Livre 7, Chapitre 37 – L’usine céleste

Ce niveau du monde souterrain était chaud comme l’enfer.

Cinq personnages se frayaient un chemin le long des coulées de lave, se faufilant entre d’immenses et spectaculaires monuments naturels.

Les ruines ici étaient différentes de celles d’en haut. Elles étaient encore plus étranges, construites en forme d’ovale, de carré, de pyramide et de cône. Chaque coin, chaque ligne, chaque courbe était extrêmement précis. Chaque face et chaque facette étaient parfaites. Même les outils de mesure les plus précis n’auraient trouvé aucun écart.

Avaient-ils été laissés ici par les dieux ?

« Qu’est-ce que c’est que tout ça ? Ils me rappellent les temples élyséens… »

« Vous avez raison. Il y a un certain nombre de similitudes. Mais la principale différence est leur fonction. D’après leur apparence, il semble que notre supposition était correcte – cet endroit a quelque chose à voir avec les dieux. »

Phoenix, Bruno, Natessa et deux autres personnes avaient participé à cette excursion. L’un d’entre eux était l’aîné de la famille Cloude, Oren. L’autre était l’un des anciens commandants en chef de Skycloud, Cosmo Thane.

Depuis que Cloudhawk les avaient laissés ici, le groupe avait découvert et collectionné un certain nombre de peintures murales. Celles-ci représentaient des secrets d’un passé lointain, qui les avaient conduits jusqu’à cet endroit caché si profondément sous terre.

S’ils ne se trompaient pas, il s’agissait d’un bunker secret. La topographie semblait ancienne et érodée, peut-être vieille de plusieurs dizaines de milliers d’années. Ses créateurs originaux étaient probablement des dieux, mais la question la plus pressante était de savoir pourquoi l’avoir construit.

Le groupe se tenait devant une structure suspendue dans les airs, la regardant avec des expressions d’émerveillement et de stupéfaction. Cependant, au fond de leur esprit, ils se demandaient si, après avoir exploré pendant si longtemps, ils seraient capables de retrouver leur chemin.

Il faisait chaud comme dans un four, l’air était si brûlant qu’il était difficile de respirer. Les gens ordinaires n’y survivraient pas. En fait, des cinq explorateurs, seul Phoenix ne souffrait pas de la chaleur. Heureusement, Natessa aperçut une entrée dans le temple sphérique et l’indiqua aux autres. Un choix s’offrait à eux.

Premièrement, ils pouvaient entrer seuls. Deuxièmement, ils pouvaient retourner au camp de base et demander aux autres de venir avec eux.

« Je me dis que puisqu’il n’y a pas d’opposition, il n’y a pas d’urgence. On ne sait pas si c’est sûr ». Bruno fit part de ses réflexions. « S’il y a une chose que nous avons, c’est le temps. Nous devrions trouver notre chemin, rassembler une équipe et élaborer un plan de retour. »

« Facile à dire pour Maître Bruno », grommela Oren. « Nous sommes à au moins cent mille mètres sous la surface. Il y a des coulées de lave et des tubes volcaniques remplis d’air brûlant. Nous ne pouvons pas nous contenter de dire “rentrons”. Nous devons attendre notre heure. »

« Si j’avais encore ma dague, ce ne serait pas si difficile. »

« Qu’est-ce que c’est que ces bêtises, Bruno ? » Phoenix se renfrogna avec dédain. « Nous sommes ici. Tu proposes de repartir les mains vides ? J’y vais. Si tu as peur, tu peux trouver un endroit où te cacher. »

Bruno se frotta le nez et gloussa d’impuissance. Les deux maîtres chasseurs de démons étaient très différents. Il était patient et difficile à mettre en colère, tandis que Phoenix était provocatrice et enflammée. À ses yeux, peu importaient les dangers auxquels ils étaient confrontés. Elle s’en chargerait avec ses poings, sans se soucier des conséquences.

Bruno, Natessa et Cosmo se regardèrent. Ils hésitaient encore à entrer, mais leurs pensées sans paroles furent interrompues lorsque le sol se mit à trembler. Des panaches de vapeurs toxiques s’échappèrent des fissures et une lumière rouge et furieuse se répandit.

« Le volcan s’est-il réveillé ? »

La zone étant instable, une éruption n’était pas à exclure, mais ils découvrirent bientôt que ce n’était pas si simple. Plusieurs silhouettes émergèrent des cendres chaudes et du magma incandescent.

Créatures. Des choses capables de vivre dans la roche en mouvement.

Elles étaient toutes couverts de cendres, et en s’envolant de la lave, elles laissaient des traînées de fumée. Leurs corps ressemblaient à des boules de magma modelées en forme de chauve-souris, sauf qu’elles étaient aussi grandes que des dragons.

Cinq visages se raidirent à cette vue.

Encore ? Il y avait toujours une nouvelle terreur qui se cachait à chaque coin de rue ! Mais cette fois-ci, elles étaient nombreuses, au moins un millier.

« Bon sang, nous sommes encerclés. Nous n’avons pas le choix – vite, dans le Temple ! » Même le calme stoïque de Bruno fut fissuré par la scène. Il leur cria d’avancer.

Des oiseaux de magma s’abattirent sur eux dans un nuage de fumée et de cendres. Leur vision devint trouble et chaotique. Une fois à portée, les oiseaux ouvrirent leurs mâchoires et vomirent un mélange de fumée brûlante, de poussière toxique et de magma. C’était un cocktail mortel.

Une ou deux créatures de ce type n’auraient pas posé de problème, mais un millier ? Il y en avait beaucoup trop, et les humains étaient trop peu nombreux. Leur seule option était de fuir vers le Temple et de se mettre à l’abri.

Bruno avait sa lame de foudre en main. D’un geste du bras, il fit jaillir un éclair. Plusieurs oiseaux de magma furent découpés, mais il n’y avait ni sang ni viande. Au contraire, leurs blessures crachaient du magma et se ressoudaient.

Les frapper ne servait à rien. Il fallait les détruire complètement.

Pris dans cette position, Phoenix se sentait particulièrement mal à l’aise. Le feu était son domaine, mais ces bêtes étaient résistantes. Ses attaques ne feraient aucun dégât à moins qu’elle ne les gonfle à des hauteurs incroyables. Elles risquaient plutôt d’augmenter la puissance de ces monstres !

« Venez avec moi. »

Natessa invoqua un tourbillon, soufflant la fumée qui leur cachait la vue. Elle fut la première à franchir les oiseaux, à sauter dans les airs et à se diriger vers le Temple.

Phoenix fut la première à réagir. Elle écarta les bras et ceux-ci s’enflammèrent, devenant une paire d’ailes fumantes. Les attaques venant de tous les côtés furent réduites en cendres avant même d’avoir pu s’approcher. Elle entraîna les autres dans le sillage de Natessa. Ils se frayèrent rapidement un chemin jusqu’à l’intérieur de la structure.

Les oiseaux de magma tournèrent longtemps en rond, mais semblaient éprouver une peur instinctive. Ils n’essayèrent pas de se frayer un chemin à l’intérieur. Ils finirent par s’enfoncer dans les grottes et les fissures et le calme revint.

Les voilà. Bruno regarda autour de lui, mal à l’aise et incertain. « Qu’est-ce que c’est que cet endroit ? »

Se serrant les uns contre les autres, les explorateurs regardèrent autour d’eux. Ils se trouvaient dans une chambre blanche, entourée de murs.

« Il ne devrait pas y avoir qu’une seule pièce dans un bâtiment aussi grand. » Bruno se tourna vers les autres. « Regardons autour de nous. Il y a probablement une porte cachée. »

Phoenix se dirigea vers l’un des murs et appuya sa paume sur sa surface. Elle trouva quelque chose presque immédiatement. « Ces murs sont faits d’un matériau spécial. Il résonne avec le pouvoir mental. Voyons voir… »

Phoenix se tourna vers l’extérieur avec son esprit. Bien sûr, le mur commença à entrer en résonance avec elle et à réagir. D’un seul coup, les murs blancs laiteux devinrent translucides et malléables, presque comme de la gelée.

Il s’agissait d’un portail de particules. Le portail s’ouvrait et se fermait grâce à l’énergie mentale. Ce qui, un instant auparavant, était un mur solide, devenait une connexion lâche de particules, suffisamment petite pour que quelqu’un puisse la traverser. Lorsque le portail était fermé, ces particules se resserraient à nouveau et le mur se reformait.

Les portes à particules étaient à la fois pratiques et efficaces pour se défendre. Les énergies mentales de chaque créature étaient différentes. Il était possible de régler la porte pour qu’elle s’ouvre en réaction à une fréquence spécifique, bloquant ainsi toute personne ne possédant pas la bonne résonance. De plus, celui qui contrôlait la porte à particules pouvait arrêter ou tuer toute personne qui la traversait.

Phoenix n’aurait pas dû pouvoir ouvrir la porte à particules, mais il semblait qu’aucune restriction n’ait été imposée. Toute personne dotée des pouvoirs mentaux nécessaires pouvait l’activer.

Phoenix tendit la main et la fit passer à travers. Le mur ondula comme de l’eau.

« Bien, nous pouvons entrer par là. Allons-y ! »

Le groupe passa sans encombre, chacun à son tour. Rien ne les arrêta et ils pénétrèrent dans un long couloir de l’autre côté. Au bout, une autre porte à particule menait à une chambre.

La chambre était le cœur du bâtiment. Lorsqu’ils y pénétrèrent, Phoenix et ses compatriotes furent stupéfaits par ce qu’ils y trouvèrent.

Il était rempli d’une technologie qu’ils ne pouvaient pas comprendre. La lumière, qui agissait comme un liquide, tissait des motifs dans l’air. Ils étaient complexes et étendus, comme les racines d’un arbre brillant ou des tuyaux industriels. Cette dernière comparaison était plus appropriée, car ils semblaient être impliqués dans la fabrication de quelque chose.

« Regardez ! Qu’est-ce que c’est ? »

Bruno vit quelque chose qu’il eut du mal à comprendre. Même sa voix trembla. Alors que les autres regardaient fixement, des sortes de bulles se formèrent dans la lumière. Elles se déplaçaient sans les contraintes de la gravité et restaient suspendues dans l’air devant les spectateurs choqués. Elles ressemblaient à des œufs, avec quelque chose à l’intérieur. Ces minuscules “embryons” étaient… des armures ?

Ils étaient de couleurs et de complexités différentes, mais leurs styles étaient toutes similaires. La lumière continuait à se déverser sur eux, tandis que les combinaisons se formaient lentement. On aurait dit une sorte de chaîne de montage, une sorte de tissage de tapisseries. C’était incroyable à voir.

« C’est… c’est une armure de dieu ! » Tout le monde regardait fixement, les yeux écarquillés et sans voix.

Pourquoi une armure divine était-elle produite ici ? S’agissait-il d’une sorte d’usine ? Si c’était le cas, cela expliquerait la présence de tous ces bâtiments et leur raison d’être.