fois que le verre a été brisé, c’est un coup de feu de l’extérieur, ce qui explique pourquoi nous n’avons rien entendu. Cependant, je ne comprends pas pourquoi la vitre a été brisé une nouvelle fois, surtout que j’ai remarqué quelque chose…
Deshya et Mariah se tournent vers la fenêtre brisée. Là-bas—
– Un peu de verre brisé est à l’intérieur, ce qui pourrait provenir de la fenêtre qui s’est faiblement brisée quand le coup de feu et provient de l’extérieur. Cependant, il n’y a pas plus de verre… ce qui signifie que tous les autres morceaux sont à l’extérieur. Bref—
– Bref, la fenêtre a été d’abord brisée à l’extérieur, puis à l’intérieur ? Bien.
Mariah la coupe et demande à Dash de vérifier l’extérieur de la maison, là où la fenêtre à été brisée. L’homme musclé accepte et demande l’aide de Gatito, qui le suit directement. Pera et Korone les observent partir et la petite-fille plisse les yeux en observant la fenêtre.
– Si la victime a été tuée depuis l’extérieur, alors pourquoi quelqu’un a brisé la vitre depuis l’intérieur ? Même si c’est un complice, alors…
Korone veut y réfléchir plus longuement, mais la femme qui la tient dans les bras la serre un peu plus fortement.
– Et dire que la fête se passait bien, jusqu’ici…” lâche-t-elle.
– Pour ma première fête, j’ai déjà vécu mieux…” pense Korone en soupirant.
Elle ne ressent plus l’étrange regard qui l’oppressait, mais elle est convaincue que quiconque en est la cause est toujours à l’intérieur de cette pièce. Toutefois, pourquoi la fixe-t-on de la sorte… ? Est-ce que cette personne proviendrait-elle de ceux qui cherchent à la tuer ? Si c’est le cas, alors…
– Pourquoi… ?
Korone n’y réfléchit pas plus pour ne pas recommencer à trembler. Elle se tourne vers Deshya, elle qui est avec Mariah devant la vitre brisée. Une bonne majorité des invités est demandée de rester vers l’avant de la salle, là où la scène où le film était projeté se trouve. L’autre partie des invités est dans le grand salon à l’étage. Elle est surveillée par un policier et un garde du corps engagé par Colin pour la fête, l’autre toujours à l’entrée. Deshya, elle qui se trouve devant la vitre avec la détective aux cheveux noirs et roses, plisse les yeux en observant un certain détail. La femme se touche le menton.
– Le verre brisé de la vitre est bel et bien de cette vitre. Vu le peu de morceaux, c’est certain qu’un petit objet a pénétré la fenêtre de l’extérieur, entrant dans l’intérieur.
Depuis là où elles se trouvent, elles peuvent voir les nombreux morceaux brisés à l’extérieur, dans les buissons et l’herbe du jardin. Gatito est justement en train d’analyser les environs pour trouver des indices sur ce qu’il s’est passé. Deshya fronce les sourcils.
– Dis, Mariah…
La femme se tourne vers elle.
– Il ne manque pas un détail ?
Mariah sourit : elle aussi l’a remarqué. Elle approuve et croise les bras.
– Il manque clairement quelque chose à la scène, mais même sans cela, ça me dérange.
Elle plisse les yeux et Deshya se relève.
– Tu parles de la vitre brisée depuis l’intérieur ?
Mariah avoue que c’est un détail qui la dérange, mais elle parle d’autre chose. Elle explique rapidement ce dont elle parle et Deshya se retourne vers l’endroit où la victime se trouvait. Annie, avec l’aide d’une personne de confiance, l’a emmené à l’extérieur pour ne pas que l’odeur et la vue d’une telle scène d’horreur viennent à traumatiser tout le monde, bien que le mal soit déjà fait. Deshya se mord la lèvre inférieure et finit par avouer qu’elle trouve ça étrange aussi. En réalité, Korone a déjà pensé à ce détail, ce qui lui fait dire quelque chose.
Peut-être que ce meurtre est plus mystérieux que prévu.
Cependant, sans les détails de Gatito et de Dash qui vérifient l’extérieur, elles ne peuvent encore rien dire. Les sept personnes qui se sont enfuies, toujours sous la surveillance d’un des gardes de la maison, attendent de leur côté, certains transpirant et d’autres la tête baissée, n’arrivant pas à croire qu’un meurtre a été commis dans la salle où ils étaient tous en train de s’amuser quelques minutes auparavant. C’est un évènement traumatisant pour beaucoup d’entre eux, même Colin et Mona : la victime est leur amie, après tout. Gatito se relève dans le jardin, quelque chose dans ses mains gantées. Il s’approche de la fenêtre brisée et interpelle Mariah. Deshya s’approche aussi. Son père leur montre ce qu’il a attrapé dans le jardin.
– Une brique cassée…” remarque Deshya.
– C’est ce qui a brisé la vitre depuis l’intérieur, alors ?” demande Mariah.
Gatito approuve et dépose le morceau par terre.
– L’herbe est piétinée dans les environs et un buisson est même dans un mauvais état, donc je pense qu’affirmer que le coupable était juste ici est raisonnable,” dit-il.
– La question est de se demander pourquoi quelqu’un a brisé la vitre depuis l’intérieur, alors…” lâche Deshya.
– C’est impensable qu’une personne ait voulu jeter la brique sur le coupable depuis l’intérieur. C’est la seule théorie que je puisse faire si le coupable vient bel et bien de l’extérieur, mais c’est aussi tellement fantaisiste et étrange que je préfère ne pas m’avancer là-dessus,” pense Mariah tout haut.
Gatito et Deshya acquiescent. Au même moment—
– Mariah !
Dash arrive depuis le jardin, juste derrière l’inspecteur de police. Il s’arrête devant la vitre brisée et montre ce qu’il a dans les mains.
– Nous avons trouvé ça à l’extérieur de la maison, tout près d’un des murs, cachée dans un buisson !
L’homme musclé tient un pistolet sur lequel un silencieux est accroché. Gatito, Mariah et Deshya l’observent avec étonnement.
– Cela signifie que le meurtrier vient bien de l’extérieur… mais pourquoi quelqu’un de l’intérieur aurait brisé la vitre ?” se demande Gatito, parlant tout haut.
Mariah demande à Dash de lui passer le pistolet pour l’analyser et il accepte directement. Deshya se retourne et observe les sept personnes qui se sont enfuies lorsque le meurtre a été commis. Quiconque a jeté la brique depuis l’intérieur doit être l’un des sept, elle le sent. Quatre d’entre eux ont des sacs à dos, deux autres n’ont rien et l’autre femme une banane autour de la taille. Deshya comprend désormais pourquoi Mariah lui a dit qu’elle pense savoir qui sont les quatre suspects principaux : les quatre qui ont des sacs à dos sont les seuls qui auraient pû garder une brique en la cachant. Cependant, Deshya se demande comment Mariah les considérait comme les quatre suspects avant même de savoir pour la brique. Sait-elle quelque chose d’autre ? Deshya veut lui poser la question, mais elle analyse toujours le pistolet que Dash a trouvé à l’extérieur.
Les secondes passent et finalement, Mariah rend le pistolet à Dash, n’ayant aucun piste supplémentaire. Deshya s’approche d’elle.
– Comment est-ce que tu savais que les quatre personnes avec des sacs à dos sont les quatre suspects principaux ?” demande-t-elle.
Mariah se retourne vers elle et lui sourit.
– Sur les sept personnes qui ont fui, elles sont les quatre à avoir été à côté de la victime lorsque le petit film était projeté sur le mur. De plus, les trois autres étaient plutôt dans le milieu de la foule, alors je ne pense pas qu’ils auraient pû détruire la vitre, encore moins tuer la victime de là où ils se trouvaient,” explique-t-elle.
– Tu continues de penser que le meurtrier est à l’intérieur ? Pourtant…
Deshya ne termine pas sa phrase et Mariah ne répond rien. Elles se comprennent uniquement avec leur simple regard, mais elles n’en parlent pas davantage. Gatito leur explique qu’il va continuer de chercher les environs et demander de l’aide depuis la station. Dash fait le tour pour revenir à l’intérieur, tandis que Deshya et Mariah s’avancent vers les quatre suspects. La détective explique aux trois autres qu’ils peuvent aller à l’avant de la salle ou dans le salon de l’étage. Ils la remercient et l’un des quatre autres se lève avec un air surpris et embêté.
– Eux trois seulement ? Et nous quatre ?! On est pas des suspects, quand même ??” demande furieusement le jeune aux cheveux noirs courts.
La détective lui demande de se taire et attend patiemment. Deshya l’observe en se demandant ce qu’elle est en train de faire, mais après quelques instants, Dash revient dans la pièce. Il va parler, mais Mariah le coupe et claque des doigts.
– Est-ce que je peux l’avoir ?” demande-t-elle sans même préciser ce qu’elle souhaite recevoir.
Dash approuve directement et fouille la poche de son pantalon avant de sortir un petit carnet ainsi qu’un stylo rose. Dash les donnent à Mariah et cette dernière le remercie avant d’ouvrir le carnet et appuie sur le bic.
– Il semblerait que quelqu’un a tiré sur la victime depuis l’extérieur, à 19h58 exactement. Il est désormais 20h34 et il n’a pas été encore trouvé, mais cela n’est qu’une question de temps. Depuis l’intérieur, une brique a été lancée à travers la vitre pour une raison qui ne nous est encore inconnue. Bien que le meurtre de ‘Georges Hedown’ ne semble pas vous concerner, nous souhaitons savoir qui a jeté la brique et pourquoi.
Contrairement à avant, son ton est sérieux et froid — même glacial. Elle explique clairement et sans fourcher la langue, chaque mot a son poids et son regard place de la pression sur les quatre suspects ; même Deshya le ressent. Dash, habitué à sa manière d’être, pose juste son dos sur le mur derrière lui et surveille les trois hommes et la femme au cas où ils tenteraient de s’enfuir à nouveau. Deux d’entre eux ont failli s’échapper de la maison, après tout.
– Et pourquoi ce n’est qu’un de nous—
Avant même que la jeune femme aux cheveux entièrement roses ne puisse terminer sa phrase, Mariah la coupe.
– Vous êtes les seules personnes qui ont un sac à dos, donc vous auriez pû garder une brique dedans. Après tout, elle est plutôt grande et bien qu’elle soit actuellement cassée, elle pèse un certain poids. De plus, même si c’est par peur, vous avez tous quitté la pièce pendant quelques instants en essayant de vous enfuir, donc vous devenez des suspects principaux parce qu’à tout moment, vous avez réussi à vous débarrasser d’un certain détail qui ferait de vous le coupable de ce lancer de brique.
Mariah se retourne vers la salle et lève un bras, ce qui interpelle la majorité des invités.
– Avant que je vienne vous poser des questions, nous allons demander à tout le monde de rejoindre Dash et Annie dans la salle à manger d’à côté pour vérifier rapidement si personne n’a de la poudre sur lui, ainsi que vous fouiller entièrement !
Elle crie suffisamment fort pour que tout le monde entende, mais à cause du résonnement à l’intérieur de la pièce, Deshya souffre depuis ses oreilles de renard. Mariah ferme son carnet de détective, qui ne lui a servi à rien pour l’instant, et saute sur une table pour s’y lever.
– Un par un, vous allez être convoqué par mon assistant et subir une inspection rapide. Pour les hommes, mon assistant vous fouillera. Pour les femmes, Annie.
Annie arrive dans la pièce et soupire en souriant.
– Elle est en train de décider tout toute seule, là ?” se demande-t-elle.
– Je suis son assistant, hein…” sourit faiblement Dash.
Mariah tape doucement la table sous elle de son pied.
– Bien que nous avons nos quatre suspects principaux pour le lancer de brique depuis l’intérieur, nous n’avons encore aucune piste ou nouvelle à propos du meurtrier. Si vous avez la moindre idée de qui aurait pû vouloir la mort de ‘Georges Hedown’, parlez-en nous lorsque vous allez être fouillés ! C’est tout.
Mariah descend de la table en sautant et Dash s’approche d’elle, accompagné d’Annie. La femme baisse les bras en râlant.
– J’en ai marre de devoir travailler tous les jours… Je dois avoir ma journée de pause depuis Août, mais tous les jours, on m’appelle…” se plaint-elle.
Deshya s’approche et Annie lui lance un regard fatigué.
– Si tu es maudite, veux-tu bien au moins faire en sorte que ce ne soit pas des meurtres ?” lâche-t-elle.
– M-Maudite ? Ne dites pas n’importe quoi, ahah…
Deshya se gratte la joue et Dash tapote le dos d’Annie.
– Bah, c’est pas de sa faute, Bélium est connu pour un pays où la criminalité n’est pas faible !” lâche-t-il.
– Je sais…
Annie soupire et Deshya lui tapote le dos à son tour, bien qu’avec maladresse. Dash demande à Colin et Mona s’ils ont le droit de faire l’inspection dans leur salle à manger en criant à travers la pièce. Colin demande aux invités de le laisser passer et arrive à leurs côtés avant d’approuver, mais il leur dit qu’il va les aider.
– Georges m’est un ami très cher, je veux savoir qui l’a tué… !
Il serre les deux poings, ainsi que les dents, laissant sa colère le dévisager. Dash tourne rapidement le visage vers Mariah. Cette dernière acquiesce et Dash accepte donc que Colin les accompagne. Deshya se place aux côtés de la détective aux cheveux noirs et roses.
– Même avec les quatre suspects principaux pour le lancer de brique, il est toujours possible que le coupable soit quelqu’un à l’intérieur de la salle, n’est-ce pas ?” demande la fille à la robe de renard.
Mariah croise les bras et approuve.
– Si le tir provient réellement de l’extérieur, rien ne dit que le coupable n’a pas rejoint la foule d’une façon ou d’une autre ou que la brique lui a permit d’entrer dans la salle et se mêler à la foule. Cependant, c’est un scénario si risqué et compliqué que je préfère ne pas laisser mon esprit aller dans de la fiction de la sorte.
Deshya est d’accord avec elle : si quelqu’un a envoyé la brique depuis l’intérieur, brisant ainsi la vitre, tout ça pour que le coupable de l’extérieur puisse sauter à l’intérieur, alors ce plan a plus de chance d’échouer que de chance de gagner au loto. Non seulement les morceaux de verre viendraient griffer la personne, mais lorsque les personnes à l’intérieur de la salle se sont retournés pour voir ce qu’il se passait, ils auraient vu la silhouette du coupable grâce aux rayons de lumière provenant de la lune. Bref, la raison que la vitre a été brisée est autre.
– Si le coupable vient de l’intérieur de la pièce, n’importe qui peut être le coupable,” lâche Mariah.
– Mais la victime a été tuée d’une balle dans le dos, non ? Il aurait été impossible pour quiconque d’autre que ceux derrière ou à côté de lui d’avoir commis le crime, n’est-ce pas ?” demande Deshya, une tonne de questions dans la tête.
– Je suis bien d’accord avec toi, mais je connais quelqu’un qui m’a dit une fois ceci.
Elle croise les bras et plisse les yeux.
– ‘C’est en pensant que l’impossible est impossible qu’on se noie dans une situation impossible’.
Mariah sourit en pensant à cette phrase et ferme les yeux en baissant doucement la tête.
– Bien que cette citation qu’il m’a dit semble être complètement idiote, c’est actuellement grâce à elle que j’ai résolu ma première enquête ici.
Deshya repense à la phrase et se touche le menton.
– Il faut donc penser à toutes les probabilités, même celles qui semblent être impossibles…
Elle comprend le sens de la phrase, mais elle ne voit réellement pas comment cela serait possible de tuer la victime dans le noir et depuis le devant, surtout avec une telle foule. Même Colin ou Mona Furas, tous deux sur la scène où le film était projetée, n’auraient pas pû commettre un tel meurtre, même aidés par la frêle lumière du projecteur. Mariah remarque que Deshya est dans ses pensées et elle sourit.
– Cette phrase ne s’applique pas à tout, hein.
– Comment ça ?” la questionne Deshya.
– Dans cette affaire, je pense réellement que le coupable vient soit de l’extérieur, soit de l’un des quatre suspects au sac à dos, donc il n’y a pas besoin d’aller dans l’impossible pour trouver notre coupable ou la vérité. Cependant, il est toujours préférable de soupçonner tout le monde, même ses amis, plutôt que de croire tout le monde.
Mariah se mord une partie la lèvre inférieure et Deshya l’admire avec de grands yeux. Mariah remarque l’air de la fille et secoue les mains, son carnet et son stylo toujours dans celle de droite.
– Enfin, je parle d’enquêtes, pas de la vie en générale ! Ne commence pas à penser que tous tes amis te mentent à cause de ce que je dis, ahah !
Deshya pouffe et lui avoue que ce n’est pas à cela qu’elle pense. Mariah est rassurée et lui dit qu’elle va vérifier l’extérieur pour voir si elle peut trouver quoi que ce soit, pendant que les invités sont tous fouillés. Deshya la salue et ensuite se retourne vers l’avant de la salle, là où plus d’une centaine de gens se trouvent, ainsi que sa mère et Korone. Elle fronce les sourcils.
– Oui, je ne douterai jamais de tout le monde… mais il est préférable que je reste sur mes gardes. Parce qu’à tout moment…
Une des personnes dans la salle détourne le regard de Deshya. Cette dernière ne l’a pas remarqué, mais il préfère prendre ses précautions. Deshya serre faiblement le poing.
– Je peux être en danger.
Tant qu’elle ne sait rien sur sa condition et la raison de son enlèvement lorsqu’elle était plus jeune, elle préfère rester paranoïaque à propos d’un groupe qui serait derrière ses oreilles de renard. De plus, désormais qu’elle sait que quelqu’un a cherché à tuer Korone, une petit enfant de 8 ans qui semble spéciale, elle se pose énormément de questions. Certes, peut-être n’ont-elles rien en commun, mais Deshya ressent une étrange émotion en regardant Korone. Pas l’une qui est mauvaise, mais comme un…
– Comme si on était lié ?
Deshya ne sait pas l’expliquer autrement. Cela est sûrement dû au fait que Korone a une étrange histoire, rien de plus ; mais Deshya préfère écouter ses ressentis. De plus, Mariah n’a pas tort : il faut parfois accepter que ce qu’on considère ‘impossible’ n’est qu’un point de vue. Que l’impossible est possible. Certes, cela est contradictoire, mais Deshya se comprend.
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Les minutes passent et après environ une heure de passée, tous les invités sont fouillés et vérifiés pour de la poudre sur leurs vêtements. Cependant, rien d’étrange n’est trouvé, ni aucune trace de poudre qui viendrait du pistolet trouvé à l’extérieur. Il est désormais 21h41 et Mariah rejoint Deshya en soupirant.
– Rien…
– Personne de suspect n’a été arrêté à l’extérieur non plus ?” demande la fille au pull renard.
Mariah joue avec son stylo et secoue la tête : bref, elles n’ont pas avancé. Elle soupire et admire la fenêtre brisée à nouveau, elle qui laisse un courant d’air agréable passer à l’intérieur de la pièce. Mariah tapote le stylo sur son épaule et réfléchit.
– Je suppose qu’il va falloir demander aux quatre autres ce qu’ils faisaient pour voir si c’est bien l’un d’eux quatre qui a jeté la brique… Peut-être on en apprendra plus après ça,” avoue-t-elle.
Deshya acquiesce et se retourne vers la scène de la salle : tous les invités sont à l’extérieur, excepté Colin, sa femme et les quatre suspects qui sont là-bas. Deshya scrute rapidement les environs et remarque qu’elles ne sont pas là. Elle tourne le visage vers la détective.
– Je sais que papa est avec Annie et Dash, mais où sont maman et Korone ?” la questionne-t-elle.
Mariah s’arrête et la regarde droit dans les yeux.
– Ah, ça…
Quelques minutes plus tôt, un peu après le meurtre de ‘Georges Hedown’, Pera tient Korone dans ses bras et se dirige vers la salle à manger, là où elles vont devoir être fouillées et testées pour de la possible poudre sur leurs vêtements. La femme est certaine qu’elle n’est pas la coupable de cette affaire, que ce soit parce qu’elle est une petite fille de 8 ans, qu’elle était à ses côtés ou simplement parce que Korone n’est pas ce genre de fille, mais elle comprend qu’ils doivent tous être fouillés par la police. Elle se demande qui aurait pû commettre un tel crime, surtout pendant une fête si amusante, festive et remplie. Quiconque est le coupable est une horrible personne, elle est certaine. Heureusement, elle a pû calmer ses tremblements. Son mari aide pour la fouille, tandis que sa fille aide la détective à découvrir la vérité derrière cette affaire. Elle se trouve ridicule de ne pas pouvoir aider, mais Pera ne possède rien d’utile pour être utile. Alors qu’elles marchent vers la salle à manger, une petite main l’agrippe fortement. Elle s’arrête devant la porte, la main sur la poignée, et baisse le regard vers la petite fille.
– Tu vas bien, Korone… ?” demande la femme.
Korone respire avec difficulté et ses yeux sont grand ouverts. Pera l’interroge du regard, mais la petite fille aux cheveux attachés en queue de cheval ne répond rien. Pera veut insister, mais Annie ouvre la porte et leur demande d’entrer. La femme rousse finit par accepter, toujours inquiète pour la petite fille.
Après avoir été testé pour de la poudre et une fouille plutôt rapide, Pera et Korone sortent de la salle à manger ensemble, mais à la place d’aller à l’étage, Pera s’éloigne un peu plus loin dans le couloir, s’approchant de la porte d’entrée, et s’y arrête. Korone cligne des yeux et lève le regard vers la femme.
– Qu’est-ce qu’il y a… ?” demande-t-elle.
– C’est plutôt moi qui devrait te poser cette question,” avoue Pera. Tu es toute tremblante.
Korone ouvre grand les yeux et analyse ses propres mains. Comme vient de le dire la femme rousse, elle est en train de trembloter. Korone elle-même ne l’avait même pas remarqué. Pera lui demande si c’est à cause du meurtre qui a été commis.
– Je ne peux pas lui avouer que c’est parce que j’ai l’impression qu’on est en train de me fixer…” pense Korone.
Elle acquiesce finalement et Pera lui caresse les cheveux, lui promettant que tout va bien aller. Korone profite de cette sensation agréable : la femme a une main plus douce que celle de Deshya, bien que la sensation soit différente. Être rassurée de la sorte… Korone apprécie énormément. Cependant, son cœur bat toujours à la chamade et pour une raison perturbante : elle ressent la présence de quelqu’un de probablement très dangereux tout près d’elle. Korone ne sait pas qui c’est, mais elle est convaincue qu’elle est en danger. Ce qui lui oppresse la poitrine, ce qui l’empêche de bien respirer, ce qui lui fait si mal… Des débuts de larmes commencent dans ses yeux et Pera les remarque directement.
– Tu veux prendre l’air ? Tu es certaine que tu vas bien ?!” s’inquiète la femme.
Korone déglutit bruyamment, comme si elle essayait d’avaler la boule qui la dérange dans sa gorge, et acquiesce à nouveau.
– Je veux bien prendre l’air…” avoue-t-elle.
Pera approuve donc et prend Korone avec elle jusqu’à la salle à manger. Alors qu’un homme s’y dirige, Korone ressent des tremblements encore plus forts. Respirer devient presque impossible. Son cœur bat trop rapidement. L’homme touche la poignée et remarque la femme rousse avec la petite fille aux longs cheveux blancs. Il s’excuse et baisse doucement son chapeau.
– Vous souhaitez passer d’abord ?” leur demande-t-il.
– Je souhaite juste parler avec mon mari pour sortir, après vous,” répond gentiment Pera.
L’homme acquiesce et ouvre la porte. Korone tient fermement la femme dans ses bras… mais—
– C-Ce n’est pas lui… C’est quelqu’un d’autre… Qui… Pourquoi… Pourquoi je me sens comme ça…
Elle tourne doucement le regard vers le fond du couloir, mais elle ne voit personne. Pourtant, elle est convaincue que cet homme n’est pas celui qui la fixe de la sorte. Elle agrippe fermement Pera et renifle : elle veut que cette sensation désagréable s’arrête. Quiconque l’observe… Elle souhaite qu’il arrête. Elle sait que ça ne fonctionne pas comme ça, mais Korone ne supporte pas ce ressenti. Elle veut que ça s’arrête… Elle veut que ça s’arrête ! Pera passe derrière l’homme et voit son mari dans le coin de la pièce. L’inspecteur se lève de la chaise et interroge sa femme du regard.
– Korone ne se sent pas très bien, est-ce qu’on a le droit d’aller à l’extérieur ?” demande-t-elle.
– Le meurtrier est peut-être toujours dans les parages, je ne sais pas si c’est sage,” lui avoue Gatito.
– Mais Korone a vraiment besoin d’aller dehors…
Gatito se gratte l’arrière du crâne et observe la petite fille aux yeux larmoyants. Ses petites mains agrippent le beau vêtement noir de la femme, tandis que son expression prouve une certaine douleur interne. De plus, elle était allée vomir dans les toilettes, accompagnée de Deshya, quelques minutes après le début de la fête. Bref, elle ne fait pas semblant. Il soupire.
– Restez devant la maison, là où le garde pourra vous surveiller, alors,” lâche-t-il. Il est peu probable qu’avec autant de policiers dans les alentours, le meurtrier revienne sur les lieux.
Sa femme le remercie d’un baiser sur la joue et accourt en dehors de la salle à manger, laissant son mari faire son travail, lui qui rougit faiblement. Il se gratte la joue et l’homme musclé à côté de lui s’éclaircit la voix.
– Notre inspecteur froid qui rougit, héhé ?” lâche Dash.
Gatito lui frappe la tête et range ses deux mains dans ses poches, se préparant à fouiller l’homme qui vient d’arriver.
– Que ça soit la première fois ou la 50000è fois, se faire embrasser par sa femme, c’est mieux qu’observer un coucher de soleil. Pas de ma faute,” rétorque-t-il.
Dash pouffe en se tenant la tête et soupire.
– Je n’en doute pas…” lâche-t-il d’un murmure.
Pera est désormais à l’extérieur avec Korone, toutes deux prennent l’air.
– Elle se sent réellement si mal… ?” demande Deshya, ayant écouté la courte explication de Mariah.
– C’est ce que ton père m’a dit, en tout cas,” avoue la détective.
Deshya regarde l’extérieur depuis la vitre brisée et sert un poing.
– Alors, nous n’avons que résoudre le mystère de cette brique et de ce meurtre et j’irai voir comment elle va.
Mariah sourit.
– Tu sembles bien l’aimer, la petite Korone, pas vrai ?
Deshya ne cherche pas à le nier : elle acquiesce et tourne le regard vers Mariah.
– C’est… comme une petite-sœur.
Mariah ouvre un peu plus grand les yeux, la bouche bée, mais elle cache ce qu’elle ressent et se retourne en poussant Deshya de son fessier. L’adolescente se rattrape avant de tomber sur le sol de la salle et interroge Mariah du regard, surprise.
– Finissons-en le plus vite pour que tu puisses vérifier ce qui ne va pas avec ta « petite-sœur », alors !” lâche Mariah.
Deshya sourit en acquiesçant. Gatito les rejoint, Dash à ses côtés.
– Aucune nouvelle de la station. Il semblerait que le coupable n’ait emprunté aucune voiture, donc il doit se cacher dans les environs. Cependant, ça va faire bientôt 2 heures depuis le meurtre, donc il est peut-être parti loin… Aucune empreinte digitale sur le pistolet, le numéro de fabrication ne va probablement nous mener sur aucune piste et rien d’autre n’a été trouvé à l’extérieur,” avoue-t-il.
Mariah se touche le menton. Elle se tourne vers Deshya et lui demande si elle peut aller à l’étage pour demander au garde si tout se passe bien. Deshya accepte et Gatito discute avec Mariah et Dash. En montant les escaliers, Deshya s’arrête et se retourne rapidement vers la porte d’entrée. Derrière celle-ci, à l’extérieur, sa mère et Korone sont toutes les deux en train de discuter, voire simplement en train de se reposer.
– Si tu es maudite, veux-tu bien au moins faire en sorte que ce ne soit pas des meurtres ?
C’est ce que lui a dit Annie, bien que pour rire, quelques instants auparavant. Bien que Deshya ne l’ait pas pris sérieusement, elle se demande elle-même si elle n’est pas un aimant à meurtre… Cela paraît impossible et irrationnel, surtout qu’il n’y a aucune raison que ça commence avec cette année scolaire, mais elle est toujours à des endroits où des morts se trouvent. Elle secoue la tête : cela est une idiotie. Cela n’est qu’un hasard. Si quelqu’un essayait de la tester, alors ce ne seraient pas tous des criminels différents et avec des raisons différentes. Cela n’aurait donc aucun sens. Cependant, Deshya commence à en avoir marre de se trouver au même endroit que des meurtres, elle ne peut pas le nier. En arrivant à l’étage, elle toque à la porte de la pièce où se trouvent la grosse majorité des invités et un garde vient l’ouvrir. Il est proche des 1m90, il s’abaisse donc pour discuter avec la fille.
– Mariah m’a demandé de venir voir si tout se passe bien,” avoue Deshya.
– Personne n’a agi étrangement et l’ambiance semble s’être améliorée,” avoue le garde. De toute façon, tout le monde a déjà été fouillé, donc cela m’étonnerait que quoi que ce soit arrive, surtout que les canifs, objets pointus ou autres sont gardés dans des sacs individuels à l’extérieur pour éviter la moindre attaque à l’intérieur.
– Je vois, merci !
Deshya le remercie et se retourne avant de descendre les escaliers à nouveau. Dans la salle de l’étage, deux personnes sont l’une à côté de l’autre, sans se faire remarquer par quiconque. L’une des deux cache ses mains dans les poches de sa veste, l’autre une cigarette en main, bien qu’elle ne puisse pas fumer.
– C’est embêtant d’être ici,” avoue la personne avec la cigarette en main.
L’autre ne répond rien, ses paupières abaissées.
– Après, tout va bien. Je n’ai pas besoin de bouger d’ici.
– Moi si.
L’autre personne, celle avec les mains en poche parle enfin.
– Il y a trois gardes qui surveillent la pièce. Je n’aurai aucun souci à partir sans me faire remarquer,” lâche-t-il.
– Pourquoi dois-tu t’en aller comme ça ? Quelque chose ne va pas ? Tu n’as pas—
– Cela ne te regarde pas, ni n’est à propos d’elle.
La personne à la cigarette sourit et la place entre ses lèvres, mais ne l’allume pas, vu que cela leur est interdit. De plus, ils n’ont même pas leur briquet sur eux.
– Toujours à avoir des cachotteries. Chacun ses secrets, fais c’que tu veux.
Alors que ces deux personnes discutent entre elles, Deshya retourne aux côtés de Mariah qui dépose les mains sur ses hanches et sourit en voyant la jeune ‘détective’ arriver.
– Je comptais poser des questions aux suspects, tu tombes à pique !
– Je n’ai pris qu’une minute pour revenir…” lâche Deshya.
– Qu’importe. Tout se passe bien en haut ?
– Oui, rien à signaler.
– Parfait. Faisons ça vite.
Mariah veut terminer sa phrase en disant « Bien que je ne pense que cela ne servira à rien », mais elle préfère rester optimiste, surtout que Deshya veut en terminer le plus rapidement pour rejoindre Korone, ce que Mariah peut comprendre. Toutes deux se dirigent donc vers les quatre suspects, eux quatre attendant à côté de Colin et de sa femme qui discutent ensemble. Ils sont tous les six sur la scène de la pièce, leur sac à dos toujours derrière eux et s’impatientant. En voyant les deux détectives s’approcher, ils se lèvent.
– Est-ce que vous avez une piste sur ce qu’il s’est réellement passé, alors ?” demande la seule femme dans les suspects.
Mariah secoue la tête et ouvre son carnet.
– Rien n’a été trouvé sur personne. Aucune trace de poudre sur les vêtements. Avant que nous commençons à vous interroger un par un, est-ce que l’un de vous quatre souhaite avouer qu’il a jeté la brique et nous expliquer pourquoi ou doit-on deviner nous-mêmes ?
Comme prévu — et malheureusement —, aucune réponse ne sort de la bouche des suspects. Ils se regardent et celui aux cheveux noirs et blancs frappe sur sa chaise.
– Est-ce que celui qui a fait ça peut enfin l’avouer ?! J’en ai marre, moi !” crie-t-il.
La jeune femme aux cheveux roses claque de la langue et pointe du doigt le jeune homme, à peine plus âgé qu’elle.
– Tu parles, tu parles, mais si ça se trouve, c’est toi !” lâche-t-elle.
– Taisez-vous !!
L’homme plus âgé qu’eux, aux cheveux blonds décoiffés, se retourne vers les deux chamailleurs, à deux doigts de les frapper.
– Un de mes meilleurs amis est mort et vous parlez, vous vous bagarrez !! Taisez-vous !!
Il se retourne d’un coup et pointe du doigt la détective aux cheveux noirs et roses.
– Faites votre travail et vite ! Je veux qu’on attrape le connard ou la connasse qui a tué Georges !!
Il se tourne ensuite vers la fille à la robe de renard.
– Alors vite, plus vite !!
– Hey.
Mariah serre le stylo dans sa main droite et plisse un œil.
– Ceux qui agissent comme toi sont souvent ceux que je suspecte en premier.
L’homme recule la tête et le jeune aux cheveux noirs et blancs se met à rire. Mariah soupire et demande à celui aux cheveux noirs courts de descendre en premier. Il accepte silencieusement et atterrit sur les deux pieds après avoir sauté depuis la scène.
– Déclinez votre identité, expliquez ce qu’il y a dans votre sac et votre relation avec la victime, ainsi que l’endroit où vous étiez lorsque le meurtre a été commis,” lui demande Mariah.
– J’ai déjà montré ce que j’ai dans mon sac au policier qui m’a fouillé,” lui avoue le jeune homme.
– J’aimerai quand même savoir, ça peut nous indiquer qui est le coupable.
Le jeune homme ne comprend pas comment cela fonctionne, mais il décide de la croire et commence.
– Je m’appelle ‘Manny Furas’, je suis le fils unique des deux sur la scène.
Deshya cligne des yeux : elle ne l’avait même pas reconnu ! Il a coupé ses longs cheveux, ce qui le rend non-reconnaissable… Pourtant, Deshya le connaît, même si vaguement. Elle ne peut pas le rayer de la liste des suspects pour autant.
– J’étais à côté de la jeune femme que vous avez mis comme suspecte, sur la scène.
Il la pointe du pouce et continue ses explications.
– Georges était juste devant moi, mais je pouvais quand même voir le film d’où j’étais. D’toute façon, c’est moi qui ai aidé mes parents à éditer les images et tout ça, donc j’savais à quoi m’attendre.
Il dépose son sac à dos par terre et l’ouvre. C’est l’un avec des baffles à l’intérieur, ainsi qu’un design très moderne et spacieux.
– J’ai mon chargeur de téléphone, mon ordinateur portable que j’utilise pour mes cours, une souris à clef USB, le chargeur de l’ordi et un sac de bonbons que j’ai commencé à manger. Rien d’autre.
Mariah vérifie son contenu avec Deshya, mais rien ne sort de l’ordinateur. Le sac possède plusieurs poches dans tous les sens, ainsi que des lanières ajustables, mais rien de plus. Elles le remercient et le laissent ranger ses affaires qu’il vient de sortir.
– Mon fils n’aurait rien fait à Georges !
Mona s’avance vers la scène et trébuche presque, mais elle arrive à garder sa balance et se tient les mains devant son torse. Manny se retourne vers elle.
– Maman…
– Mon fils n’est pas un criminel ! De plus, il aimait beaucoup Georges, il allait même voir la fabrication des bonbons de ses magasins !!
Mona a son bras attrapé par son mari, lui demandant de rester calme pendant que la police fait son travail. Cependant, la femme refuse de laisser son fils être un suspect. Mariah va lui parler, mais Manny est plus rapide.
– J’étais derrière Georges et mon sac est assez grand pour contenir une brique, surtout que j’étais parfaitement positionné pour la jeter et briser la vitre.
Manny retourne sur la scène et soupire.
– Aussi, avant que vous me le demandiez, je me suis enfui car même si j’fais l’fort, je suis actuellement une poule mouillée. Quand la vitre s’est brisée la première fois, mes oreilles n’ont pas supporté et j’ai même lâché un cri aigu.
Sur cette explication venue de nulle part, il retourne à côté des autres suspects et attend patiemment sur sa chaise. Deshya sourit : elle le reconnaît bien. Cependant, cela ne signifie pas qu’il n’est pas le coupable de ce lancer de brique : parler beaucoup peut être vu comme une façon de paraître moins suspect que les autres. Bref, Deshya doit penser objectivement et ne pas laisser le fait qu’elle le connaisse la dériver de la vérité. Mariah demande à la fille à la capuche de renard si elle a remarqué quoi que ce soit d’étrange, mais Deshya secoue juste la tête. Mariah appelle donc la jeune femme aux cheveux roses. Elle soupire et imite Manny.
– J’étais juste à côté de mon pote, Manny, comme il l’a dit. Je m’appelle ‘Sally Corem’, j’suis la fille d’une CEO, mais ça importe peu dans ma position. Perso’, j’ai fui parce que quand la vitre a été brisé, j’ai vu le corps de la victime par terre, je suis pas assez folle pour rester simplement là. En plus, j’ai vu Manny fuir, donc je l’ai suivi inconsciemment,” explique-t-elle.
– Votre relation avec la victime ?
– Je ne le connais pas, honnêtement. Je suis ici simplement car je suis une bonne amie à Manny, donc j’connais ses vieux.
– Et votre sac ?” demande Deshya.
La jeune femme n’apprécie pas trop qu’une fille plus jeune qu’elle lui demande une telle chose, mais elle reste tranquille et le retire de son dos. Contrairement à celui de Manny, le sac à dos de Sally est bien plus simple : c’est un cartable d’école qui semble sortir des années 2010. Un petit accessoire ‘Gato Lana’ y est aussi accroché, ce qui fait sourire Deshya. Toutefois, elle retire rapidement son sourire : elle ne doit pas laisser son esprit dériver là où il ne faut pas.
– Voyons voir…” lâche Mariah.
Sally énonce tout ce qu’elle possède dans son cartable :
– Mes affaires de cours, mon plumier, des canvas et des crayons, dont des pinceaux utilisés. J’suis venue directement après mon cours particulier d’art, c’est pour ça que j’ai toujours mon cartable sur moi. Ah, j’ai ouvert mon sac pendant que le film était en train d’être proj’té car je voulais manger ma collation, elle est dans le fond, vu que j’l’ai pas fini.
Deshya remarque que le plumier est rempli et qu’une tâche se trouve au bout du cartable. Est-ce qu’elle serait le résultat d’eau ou d’un autre fluide — ou autre chose… ? Mariah ne remarque rien de particulier sur le cartable, excepté qu’il semble très résistant. Il remercie Sally et demande à l’homme plus âgé, qui doit entrer dans la trentaine, de descendre de la scène. Contrairement aux deux plus jeunes, il ne saute pas et prend son temps, bien que son expression montre une certaine impatience.
– Mon nom est ‘Antoine Darrain’, j’suis un très bon ami de Georges. Je travaille en tant qu’artiste, tout comme la p’tite ici, mais j’fais aussi des sites web pour ceux qui le veulent.
– J’suis pas une ‘p’tite’ !” crie Sally.
– Oui, on s’en fiche.
Antoine soupire et dépose son sac.
– Je regardais juste le film comme tout le monde, mais j’étais juste à côté de Georges. Quand je l’ai entendu hurler, il est tombé à mes côtés et j’avoue que ça m’a donné la frousse. J’me suis pas enfui parce que j’avais peur comme les autres, mais car j’pensais que le criminel était un d’entre ceux qui couraient, donc j’voulais juste les rattraper pour leur faire cracher la vérité. Cependant, j’ai vite été attrapé par l’autre policier musclé.
– Il parle de Dash,” pense Deshya.
– J’ai rien contre Georges non plus, c’est un pote incroyable. Enfin, c’était, maintenant qu’il est…
Antoine grince des dents, mais il se calme rapidement et montre le contenu de son sac.
– J’ai ma caméra et mes films, rien d’autre,” avoue-t-il.
Contrairement aux sacs des trois autres, celui-ci est bien plus petit, mais aurait pû contenir une brique sans souci. Deshya est surprise de voir la caméra dans le sac d’Antoine : c’est une vieille caméra qui n’est même pas digitale, d’une marque qu’elle ne connaît pas. Le sac est en mauvais état et quelques trous sont visibles ici et là, mais rien de particulier à propos de son contenu ou de son état. Mariah le remercie et demande au dernier suspect de venir devant elles. Il accepte en soupirant et saute pour atterrir sur ses deux pieds.
– J’m’appelle ‘Rei Polley’, j’habite avec mes grand-parents et j’suis un bon ami de Manny et ses parents. Je connais bien Georges aussi, c’est quelqu’un que j’apprécie beaucoup… Quand j’ai entendu le verre se briser derrière moi, j’me suis retourné, mais au même moment, j’ai entendu Georges crier…. Quand j’ai vu qu’il était mort, j’ai… Je voulais pas mourir, moi aussi. Après tout, la balle a dû me passer pas loin, vu que j’étais à côté de Manny, juste derrière Georges aussi.
Rei lâche son sac à dos et l’ouvre.
– J’ai dû prendre un certain temps pour me calmer, tout comme eux, mais la fenêtre qui s’est brisée derrière moi m’a vraiment effrayé. Il faisait trop noir pour voir quoi que ce soit, alors…
Rei soupire et secoue la tête.
– J’ai mes affaires de cours, mon plumier qui est pas trop rempli, vu que c’est le début de l’année, ma collation écrasée car je l’ai oublié, mon sac de sandwich que j’ai mangé ce midi et ma bouteille d’eau que j’ai remplie à la cuisine, pendant la fête.
Mariah vérifie son contenu et remarque que le sac à dos de Rei est assez similaire à Manny. Certains scratchs sont visibles à l’extérieur. Lorsqu’elle les touche, elle remarque que ça permet d’ouvrir le sac depuis le bas ou même les côtés, mais les trous sont minces et ne laisserait jamais une arme passée, encore moins un plumier ou une brique. Des baffles y sont aussi intégrés, ce qui est un style que Mariah ne comprend pas. Pendant qu’il range ses affaires, Deshya et Mariah discutent rapidement.
– Je n’ai vu aucune trace d’effritement de brique dans aucun des sacs,” avoue Mariah.
– Leurs sacs à dos n’ont rien de spécial non plus,” ajoute Deshya. De plus, je n’ai rien entendu d’étrange dans leurs explications.
Deshya et Mariah regardent les quatre suspects qui attendent impatiemment qu’on les laisse partir, tous sur la scène, à la droite de Colin et Mona.
– Pour finir…
Mariah plisse les yeux.
– Excepté Sally qui ne connaît pas la victime — si elle ne ment pas —, ils ne semblent avoir aucun motif pour le tuer.
Deshya approuve.
– On dirait qu’on est dans une impasse, là,” lâche-t-elle.