La Tour des Mondes
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Chapitre 60 – Grande Finale
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Les spectateurs crient et encouragent les derniers champions. La foule est hystérique, elle attend avec impatience le dernier combat. Les paris sont lancés pour savoir qui des deux finira par l’emporter. Dans les vestiaires, certains candidats se redressent de la table d’opération. D’autres restent immobiles à tout jamais, trop amochés pour qu’un prêtre puisse faire quoi que ce soit. Il y en a toujours chaque année qui sont dans ce cas.

Lors de cet événement, certains s’acharnent plus que d’autres pour s’assurer que l’adversaire ne puisse pas se relever avec un miracle de résurrection. Corps déchiqueté, brûlé, impossible à reconnaître. Le miracle a des règles bien précises pour fonctionner : tête et organes intacts à 80 %. Pas besoin de s’intéresser aux bras et jambes pour redonner vie à quelqu’un. Reconstituer la chair n’a jamais été un problème avec toutes ces magies, mais le cerveau et les organes sont plus compliqués.

Cependant et malgré les corps défigurés, les guides sont là au chevet des morts. Ce sont les premiers à savoir. Chacun voit les grimpeurs à sa façon. Un ami pour certains, un proche, une connaissance, un amant, un fils. La mort est une éventualité durant le test, chaque guide le sait. C’est aussi pour ça que la fuite est préférable.

Les guides pleurent, tandis que d’autres se redressent en ayant l’air de se sentir plutôt bien. Ils sourient, car même s’ils ont perdu, ils sont toujours là et c’est d’abord la joie qui les prend, ensuite ils se souviennent de comment ils sont morts. Certains sont des vétérans et malgré l’habitude, ce n’est jamais facile d’ajouter à ses souvenirs la sensation d’une flèche transperçant la tête, d’une épée s’enfonçant dans le cœur, d’une explosion ravageant le corps et d’autres encore. Pour les plus jeunes, il faudra du temps avant que la sensation ne disparaisse. Une blessure fantôme que la magie ne peut pas guérir et qui restera gravée là, à chaque fois qu’ils penseront à ce qu’ils ont vécu dans cette arène.

Mais le combat n’est pas fini. À l’intérieur de l’arène, les deux derniers candidats se battent encore.

Emy esquive d’un saut sur la droite la charge du cavalier. C’est sa quatrième charge et elle ne peut que se contenter de se défendre pour l’instant. Sa technique de combat est bien différente de quand il affrontait la Bretteuse en duel. C’est peut-être le marteau de guerre qui l’inquiète ?

Après la cinquième charge, Emy décida de s’enfuir au centre de l’arène là où elle pourrait se servir du relief pour attaquer plus facilement le cavalier. Celui-ci se contenta de la suivre cette fois-ci sans charger, sans doute après avoir réalisé que c’était inutile.

Tandis qu’il s’approche, Emy se cache et attend son heure.

« Quel est ton nom jeune fille ? »

La voix du cavalier retentit dans l’arène et la foule se tait petit à petit pour écouter. Seulement, Emy ne répond pas, elle reste cachée et attend. Elle ne tombera pas dans un piège aussi grossier.

« Le mien est Guernier. Tu as fait tes preuves en survivant dans l’arène aussi longtemps, mais ça s’arrête ici. Tu ne pourras pas me battre. Tu ne peux pas te cacher ! »

D’un mouvement de son épée, le cavalier frappe le vide et envoie une onde de choc à l’endroit où Emy était cachée, brisant les morceaux de terre en fragments.

Emy sort alors de sa cachette pour esquiver l’attaque et se place devant le cavalier. L’endroit où elle se trouvait a entièrement disparu dans un nuage de poussière. La personne qu’elle a en face d’elle n’est pas un paladin ni un cavalier ordinaire.

« Je suis Guernier, de l’ordre des dragons, une simple Paladin ne peut pas gagner contre moi. Jusque là, j’ai retenu mes forces, mais ne t’attends pas à ma pitié si tu commences à te cacher. »

Emy se met à sourire en écoutant le speech du cavalier. Elle ne sait pas ce qu’est cet ordre du Dragon, sans doute une guilde ou un ordre de chevalier d’un étage de la tour. Cependant, il s’avance beaucoup trop en disant qu’elle n’a aucune chance. S’il souhaite se battre sérieusement alors elle l’affrontera, mais s’il continue de charger en vain avec sa monture autant attendre. Le coup qu’il vient d’envoyer n’est pas une attaque normale en tout cas et elle n’arrive pas à savoir exactement de quoi il est capable. Envoyer une onde de choc de ce genre n’est pas une compétence de paladin ni de cavalier. C’est peut-être une compétence d’une des classes psychiques de la tour des Bardes, mais elle n’en est même pas certaine.

En tout cas, Emy a bien compris que se cacher ne lui servirait à rien et dans ce cas elle n’a plus qu’à l’affronter en combat direct. Il y a suffisamment d’obstacles dans les parages pour l’empêcher de charger à plusieurs reprises. Elle attrape la claymore dans son inventaire et attend la suite en fixant le cavalier et en raffermissant sa prise sur son marteau de guerre. Soudainement, une voix retentit à sa droite, puis à sa gauche et même derrière elle.

« Vois-tu, nous autres grimpeurs de haut niveau, avons accès à des compétences que tu ne peux pas soupçonner. Maintenant, défends-toi et faisons de ce dernier combat quelque chose de glorieux, pour que chacun ici puisse voir de quoi mon ordre est capable. Je ne te demanderai que de survivre le plus longtemps possible. »

Emy est à présent encerclée. Elle regarde autour d’elle et compte dix, non douze cavaliers. Une véritable petite armée de clones. L’un d’entre eux s’avance et elle esquive l’attaque dont l’onde de choc frappe le sol dans un craquement lourd. Donc ils sont bien réels. À moins que ce ne soit de l’hypnose, mais d’une simple vérification en activant une compétence elle se rend bien compte que ce n’est pas le cas. D’un mouvement de tête, elle fait craquer sa nuque. Si c’est un combat qu’il veut, il l’aura, mais il n’appréciera pas le résultat.

Les boosts sont déjà activés, mais ça ne l’empêchera pas d’utiliser les compétences dont elle ne s’est pas encore servie jusque-là. D’un geste de son poignard, elle se coupe la gorge et le sang coule avec abondance. Dans sa tête, elle récite une incantation et finit par activer « Sacrifice du Berserk ». Le sang qui coule et recouvre son corps s’agite alors comme mue par une volonté propre. Le sang s’arrête de couler soudainement et se met à briller d’une lueur étrange. Soudainement, sa direction change. Il remonte le long de son armure et de ses vêtements puis retourne à l’intérieur de son corps en repassant par sa gorge avec violence et au point qu’elle pousse un cri de douleur.

Le sang se répand ensuite dans son corps en passant par ses veines en les brûlant comme de la lave. Elle crie à plusieurs reprises incapable de supporter la douleur. Le sacrifice annule totalement l’effet de Frénésie en multipliant la douleur ressentie par dix, mais en échange… Les blessures guériront d’elles-mêmes jusqu’à ce qu’elle n’ait plus de force vitale à offrir.

En couplant l’effet du sacrifice avec celui de « Fureur » qui transforme la douleur en force, elle peut atteindre un pouvoir dépassant tout ce qu’elle a pu montrer jusque là. Il y a bien sûr des risques, mais elle ne laissera pas un vulgaire cavalier se prenant pour un Dragon lui faire peur.

Elle a le souffle lourd et souffre, le cavalier n’a pas encore attaqué et semble attendre qu’elle ait fini ses préparations, peut-être par orgueil. Elle pousse ensuite son cri de guerre qui retentit dans l’arène et que même les spectateurs peuvent ressentir, mais le cavalier et ses clones attendent immobiles. D’un geste, Emy agite sa claymore et une gerbe gigantesque de poussière s’élève du sol. Elle souffre, mais elle ne perd pas son objectif, battre le cavalier, c’est la seule chose à laquelle elle arrive à penser dans son état. Le battre pour achever tout ça, prouver ce dont elle est capable. Le battre pour arrêter la douleur. Le battre. LE BATTRE.

Guernier hoche simplement la tête à travers son heaume, imité par tous les clones qui un à un s’avance sur leurs montures en direction d’Emy. Soudainement, ils attaquent avec leurs épées et envoient les ondes de choc à l’endroit où Emy se trouvait. D’un bond, elle s’éloigne dans les airs à une quinzaine de mètres de là et esquive toutes les attaques. Automatiquement, ils tournent leurs épées vers le ciel et envoient d’autres ondes.

Emy lance son marteau de guerre sur l’un d’entre eux et se sert de la force de projection pour se jeter dans le sens inverse en direction d’un des cavaliers. Le marteau frappe l’un des clones en détruisant son bouclier et le projetant au sol. Depuis les airs et en se servant de sa claymore, elle fonce et transperce un des boucliers et embroche l’un des cavaliers. Celui-ci n’est pas en reste et lui transperce le torse en manquant de peu le cœur. Emy hurle alors à la mort tandis que le Sacrifice opère sa magie et l’empêche de disparaître dans un vulgaire nuage de fumée noire. Son hurlement ne s’arrête pas et finit par se transformer en cri de colère et de rage. D’un mouvement, elle attrape une épée dans son inventaire et coupe la tête du cavalier. Celui-ci disparaît instantanément avec sa mouture et Emy tombe au sol en sortant l’épée de son corps qui disparaît elle aussi quelques instants plus tard. Le sang sur son torse retourne dans son corps tandis qu’à l’intérieur son organisme travaille. Les cellules de son corps se divisent et soignent automatiquement sa blessure en ne laissant qu’une marque sur le tissu. Sa souffrance augmente encore, mais tout autant que sa force.

« 1 »

Elle se retourne et se rend compte qu’elle est encerclée par quatre cavaliers qui s’apprêtent à l’attaquer. D’un mouvement, elle se jette en arrière et esquive les épées. Rasant le sol en tourbillonnant sur elle-même, elle se sert de la claymore pour attaquer les chevaux, mais d’un bond deux d’entre eux réussissent à s’échapper. Les deux autres perdent cependant leurs pattes avant lors de son attaque et au bout de quelques instants à hennir en s’agitant, disparaissent en ne laissant que les cavaliers qui tombent au sol lourdement à cause des armures.

En se servant de sa claymore, elle attaque les deux cavaliers qui tentent de bloquer le coup avec leurs boucliers, mais elle les découpe tous les deux en se moquant de leurs défenses comme s’ils étaient faits de fumée. Répandant leur sang dans les airs, ils disparaissent chacun leur tour. Les deux autres cavaliers l’attaquent et la désarment en se servant de l’onde de choc et sa claymore voltige dans les airs avant de se planter dans le sol. Son poignet se brise sous le choc et même forteresse ne peut rien y faire, mais en quelques instants celui-ci se ressoude douloureusement et la pousse à crier une autre fois tandis qu’elle mélange son râle de douleur à son cri de guerre.

« 3 »

Les montures se dressent et la menacent de leurs sabots comme pour réagir à la menace toujours plus forte en face d’eux. Elle attrape alors un des chevaux qui la menace par la patte et se sert de sa force pour le jeter lui et son cavalier sur celui d’à côté. Le poids et la puissance du choc sont suffisants pour les clouer au sol et faire disparaître les montures et les deux cavaliers d’un seul coup. Derrière elle, un autre cavalier l’attaque et d’un mouvement de son épée coupe son bras qui tombe par terre tandis que l’onde de choc lacère le sol. La douleur la frappe encore une fois et injecte ses yeux de sang. Son corps tremble et bientôt elle atteindra ses limites physiques.

Elle le frappe d’un simple coup de pied qui, malgré le bouclier le protégeant, l’expédie à une dizaine de mètres de là où il disparaît.

« 6 »

Emy récupère son bras qu’elle pose à l’endroit où il devrait se trouver et le sang s’occupe du reste. En quelques secondes, elle peut s’en resservir.

Pendant qu’elle court pour esquiver les attaques suivantes des autres cavaliers. Elle fonce en direction du marteau de guerre à côté du cavalier sur lequel elle l’avait lancé et qui est toujours immobile au sol, d’un simple coup de pied elle le fait disparaître et s’apprête à attaquer à nouveau.

« 7 »

Les cinq cavaliers restants sont loin d’elle maintenant, comme s’ils venaient de comprendre que les armures et les boucliers étaient devenus inutiles. En se servant de leurs montures, ils se mettent à tourner en cercle autour d’elle en faisant fi des obstacles de terre qu’ils détruisent comme s’ils n’avaient jamais été là. Emy attrape une lance dans son inventaire et la jette de toutes ses forces sur l’un des cavaliers qui transperce la monture de part en part avant d’aller se planter contre le mur de l’arène. Le cheval disparaît et le cavalier tombe au sol. Emy fonce sur lui tandis que les autres clones l’attaquent à distance la forçant à ralentir pour esquiver. Elle s’expose pour aller le chercher, mais ce n’est pas comme si elle avait le choix. Emy se jette en avant d’un saut pour aller le frapper de toutes ses forces.

« 8. ? »

Les autres clones disparaissent alors. Est-ce que c’est fini ? Derrière elle s’élève la voix de Guernier qui retentit à travers l’arène lui prouvant que non.

« Quel genre de Berserk es-tu pour être capable de telles choses. Et bien soit. Je vais t’affronter comme j’aurais dû le faire depuis le début. Te couper la tête suffira sans doute à arrêter cette folie. »

Le cavalier descend alors de sa monture dont il caresse la tête avant qu’elle ne se dirige vers un coin de l’arène sans qu’il n’ait à faire quoi que ce soit. Armé de son épée et de son bouclier il avance dans sa direction, mais semble en train d’activer une à une les compétences qu’il avait sans doute gardées en réserve. Son corps semble tripler de taille ainsi que son épée et son bouclier. Une aura recouvre son corps comme une sorte de protection divine. Il tend ensuite son arme vers le ciel et de nulle part un nuage noir apparaît pour qu’un seul et unique éclair en surgisse et aille frapper son épée qui se met à briller et à projeter des arcs électriques autour de lui.

« Maintenant, viens et bats-toi. »

Emy est incapable de réfléchir. Elle se tient droite devant sa cible, tandis que chacun de ses muscles tremble sous la pression qu’ils subissent. La douleur la fatigue à une vitesse folle qu’elle n’avait jamais atteinte jusque là. Le pic de douleur est tellement intense qu’elle a du mal à comprendre ce qu’il se passe devant ses yeux et voir que sa cible approche. Un peu comme si elle était en train de somnoler tandis qu’elle se noie dans la souffrance de son corps.

C’est à ce moment-là qu’elle le voit vraiment l’espace d’un instant, plus grand et plus fort. Prêt à se battre.

D’un bond, elle se jette dans sa direction en prenant à deux mains le marteau de guerre et le frappe de toutes ses forces avec. Guernier bloque le coup avec son bouclier et ne flanche pas.

D’un revers, il la projette contre le mur de l’arène. Il semble qu’il ait maintenant une force suffisante pour rivaliser avec elle ou même plus ? Les os du corps d’Emy se brisent et se ressoudent pour la dernière fois et elle en a un semblant de conscience, mais la douleur la remplit complètement, il faut que cela cesse. Des fragments de pensée continuent de se réunir encore et encore dans sa tête, des visages et des souvenirs se mélangent. Jusqu’à ce que sa vision revienne et qu’elle le voit lui en face d’elle, patientant. C’est sa faute si tout cela est arrivé. C’est la raison de ma souffrance, c’est lui et tant qu’il sera là je serai obligée de ressentir cette douleur.

Autour d’Emy, une aura meurtrière se forme lentement et se manifeste clairement. Une aura sanguinaire, monstrueuse, figeant toute chose autour d’elle. Il n’y a plus de brise, plus de son, plus rien.

Guernier comprend qu’il se passe quelque chose qu’il n’avait pas prévu en la regardant. Il a sous estimé le désir de vaincre de cette femme et maintenant il doit agir avant qu’elle ne complète ce qu’elle est en train de faire. Il s’avance vers elle rapidement dans le but de l’arrêter. Ce ne sera pas la première fois qu’il voit quelqu’un se battre avec l’énergie du désespoir, mais sous cette forme-là et dans des circonstances pareilles ? Pour gagner un simple tournoi ? Est-elle donc en train de se dépasser dans le seul but cosmétique de pouvoir dire qu’elle a gagné, recherche-t-elle la gloire à ce point là ? Ou bien est-elle ivre de bataille ?

Guernier ne saurait dire. Les compétences de sa jeune adversaire sont dignes d’une victoire, mais lui ne peut pas perdre ici. Son honneur est en jeu. Chacun écrit son histoire à sa façon dans la tour et la sienne passe par sa victoire dans cette arène.

Il brandit son épée dans la direction de la jeune femme et lance un éclair vers elle qui frappe le mur. Elle semble immobile, mais elle a bien esquivé le coup d’un pas sur le côté. Trop rapide pour que l’attaque ne la touche. Guernier s’avance et raffermit sa prise sur son épée, mais il est déjà trop tard. À mains nues, elle est déjà sur son bouclier en train de le gravir en plantant ses mains dans l’acier. D’un coup d’épée, il l’attaque, mais il n’arrive pas à la toucher. Elle est déjà sur son heaume en train de se servir de ses deux mains pour écarter le métal comme un simple rideau. Guernier se sert alors d’une de ses compétences pour émettre une onde de choc lumineuse qui projette Emy une nouvelle fois contre le mur et la pousse à y rester collée tandis que l’onde balaye le reste de l’arène en une bourrasque gigantesque la faisant vibrer. Tout en conservant sa compétence active, il tend l’épée dans la direction de la Jeune Paladin contre le mur et frappe d’un éclair.



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