De l'Innocence au Mal Absolu
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Chapitre 4 – Le cœur du démon
Chapitre 3 – L’inutilité de la vérité dans un monde de jugement Menu à suivre...

La salle du trône était un tableau d’horreur et de triomphe, la puissance brute du démon gisant sur le sol n’était plus qu’un tas de chair inanimé. Son sang noirâtre se répandait lentement sur les dalles de pierre, emplissant l’air d’une odeur de soufre suffocante. L’énorme créature, source de peur et de destruction, n’était plus qu’un souvenir sinistre de la bataille qu’ils venaient de mener.

Il avait porté le coup final. Son épée avait tranché la tête du démon, mettant fin à des semaines de lutte acharnée à travers ces ruines hantées. Leurs nerfs étaient constamment à vif, à l’affût du moindre piège ou de créatures qui pourraient surgir dans leur sommeil.

La tête de la créature gisait maintenant sur les dalles froides. Michael avait l’impression que le démon le dévisageait encore. Sans ciller, il ramassa un sac de toile qu’il avait amené spécialement pour cette occasion et y fit glisser la tête de la créature. Il lui fallait une preuve de sa victoire, et il l’avait enfin obtenue.

Abattre un démon était une condition sine qua non pour recevoir le titre de Héros. Lui et son équipe allaient bénéficier de privilèges auxquels ils n’auraient jamais osé rêver. Michael pouvait enfin respirer, ils n’avaient pas traversé tout ce cauchemar en vain.

L’équipe d’aventuriers s’affairait à soigner leurs blessures à la lumière vacillante des torches. Le soulagement se lisait dans leurs yeux fatigués, mais aussi une satisfaction silencieuse d’avoir survécu à une lutte aussi acharnée.

Le guerrier, un colosse vêtu d’acier, essuyait sa large épée ensanglantée sur le tissu du sac en toile ou reposait la tête décapitée du démon.

– Par tous les dieux, je pensais que ça ne finirait jamais !

Gronda-t-il, la voix grave résonnant dans la salle immense. Sa peau portait les marques de la bataille, chaque cicatrice une preuve de sa bravoure.

Non loin de lui se tenait Sylvia, l’Archimage. Elle était une femme de stature grande et élancée. Ses longs cheveux ondulés argentés tombaient librement sur ses épaules, reflétant la faible lueur des torches environnantes. Ses yeux étaient du même gris que ses cheveux, comme s’ils étaient faits de la même substance métallique. Sa silhouette avantageuse dégageait une certaine grâce, elle possédait un charme propre, forgé par sa sagesse et son pouvoir magique.

Elle déposait son bâton orné de pierres précieuses. Des runes lumineuses étaient gravées sur le bois, émettant une lueur douce.

– Nous avons vaincu, c’est tout ce qui importe !

Murmura-t-elle, épuisée, mais déterminée. Les éclats de sa magie élémentaire scintillaient encore autour d’elle, émettant une légère chaleur.

L’homme de foi, un prêtre aux longs cheveux blonds et à la barbe touffue, se tenait agenouillé sur le sol. Sa stature imposante et quelque peu grassouillette contrastait avec la finesse de ses gestes alors qu’il murmurait des prières sacrées. Il portait la tunique officielle des prêtres de l’ordre de la Croix sacrée, mais la blancheur initiale de son vêtement avait été remplacée par la saleté et le sang des semaines de combat dans les ruines.

Une aura doré émanait de sa paume, touchant délicatement la peau écorchée. Sous la douce lumière, la douleur semblait immédiatement s’apaiser. Les chairs endommagées paraissaient répondre à son toucher. Les bords de la plaie, autrefois rouges et vifs, commencèrent à se recolorer d’une teinte plus saine, et lentement, on pouvait voir la peau se regrouper, se retisser comme un tissu déchiré que l’on répare minutieusement.

Il leva les yeux vers Sylvia, un sourire malicieux se dessinant sous sa barbe épaisse.

– Je croyais que c’était la récompense qui t’importait ?

Ajouta-t-il dans un éclat de rire. Ses mots, bien que prononcés sur le ton de la plaisanterie, contenaient une part de vérité que tous reconnaissaient.

– Je peux soigner les blessures, mais le sang perdu prendra plus de temps à se régénérer Yazé donc, n’en fais pas trop.

À ses côtés, l’archère elfique grimaçait légèrement sous la pression des mains du prêtre sur sa blessure. Malgré la douleur, elle restait toujours aussi alerte. Ses oreilles pointues tressaillaient à chaque bruit suspect, prête à décocher une flèche à la moindre alerte. L’odeur de la moisissure et de la poussière lui picotait le nez, un rappel constant de l’environnement inhospitalier du donjon.

Les fibres de la chair se reconstituaient et ce qui était une blessure béante se transformait progressivement en une simple éraflure. À chaque seconde, la blessure se refermait davantage, jusqu’à ne plus être qu’un lointain souvenir de douleur.

Lorsque le halo doré de la magie guérisseuse se dissipa, elle se leva avec souplesse, son arc souple à la main. Elle inclina respectueusement la tête pour remercier Henri, qui répondit par un sourire avant de vaquer à ses occupations. Déjà rétablie, l’elfe se déplaçait avec grâce et légèreté, ses yeux perçant l’obscurité pour localiser les flèches qu’elle pourrait récupérer.

Yazé effleura l’épaule de leur dernier compagnon du bout de ses doigts fins

– Tu as trouvé des choses intéressantes Adam ?

À l’autre bout de la pièce, Adam, l’assassin du groupe, vêtu d’une armure en cuir noir, s’affairait sur les corps jonchant le sol. Cet homme de taille moyenne aux cheveux noirs et à la barbe mal rasée, symbole de leurs semaines d’errance dans les ruines, n’était pas perturbé par la froideur de la mort. Son visage, habituellement impassible, était figé dans une concentration intense alors qu’il fouillait les dépouilles. Toutefois, le léger effleurement des doigts de la jeune elfe sur son épaule interrompirent momentanément son immersion. Il leva la tête, son regard doux, croisant celui de Yazé.

En réponse, il tendit la main, glissant doucement ses doigts contre ceux de la jeune femme dans un geste presque tendre. Le contact était fugace, mais empreint d’une complicité secrète.

– Oui… Bien plus que prévu, nous allons pouvoir en tirer un bon pactole. De plus j’ai trouvé ceci sur le corps du démon.

– Qu’est-ce que c’est ?

Demanda Michael, ses yeux scrutant l’étrange objet que tenait Adam.

– Un cristal rouge translucide, répondit Adam, ses yeux sombres fixés sur l’objet mystérieux. Plus je le regarde, plus j’ai l’impression que je vais me noyer… Il y a quelque chose de dérangeant là-dedans.

À ces mots, Henri bondit sur ses pieds. En un instant, il était aux côtés d’Adam, arrachant le cristal de ses mains sans préambule.

– Bonté divine, quelle horreur !

Curieux et déconcerté, Michael s’approcha, tentant d’étudier le cristal. Mais il ressentit un malaise étrange et déstabilisant, tout comme Adam l’avait ressenti. Henri, quant à lui, semblait amusé par leur réaction.

– C’est le cœur de la créature !

Expliqua-t-il enfin.

– Les démons n’ont pas de cœur comme nous, humain. À la place, ils ont ça… C’est un concentré d’énergie pure, la source de leur pouvoir. Mais attention, il doit être raffiné. Sinon, celui qui tentera de l’utiliser finira réduit en cendres.

Sylvia ouvrit la bouche pour parler, mais Henri, anticipant sa question, la coupa avec un sourire.

– Oui, Sylvia, cela vaut une fortune. L’Ordre récompensera généreusement pour ce cœur de démon.

Il rangea la pierre précieuse dans une petite besace délicatement brodée avec du fil d’or, et se frotta les mains avec un air de satisfaction.

– Bon… cet endroit sent la mort. Rassemblez vos affaires et allons-nous-en. Nous avons beaucoup de route à faire, ordonna Michael.

Ordonna Michael.

Soudain, Sylvia s’exclama, attirant leur attention vers une stèle placée au centre de la salle. Ses doigts délicats glissèrent sur les runes gravées, son esprit intrigué par le mécanisme mystérieux. Ses compagnons se rassemblèrent autour, leur réflexion silencieuse, marquée par une anxiété palpable. C’est alors que la voix grondante de Michael rompit le silence.

– Qu’est-ce que c’est encore que ça ?

Yazé haussa les épaules, l’air résigné, tout en continuant d’étudier les runes avec une curiosité prudente.

– Je n’en ai aucune idée. C’est probablement un artefact magique… Les runes sont démoniaques, je ne sais pas les déchiffrer.

À ces mots, l’Archimage s’avança, signifiant son intention de jeter un regard plus approfondi. Tandis qu’elle frottait son menton dans une réflexion intense, elle jetait occasionnellement un coup d’œil à un grimoire qu’elle gardait toujours à portée de main.

– C’est incroyable, absolument incroyable !

L’exclamation de surprise de Sylvia fut ponctuée par le grognement de Michael.

– Alors, accouche ! Qu’est-ce que c’est ?

– Toujours aussi impatient… C’est tout simplement un système de téléportation, capable de nous ramener à l’entrée du donjon.

L’annonce laissa ses camarades stupéfaits. La téléportation, une réalité ?

– Est-ce prudent de l’utiliser ?

Demanda Adam, son regard perçant fixé sur la stèle.

– À moins que tu préfères passer plusieurs jours à parcourir à nouveau le chemin jusqu’à la surface.

Objecta Sylvia. Le soupir de l’assassin traduisait sa résignation. L’opportunité d’économiser plusieurs jours de marche était bien trop alléchante.

– Et comment fait-on pour l’activer ?

S’impatienta Michael d’un ton autoritaire.

– Il suffit de monter sur la plateforme et de poser la main sur l’orbe en son centre. Le reste se fera tout seul.

– Parfait ! Tout le monde sur la stèle, et vite. Je n’ai aucune envie de passer une seconde de plus dans cet endroit macabre.

Ils se regroupèrent tous autour de la stèle, hésitants. Le toucher de la pierre froide et lisse évoqua une étrange vibration, comme une énergie mystique qui dansait sous leurs doigts. Ils échangèrent un dernier regard avant de poser leurs mains sur l’orbe central. C’était une sphère étrange, faite d’un matériau inconnu qui rappelait le cristal, mais qui était froid comme le métal.

Leurs paumes effleurèrent l’orbe, un frisson les traversa. Une lumière intense émana de la stèle, enveloppant le groupe d’une aura étincelante. Une pression écrasante se fit sentir, comme si l’air autour d’eux s’était condensé. Le monde se tordit et se plia brutalement, déformé comme un tableau dans un miroir. Les sons s’étouffèrent, comme s’ils étaient filtrés à travers de l’eau. Et soudain, l’expérience prit fin. Ils se retrouvèrent à l’entrée du donjon, la fraîcheur de la nuit les enveloppant.

Une fois l’expérience de la téléportation terminée, les membres de la compagnie eurent une réaction commune et immédiate. Tous, sauf Sylvia, se précipitèrent vers le côté du chemin, régurgitant tout ce que leurs maigres estomacs avaient bien pu avaler ces derniers jours.

L’Archimage, se tenant droite et sereine, affichait un sourire malicieux alors qu’elle contemplait ses compagnons désorientés. Sa technique pour éviter le désagrément de la téléportation avait été simple : elle n’avait simplement pas regardé.

– Pourquoi ne nous as-tu pas conseillé de fermer les yeux ?!

Tonna Michael, sa frustration débordante alors qu’il tentait de reprendre son aplomb. Il s’essuya la bouche du revers de la manche, sa fierté clairement écornée. L’Archimage se mit à rire de manière jubilatoire, savourant son petit triomphe.

– Je n’en savais rien, j’ai tendance à fermer les yeux quand je retiens ma respiration. Je pensais qu’on serait plongés dans quelque chose.

Yavé, l’archère, lui jeta un regard noir alors qu’elle essayait d’oublier le goût de la viande séchée récemment régurgitée pendant qu’Adam lui frottait le dos.

Une fois le malaise initial passé, ils étendirent leur carte des environs sur le sol battu, cherchant un endroit où ils pourraient se reposer et se rétablir. Les doigts fatigués, mais fermes de Michael parcoururent les lignes et les symboles de la carte étalée devant eux, les yeux des quatre aventuriers scrutant chaque détail. La discussion allait bon train, les avis divergents et les idées se confrontant dans une cacophonie légère. Des points de repère familiers, des villes éloignées, des forêts denses et des montagnes menaçantes défilaient sous leur regard, leurs options étaient limitées.

– Que diriez-vous d’Arlor ?

Suggéra Yavé, pointant une petite ville nichée au cœur d’une vallée verdoyante. Mais l’assassin secoua la tête.

– Non… Le village a été raid il y a quelques mois de cela, il ne reste absolument plus rien.

– Alors dans ce cas, Bahrn semble être une bonne option, n’est-ce pas ?

Proposa le prêtre, indiquant une ville côtière avec un port florissant. Cependant, Sylvia grimaça, elle n’avait jamais aimé l’odeur du poisson et du sel marin. Après de longues minutes de délibération, c’est Michael qui posa enfin le doigt sur une destination.

– Ys !

Déclara-t-il fermement, son doigt reposant sur une petite ville située sur le plateau d’une haute montagne.

– Ys ? Tu es certain ?

Demanda Yavé, haussant un sourcil. L’endroit était connu pour son climat difficile et sa solitude.

– C’est isolé, sécurisé et j’ai un contact à retrouver là-bas.

Répondit Michael, défendant son choix.

– Et je suis sûr qu’ils ont une taverne décente pour Sylvia.

Ajouta-t-il avec un clin d’œil à l’Archimage. La magicienne éclata de rire, amusée par la remarque du guerrier.

– Tant qu’il y a de la bonne bière et de jolis petits culs, je suis partante !

– Sylvia !

La sermonna Yazé, lui lançant un regard réprobateur. Henry, le prêtre, laissa échapper un léger rire, le comportement effronté de la jeune femme l’amusait énormément. Adam, lui, ne put s’empêcher de laisser échapper un soupir. Ces moments de légèreté après avoir frôlé la mort étaient bienvenus.

Alors qu’ils emballaient leurs affaires, le soleil amorçait sa descente dans le ciel, teintant les nuages de nuances pourpres et orangées. L’atmosphère était sereine et la nature autour d’eux s’était réveillée, les chants des oiseaux mêlés aux bruits lointains des criquets. Leur groupe de chevaux, apprivoisés et obéissants, se tenait à leurs côtés, prêts pour le voyage.

– Nous avons du chemin à faire.



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