L’explosion retentit derrière moi alors que j’esquive ce qui a l’air d’être un robot du futur avec un gros œil rouge qui lui sert de visage. C’est probablement un golem maintenant que je regarde de plus près. Les lames qui lui servent de mains n’ont en tout cas rien d’absolument super amical alors qu’il les agite devant moi comme un idiot. C’est même plutôt effrayant quand les lames passent à proximité de moi. C’est probablement parce que je les vois super bien avec mes yeux, jusqu’à voir la moindre rayure, mais il suffit de ne pas regarder et il n’y a plus de problème, non ?

J’esquive une lame en faisant un bon en arrière, mais je me retrouve à moi-même pousser un golem qui cherche aussitôt à m’embrocher. Je lui tire la langue avant de lui en laisser le temps.

La fusion est plus stable que dans la Fosse grâce aux ajustements sur la fusion d’urgence que Yuu a faite, maiiiis je dois admettre un tout petit peu… que je n’ai pas un très bon contrôle de ce corps. J’ai beaucoup trop de force pour que le corps de Nomad tienne le choc, héhé.

Non. Calme-toi. Ce n’est pas la peine de te comparer à une autre fusion que Nomad chouchoute particulièrement. Tu es forte Meni ! Certainement pas éclipsée par Sigu. Je n’esquive peut-être pas les attaques avec autant de grâce, mais j’y arrive quand même plus mieux !

« Maintenant, poussez-vous les boîtes de conserve !! »

Je mets un coup de pied dans un golem avec suffisamment de force pour le projeter sur les autres et ouvrir un chemin. Ça fait super mal à la jambe… Le coup de pied du zèbre, c’est pas mal, mais le coup de pied à la Meni semble être bien plus efficace. Sans me vanter… vraiment ! C’est clairement moi la plus forte !

Je passe au-dessus des golems de fer en courant et en oubliant ma douleur à la jambe. À la fin du couloir, une autre menace apparaît sous la forme d’un barrage de gardes. Ils sont déjà en formation, prêts à m’arrêter, mais je me couche par terre en plantant les griffes du gantelet et les lames sur mes bottes dans le sol. En tendant tous mes muscles, je me projette ensuite comme un missile vers le barrage, mais les gardes lèvent aussitôt des boucliers qui font chacun la taille d’une porte. Avant de les atteindre, je plie à nouveau les jambes pour frapper le sol pour changer la direction de mon saut et passer au-dessus d’eux en faisant un saut en cloche.

« WEEEEEE !!! »

C’est tellement amusant d’être aussi libre de mes mouvements. C’est même revigorant ! Ils font une tête bizarre en bas, mais je me contente de tirer la langue en faisant une grimace. Personne ne m’arrêtera ! Je peux voir que les golems que je pensais avoir semés me poursuivent quand même en marchant sur les murs et je refais une grimace… Ne parlons pas de la trentaine de poursuivants derrière eux avec Talion à la tête du groupe qui me regarde furieux… Je préfère le voir lui que Maliel, mais ça tourne à l’obsession avec lui. Est-ce que… il aurait des sentiments pour moi… ? Ah !

[Continue Meni, je prends des notes. Nous disions donc, une relation basée sur un mélange d’amour et de haine avec un autre homme dont Nomad a tué le frère… Cela me semble intéressant pour torturer Nomad. Je vais peut-être le rajouter sur le tableau des relations amoureuses possibles…]

… Ce kelfi est trop méchant. Il est l’incarnation du démon avec ses idées ! Après tout, Micha ne fait pas partie de ce tableau et c’est probablement juste pour la frustrer !

Je continue mon chemin en évitant les barrages et même s’ils sont nombreux à me tirer dessus, j’ai à la fois l’entraînement de Nerys et les yeux partout. Ça semble peut-être un peu étrange, mais plus l’arme à feu est précise et moins j’ai de mal à éviter les attaques. Les compétences de précision qu’ils ont probablement me facilitent le travail puisqu’il suffit que j’observe la direction du canon pour savoir comment esquiver la balle. Et puis, je suis rapide.

Je vais bien plus vite qu’avec le boost d’agilité. Les muscles ont du mal à le supporter, mais ça fait partie de l’évolution de Nomad. Ça ne fait qu’une journée depuis ma dernière apparition, mais c’est déjà moins douloureux. Ce corps finira par être un véhicule parfait pour ma personne… fufufu !

… Hmmm. Faut que je continue à parler. Ça évite au propriétaire d’origine de ce corps de réfléchir à des choses déplaisantes. Il a de quoi moudre des idées noires pendant un moment, mais aujourd’hui, le but est de se débarrasser d’Arcana, pas de parler de celle-dont-il-ne-faut-pas-dire-le-nom.

Tout en me servant de la tête d’un garde comme d’une plateforme, je me propulse au-dessus d’un autre barrage. Il ne me reste plus que quelques couloirs avant d’atteindre la bouche d’aération et fuir d’ici.

[J’espère juste que la prochaine fois que nous viendrons, ils auront des défenses plus impressionnantes. Difficile de faire confiance à un coffre qui n’est même pas estampillé Kelfi-proof.]

Et anti-Meni !

[Je leur ferai un courrier pour leur dire que je ne suis pas satisfait de ce cambriolage et toi non plus. Je me demande d’ailleurs s’ils ont un système de notation comme sur terre. « 1 étoile, les braquages chez eux sont trop faciles, mais le personnel est très sympa ».

Je me mets à rire en écoutant le Kelfi. Les gardes le prennent mal et grimacent, mais ils seraient sans doute encore moins contents s’ils pouvaient entendre Yuu.

Alors que je regarde devant moi, je peux voir un barrage d’hommes en pagne avec des muselières et qui n’ont pas l’air très content d’être là. Vu la taille de leurs armes, ils ne sont probablement pas là pour prendre le thé, mais Meni l’invincible ne risque pas d’avoir du mal avec eux !

*

— Tu as encore du jus ? Je commence à avoir mal aux bras.

— Si tu parles de mana… Non. Ça fait quoi ? Une centaine de types maintenant ? Je ne compte pas les esclaves. Et toi Tark ?

— Laisse-le. J’ai l’impression qu’il pleure sa canne à pêche depuis cinq minutes.

Kiki est à terre en train de reprendre son souffle alors que Tark et Korail la protègent en faisant face à leurs adversaires. Malgré le nombre de corps qui semble indiquer le contraire, ils se font avoir à l’usure et la victoire s’éloigne de plus en plus. Pour un grimpeur qu’ils tuent, il y en a trois qui prennent sa place avec autant de nouvelles compétences. Les esclaves sont aussi plus difficiles à gérer que prévu. Ce sont tous des elfes, mais malgré leur mine blafarde, ils ont clairement muté pour être résistants à la douleur et aux blessures graves.

Cela fait probablement un peu moins d’une heure qu’ils se battent. Pour Kiki, il était clair que le combat ne durerait pas aussi longtemps, mais malheureusement c’était sans compter sur des renforts qui ne s’arrêtent jamais.

« Vous deux, sortez d’ici. Je m’occupe du reste. »

La voix de Tark retentit et même Korail qui frappe un grimpeur au visage alors qu’il en jette un autre dans son dos, hausse un sourcil en l’écoutant.

— Tu n’as pas l’impression de te surestimer ?

— Non. Avec Nomad, on aurait probablement pu s’occuper de tout le monde sans problème, mais vous deux n’êtes pas encore prêts pour ça. Vous me gênez plus qu’autre chose en restant ici et je préfère que vous partiez puisque le spectacle risque de devenir… déplaisant à regarder.

— Tu… Attends, je pige pas. Tu vas me dire que tu as des compétences que tu n’utilises pas et qui pourraient résoudre la situation ?

— C’est… un ordre de chef. Allez récupérer Nomad devant le coffre. Moi je m’occupe d’en finir ici.

Korail soupire en mettant un coup de tête à un elfe esclave.

« Très bien le Pêcheur. Faut bien que quelqu’un veille sur la Sorcière de toute façon. Pour sortir d’ici par contre… »

Tark ricane dans son coin en sortant une canne à pêche de son inventaire. Korail comprend malheureusement ce qu’il compte faire et attrape Kiki avec ses bras. L’instant d’après, il traverse le toit de l’entrepôt en volant dans le ciel sombre en grimaçant. Se faire jeter dans le ciel par un coup de canne à pêche aussi soudainement est très désagréable. Quoi que cet idiot de Tark ait de prévu, il espère premièrement… que l’atterrissage ne sera pas trop désagréable et deuxièmement, que Tark s’en sorte. Cela dit, bien que ce soit le genre de type à faire des blagues tout le temps, le ton de sa voix était suffisamment sérieux pour que Korail ne doute pas de sa décision…

Tark se retrouve encerclé par une cinquantaine d’hommes qui veulent sa mort et se met soudainement à rire bruyamment.

« À moi tout l’argent ! Ahaha ! Je pensais que j’aurais plus de mal à les faire partir ! Mais avant l’argent, faut que je m’occupe de vous… »

Le sourire sur son visage devient soudainement malsain. Dans son inventaire, il attrape une nouvelle canne à pêche, bien plus grande et plus solide que celle qu’il a cassée un peu plus tôt à cause d’un grimpeur avec le physique d’une armoire à glace. Un hameçon gigantesque qui ressemble à une ancre d’une centaine de kilos tombe au sol en produisant un bruit sourd.

Les grimpeurs reculent de plusieurs pas en voyant cela et laissent la place aux esclaves. Ils ne l’ont clairement pas encore vu brandir sa canne à pêche lourde comme si elle ne pesait rien, sinon ils auraient compris que reculer de quelques mètres ne sert à rien.