Au moment où il descendit du bateau, Leylin vit quelqu’un d’inattendu. Le gardien du manoir, Léon, était arrivé avant lui. Il était évident qu’il attendait depuis longtemps, et il y avait même des gouttes d’eau sur ses vêtements formées par la brume. « Jeune maître, jeune maître ! Le maître est de retour, et il a dit que vous deviez le rejoindre une fois sur le rivage !”»
« Père est revenu ? Bien, je vais le voir tout de suite. Prends soin des choses ici, ainsi que du butin de guerre et des captifs…» Comparé à la dernière attaque où il se faufilait, Leylin se pavanait maintenant avec audace. Il espérait même intimider ceux qui nourrissaient des pensées néfastes avec cette victoire.
Cependant, le seul navire entrant dans le port était le propre navire de guerre de Leylin. Le Tigre Noir lui-même avait disparu avec sa cousine Isabel, accompagné d’une partie des pirates.
Seuls quelques pirates malchanceux se trouvaient ici, en plus des quelques butins de guerre. Bien sûr, il y avait aussi l’ex-capitaine, Steve.
« Compris, jeune maître ! » Léon s’inclina très bas. Les blessures des soldats derrière Leylin montraient clairement que la bataille avait été très intense.
« Jacob, va chercher Steve. Allons-y ! » Leylin monta lui-même dans la calèche, suivi par Jacob et leur prisonnier. Steve avait un sac noir sur la tête, car Leylin ne confiait pas un prisonnier de si haut rang à ses subordonnés. S’il le faisait, il y avait un risque que quelque chose se passe mal.
« Père… » Au moment où la calèche arriva au manoir, Leylin vit ses parents actuels, le Baron Jonas et Lady Sarah. Ils attendaient à la porte du manoir, les yeux pleins d’inquiétude.
Leylin descendit immédiatement du carrosse et fut attiré dans les bras de Maîtresse Sarah, « Oh, mon pauvre enfant…» Il était évident que même si elle avait une idée de ce que Leylin avait fait, Maîtresse Sarah était toujours inquiète.
« C’est bien que tu ailles bien ! » Le Baron Jonas garda son calme de noble, bien qu’il y ait un soupçon de joie dans ses yeux.
Leylin regarda son père, puis son mentor Ernest. Ce dernier lui adressa un regard d’approbation encourageant et resserra sa robe de sorcier autour de lui, se dissimulant dans la foule. Les sorciers n’étaient pas très doués pour s’exprimer.
A ce moment, Leylin vit de nombreuses troupes d’élite derrière le Baron Jonas, toutes en armure. Leurs regards froids lui donnèrent un sentiment de danger.
« Guerriers de rang 5 ! Et ils sont si nombreux. Père, où les as-tu trouvés ? » Leylin pouvait lire le respect dans les yeux des combattants, en particulier de leur chef, mais il n’y avait pas la confiance et l’inquiétude que leurs propres hommes avaient. Ces troupes étaient de toute évidence des renforts provenant d’une source extérieure.
Cependant, il s’agissait d’une question triviale.
« Mon enfant, ne sois plus aussi imprudent à l’avenir. Il n’est pas digne d’un noble de diriger des troupes seul…» Jonas réprimanda Leylin. Si son seul successeur devait mourir dans cette bataille, il ne pourrait pas le supporter.
« Au fait, Père, permettez-moi de montrer mon butin ainsi que les prisonniers…» Leylin frappa dans ses mains, et Jacob lui-même fit monter Steve.
Bien que ses membres aient déjà été coupés et qu’il soit pratiquement infirme sans l’aide de sorts divins de haut niveau, il devait tout de même être surveillé.
“Oh ?” Les sourcils du Baron Jonas se levèrent, ne réagissant pas du tout aux captifs et aux lames de pacotille que Leylin montrait.
Selon lui, Leylin avait simplement éliminé une petite vague de pirates, peut-être moins de 20 au total. Il s’agissait probablement de pêcheurs qui avaient perdu leur désir de richesse, c’est pourquoi il ne leur accordait pas beaucoup d’attention.
Mais alors Leylin souleva le sac noir au-dessus de la tête de Steve, exposant son visage malicieux à la lumière du jour. En raison de la perte de sang, son visage avait pâli, ce qui ne réduisait en rien la peur causée par la vue de son visage. Même Maîtresse Sarah cria, reculant de quelques pas sous le choc et le dégoût.
« Leylin, tu as effrayé ta mère. Tu ne devrais pas salir les yeux d’une noble avec un captif aussi bas… » Le Baron Jonas était né en tant que noble d’une famille militaire, et il ne se sentit pas mal à l’aise face à cette situation. Cependant, ses sourcils se froncèrent légèrement.
Jonas ne comprenait pas pourquoi Leylin avait amené un captif dégoûtant avec de la sueur, du sang et de graves blessures devant lui. Ce qu’il ne vit pas, c’est que les guerriers d’élite derrière lui avaient maintenant un regard différent.
Bien que Steve soit estropié, les callosités épaisses sur son corps et ses muscles fermes se mêlaient à l’aura puissante d’un combattant de haut rang qui ne s’était pas encore dissipée. Ils se doutaient bien de ce qu’il s’agissait.
« Voici Steve, le chef des Tigres Noirs. » Leylin dit simplement, mais les yeux du Baron Jonas s’écarquillèrent.
« Dieux ! » Le Baron Jonas ne se souciait plus de la crasse sur le corps de Steve et s’approcha de lui, écartant les cheveux en désordre sur son front pour le jauger attentivement.
« En effet, c’est lui. Voici le chef des Tigres noirs, le combattant de rang 10 Steve ! De nombreuses chambres de commerce ont mis en place une prime de 500 pièces d’or pour sa capture ! L’une des primes se trouve même dans notre port, je ne pouvais pas me tromper… »
Un long moment plus tard, le baron soupira et fixa son fils avec une expression compliquée. Cet enfant semblait toujours le surprendre. Son expédition aurait même pu lui valoir d’être tué par des assassins si Leylin n’avait pas demandé à Ernest de venir l’aider.
Il demanda tout de même avec incrédulité : « Puisque Steve est ici, où sont les Tigres Noirs ? »
« Ils ont été anéantis » répondit Leylin avec légèreté. Jacob et les soldats derrière se gonflèrent la poitrine de fierté, fixant durement les guerriers d’élite derrière le Baron.
« Bien ! Il semblerait que nous devions avoir une discussion sérieuse. » Le Baron Jonas avait une expression compliquée sur le visage.
Après le retour de Leylin, les rires et la gaieté revinrent au manoir une fois de plus. Même l’intendant Léon, qui avait toujours l’air sombre, afficha un rare sourire en demandant à Clara et Claire de préparer le banquet.
Pendant cette période de préparation, le baron resta dans sa salle d’étude, ayant chassé les servantes pour ne laisser derrière lui que Leylin et Ernest.
« Les informations que tu m’as fournies m’ont été très utiles. Même si j’ai dû payer un prix énorme, je m’occuperai des problèmes avec l’église de la connaissance…» La voix du Baron Jonas était rauque et basse. Leylin remarqua astucieusement ses yeux injectés de sang et les mèches de cheveux blancs près de ses oreilles.
Il était évident que le fait d’être opprimé par une personne de haut statut comme le Marquis Louis laissa le baron stressé et vexé. Bien qu’ils puissent maintenant agir plus librement, le traumatisme causé par les actions du marquis ne s’est pas encore dissipé.
« Ce n’est que mon devoir. Après tout, je fais partie de la Famille Faulen ! » Leylin semblait très humble.
Le Baron Jonas hocha la tête intérieurement, « Puisque nous savons qui est notre adversaire, les choses seront plus faciles. Bien que j’aie subi quelques tentatives d’assassinat lors de mon voyage sur le continent, je suis heureusement indemne. J’ai même pu voir le comte Griffith ! »
« Le Comte Griffith, le seigneur de guerre de cet endroit ? » Les yeux de Leylin pétillèrent, se souvenant immédiatement de lui. Il semblait que le Baron Jonas avait payé un prix, cédant une part des profits pour acquérir un certain soutien de la part de la noblesse régionale.
« Ils ont envoyé un groupe de cavaliers avec de nombreux combattants de rang 5. Le chef est de rang 9, ce qui sera suffisant pour assurer la sécurité de notre manoir… » Le Baron Jonas observa Leylin avec un regard désolé.
Il pensait que la tentative d’assassinat de son fils était due au fait qu’il avait pris la plupart des élites. Sans cela, il n’aurait pas été forcé de se battre contre un terrible groupe de pirates.
Il avait essayé de laisser derrière lui Ernest et Jacob, qui étaient tous deux des professionnels chargés de protéger le port. Cependant, compter sur la protection des autres n’était pas une solution à long terme. Leylin fronça légèrement les sourcils.
Le Baron Jonas vit tout cela, et cela le fit hocher encore plus la tête. Cet enfant a déjà assez de sagesse pour diriger notre famille.
« Bien, alors, comment penses tu que Steve devrait être traité ? Après tout, c’est ton prisonnier…» Le Baron Jonas gloussa, voulant voir comment Leylin allait agir.
« Envoyons un messager pour négocier, puis rendons-le au Marquis Louis. En échange, nous pourrons établir un traité de paix. Que pensez-vous de cela ? Notre famille est assez faible après tout…» Leylin ne se retint pas de parler.
« Bien ! » Le Baron Jonas était sur le point d’applaudir son enfant. Il n’avait certainement pas été aussi rationnel à un tel âge ; il se serait plaint de sa vengeance après l’humiliation.
En voyant cette capacité à abandonner et à maintenir un profil bas, le Baron Jonas confierait la famille à Leylin même s’il était inutile dans d’autres domaines.
« Qui penses-tu être le plus approprié ? »
« L’évêque Tapris de l’église de la connaissance. C’est un ami des deux camps, il ferait donc un bon messager. » Leylin insista sur le fait qu’il s’agissait d’un ‘ami’, et le Baron Jonas comprit évidemment ce que Leylin sous-entendait.
Il marmonna en lui-même : « C’est un bon choix… »
Avec son statut d’évêque de l’église de la connaissance, Tapris était le médiateur le plus approprié. Il pouvait même augmenter le prestige du dieu de la connaissance de cette façon, alors il ne les rejetterait probablement pas.
Une fois que tout fut réglé, Leylin marmonna : « Père, j’ai encore des choses à dire à Maître Ernest…» sans pouvoir s’empêcher de sourire.