Le Chevalier des Elfes
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Les adeptes de l’entité appelée Néant ne faisaient pas que combattre, ils complotaient aussi. Ils s’infiltraient dans les différentes organisations légales et criminelles du monde de Gerboisia. Ils prenaient en sous-main le contrôle des actes de puissants ou de personnes charismatiques. Ils employaient des méthodes très variées pour arriver à leurs fins, le chantage, la corruption progressive, l’attrait pour la connaissance, ou encore la séduction. Chaque dieu de la destruction avait son propre réseau d’espions et d’infiltrés, mais le plus étendu s’avérait celui des adorateurs du Néant.

Certains prêtres de la divinité elfique Jéhavah prétendaient que les adeptes de l’entité profondément souillés, étaient faciles à reconnaître, que leurs yeux ou leur attitude les contraignait à se cacher. Mais dans la réalité les partisans du Néant pouvaient passer inaperçus pendant longtemps. D’ailleurs le culte de Jéhavah n’était pas spécialement épargné par l’infiltration des serviteurs de l’entité. En effet, des centaines de néantistes couchaient avec des jéhavistes hauts placés, consultaient les archives secrètes de prêtres de Jéhavah etc. Autrement dit les adeptes du Néant étaient très bien informés des agissements de leurs adversaires.

Seule une organisation résistait plutôt bien à l’influence des néantistes, la ligue des protecteurs fondée par Arthur le vampire, qui mit au point un sort de détection du Néant, permettant de déjouer plusieurs tentatives d’infiltration. La résistance d’Arthur à la corruption énervait profondément l’entité. Résultat elle chargea plusieurs de ses pions les plus influents parmi les elfes de couvrir d’opprobre le vampire.

Ainsi grâce à la complicité du procureur Asi et d’autres personnes, Arthur s’était retrouvé accusé d’adoration du Néant. Asi était assez sûr d’obtenir facilement un verdict de culpabilité, il n’abattit pas ses meilleures cartes, pourtant il attira déjà bien la suspicion sur Arthur.

Le principal chef d’orchestre du complot contre le haut-roi demeurait inconnu, il s’agissait d’Orunaé, qui ricanait dans l’ombre. D’ailleurs les ennuis judiciaires qui frappaient Arthur n’étaient que le début d’une série de nombreux procès destinés à apporter à Hertio, l’évincement de ses principaux rivaux politiques. Orunaé s’arrangea pour que Hertio son maître ait bientôt assez de marges de manœuvre pour imposer sa vision politique.

Arthur aurait voulu réfuter le droit d’être jugé, mais il n’était pas en position d’imposer son point de vue. Surtout que les manœuvres habituelles pour faire tomber des ennemis ne marchèrent pas sur Asi le procureur. Ce dernier semblait invulnérable ou avoir un ange gardien surentraîné qui veillait sur lui. Alors le haut-roi se retrouvait contraint de participer à un procès en tant qu’accusé. Il y avait véritablement foule pour observer la procédure judiciaire frappant Arthur.

Des milliers de personnes étaient assises pour observer les malheurs ou la réhabilitation possible de leur haut-roi. Asi parvint à négocier le droit d’user du principal temple en l’honneur de Jéhavah pour organiser la déchéance programmée de l’accusé.

Il estimait que ce serait un moyen de renforcer la symbolique du procès que le lieu qui servit au couronnement d’Arthur soit l’endroit où son règne prendrait fin. Le procureur trépignait d’impatience que les statues représentant Arthur dans le temple soient démolis, et que les énonciations écrites rappelant son existence dans le lieu de culte soient accompagnées d’un surnom infamant du type le traître ou l’ignoble. Le temple des mille colonnes obéissait à une tradition spéciale à l’égard des souverains des elfes convaincus par la justice de félonie ou d’autres crimes graves. Toute commémoration prenant la forme d’une sculpture ou d’un vitrail les honorant devait être démolie, et toute mention écrite d’eux s’accompagnait d’une description peu gratifiante.

D’ailleurs dans le passé le temple ne servait pas seulement de lieu pour des cérémonies religieuses, il s’agissait aussi d’une zone dévolue aux procès de hauts personnages. L’usage qu’il serve de tribunal se perdit, et fut abandonné pendant plusieurs siècles. Mais Asi usa de sa grande influence pour restaurer l’ancienne fonction du temple. Et puis cela lui permettait de marquer des points avec les jéhavistes étriqués mais puissants qui lui servaient de soutiens. Le procureur bien qu’il soit un adepte du Néant réputé, avait assez d’hypocrisie et de sens de la manipulation pour inciter certains traditionnalistes elfes adeptes du dieu Jéhavah à lui fournir de solides soutiens.

Asi : Accusé, votre nom et votre profession, je vous prie.

Arthur : Je suis Arthur Magnus, haut-roi des elfes.

Asi : Possédez-vous des objets en lien avec le Néant, du genre statues ou amulettes ?

Arthur : Pas du tout.

Asi : Pourtant sous une dalle de votre chambre, des enquêteurs ont déniché, une statue représentant une tornade avec des dents qui engloutit un soleil et une lune, une œuvre d’art que l’on trouve souvent chez les adorateurs du Néant.

Arthur : Cette statue a été placée à mon insu pour me discréditer.

Asi : Admettons, mais il y a beaucoup d’autres preuves vous incriminant. Votre bibliothèque contient-elle des ouvrages traitant du Néant ?

Arthur : Oui, mais il s’agit de livres destinés à m’aider à combattre le Néant.

Asi : À votre connaissance est-il vrai que l’ouvrage «Gloire au Néant», que vous possédez fasse partie des livres favoris des chevaliers du Néant, les adorateurs les plus redoutés des puissances de la ruine ?

Arthur : En effet, mais pour détruire les ennemis des elfes, connaître leur manière d’agir et de se comporter est primordiale.

Le témoin-clé d’Asi le procureur était Thérésa Aquin, une amie intime d’Arthur.

Asi : D’après votre longue expérience de traqueuse des esclaves du Néant, avez-vous déjà vu des personnes non contaminées par le Néant, posséder le livre «Gloire au Néant» ?

Thérésa : Jamais, tous les possesseurs de «Gloire au Néant» que j’ai appréhendés, s’avéraient des fanatiques obsédés par le Néant.

Asi : Est-il vrai que vous avez au cours d’une enquête, découvert des éléments qui incriminent l’accusé ?

Thérésa : Des espions m’ont appris que sa haute-majesté avait eu plusieurs entrevues avec un démon du Néant.

Asi : Qu’est-ce qui vous a poussé à faire surveiller votre haut-roi ?

Thérésa : Sa haute-majesté a été exposé plusieurs fois à la corruption du Néant. En outre il montrait un intérêt suspect en ce qui concerne les reliques du Néant.

Asi : Pourtant sa haute-majesté a combattu plusieurs fois des adeptes du Néant, dont le célèbre Erèbe.

Thérésa : Les esclaves du Néant ne connaissent pas la solidarité, pour faire disparaître un rival ils sont prêts aux pires extrémités. Comme Erèbe est un esclave influent du Néant, il est logique que sa haute-majesté animé par la jalousie ait cherché à se débarrasser de lui.

Asi : Pourquoi n’avez-vous pas fait part de vos soupçons aux autorités ?

Thérésa : En dénonçant sa haute-majesté je risque ma vie, des centaines de vampires lui vouent une dévotion fanatique, un message de sa part et je suis morte. De plus j’ai honte de l’admettre mais j’ai fini par me lier au Néant.

Asi : Avez-vous vu ou entendu l’accusé participer à une cérémonie de vénération du Néant ?

Thérésa : J’ai vu et entendu sa haute-majesté, sacrifier en honneur du Néant de jeunes elfes âgés de moins de dix ans. Je fournissais des victimes à l’accusé.

Asi : Vous rendez vous compte que vos propos peuvent vous faire passer pour la complice de l’accusé ?

Thérésa : Je sais que je risque au mieux vingt ans de prison en avouant mes crimes. Cependant ma confession est un moyen d’apaiser ma conscience troublée.

Un lourd silence suivit les déclarations de Thérésa, les derniers doutes pesant sur la culpabilité d’Arthur s’envolèrent, même ses plus chauds partisans se mirent à douter de lui. Arthur le vampire était décomposé, il ne voyait pas d’échappatoire au terrible traquenard qui pesait sur lui. Il se voyait disgracié sans espoir de faire éclater son innocence, il s’imaginait victime de réactions d’hostilité terrible de la part de ses proches.

Il jugeait son avenir totalement fichu. Il songeait sérieusement à se suicider pour mettre fin au cauchemar qu’il vivait. Il considérait que cela ajouterait des soupçons sur son affiliation prétendue au Néant. Mais vu l’avalanche de preuves contre lui et les témoignages troublants contre le vampire, un acte de plus attirant la suspicion ne changerait vraisemblablement pas grand-chose.

Il y avait encore quelques semaines, le haut-roi préparait une belle surprise pour Thérésa, il façonnait des boucles d’oreille de belle facture avec la magie. Il fabriquait des objets représentant des cygnes et dotés de charmes de protections. Il caressait même l’ambition secrète lors de la remise du présent de faire une annonce à Thérésa, en lui demandant sa main. Certes il n’éprouvait pas encore d’amour pour elle, mais il pensait que cette elfe était la personne la plus digne de confiance du pays, surtout depuis qu’elle clama qu’elle laisserait les coudées franches à Arthur en tant que monarque.

Et même s’il pensait que cela aurait mieux d’épouser quelqu’un en ayant des sentiments amoureux réciproques, il reconnaissait de nombreuses qualités morales à Thérésa. Il la considérait comme une elfe ayant un sens de l’honneur exceptionnel. Mais voilà que son jugement paraissait complètement erroné.

En fait Thérésa était une odieuse traîtresse. Le vampire plaçait beaucoup d’espoir en elle, il songeait qu’il y aurait eu moyen d’inaugurer un règne plus heureux pour lui et ses sujets grâce à l’elfe. Elle adoucissait son cœur, elle lui apportait du réconfort. Elle servait de référence morale l’incitant à croire que ses nombreux sacrifices servaient une noble cause. Cependant beaucoup des belles certitudes d’Arthur s’effondrèrent avec éclat. Le vampire croyait désormais que son avenir et son œuvre politique se réduiraient à des cendres honteuses.

Alors la partie sanguinaire du haut-roi l’invita à opérer un carnage dans les alentours, en particulier sur Thérésa. D’accord, elle ne paraissait qu’une actrice secondaire dans sa chute. Et il y avait surement des gens au-dessus d’elle dans le processus de déchéance. Mais Arthur pensait que ce serait très bon pour ses nerfs de saigner à blanc avec ses crocs Thérésa, qu’il voyait comme une immonde traîtresse. Ainsi il opéra la lutte la plus difficile de son existence pour garder le contrôle. Il se disait que ce serait idiot de sauvegarder les apparences, vu l’état de sa réputation. Il ne lui restait comme seule joie que la perspective de tuer des ennemis. Le vampire avait un regard témoignant une ardeur dévorante de violence.

Sa bête intérieure s’agitait comme jamais pour qu’il se jette sur Thérésa. Tant pis s’il existait certainement des mesures de protection pour la préserver d’une attaque. Il était nécessaire de l’exterminer pour se venger de son répugnant parjure. Puis Arthur eut une pensée pour certains proches, notamment ses successeurs désignés. S’il s’adonnait à un acte de pure sauvagerie, il compliquerait sans doute leur situation. Il se doutait que ses héritiers seraient bientôt les prochains sur la liste, mais se livrer à une action de pure démence ne ferait qu’accroître leurs ennuis. Donc le vampire réussit au prix d’un immense effort de volonté à juguler son désir de ravage.

Arthur estimait que sa réputation élogieuse il y avait encore quelques jours, se révélait transformée en un statut très négatif, qu’il perdit la majorité de ses amis, et de ses soutiens par la faute du procès à son égard. Alors il fallait mieux en terminer avec la vie pour moins souffrir, plutôt que de continuer à subir une procédure cauchemardesque. Le vampire regrettait de permettre à ses ennemis de triompher, cependant il ne décelait pas de meilleure alternative que le suicide pour embêter les adeptes du Néant qui le piégèrent.

Arthur éprouvait d’ailleurs un profond dégoût, des personnes à qui il accorda une forte confiance se révélèrent en fin de compte des agents de puissance de la ruine, des gens qui vendirent leur âme à des dieux de la destruction. Le vampire soupçonnait quelque chose venant de Thérésa, mais son amitié profonde occulta son jugement. Soudain Thérésa eut des agissements inattendus. Elle se leva de son siège, et chercha à attirer l’attention.

Elle hésita pendant quelques secondes à parler, si elle allait jusqu’au bout de son intention de sauver Arthur, elle serait privée pour longtemps de la substance. Elle devrait affronter une crise effroyable de manque. Mais même si elle se livra dans le passé à de fortes compromissions morales pour bénéficier de sa dose ; elle avait du mal à ne pas se considérer comme vraiment honteuse, à ne pas souffrir terriblement du fait de contribuer à la chute du vampire. Elle pensait qu’elle fit trop de choses néfastes pour autrui, et surtout les elfes, pour avoir une chance d’échapper à un séjour dans les enfers. Cependant elle demeurait aussi motivée à concrétiser le sauvetage d’Arthur.

Elle allait proférer des mots quand ses propos moururent dans sa bouche suite à un regard assez terrible de la part d’Asi. Elle subissait un sentiment intense de peur, elle se demandait si elle n’était pas folle d’essayer de protéger le vampire. Surtout que ce dernier n’avait vraisemblablement plus que du mépris pour elle. Qu’au mieux il témoignerait une profonde pitié à la place d’une amitié sincère. Devant cette perspective Thérésa songea qu’il valait mieux abandonner la lutte, ne pas chercher à faire la maline avec Asi. Cependant son amour triompha quand même de ses réflexions.

Thérésa : Arrêtez cette mascarade, sa haute-majesté est innocent, les crimes qui lui sont reprochés sont inventés ! Tous les témoins à charge ont menti, la corruption ou le chantage nous ont poussés à raconter des fables. Les preuves contre sa majesté sont fabriquées, aucune n’est véridique. Si monsieur le juge veut bien examiner ces documents, il verra l’étendue du complot contre sa haute-majesté !

Juge : Je vais faire examiner par un expert ces documents, en attendant, il faudra placer en détention monsieur le procureur.

Asi : Votre honneur, vous n’allez pas croire les divagations d’une adepte du Néant, tout de même ?

Juge : Je sentais que quelque chose clochait dans cette affaire, et puis mon devoir est d’examiner soigneusement toutes les pièces à conviction que l’on me fournit.

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