Chapitre 1019 — Enfer

« L’information est probablement erronée. Leylin n’a peut-être pas obtenu la cité volante de Thultanthar. Soit ça, soit il est extrêmement rusé et a prédit notre embuscade… »
Le regard perçant de Mystra traversa le vide, observant la scène qui se déroulait dans le monde.

Si Leylin avait été là, il aurait certainement eu des sueurs froides.
S’il avait réellement utilisé la cité flottante pour attaquer la colonne vertébrale de ces églises, les dieux qui l’attendaient lui auraient montré pourquoi les fleurs étaient teintes en rouge.

C’étaient deux dieux majeurs !
Leylin pouvait leur résister sur le plan matériel primordial, mais dans les plans extérieurs, où il n’existait plus aucune restriction, il n’aurait eu aucune chance de riposter.

« Où as-tu trouvé cette information ? » demanda Tyr, brisant son silence.

« Un de mes fidèles a rencontré un diable lors de son voyage et a obtenu de lui cette information. Cependant, le diable était déjà mort à mon arrivée… et son âme avait également disparu… »

Une lueur de doute passa sur le visage de Mystra.
« Je sens une aura extrêmement agaçante et sinistre, plus vile que les trois monarques des profondeurs abyssales. C’est… une existence mystérieuse… »

« Plus sinistre que le mal lui-même ? » Tyr frissonna, comme si un souvenir interdit remontait à la surface.
« Tu devrais vérifier les scellés. Éliminer toute contamination dans la zone si nécessaire… »

« Tu veux dire… » Mystra inspira profondément et prononça le mot tabou des temps anciens :
« Mag… »

Une lumière de téléportation éclata tandis que Leylin émergeait d’une distorsion spatiale.
Un instant plus tôt, la voix de la puce IA avait résonné :

[Conditions remplies. Téléportation instantanée activée.]

« La téléportation instantanée était effectivement l’option la plus sûre.
Je ne crains personne sur le monde principal, mais je ne peux pas en être certain dans les plans extérieurs.
Pour l’instant, je suis probablement dans… »

Il observa autour de lui.
Un ciel cramoisi où filaient des météores, une terre désolée et calcinée jonchée de roches noircies, quelques collines lointaines rompant l’horizon.
Un air lourd, chargé de malveillance… et de terreur.
Des ruisseaux de sang serpentaient à travers les fissures du sol.

« Huuu… On dirait que… » murmura-t-il. Puis ses yeux se plissèrent.
« Baator. Les Neuf Enfers. Je savais que ça me semblait familier ! »

Leylin s’étira paresseusement avant d’ordonner :
« Puce IA, effectue un scan. »

[Bip ! Mission établie. Début de l’analyse…]
[Environnement scanné. Localisation actuelle : Avernus, premier niveau de Baator.]
[Analyse des lois régionales en cours…]

Les données apparurent rapidement :

Gravité normale.

Écoulement du temps normal.

Espace illimité : les neuf niveaux de l’Enfer s’étendent à l’infini mais restent à une distance fixe de l’Abîme et de ses niveaux inférieurs.

Forme divine : seule une puissance divine d’au moins un dieu mineur peut altérer la structure des Neuf Enfers.

Aucune affinité élémentaire : tous les éléments sont équilibrés.

Alignement Loyal Mauvais : tout être Chaotique ou Bon est affaibli et attaqué par les diables ; les êtres Loyaux Mauvais bénéficient d’un léger bonus.

« C’est bien le territoire des diables. »
Leylin inspira profondément.
Il ressentait une étrange harmonie avec Baator, peut-être en raison de l’essence de Belzébuth qu’il avait dévorée.
Son tempérament s’alignait parfaitement sur les lois de l’Enfer… et cet endroit pouvait porter le poids de ses ambitions.

« Les demi-dieux peuvent voyager entre les plans. Je pourrais retourner sur le plan matériel, mais puisque je suis déjà ici… »
Il se caressa le menton, son regard brillant.
« De toute façon, l’île de Debanks est isolée et restera hors de danger. Je peux gérer mes fidèles depuis ici… Et puis, j’avais prévu de visiter Baator. Autant en profiter… »

Baator, les Neuf Enfers , était la quintessence du mal loyal : cruauté froide, complots méticuleux, hiérarchie impitoyable.
C’était la demeure de diables barbus, cornes, de glace, barbelés, damnés des fosses, mais aussi de créatures comme les chats et chiens des Enfers, kytons, mangeurs de rêves, bêtes démoniaques et même certains humains.
Tous obéissaient à un système hiérarchique où le rang se gagnait par intrigue et par force.

Baator comptait neuf niveaux.
La légende disait qu’il avait autrefois fait partie de l’Abîme, avant de s’en séparer.
Son souverain : Asmodée .

Bien qu’Asmodée soit reconnu comme le Suprême des Neuf Enfers, il ne contrôlait directement que Nessos , le neuvième niveau, une plaine déchirée de canyons plus profonds que les fosses océaniques.
Son autorité sur les huit autres niveaux était plus symbolique que réelle, chaque Archidiable étant d’un rang comparable au sien.

Asmodée avait gagné son trône par un enchaînement de guerres et de ruses, ralliant des armées de démons des fosses et de diables majeurs, et en s’assurant le soutien (forcé) des seigneurs des autres niveaux.
Mais les six Archidiables restants n’avaient jamais cessé de manigancer, maintenant un équilibre fragile.

Jusqu’à aujourd’hui.
Car désormais, un nouvel acteur — Leylin — entrait en scène.

« Le deuxième niveau, Dis… je connais cet endroit. Le fief de Belzébuth. Il doit se cacher là, en convalescence… »
Privé d’une grande partie de sa divinité et de sa force, Belzébuth récupérait lentement, protégé par la volonté de Baator et ses richesses accumulées.

Mais Leylin avait un objectif clair : le dévorer entièrement et prendre sa place.

Le troisième niveau, Minauros, était un marais fétide gouverné par Mammon, Seigneur de l’Avarice. La légende disait que quiconque y succombait à la cupidité disparaissait, englouti dans la vase.

« Les autres niveaux ont aussi leurs maîtres… » Leylin plissa les yeux.
« Huit Archidiables, plus quelques dieux et damnés du Premier Enfer… Les figures les plus puissantes de tout Baator… »

Il savait que chacun de ces adversaires était un stratège redoutable.
Mais au lieu de le décourager, cette perspective fit naître en lui un désir brûlant.

« Je veux vraiment… je veux vraiment tous les tuer… »
Un éclat cruel passa dans son regard.
Les obstacles ne l’avaient jamais arrêté.
Ils ne faisaient que nourrir son ambition.