Erèbe le malfaisant se révélait très sûr de lui, il jeta toutes ses réserves à l’attaque, et ne prit aucune disposition pour préparer une retraite. Pourtant l’entité baptisée Néant lui souffla d’être prudent. Néanmoins Erèbe se considérait comme certain de sa victoire. Ses mages paralysaient tout lancer de sort chez l’ennemi. L’atout principal de l’ennemi, les reliques du Néant, étaient en fait une faiblesse qui renforçait beaucoup de suivants de l’entité. Le malfaisant estimait ses pertes à moins d’un pour cent pour la bataille. En outre ceux qui mouraient seraient surtout des esclaves de guerre, de la chair à canon sans valeur, des subordonnés insignifiants.
Erèbe croyait tellement dans sa victoire qu’il jugeait presque inutiles son infanterie et sa cavalerie. Il se considérait capable de l’emporter avec seulement ses nombreux canons à l’apparence effrayante, qui se caractérisaient par une apparence semi-organique, notamment des écailles et des yeux. Certes ses armes étaient lentes à charger, les plus réactives ne tiraient qu’un coup à la minute. Mais l’adversaire choisit une confrontation frontale. Il ne chercha pas à le surprendre sur les côtés ou par derrière. Et surtout les canons étaient de véritables outils de carnage, et ils étaient gorgés d’âmes sacrifiées offertes pour satisfaire les créatures les habitant.
Donc les démons à l’intérieur se battraient de toutes leurs forces, s’arrangeraient pour que chaque projectile expédié cause des ravages incroyables, du type détruire la moitié d’un bataillon avec quelques tirs. Toutefois le malfaisant choisit de ne pas s’appuyer sur ses centaines de machines de guerre sauf pour la dernière phase de la bataille, quand les ennemis fuiraient comme des dératés.
Erèbe voyait comme du gâchis de donner un usage secondaire à des trésors de technologie militaire, et de sorcellerie. Mais le malfaisant devait composer avec des conservateurs influents, des gens allergiques vis-à-vis de l’usage d’outils de mort autres que le marteau de guerre. S’il se montrait trop enthousiaste à l’égard des canons, il pourrait perdre sa place.
Ce n’était pas grave, il arrivait beaucoup de choses dans une bataille. Il comptait justement provoquer la mort des bougons allergiques à la technologie aujourd’hui. Il dut faire des pieds et des mains pour avoir le droit d’installer des canons, et il supportait difficilement d’être obligé de négocier.
Erèbe obligea les états dominés par des humains à se vider de leurs habitants, à faire des recrutements militaires gigantesques. Ainsi certains pays fournirent plus de la moitié de leurs jeunes âgés, entre dix-huit et trente ans pour servir la cause du Néant. Il y eut des protestations, mais les troupes régulières et d’élite de l’entité les firent taire sans problème, elles étaient d’une efficacité effrayante quand il s’agissait de tuer. Un chevalier du Néant pouvait annihiler sans se fatiguer une armée de dix mille soldats humains ordinaires.
Arthur aligna des milliers de frondeurs, c’est à dire des lanceurs de cailloux en face des adeptes du Néant. Cela fit franchement rire Erèbe qui faillit même se rouler par terre, tellement il trouvait le spectacle comique. Face à ses terribles machines de guerre surnaturelles qui marchaient grâce à un mélange d’innovation technique et de sorcellerie ; face à sa cavalerie monstrueuse, des unités montées composées de montures terrifiantes cracheuses de feu, dévoreuses d’elfes, et de cavaliers presque aussi redoutables que leurs étalons ; face à son infanterie invincible, des mutants aux caractéristiques guerrières époustouflantes capables de triompher des meilleurs à cent contre un, pouvant déchiqueter sans problème les troupes antagonistes les mieux équipées et disciplinées à coup de griffes entaillant les blindages, de crocs broyant les armures et les os ; face à ses troupes avec une force, une endurance et des réflexes dignes de causer l’effroi, l’ennemi opposait une arme dérisoire et extrêmement primitive, le caillou.
C’était tellement pathétique à première vue, qu’Erèbe pensait qu’Arthur craqua, qu’il perdit l’esprit face au désespoir de la situation. Le malfaisant s’esclaffa de plus belle quand il remarqua que des prêtres bénissaient les pierres. Erèbe voyait ce type d’acte religieux comme une idiotie sans précédent. Il ordonna à ses troupes d’élite de se débarrasser de leur casque, bouclier et armure, et de s’avancer résolument vers les frondeurs. Il allait d’ailleurs participer en première ligne contrairement à ses habitudes, partir à l’assaut directement sur les ennemis, au lieu d’observer la bataille de loin, tellement il jugeait facile le dénouement du conflit.
Dans le camp d’Arthur, le choix de compter sur des pierres même bénies suscitaient un certain désarroi chez ceux qui n’étaient pas très loyaux au vampire. Certes le haut-roi insista sur le fait que les cailloux joueraient un rôle essentiel dans la victoire. Mais nombreux étaient les gens qui doutaient que des pierres soient efficaces contre des troupes ennemies dont beaucoup d’éléments étaient capables d’encaisser sans difficulté le souffle de feu d’un dragon.
En fait un nombre non négligeable de subordonnés d’Arthur jugèrent que ce dernier pouvait avoir perdu l’esprit, à cause de la soif de sang. Le vampire n’aurait pas bu depuis une bonne semaine de fluide rouge d’après certaines rumeurs. Donc son jugement serait plutôt altéré, il serait même en train de perdre toute lucidité, de devenir complètement fou d’après ses plus féroces détracteurs.
Quelques-uns murmuraient carrément qu’Arthur aurait pactisé avec le Néant, que sa réponse à priori pathétique avec les pierres était une preuve manifeste de corruption idéologique. Que le haut-roi cherchait à se faire bien voir d’Erèbe en lui offrant une victoire la plus facile possible. D’un autre côté Arthur avait assez de prestige pour calmer le jeu auprès de la majorité des soldats pour l’instant, il était encore assez populaire pour être massivement suivi. Mais s’il subissait une défaite aujourd’hui, ce n’était pas sûr qu’il demeure un souverain.
D’ailleurs des opposants au vampire se faisaient un plaisir de transmettre un maximum d’informations au roi elfe Hertio, qui s’empressait de rédiger un discours fustigeant Arthur, qui le présentait comme une honte absolue méritant un châtiment exemplaire.
Hertio ne participait pas directement aux combats aujourd’hui en prétextant une maladie, même s’il était en parfaite santé. Il se focalisait globalement sur les moyens de nuire à son rival Arthur, plutôt que de chercher à préparer la riposte des elfes face aux troupes du Néant. Il élaborait bien des stratégies pour s’occuper d’Erèbe et de ses sbires, mais il dépensait pour le moment beaucoup plus d’énergie à trouver un moyen de s’attribuer la fonction de haut-roi des elfes.
À la vue des chevaliers du Néant, les soldats d’Arthur sentirent de l’effroi, et lancèrent d’abord timidement quelques pierres. Les résultats se révélèrent beaucoup plus efficaces que prévu. Des dizaines d’adversaires tombèrent et subirent une agonie très douloureuse.
Erèbe ne comprenait pas ce qui se passait, mais réagit promptement, et demanda à ses troupes de se jeter massivement dans la bataille. Cependant les elfes ne se laissèrent pas faire, ils mitraillèrent de cailloux leurs assaillants, en outre une révolte éclata parmi les esclaves de guerre d’Erèbe, résultat les suivants du Néant durent combattre sur deux fronts. Les révoltés finirent par se faire presque intégralement massacrés, toutefois ils donnèrent un répit suffisant aux elfes pour qu’ils envoient des dizaines de milliers de cailloux sur leurs adversaires.
Erèbe n’en revenait pas du résultat actuel de la bataille, cependant il ne perdait pas espoir, il avait encore d’autres cartes à jouer.
Ses chevaliers et beaucoup d’autres troupes étaient dans un triste état mais il lui restait ses fameuses machines, notamment ses canons de la dévastation, et sa superbe cavalerie. Erèbe mit en retrait ses unités montées et attendit un peu que ses ennemis se rapprochent pour qu’ils se fassent décimer par des projectiles spéciaux, des boulets particuliers remplis d’une sorcellerie mortifère afin de pouvoir faucher un maximum de vies sur une vaste zone. Deux à trois tirs des canons de la dévastation étaient suffisants pour décimer un bataillon de plusieurs centaines d’adversaires. Leurs projectiles non seulement causaient une explosion puissante, mais ils répandaient un poison toxique pour les non adeptes du Néant.
Erèbe ordonna de faire pivoter les canons sur quatre côtés différents afin de minimiser le risque d’être pris à découvert, et il commanda à ses meilleurs voyants et éclaireurs de scruter les environs avec zèle. Si les troupes du Néant se faisaient surprendre une nouvelle fois, la défaite pourrait être complète, mais si les sbires d’Erèbe parvenaient à éviter une embuscade ils étaient encore capables de renverser la mauvaise tendance de la journée.
Arthur ordonna à ses soldats d’avancer vaillamment et frontalement vers les machines de guerre ennemies, de s’arranger juste pour jeter à échéance régulière des cailloux devant eux le plus loin possible. Erèbe ne comprenait pas cette stratégie mais ordonna quand même des tirs, qui se résumèrent à un bel échec. Les pierres lancées neutralisaient le potentiel offensif des projectiles liés au Néant. Quand un tir passait près d’un des cailloux spéciaux, il perdait immédiatement en force et échouait presque systématiquement à faire des victimes. Devant ce constat les subalternes d’Arthur chargèrent vaillamment, et se précipitèrent afin de massacrer les ingénieurs et les canonniers au service du Néant.
Erèbe essaya de sauver ce qui pouvait l’être en ordonnant un repli stratégique à sa cavalerie lourde, mais une troupe composée de cavaliers légers sans armure s’interposa et empêchait la retraite adverse de par une mobilité accrue. Ainsi les derniers bataillons d’adorateurs du Néant encore vivants se firent massacrer. Les cavaliers légers avaient comme armement une épée, et surtout un sac en toile contenant plusieurs cailloux spéciaux.
Par conséquent les troupes d’Erèbe se retrouvèrent battues par l’anti-néantus un minéral très néfaste pour les adorateurs du Néant. Cette pierre n’était pas d’origine naturelle, il s’agissait d’une découverte récente, d’un achèvement qui demanda des siècles de recherches acharnées à Merlin. Chaque soldat d’Arthur profita aujourd’hui des pierres anti-Néant, et s’équipa de cailloux finalement redoutables contre certains ennemis liés aux forces de la ruine.
Erèbe était décomposé, sa glorieuse armée qui paraissait innombrable se fit battre à plate couture. Il se demandait d’ailleurs comment il était possible que le Néant ne dévore pas son corps pour se venger. Puis il se ressaisit, puisqu’il avait encore la chance de pouvoir s’illustrer face au Néant, il travaillerait à reconstituer sa force de frappe, même si des siècles seraient nécessaires pour vaincre Arthur.
Les elfes étaient abasourdis du résultat, aussi ils portèrent en triomphe Arthur et beaucoup lui jurèrent une fidélité absolue. Pour de nombreuses personnes il était un élu divin. Il méritait le titre de champion de la lumière.
Quant à Arthur il était vraiment heureux d’avoir sauver les elfes, il espérait beaucoup d’avancées positives en terme d’autorité suite à sa victoire. Cependant il était aussi content pour d’autres raisons, il pensait qu’il honora dignement aujourd’hui son serment de protéger les elfes.
Les humains avaient été considérablement affaiblis par les ravage des armées du Néant, désormais l’ère des hommes était finie, l’ère des elfes commençait.
Mais il y avait un elfe qui était prêt à faire de sacrées choses afin de causer la chute Arthur le sauveur des elfes, il s’agissait d’Orunaé. Ses plans avançaient bien, désormais Thérésa était beaucoup plus ouverte à des solutions peu honorables pour engendrer la déchéance de son ami Arthur. Elle témoignait encore une certaine volonté à préserver la réputation de son proche, mais elle perdait progressivement ses réticences morales afin de pouvoir bénéficier de sa dose de substance.
Elle mettait du maquillage pour camoufler les impressionnantes cernes suscités par ses problèmes psychiques. Et comme elle avait reçu l’ordre de continuer à afficher une attitude normale, de ne pas modifier sa manière de se conduire à l’égard de son entourage, elle ne déclencha pas beaucoup de questions. Elle devint un peu plus taciturne que d’habitude, mais c’était le seul signe vraiment repérable de sa déchéance. Donc personne sans mauvaise intention à l’égard de Thérésa ne remarqua sa chute continuelle sur le plan de la moralité.
Pourtant il y eut une sacrée évolution de la manière de se comporter de Thérésa, la substance anéantissait progressivement son honnêteté et sa fidélité à l’égard des elfes. Elle n’était pas encore prête à vénérer les dieux de la destruction, mais elle se rapprochait progressivement du point de non-retour dans les rangs des corrompus et des damnés.
La substance modifiait la moralité mais elle ne détruisait pas l’intelligence. Il s’agissait d’une drogue conçue pour asservir les gens mais qui préservait leur capital intellectuel.
Alors Thérésa parvenait à réaliser des tâches complexes pour Orunaé, elle pouvait participer à des manigances et des crimes difficiles à concrétiser. Sa dernière mauvaise action consista à faire des repérages des systèmes de protections magiques dans une caserne militaire. Cela permettrait à Orunaé d’envahir plus facilement le château quand il participerait à l’invasion des royaumes elfes.