Inconscient, Song Shuhang fit un rêve. Cette fois, il n’assista pas à l’existence passée de quelqu’un d’autre. C’était sa propre vie.
Le songe débuta quand il était enfant et progressa lentement, comme un film au ralenti, sans rien laisser de côté. De nombreux petits souvenirs qu’il avait oubliés resurgirent. Mais certaines choses qu’il s’était efforcé de bannir de sa mémoire refirent surface. Ses sentiments étaient troubles.
Dans son coma, il lui sembla entendre la Sœur Aînée Ye crier. Il voulait se réveiller le plus tôt possible, mais il venait juste d’atteindre la deuxième année du collège. Il lui restait encore la moitié de sa vie à écouler avant d’atteindre l’université. Il n’était pas près d’émerger.
C’est la faute de cette foutue technique d’évaluation ! pensa-t-il.
Même s’il avait éprouvé une douleur inimaginable et avait failli mourir, il avait tout de même réussi à obtenir de bons résultats, notamment en apprenant plusieurs méthodes pour résoudre le problème lié à son énergie mentale. Dès qu’il reviendrait à lui, il essayerait d’amasser la lumière vertueuse. Et pour ce faire, il devait apprendre quelque chose comme un Soutra du Voeu du Bodhisattva Kishitigarbha pour conduire les âmes des morts sur le bon chemin. Quelle chance s’il pouvait à nouveau rencontrer le moine venu d’Occident. Sa lumière vertueuse avait été si dense qu’elle en avait été presque palpable. Il semblait avoir dû guider des dizaines de milliers d’âmes ! Ou peut-être 100.000, déjà, faisant ainsi subir un changement qualitatif à la lueur l’entourant !
Bien qu’il n’était qu’au Premier Rang et à la Porte du Dragon, le moine avait déjà purifié plusieurs dizaines de milliers de fantômes rancuniers. Ayant une lumière vertueuse si puissante, il devait être très expérimenté en la matière.
Si je peux le rencontrer à nouveau, je pourrai peut-être lui demander conseil sur la façon de m’occuper de ces fantômes pleins de ressentiment.
Alors qu’il y réfléchissait, Song Shuhang sentit soudain son corps devenir plus léger.
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Cité du Temps, bibliothèque.
Les larmes se mirent à couler sur le visage de la Sœur Aînée Ye. « Snif, snif, snif ! Écoutez ! Je ne pleure pas parce que vous avez été gravement blessé ! Snif, snif, snif ! Je pleure seulement parce que je me sens triste ! Je ne veux pas pleurer, snif, snif, snif ! Mais je ne peux tout simplement pas m’arrêter ! »
Elle chouinait tout en utilisant la technique de guérison sur le corps de l’Esprit Fantôme. La lueur inondait encore et encore l’ectoplasme, essayant de stabiliser ses blessures. Mais dès qu’elle s’arrêtait, les plaies se rouvraient.
– « Combien de temps faudra-t-il pour que ces blessures guérissent ? Vont-elles continuer à s’ouvrir encore et encore ? Snif, snif, snif ! »
Et justement, la chair se déchira à nouveau ! Alors même que la technique de guérison était toujours active… Son état devenait de plus en plus grave. L’intérieur était toujours d’un noir absolu, comme s’il y avait un trou noir sans fond caché en dessous.
– « Qu’est-ce qui se passe ? » Ye Si investit plus d’énergie dans la technique, mais les plaies ne montraient aucun signe de fermeture. Est-il possible qu’il n’y ait aucun moyen de guérir ces blessures ? « Que dois-je faire ? Dois-je demander de l’aide à mon professeur ? »
Mais à ce moment précis, l’Esprit Fantôme cessa de crier. Ses blessures étaient toujours là. Pourtant, il ne souffrait plus. Il descendit faiblement et baissa la tête, flottant sur le dos de Song Shuhang.
L’étudiant inconscient se calma également.
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Ye Si demanda à voix basse : « Vous n’avez plus mal ? »
L’Esprit Fantôme hocha doucement la tête.
Curieuse, elle tendit le doigt et tenta de toucher le dos dévasté de l’être éthéré.
Mais ce dernier se tourna rapidement sur le côté. Son sens de la vue était différent de celui d’un être humain. Il pouvait voir tout ce qui se passait autour de lui et n’avait aucun angle mort. Par conséquent, il remarqua facilement le geste de la Sœur Aînée Ye.
– « Est-ce que ça fera mal si j’y touche ? »
L’Esprit Fantôme hocha la tête. Puis il pensa soudain à quelque chose.
Il fila vers Ye Si la Pensive et tendit un doigt. Il lui toucha la main.
Elle était confuse. Toutefois, dans l’instant, une pensée lui fut transmise. « Oh ? Vous voulez quitter la Cité du Temps et le Pavillon de l’Eau Cristalline ? »
Il acquiesça.
– « Où comptez-vous aller après avoir quitté le Pavillon ? »
Je veux retourner sur Terre, continua-t-il en pensées.
– « Le corps de Shuhang est toujours là. Est-ce que vous pouvez vraiment rentrer seul ? »
Ça ira. J’obéis à un ordre du corps principal. Je dois chercher une méthode pour résoudre son problème d’énergie mentale excessive.
– « Très bien. Je vais vous dire comment quitter cet endroit. »
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La Sœur Aînée Ye expliqua à l’Esprit Fantôme comment quitter la Cité du Temps et le Pavillon de l’Eau Cristalline. Il flotta donc à travers la ville et réussit à partir. Comme il n’était qu’une âme, il était extrêmement rapide, plusieurs fois plus qu’un cultivateur de Quatrième Rang chevauchant une Épée volante. De plus, il pouvait traverser des objets, comme des astéroïdes.
En seulement une demi-journée, il revint sur Terre, puis en Chine. Très prudent, il n’attira l’attention d’aucun pratiquant. Il se rendit d’abord dans la maison de Song Shuhang, rue Baijing, Wenzhou.
Après s’être assuré que ses parents allaient bien, il s’envola vers un endroit proche, dans la montagne Niuding. Là-bas, une équipe préparait les accessoires de scène et d’autres choses nécessaires au film qu’ils allaient tourner. Il s’agissait des collègues de l’ami du professeur Smith. À première vue, ils n’avaient pas encore commencé.
Flottant au-dessus de l’équipe pendant un moment, l’Esprit Fantôme décida de partir. Il reviendrait une fois que l’équipe aurait commencé le tournage du film.
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Ensuite, l’Esprit Fantôme envisagea de chercher Yu Jiaojiao pour voir si elle avait réussi à capturer l’auteur qui écrivait des romans intéressants. Cependant, il était incapable de ressentir son aura. De plus, il n’avait pas ses coordonnées.
Song Shuhang avait enregistré le numéro de téléphone portable de Yu Jiaojiao dans son propre téléphone. Par conséquent, il suffisait d’attendre son réveil pour contacter la femme-poisson. Ainsi, le spectre mit temporairement de côté l’idée de la retrouver.
Dans ce cas, il est maintenant temps d’exécuter l’ordre du corps principal !
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L’Esprit Fantôme n’arrêtait pas de flotter dans le ciel.
Il était d’abord revenu sur Terre pour retrouver le moine occidental !
Inconscient, Song Shuhang avait pensé qu’il serait utile de partir à sa recherche pour lui demander des conseils sur la façon de conduire sur le bon chemin les fantômes rancuniers. Pour une raison inconnue, l’Esprit Fantôme avait pris la pensée pour un ordre. Voilà pourquoi il avait quitté le Pavillon de l’Eau Cristalline et était revenu sur Terre. Après avoir parcouru des milliers de kilomètres, il se lançait enfin à la recherche de ce moine occidental.
Cependant, il n’avait aucune idée de sa position actuelle. Il n’avait pas ses coordonnées et la Chine était si vaste… Il ne savait pas par où commencer.
L’Esprit Fantôme se remémora certaines choses. Son esprit et ses organes sensoriels étaient liés à ceux de Song Shuhang. Tant qu’il avait sa permission, leurs souvenirs étaient partagés. Dans sa mémoire, le moine avait été arrêté par la police et jeté dans la prison de Jiangnan.
Dois-je aller à la prison de Jiangnan pour y jeter un œil ? Peut-être que je peux y trouver des indices.
Sur ce, il vola vers la gare ferroviaire, envisageant d’entrer clandestinement dans un train.
Mais le prochain train à destination de Jiangnan sera là dans trois heures. Je vais devoir attendre si longtemps ! Dois-je plutôt prendre l’avion ?
Alors, un sentiment d’épuisement extrême le secoua.
Ce jour-là, il avait rejoint la Terre directement depuis l’espace et avait passé beaucoup de temps à flotter dans la ville de Wenzhou. En conséquence, il était épuisé. Ce n’était donc pas une mauvaise idée de se reposer un peu et de récupérer ses forces. Son domaine était le même que celui de Shuhang, le Deuxième Rang et le Troisième Dantian. Par conséquent, ce trajet avait été très éprouvant.
Le mieux était de profiter de ces trois heures pour se reposer. Les blessures dans son dos étaient toujours là, mais elles ne lui faisaient pas mal. Il ne savait pas combien de temps il lui faudrait pour guérir.
L’Esprit Fantôme flotta paisiblement au-dessus du quai. Il dormait.
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À ce moment précis, le moine occidental se trouvait en gare, dans la région de Jiangnan.
Cela faisait déjà plusieurs jours qu’il avait été libéré de prison. En fait, il aurait pu la quitter depuis longtemps, mais il y était resté pour convertir les criminels et sauver les âmes blessées, prolongeant ainsi son séjour.
Il avait réussi à Sauter la Porte du Dragon et était alors un pratiquant de Deuxième Rang. Son corps était recouvert d’une épaisse lumière vertueuse qui aurait fait envie à l’étudiant. Le cap qui effrayait la plupart des cultivateurs ordinaires de Premier Rang n’avait rien eu de spécial pour lui. Il n’avait rencontré aucun obstacle et avait pu facilement franchir la porte et percer ! Après quoi, il avait décidé de quitter la prison.
À son départ, la personne la plus heureuse avait sûrement été Zhao Bulu, son disciple nouvellement nommé. Zhao Bulu était un membre externe de la Secte du Sabre Lunaire qui avait volé un colis express de Sima Jiang et avait eu les jambes cassées après avoir été attrapé. En prison, le pauvre avait rencontré le moine. Il avait été conduit de force sur le bon chemin, transformé en moine, et six brûlures avaient été laissées sur sa tête. De plus, il avait quotidiennement dû discuter de textes religieux avec son tortionnaire. Mais le pire… Déjà que la nourriture en prison était ignoble, son nouveau maître avait fait en sorte de ne lui laisser accès qu’à des plats végétariens !
Zhao Bulu avait pensé à plusieurs reprises au suicide lors de son incarcération.
Ceci étant dit, il avait été la personne la plus heureuse au monde lorsqu’il avait appris que le moine allait quitter la prison. Bien sûr, si ce dernier n’avait pas ajouté qu’il viendrait le chercher à sa sortie, le Surhomme aurait été encore plus heureux.
Après avoir quitté la prison, le moine avait demandé l’aumône et avait erré tout en consolidant sa cultivation. Il avait également supervisé de nombreuses cérémonies et cortèges funéraires, obtenant suffisamment d’argent pour plusieurs repas végétariens.
– « J’ai maintenant atteint le Deuxième Rang. Dois-je retourner dans la secte saluer mon professeur, Wu Yinzi ? »
Cependant, il devrait retirer sa robe de moine et remplacer son bâton par une épée pour cela… Songeant à cette scène, il sentit une vague de lassitude l’envahir.
– « Je pense que je devrais attendre encore quelques jours avant d’y retourner. De toute façon, il va me sonner les cloches. » Il se frotta la tête en imaginant son enseignant entrer dans une colère noire.
C’est décidé. Je n’y retournerai pas pour le moment !
– « Puisque je ne rentre pas… Où aller ? » Il sortit son téléphone portable et commença à regarder la carte.
Le monde était si grand !
Où partir ensuite ?
Ding ! Juste à ce moment-là, une publicité apparut sur son téléphone portable.
Le célèbre réalisateur “Monsieur Jacob” était arrivé l’avant veille dans la ville de Wenzhou. De plus, il avait choisi la montagne Niuding comme lieu de tournage de son nouveau film.
– « Monsieur Jacob est en Chine pour tourner un nouveau film ? » En lisant la nouvelle, son cœur battit plus fort.
Il s’était rasé les cheveux et était devenu moine, néanmoins la plupart de ses passe-temps et intérêts restaient les mêmes. En plus de purifier des fantômes rancuniers, il aimait les films. D’ailleurs, il appréciait vraiment ce réalisateur, Monsieur Jacob, qui venait du même pays que lui. Cet homme était un réalisateur mondialement reconnu qui faisait la fierté de leur patrie !
Ce serait génial si je parvenais à décrocher un petit rôle dans son film !
Parfait ! Le prochain arrêt sera la rue Baijing, à Wenzhou !
Sur ce, il monta dans le train.
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Trois heures plus tard.
Non loin de Wenzhou.
Zhou Li, 46 ans, traînait son corps fatigué chez lui. Il gara sa toute nouvelle moto électrique et l’accrocha avec une chaîne et un cadenas. Le fait qu’on lui fît faire dans son entreprise des heures supplémentaires l’agaçait. En plus, une petite frappe lui avait volé sa vieille moto deux jours plus tôt. Il avait donc dû dépenser 3.000 RMB pour en acheter une nouvelle. La moitié de son salaire mensuel avait disparu dans cette acquisition ! Et comme si cela ne suffisait pas, sa femme l’avait disputé pendant une soirée entière. Il réprimait à grand peine sa colère dans son cœur.
– « Bon sang ! Ce salaud qui a volé ma moto a intérêt à partir à l’étranger ! Si je le trouve, je ferai en sorte de lui faire goûter à mes poings ! »
La simple pensée de ce vol suffisait à le faire grincer des dents. Après avoir arrêté son deux roues, il monta jusqu’à l’étage supérieur de sa maison.
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Une silhouette mince attendait au loin.
– « Héhé ! J’ai piqué la moto du vieux il y a quelques jours, et le voici avec un nouvel engin. Voilà ma cible du jour ! » L’homme sourit. Ensuite, il jeta un rapide coup d’œil autour de lui.
Il n’y avait personne. C’était sa chance.
Sur ce, il s’approcha tranquillement du véhicule électrique.
– « Un nouveau cadenas ? Tsk, comme c’est naïf ! Je peux ouvrir ce truc en trois secondes. » Il s’accroupit. Un fil de fer apparut dans ses mains. Il se mit à jouer avec la serrure, essayant de la forcer.
Cependant, même si le verrou paraissait être ancien, il était plutôt sophistiqué. Même après cinq secondes, le voleur était incapable de s’en débarrasser.
– « Bon sang, c’est quoi ce truc ! » dit-il, déçu. Il était incapable de libérer la moto.
Serrant les dents, il sortit une chaîne. C’était une de ses habitudes. S’il était incapable d’ouvrir un cadenas pour voler un véhicule, il en ajoutait un de plus… Comme s’il disait : Si je ne peux pas voler le véhicule, je ne vous permettrai pas non plus de l’utiliser !
S’il avait la chance de voir le propriétaire de la moto entrer dans une colère noire, cela le rendait encore plus heureux.
Il était plutôt tordu. Il avait besoin de voir un psy !
Mais alors, un moine apparut au loin.
– « Monsieur, arrêtez ça immédiatement ! » cria-t-il d’une voix aussi forte que le tonnerre. « Monsieur, voler c’est mal ! Vous ne devez pas commettre de telles perversions ! Je vous demande d’arrêter, ou vous serez puni ! »
Dès qu’il prononça le mot “puni”, les yeux du moine s’illuminèrent.