Cro’ observe l’assistance derrière le rideau de végétation devant ses yeux. Il s’est peut-être trompé puisque Nomad n’a pas l’air d’être présent. Il réfléchit quelques instants et se demande si son flair ne fait pas des siennes à cause du climat chaud. Bien sûr pendant qu’il réfléchit deux gardes braquent des lances dans sa direction tandis que d’autres s’approchent et que même les nobles dégainent leur épée dans sa direction.

Cro’ tousse quelques instants avant de prendre la parole tandis qu’une lance manque de lui érafler la joue.

– Du calme, du calme, je me suis juste trompé de porte, je vais faire demi-tour et vous me reverrez plus.

– Qui donc ose entrer ici ? D’où viens-tu ?!

Cro’ penche légèrement la tête sur le côté et se rend compte que la personne lui ayant adressé la parole est un homme portant une couronne qui a l’air très irrité. Vu le ton qu’il prend c’est quelqu’un avec qui il sera difficile de discuter. Les histoires avec les rois n’ont jamais été très positives pour lui. Il se tourne rapidement vers la porte pour partir, mais aussitôt des gardes lui bloquent le passage.

Sans vraiment attendre qu’ils l’agressent, il décide d’utiliser du pollen dans son inventaire et en jette une poignée sur chacun des deux hommes qui tombent aussitôt par terre en convulsant. Cro’ se demande s’il n’en a pas trop utilisé vu la mousse blanche qui commence à sortir d’entre leurs lèvres. Bon, ce n’est pas important puisque les effets secondaires ne sont que des broutilles auxquelles il a déjà survécu. Enfin, peut-être qu’il est un cas particulier et que ce sera plus difficile pour eux, mais ils ne mourront pas de toute façon donc ce n’est pas important.

Il décide d’ouvrir la porte alors que derrière lui les gardes s’agitent quand soudainement…

[Tu cherches Nomad c’est ça ?]

– Ah ? Euuuh… Allo ?!… Est-ce que j’ai aspiré du pollen moi aussi…

[Je suis avec lui, un animal on va dire, il est dans la chambre du Roi actuellement. Il aimerait probablement savoir pourquoi tu es là.]

– Oh ! Ah… ? Et bien… il n’a pas répondu à mes questions et je ne voulais pas le laisser disparaître ou mourir sans qu’il ne me réponde. Et puis y a la fille là… Adi…Ada… machine, enfin tu devrais savoir c’est la fille d’ici. Elle a ramené des renforts au cas où Nomad et l’autre fille aient besoin d’aide pour retrouver son père. –Eh !

Alors que Cro’ discute seul comme un fou devant toutes les personnes présentes, les gardes du roi commencent à l’attaquer. Il se contente d’esquiver ou de se servir de la paume de ses mains pour arrêter les coups de lances qui ne l’égratignent même pas. Malgré ça les gardes continuent de l’attaquer, mais au bout d’un moment il décide d’en attraper un avant de le jeter sur les autres en leur criant dessus.

– Ça va, oui !? C’est pas avec des piques à brochettes que je sentirais quelque chose d’accord ?

– Et avec ça tu vas sentir quelque chose tu penses ?

Avant même qu’il n’ait le temps de se retourner il peut entendre une détonation derrière lui provenant d’un arme à feu et sentir un choc contre l’arrière de son crâne. La balle ricoche et s’enfonce dans le plafond en pierre pendant que Cro’ se retourne rapidement en se frottant l’arrière de la tête douloureusement. L’homme qui lui fait face n’est autre qu’un grimpeur à la peau sombre et ayant la vingtaine. Il tient un mousquet entre les mains que Cro’ confisque aussitôt. Il a l’air secoué de voir que son arme n’a eu aucun effet et ne semble pas savoir comment réagir. Cro’ se contente de casser l’arme comme une brindille en soupirant et attrape le grimpeur avant de le jeter à son tour sur les gardes.

« Le prochain qui m’agresse je le composte, c’est clair !? »

Tout en criant de façon irritée à toute l’assemblée il commence à grogner comme un animal et sort une petite branche d’arbre de son inventaire avec laquelle il commence à menacer les gardes un par un, mais les gardes et les nobles se contentent de le regarder avec un air confus en voyant son arme et sans vraiment comprendre ce que le mot composte signifie. Le grimpeur au mousquet qui s’est relevé se contente de reculer un peu en comprenant qu’il ne joue pas dans la même cour que l’inconnu en face de lui… et étrangement, cette branche lui semble plus dangereuse qu’elle n’en a l’air même s’il ne sait pas pourquoi… Il ne sait pas d’où vient l’homme, mais c’est clairement un grimpeur et à sa tenue il a probablement une classe liée à la nature ce qui lui indique donc que cette branche n’a rien d’ordinaire.

– Le truc qui me parlait y a deux minutes, est-ce que le père de la fille est là ? Elle m’avait dit que si je la suivais je pourrais revoir Nomad, mais je l’ai perdue de vue dans les souterrains. Je sais que Nomad est là pour lui donc si je peux le récupérer ça facilitera probablement les choses.

[Il est pas loin du roi, c’est celui qui a le moins de trucs brillants sur lui.]

*

– Yuu vient de me dire que Cro’ était dans le château et qu’il était au même endroit que le roi et le père d’Adelina.

– Ah ? Dans ce cas c’est réglé, il peut se débrouiller pour sauver le père tout seul et on peut partir, non ? Mission accomplie pas vrai ?

– …

– Arrête d’hésiter. Je te rappelle que Cro’ est un grimpeur vétéran, il va s’en sortir, pas besoin que tu le rejoignes.

J’ai beau vouloir y aller, je sais que Maliel a raison. Si Cro’ et Yuu s’en occupent, la meilleure chose que je puisse faire c’est de trouver un moyen de quitter le palais.

Yuu, est-ce que tu peux dire à Cro’ qu’une trentaine de manges-mots arrivent sur sa position ? Je vais trouver une issue avec Maliel et on se retrouve dehors. Guide-les vers la sortie du palais d’accord ?

[Y a autre chose, Adelina est là avec les grimpeurs qui t’ont sauvé la vie, c’est elle qui l’a conduit jusqu’ici.]

…

[Il l’a perdue de vue dans les souterrains du palais et… – voilà tu vas refaire une bêtise.]

Pourquoi est-ce qu’elle est venue… Le château s’est transformé en zone de guerre, si elle se fait rattraper par les manges-mots….

Tout en réfléchissant, j’explique rapidement la situation à Maliel qui se frappe le front avec la paume de la main comme si elle était désespérée et irritée en même temps.

« Tout le monde a décidé d’en faire qu’à sa tête j’ai l’impression. Très bien, on va dans les souterrains et avec un peu de chance on la retrouvera. Demande à Yuu de nous aider une fois qu’il a fini avec Cro’. »

Je suis un peu étonné que Maliel accepte la situation aussi facilement sans se plaindre, mais vu la grimace qu’elle fait je pense qu’elle se retient juste d’imploser.

– Tu n’es pas obligée, tu sais. Si tu veux partir tu peux le faire, je ne t’en voudrai pas.

– Tu ne m’en voudras pas ? Je te rappelle que tu as toujours une part de « mon » butin dans ton inventaire ! Si tu crèves je fais comment pour le récupérer ?

– Je tacherais de ne pas mourir et de te le rendre ça te va ?

– Oh oh oh… Tu m’as déjà fait le coup au pied de la tour, pas vrai ? « Je dois partir sinon je vais mourir, je te payerai plus tard », j’ai toujours rien eu et maintenant tu me fais la même chose. Cette fois-ci tu restes avec moi et je m’assure que tu ne meurs pas.

– Je ne suis pas si facile que ça à tuer…

– Moui, c’est toi qui le dit, mais c’est quand même moi qui t’ai sauvé y a deux jours pas vrai ? Évite de me raconter des mauvaises blagues comme ça. Je reste avec toi, on sauve ta princesse et on se casse d’ici avec l’argent. Si tu t’arrêtes une fois de plus pour sauver quelqu’un je te jure que je t’assomme et que je te traîne jusqu’à la sortie.

– Mais… C’est pas « ma » princesse… et ce n’est même pas « une » princesse.

– C’est ce qui s’en rapproche le plus de ce que j’en sais. Allez, en route Romeo.

*

A l’entrée de la chambre du Roi, dix manges-mots qui attendaient rentrent à nouveau et se tiennent devant le passage secret. En entendant les voix des deux grimpeurs disparaître petit à petit, ils décident finalement de s’engager à leur tour dans le passage.