Max se souvenait des histoires des chevaliers qui visitaient le château de Croix, tous des génies en matière d’amour. Elle ne comptait plus les fois où elle avait entendu des servantes, séduites par des chevaliers pour une nuit de compagnie, glousser en se remémorant comment certains chevaliers les avaient habilement menées par la séduction.
C’était impossible. Elle croyait fermement que Riftan avait dû avoir sa part de relations avec de jeunes servantes ou de belles dames. Riftan ne lui avait-il pas aussi divulgué que la coutume dans le nord était que les seigneurs et les dames se baignent ensemble ?
Comment aurait-il pu connaître cette information à moins que…
Max se rattrapa à temps et arrêta sa prédilection pour les pensées négatives. Peu importe ce qu’il avait fait dans le passé, cela n’avait plus d’importance maintenant.
“Qu’est-ce qu’il y a ? Tu es renfrogné.”
“Oh, le vent est un peu froid…”
Riftan se pencha sur elle et la serra dans ses bras, réchauffant son corps rendu froid par le temps glacial. Le parfum masculin qui envahissait ses sens empêchait presque Max de respirer, cette drôle de sensation s’installant en elle une fois de plus.
“Tu aurais dû porter des vêtements plus épais.” dit-il d’un ton étouffé au-dessus de sa tête.
“C’est bon. Si le vent ne soufflait pas si fort, ça irait… le soleil est chaud…”
“Tu l’aimes ? Je veux dire, la robe.”
Elle baissa les yeux sur sa tenue, trop belle pour être portée par elle. Il serait étrange de lui dire que c’était en fait la première fois qu’elle portait d’aussi jolis vêtements.
“Je l’aime bien.” dit-elle à la place.
“Je vais faire venir une couturière pour que tu puisses avoir autant de robes que tu le souhaites. Je t’en achèterai des centaines.”
Riftan saisit légèrement son menton et le souleva, la fixant intensément dans les yeux avec la promesse solennelle de l’extravagance. Max se sentit rougir et devenir chaude, ce n’était pas le comportement d’un homme peu habitué à traiter avec des femmes.
Elle murmura en baissant les yeux. “Je dois m’habituer à ça ?”
“A quoi ?”
“Que tu me donnes tout ce que je demande.”
Ses mots directs ont fait froncer les sourcils à Riftan.
“Je suis sérieux. Je t’ai déjà dit que je ferais tout pour que tu vives aussi luxueusement que dans le château de ton père.”
Max ravala le rire sec qui faillit jaillir d’elle.
Comment avait-elle pu vivre une vie délectable et somptueuse ? Jamais on ne lui avait donné ce qu’elle désirait, ni même ce dont une femme noble avait besoin. S’il savait combien ses idées préconçues sur sa vie passée étaient erronées, ferait-il autant d’efforts ? ( S’il s’avait… tu serais étouffer sous ces montagnes de cadeaux )
Elle avait l’impression de le dupé, et cela la rendait insupportable, comme si elle était une méchante.
Elle marmonna légèrement, évitant son regard. “On peut faire une pause ?”
“Tu te sens fatiguée ?”
Comme elle hochait la tête, il s’avança pour la conduire chez elle. Un vent fort soufflait du nord et balayait les arbres couvrant au loin la colline bleutée. Max s’arrêta un moment, inhalant l’odeur du pin, le moisi des champignons.
Est-ce qu’elle sentirait cela tous les jours ?
Max, surplombant le paysage majestueux, suivit bientôt Riftan vers le bas et à l’écart des vues.
***
Riftan a dû la quitter à nouveau pour superviser la formation des chevaliers potentiels. Elle retourna seule dans la chambre, s’asseyant devant la cheminée pour se détendre tandis que Rudis apportait du thé au gingembre et des bonbons aux fruits secs en guise d’en-cas pour se ressourcer.
“Comme vous allez dîner avec les chevaliers ce soir, voudriez-vous changer de vêtements, madame ?”. dit Rudis en remplissant sa tasse vide.
Max, après avoir terminé une bouchée de fruits secs, leva les yeux vers la servante, confuse.
“Changer ?”
“Oui, puisque vous les rencontrez pour la première fois en tant qu’épouse du seigneur, je suggère qu’il serait préférable de s’habiller de manière plus formelle.”
Elle a incliné la tête avec un visage tendu. “Je m’excuse si j’ai dépassé les bornes.”
“Non, vous n’avez pas…”
Max grimaça en regardant son propre reflet dans le miroir adossé au mur. Les cheveux que Rudis avait soigneusement brossés et tordus avec élégance ce matin avaient été ruinés par le vent.
Elle hocha la tête, retira quelques épingles et laissa tomber ses cheveux ondulés pour permettre à la femme de chambre de faire sa magie sur ses cheveux une seconde fois.
“D’accord… s’il vous plaît.”
Rudis sortit directement de la pièce avec la théière et revint avec une petite boîte à bijoux contenant des peignes complexes, des huiles parfumées et des ornements fins.
Elle s’assit sur une chaise devant le miroir tandis que Rudis utilisait d’abord un peigne pour lisser les nœuds de ses cheveux. Pendant un long moment, elle continua à brosser, ajoutant de temps en temps un peu d’huile, puis brossant à nouveau. Très vite, tous ses efforts pour dompter ses cheveux crépus furent couronné de succès, elle se retrouvait avec la chevelure soignée et brillante d’avant.
“On met une épingle à cheveux ? Ou préférez-vouz porter une couronne ?”
Rudis ouvrit la boîte pleine de bijoux. Devant les babioles coûteuses qui semblaient pouvoir aveugler une personne, les yeux de Max s’ouvrirent comme des soucoupes.
Des broches emblématiques, des colliers de perles, des bagues en or et des épingles à cheveux en argent étaient soigneusement placés sur le satin rouge. Et dans une autre boîte se trouvait un superbe diadème. À sa connaissance, la mère de Riftan était morte quand il était jeune, et il n’avait pas de sœur, ni d’autre parent féminin.
Alors d’où vient tout ça ?
N’était-ce pas un peu trop rapide pour être capable de préparer une telle chose pour un dîner, le lendemain de son arrivée ? Elle ne pouvait qu’en déduire que ces bijoux étaient des objets de ses anciennes amantes… ( ou pas, il les avaient peut-être acheter sur le chemin, acheter avant, ou même se trouvait dans le château avant qu’il en devienne le propriétaire… maxi, sois plus positive )
“Madame, aimez-vous l’un d’entre eux ?”
“Je… Oui.”
Elle s’arrêta, ayant l’impression de s’introduire dans le domaine de quelqu’un d’autre, un domaine dans lequel elle ne devrait pas mettre les pieds, et se concentra plutôt pour choisir quelque chose, n’importe quoi.
“Cette épingle à cheveux, s’il vous plaît…”
“Oui, madame.”
Rudis tressa ses cheveux serrés, les enroulant d’un côté, et les fixa avec les épingles à cheveux argentées décorées de fleurs colorées. Puis, elle a passé un collier de perles à son cou et une bague en cristal à son doigt.
Max regarda l’étrange reflet de la femme avec ses cheveux coiffés et les bijoux qui illuminaient son visage. Elle n’avait pas l’air elle-même… si elle osait le dire, elle se trouvait belle. La simplicité des bijoux faisait ressortir davantage ses traits.
“Si vous n’aimez pas votre apparence, je peux vous apportez d’autres bijoux.”
Rudis, qui avait baissé les yeux sur les nombreux plis de sa jupe, proposa poliment.
Max secoue la tête. “C’est très joli. Je vais garder ça.”
Rudis a eu l’air soulagé. Lorsqu’elles furent prêtes à quitter la pièce, elle plaça un fin châle, presque translucide, sur ses épaules. Soudain, le crépuscule tomba à l’extérieur de la fenêtre.