La Tour des Mondes
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Chapitre 207 : Combat au sommet — Fin
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Hey, Guernier. Mon dresseur est sur le globe et il risque de mourir. Serait-il possible de compter sur toi pour le sauver ?

[Prends ceci. Quel que soit la blessure, il vivra.]

Une potion apparaît à côté de moi. Je la prends dans ma gueule alors que Guernier tend une de ses pattes en direction du globe à proximité de là où se trouve Nomad pour que je puisse l’atteindre.

Alors que j’avance en direction du globe, Marshall finit par mourir et de son corps sort une très grande quantité de corruption, qui se divise en deux en partant en direction de moi et de Nomad. Ghg… Je finirai par m’y faire, mais j’espère vraiment que cette Angela apprécie le cadeau. Il y a suffisamment de corruption pour vingt personnes là-dedans.

Je finis par descendre sur le globe alors que la gravité change de sens et je m’approche du corps de Nomad. On dirait que Juliette essaye de faire une sorte de garrot à sa jambe pour qu’il évite de perdre trop de sang. C’est une bonne idée, je sais que Nomad a pris le temps de lui expliquer cette notion, mais entre comprendre et faire… venant d’elle, c’est assez surprenant. On dirait que Nomad a bien choisi ce serpent.

Nomad est encore conscient, mais probablement pas pour longtemps. Je m’approche et en réussissant à ouvrir la bouteille que je place contre sa bouche en lui disant de boire par télépathie.

L’odeur ne me dit rien de bon, mais sachant que ça vient d’un Dragon qui nous aide, il n’a pas intérêt à faire le difficile.

Nomad réussit à rassembler ses forces et finit par réagir suffisamment pour commencer à boire. Bien.

*

Je peux sentir du liquide couler dans ma bouche. Impossible de dire à quoi correspond ce goût… De la lave ? Non, c’est la même sensation que j’ai eue quand j’ai bu la potion de Bastion. Du sang de dragon ?

Mon corps commence à brûler comme la première fois. Je commence à tousser alors que je peux sentir l’intérieur de mon corps se mettre à brûler. Mon visage se met lui aussi à brûler de façon insupportable alors que je peux sentir de la fumée sortir de ma plaie au visage. Ma joue commence à siffler comme si un fer brûlant était posé contre elle. Je me redresse alors que la sensation continue à se répandre dans mon corps. Mes côtes ont l’air de se ressouder rapidement et douloureusement alors que je crache la fumée qui se dégage de l’intérieur de mon corps. Ma main se met aussi à brûler en sifflant, mais l’endroit d’où sort le plus de fumée est ma jambe… Je ne sais pas ce qu’il se produit, mais à chaque seconde qui passe, un jet de fumée semble en sortir. Juliette a déjà fui à cause de la chaleur et petit à petit, alors que la fumée avance, je peux voir que ma jambe semble revenir à son état normal. Je recommence à avoir les idées claires et, même si je n’ai pas perdu conscience, je pense qu’ici et là il me manque quelques informations sur la situation.

En parlant de situation… À travers le lien, je fais comprendre à Juliette que si elle continue, je risque de me fâcher. Même si ça semble l’amuser que je ne le remarque que maintenant, elle finit par ouvrir la gueule et laisse Micha sortir de là. Elle est terrifiée, mais je n’avais pas trop le choix. C’est impossible pour elle de se fondre dans mon corps comme le fait Juliette, mais je n’avais pas d’autre choix si je voulais la mettre en sécurité. Je n’avais pensé à cette éventualité qu’une ou deux fois auparavant et à chaque fois, Micha était terrifiée que cela puisse se produire, mais vu la situation c’était nécessaire. La potion asphyxiante l’aurait tuée si je n’avais pas pris cette décision.

Le temps que je réconforte Micha… sans la toucher, de peur de la brûler, ma jambe finit de guérir et j’ai l’impression de redécouvrir mon corps. La sensation est presque addictive, un peu comme de découvrir quelque chose de neuf.

Je me redresse en allant chercher la dent de basilique qui est par terre à proximité du corps de Marshall. Il semble que la victoire se soit décidée quand Sigu a décidé de planter le croc dans son œil. En l’injectant aussi près du cerveau, peu importe sa résistance, sa mort a dû être douloureuse.

Même s’il avait les compétences d’un chevalier pour le protéger, je me suis rappelé de ce que m’a dit celui que j’ai affronté chez Bastion au début du combat. Il semble que cela confirme que les orifices naturels sont le point faible des chevaliers. C’est toujours bon à savoir si j’en affronte d’autres dans le futur.

Je pense que j’ai eu beaucoup de chance au final. Si je n’avais pas réussi à le surprendre à la fin, j’aurai perdu. Et s’il avait décidé d’absorber plus de compétences… Le combat aurait été bien différent. Je soupire quelques instants en m’allongeant sur le sol du globe. Même si la potion m’a remis d’aplomb, j’ai vraiment besoin d’une pause.

« NOMAD !!! Au-dessus de toi !! »

Je peux entendre le cri de Blue qui retentit à travers la salle, ce qui veut dire que ma pause est finie –

Ah.

Je crois que j’ai oublié un détail, vu la taille de la chose qui me regarde…

Yuu, tu peux…

[C’est Blue qui m’a guidé vers lui. Il était enchaîné dans une très très grande salle. Je te présente Guernier, de l’ordre du Dragon.]

Et comment est-ce que tu as fait pour le libérer ?

[Secret de Kelfi, l’important c’est qu’il soit de notre côté. Il en impose pour un grimpeur, pas vrai ?]

Attends, c’est une classe qui lui permet de se transformer en dragon ?

[Je vais simplifier l’explication pour ton petit cerveau, oui c’est bien une classe et non ce n’est pas un dragon venant d’un étage de la tour.]

Emy m’en avait parlé, mais je m’attendais pas à ce que la classe de Dragon porte aussi bien son nom…

Je dévisage le dragon qui me regarde, immobile. Vu sa posture, j’ai presque l’impression qu’il s’apprête à me dévorer, mais je ne pense même pas faire la taille d’une de ses dents. La salle, qui est pourtant gigantesque, à l’air de ne pas être suffisamment grande pour lui.

« Dresseur, l’ordre du Dragon n’oubliera pas ce que tu viens de faire. Ton compagnon m’a libéré, c’est une faveur que je n’oublierai pas. En tuant le geôlier, tu m’as rendu un deuxième service, mais son maître approche. Il est plus que temps pour toi de partir. »

Cette chose me doit une faveur… ? Est-ce que j’ai besoin de dire que Yuu va me le faire remarquer pendant très longtemps ? En tout cas, partir me semble être une bonne idée. Alors que je récupère Yuu qui était encore au sol pour le mettre dans ma sacoche, je lui glisse une potion spirituelle pour qu’il récupère. Je monte sur la patte du Dragon tendue vers nous à qui Yuu demande de nous approcher du balcon où se trouve Blue. D’un simple mouvement de la pointe d’une griffe, il fait sauter la grille en acier qui la sépare de nous et je descends de là. La situation est vraiment irréel…

Blue, en me voyant, commence à avoir un haut-le-cœur en apercevant le sang dont je suis recouvert et j’ai presque envie de soupirer. Presque aussitôt, elle ferme les yeux et se jette dans mes bras en pleurant.

— Je suis désolé ! Je ne pensais pas q-que… Je voulais… J-je –

— On va choisir un autre endroit pour manger. Mais ce n’est pas grave, c’est le destin qui l’a décidé pas vrai ?

— Je te laisse décider de l’endroit cette fois-ci !

— J… je pense que c’est une bonne idée, oui.

Blue recule en hochant la tête. Elle a l’air ridicule avec les yeux fermés alors qu’elle pleure et elle va probablement faire une crise dès qu’elle va ouvrir les yeux si je reste comme ça. Je décide de mettre ma cape et de remettre un morceau de tissu sur mon visage pour le cacher. Enfin, il me manque une partie de mon pantalon ainsi qu’une chaussure, et je suis couvert de sang. Niveau discrétion, je repasserai.

Yuu m’explique qu’il a eu le temps de discuter avec Guernier et qu’il sait comment le retrouver si nous en avons besoin. Je me retourne en m’inclinant devant le grimpeur de l’ordre du dragon. Même s’il vient de dire qu’il me doit une faveur, j’ai du mal à le croire quand je vois sa taille. En attendant, je n’ai pas l’impression qu’il soit une menace pour moi. Même s’il a l’air menaçant, il n’a pas l’air de me vouloir du mal. En plus de ça, Yuu n’arrête pas de me dire que « le vieux est un gars sympa ». Je ne sais pas pourquoi il le dit, mais vu sa façon de l’affirmer, j’ai peu de doutes sur la question. Je pense que j’aurai une histoire a raconté à Emy quand je la reverrai. Je m’arrête quelques instants en pensant à autre chose.

Et les esclaves ? Les gens dans les cages ? Tu as eu le temps de faire quelque chose pour eux ?

[J’en ai libéré quelques-uns comme tu l’as demandé, mais les souterrains croulaient sous les hommes de main de Marshall. Difficile de savoir s’ils ont réussi à fuir.]

J’espère que c’est le cas.

Je m’avance vers la porte en disant à Blue de rester derrière moi. Tant qu’elle ne voit que ma cape, elle ne devrait pas faire de crise. Et puis, il y a des hommes de Marshall dans les parages. Je n’ai de toute façon pas envie de désobéir au dragon, surtout si une plus grande menace que Marshall apparaît.

Une griffe de Dragon passe à proximité de ma tête et en pressant quelques instants dessus, la porte finit par céder. Je crois que cette rencontre me retire complètement l’idée de dresser un dragon. Je sais bien qu’il s’agit d’un grimpeur, mais si les vrais dragons font cette taille, je préfère ne pas en rencontrer d’autres.

*

Alors que Nomad finit par sortir de l’Atlas. Le Dragon tourne son attention vers le sommet du globe. Un homme, assis sur la banquise, semble attendre de façon décontractée.

— Te voilà enfin. Comptes-tu t’expliquer où dois-je directement t’affronter ?

— Je ne pense pas que mes explications conviendront à un lézard.

— Tu penses arrêter mon ordre en m’enfermant ? Les cinq font partie du passé, tu n’as plus aucun pouvoir ici.

— Ahaha. Oublis les cinq et regarde autour de toi. Qui ici pourrait m’empêcher d’agir ?

— Ris autant que tu le souhaites, ma libération montre que tes plans ne sont pas sans failles.

— J’admets que je suis surpris, mais ce petit dresseur ne vivra plus très longtemps. Maintenant, regarde-moi. Regarde-moi bien et ose me dire qui est le dernier dresseur.

Alors que l’homme finit sa phrase, la salle se met à trembler de toute part. Des filets de poussières tombent lentement de la voûte. Les vibrations semblent venir du globe qui se met lentement à gronder de plus en plus fort alors que l’eau à sa surface se trouble et s’évapore presque instantanément en répandant toujours plus de vapeur dans les airs. L’homme, installé sur la banquise qui ne ressemble plus qu’à un désert, se lève en souriant alors qu’un long rugissement semble venir de la sphère comme si elle contenait quelque chose…

— Tu ne vas pas…

— Regarde-moi Guernier. Regarde-moi bien. J’ai réussi à te dresser d’un claquement de doigts comme j’en ai réduit d’autres à l’esclavage. Si tu le considères comme le dernier dresseur, comment appelles-tu l’homme qui se tient devant toi ?

— Tu n’es qu’un être hideux.

— Certes, mais tu rates l’essentiel. Je suis l’homme qui a dressé des dieux, des démons et des titans, que penses-tu faire contre moi quand je déchaînerai l’enfer ? Tu comptes m’arrêter ? Avec tes petites griffes et tes petites ailes ? Avec tes amis lézards peut-être ? Ahaha !

L’homme sur la banquise tend son bras en l’air tout en souriant et une lance couverte d’or mesurant plusieurs dizaines de mètres apparaît. Vibrante d’énergie et couverte d’éclair, elle est tournée en direction du dragon qui observe l’homme, résolu à faire de son mieux pour l’arrêter.

« Amuse-moi donc et viens te battre. »

Alors que la lance semble prête à être jetée sur le dragon, l’énergie à sa surface disparaît soudainement et la lance disparaît à son tour en se transformant en centaines de papillons qui s’envolent dans les airs.

« Cela ne sera pas nécessaire. »

Que ce soit le Dragon ou l’homme qui se tient sur le globe, ils tournent tous les deux la tête en direction de la voix qui semble parvenir d’un des balcons. La grille devant celui-ci s’ouvre en deux aussi naturellement que si le métal avait toujours été prévu pour cela. Une femme s’avance et semble marcher dans les airs. Sa longue chevelure blonde tombe en cascade sur son corps dont les formes sont à peine cachées par la toge qu’elle porte. Ses yeux bleus fixent le vide, mais aucun des deux hommes n’a l’impression qu’elle ne les regarde pas directement.

Derrière elle, un homme tenant une lyre approche avec elle en lévitant la tête en bas. Il semble réfléchir tout en jouant quelques notes. Un sourire étrange aux lèvres, il semble satisfait d’un accord qu’il vient de trouver. Il continue de jouer de son instrument sans vraiment faire attention à ce qu’il se passe autour de lui et frotte quelques instants sa barbichette alors qu’il avance presque en dansant dans les airs. Sa tenue, proche de la toge que porte la femme, semble guider ses pas en lévitant autour de lui alors qu’il semble perdu dans sa création musicale.

Si le Dragon et l’homme sur le globe n’auraient probablement pas hésité à se battre jusque-là, la question ne se pose plus à présent pour des raisons bien différentes pour chacun d’eux.

Devant eux se tient à présent la gardienne des Oracles, Beatice et le gardien des Bardes, Errasil.

« Un tel combat n’aura pas lieu. Que ma parole résonne à travers le temps. »

Correction : Hastin



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