Livre 17 : La Préfecture Indigo – Chapitre 50 – Entre la vie et la mort
Dans la salle, tout le monde regardait Alfonsus traiter Delia. Linley était le plus nerveux de tous, et son front suintait de sueur.
L’énergie verte circula en émettant un son très faible. Alfonsus, le visage sérieux, émit tout à coup un grognement grave, et la vitesse de l’énergie augmenta de façon spectaculaire, se déversant constamment dans le cerveau de Delia.
– « Uhhh… » Delia, qui semblait souffrir, plissa le front et gémit doucement.
Pour Linley, ce gémissement fut comme un coup de tonnerre. Ses yeux s’illuminèrent comme s’il avait été frappé par la foudre. « Delia a repris conscience ! Elle réagit ! » Il était si excité que tout son corps tremblait.
Des regards joyeux apparurent sur tous les visages.
– « Patron, Delia va être sauvée. » Dit Bébé par le sens divin.
– « C’est vrai. » Répondit Linley.
Gislason, Phusro et les autres se mirent à glousser également. Linley fixa Alfonsus, et l’espoir dans son cœur continua à croître. « Delia, tu dois absolument aller mieux, tu le dois. »
Alfonsus retira ensuite sa main droite, mettant fin au traitement.
– « M. Alfonsus, ma femme est-elle soignée ? » Demanda Linley.
Alfonsus se retourna. « Linley… préparez-vous. »
– « Me préparer pour quoi ? Pourquoi ? » Linley eut un mauvais pressentiment.
– « M. Alfonsus, que se passe-t-il ? » Demanda Gislason, dont le visage venait de blêmir.
Alfonsus secoua la tête. « Tout ce que je peux faire, c’est vous le dire très ouvertement… Je ne suis pas capable de sauver cette femme. C’est pour cela que je vous recommande d’abandonner. Il est pratiquement impossible de la sauver. »
Le monde s’écroula autour de Linley. « Non ! » Il dévisagea Alfonsus comme un lion furieux prêt à bondir. « M. Alfonsus, vous devez me mentir. À l’instant, Delia a eu une réaction. Elle était consciente. Comment pouvez-vous soudainement dire que vous ne pouvez pas la soigner ? »
– « Oui. Ne s’est-elle pas améliorée à l’instant ? » Ajouta Gislason.
– « Linley, votre femme n’a pas vraiment repris conscience. Au contraire, pendant que je la soignais, son âme a fortement poussé la mienne, provoquant une légère réaction de son corps. »
– « Mais…mais Kestrel m’a dit que vous aviez 90% de chance de sauver ma femme ? Comment pouvez-vous…maintenant… » Linley ne pouvait pas accepter cela. Il ne pouvait vraiment pas ! Cela faisait trois mois qu’il attendait le jour de la guérison de Delia.
– « Il y a trois mois, j’aurais certainement pu la sauver. Mais maintenant, il est trop tard. »
– « Que voulez-vous dire ? Vous auriez pu il y a trois mois ? » Demanda Linley.
– « Écoutez-moi tous. Ce genre d’attaque spirituelle est un type insidieux et vil. Ces points de lumière verte envahissent l’âme, puis la dévorent et la transforment. Un point en donne deux, deux en donnent quatre, quatre deviennent huit… Bien que les âmes des dieux supérieurs soient puissantes, et que conséquemment, le processus dévorant et la transformation soient plus difficiles…plus les effets multiplicatifs se poursuivent, plus le temps passe, plus le rythme de l’ensemble devient effrayant. »
Toute l’assistance hocha la tête.
– « Je sais ces choses. Mais pourquoi êtes-vous incapable de sauver Delia ? » Dit Linley.
– « Linley, vous ne comprenez toujours pas ? La vitesse dévorante et transformante continue de croître de plus en plus vite. Il y a trois mois, elle était un million de fois plus lente qu’aujourd’hui ! »
Linley fut sous le choc.
– « Pour sauver votre femme, il faudrait que je contre la déviation et la transformation de ces points! Et que ma vitesse dépasse celle de dégénérescence ! »
– « Ma vitesse de traitement est bien trop lente, comparée à la vitesse dévorante. Même si je me donne à fond, je pourrai tout au plus ralentir l’échéance. Il y a trois mois, j’aurais pu facilement sauver votre femme. Je vous demande… de pardonner mon incapacité. »
Linley comprenait très bien. Une fois le feu amorcé, la forêt pouvait brûler très vite.
– « Patron. Patron. » Bébé cria à plusieurs reprises.
– « Linley. » Dit Phusro.
Mais Linley resta planté sans rien dire, complètement silencieux.
– « Hélas. » Soupira Alfonsus.
Dans la salle, Gislason, le Patriarche du Clan Oiseau Vermillon, et les différents Aînés se regardèrent tous, sans voix. L’atmosphère était extrêmement tendue et sombre.
– « M. Alfonsus. Je vous en prie, aidez à soigner ma femme et à prolonger sa vie. Laissez-moi assez de temps pour demander à quelqu’un d’autre d’intervenir. Acceptez-vous ? »
– « Linley. »
Alfonsus répondit solennellement. « Pour votre Clan des Quatre Bêtes Divines et pour le Seigneur Préfet, je contribuerais à prolonger la vie de votre femme si j’en avais la possibilité. Mais…je dois vous dire. Même si je l’aide, je pourrai tout au plus lui rajouter un jour ou deux. »
– « Un jour ou deux ? » Linley espérait beaucoup plus long.
– « Ce genre de traitement de l’âme… n’est pas aussi simple que vous le pensez. L’âme est une partie très centrale de la personne. Lorsque je traite quelqu’un, je dois être extrêmement prudent. Si la moindre énergie s’écarte de sa voie, je peux blesser l’âme de votre femme et elle mourra. Je peux maintenir ce genre de performances de pointe pendant une courte période, en m’assurant de ne pas faire d’erreurs. Mais si le temps que je passe dans cet état est juste un peu trop long, compte tenu de la quantité d’énergie spirituelle que cela absorbe, des erreurs se produiront naturellement. Et une fois qu’une erreur se produit, votre femme… »
– « Linley. Le Seigneur Préfet va bientôt arriver. Peut-être qu’il pourra sauver votre femme. » Dit Gislason.
Les yeux de Linley s’illuminèrent. « Oui. Il y a encore le Seigneur Préfet. »
– « Linley, je vous ai demandé de vous préparer. Bien que j’admire profondément le Seigneur Préfet, pour être honnête… je ne crois pas qu’il ait la capacité de la guérir. » Dit Alfonsus.
– « Mr. Alfonsus ! » L’insistance d’Alfonsus irritait Linley.
– « Pour sauver votre femme, il n’y a que trois méthodes. » Dit Alfonsus.
– « La première est de faire venir un expert qui s’est entraîné jusqu’aux limites des Édits de la Vie. Très probablement, sa vitesse de traitement dépassera celle du processus dévorant. Une telle personne peut sauver votre femme… mais bien sûr, vous devez comprendre que plus le temps passera, plus il sera difficile, même pour le plus puissant des experts, de sauver votre épouse. Et ce type de personne est extrêmement rare, même dans le Plan Supérieur de la Vie, et encore moins dans le Royaume Infernal. La deuxième méthode consiste à utiliser la Puissance du Souverain de type vie. Compte tenu de la puissance de cette dernière, votre femme pourrait être rapidement guérie ! »
– « Notre clan des Quatre Bêtes Divines dispose de la Puissance du Souverain de type vie ! » Dit Gislason.
– « C’est vrai, nous l’avons ! » Dit Linley.
– « Vous ne m’avez pas laissé finir ! La Puissance du Souverain de type vie est extrêmement puissante. Naturellement, sa vitesse de restauration est étonnante. Mais… Elle est en fait bien trop puissante. Il est impossible qu’un dieu supérieur puisse la contrôler parfaitement. J’imagine que ceux d’entre vous qui utilisent la Puissance du Souverain savent à quel point elle est capricieuse, n’est-ce pas ? »
La Puissance du Souverain ne pouvait être utilisée qu’une seule fois ! En effet, une fois qu’un dieu supérieur l’utilisait, il n’y avait aucun moyen pour lui d’empêcher sa fuite et sa dissipation.
– « Même si j’utilisais la Puissance du Souverain pour sauver Delia en fouillant au plus profond de son âme… s’il y avait la moindre imprécision, son âme serait touchée et mourrait. Sans parler de la fuite d’énergie de la Puissance du Souverain ! Sachez bien que, pour sauver Delia, il ne peut y avoir aucune fuite ni erreur ! »
– « Il y a en effet des dieux supérieurs capables de contrôler parfaitement la Puissance du Souverain… D’après la légende, les dieux supérieurs qui ont atteint le niveau Paragon peuvent le faire. Malheureusement, je n’ai jamais entendu parler d’un dieu supérieur Paragon résidant dans la Préfecture Indigo. » Dit Gislason.
– « M. Alfonsus, n’avez-vous pas dit qu’il y avait une troisième méthode ? » Demanda Linley.
– « La troisième méthode consiste à demander à un Souverain d’intervenir ! Peu importe lequel ! Votre femme serait facilement sauvée. Mais…serez-vous capable de convaincre un Souverain d’intervenir ? »
– « Votre troisième méthode est un gaspillage de mots. » Dit Bébé avec tristesse.
Linley resta silencieux un bon moment… « M. Alfonsus, n’y a-t-il vraiment pas d’autres méthodes ? »
Alfonsus acquiesça avec une certitude absolue. « Étant donné ma compréhension de l’âme, j’ose dire que je suis absolument certain qu’à part ces trois méthodes, il n’y en a pas d’autres de disponibles. »
Le seul Souverain avec lequel Linley avait un lien était le Souverain du Bourgeon Rouge. Mais même en dehors de la question de savoir si elle allait aider ou non, le temps nécessaire pour passer du continent de la Crête Rouge au continent du Bourgeon Rouge était bien, bien trop long ! Delia ne pouvait pas attendre aussi longtemps !
– « Merci de vous être tous déplacés. » Linley força un sourire. « Vous pouvez tous rentrer maintenant. Vous n’avez pas besoin de vous inquiéter pour mes affaires. M. Alfonsus, je vous remercie d’avoir fait si vite pour venir tenter de sauver ma femme. »
Gislason, la Matriarche, Phusro, et les autres, furent soulagés en voyant le regard de Linley.
– « Linley, nous allons partir. » Gislason aurait voulu le consoler, mais que dire, et que faire ?
– « Patron… » Bébé eut une soudaine envie de pleurer.
– « Bébé, tu peux aussi y aller. Laisse-moi accompagner Delia tout seul. » Il tapota Bébé sur les épaules.
Bébé hocha la tête à plusieurs reprises, puis quitta la pièce. Il ne restait plus que Linley, Delia et Wade qui dormait et ignorait tout de ce qui se passait.
Linley regarda tranquillement Delia, l’esprit inondé de scènes innombrables. Le chagrin lui remplissant la poitrine, il leva la tête. « Ciel ! Pourquoi devez-vous me punir ainsi !!! » Deux torrents de larmes coulaient de son visage.
Linley se dirigea lentement vers le lit, puis s’agenouilla. Il étendit la main, caressant doucement le visage de sa femme, et souriant légèrement. « Delia, je vais t’accompagner dans la dernière étape du voyage. Pas de séparation…jamais ! »
Le temps s’écoula. En un clin d’œil, de nombreux jours passèrent.
Bébé se tenait à l’extérieur, regardant par la fenêtre. À cet instant, Baruch passa. Par peur de déranger Linley, il dit doucement: « Bébé, comment va Linley ? » Tout le monde connaissait la situation de Delia, et la comprenait…
– « Voyez par vous-même. »
Baruch regarda par la fenêtre. Linley tenait Wade, lui donnant de la nourriture liquide. De temps en temps, il regardait Delia. « Delia, Wade a été très bien aujourd’hui. Il n’a pas fait d’histoires du tout. »
– « J’espère vraiment ! » Dit doucement Bébé. « J’espère vraiment, vraiment que le Seigneur Préfet qui arrive bientôt pourra sauver Delia ! Il doit le faire ! »
– « Je l’espère aussi. » Baruch fit un signe de tête.
Phusro descendit du ciel. « Bébé, Linley, il… » Dit-il d’une voix douce.
– « Phusro, tu es venu ? » En souriant, Linley sortit de la chambre, portant Wade. « Je vais sortir Wade. Viens, Phusro, tu peux le tenir dans tes bras un moment. Ça fait si longtemps que tu n’es pas venu. Tu as manqué à Wade. »
Phusro fut stupéfait par le sourire de Linley. « Oui, je vais le tenir… »
– « Câlin… » Wade, voyant Phusro s’approcher, tendit immédiatement sa petite main. « Câlin…câlin… »
– « Wade peut déjà dire quelques mots simples. Il sait comment dire maman. » Dit Linley.
– « Linley, le Seigneur Préfet est arrivé ! » L’Aîné Garvey lui apporta la nouvelle.
– « Il est arrivé ? » Un soupçon de lumière apparut dans les yeux sans vie de Linley. Bien que celui-ci n’avait plus beaucoup d’espoir quant à la capacité du Préfet à sauver Delia, au moins, cela valait la peine d’essayer.
– « Oui. Les quatre chefs de clan et le Grand Aîné sont allés le saluer. Il va mettre du temps à arriver ! »
Les quatre chefs étaient naturellement très arrogants, mais ils admiraient sincèrement le Seigneur Préfet de la Préfecture Indigo, et le respectaient.
– « Oh, Linley vit ici ? » Dit une voix amicale.
Dix personnes descendirent du ciel. Linley, Phusro, Bébé levèrent tous la tête. La personne qui volait en tête était le Préfet, tandis que Gislason et les quatre chefs de clan suivaient à ses côtés, se comportant très humblement et délicatement.
Le Seigneur Préfet était vêtu d’une longue robe noire. Ses longs cheveux noirs flottaient dans la brise, et sa longue barbe noire pendait sur sa poitrine. Ses yeux étaient très petits, mais ils semblaient aussi vifs et énergiques que les étoiles. Un soupçon de sourire se hissait au coin de ses lèvres et son visage était très amical. « Linley ! » Il lui sourit en le saluant.
– « Linley, voici le Seigneur Préfet. » Gislason le présenta.
Mais Linley resta scotché. « Sei…Seigneur Beirut ?! »
– « Grand-père ! » cria Bébé, choqué. Beirut le serra immédiatement dans ses bras. « Haha, Bébé… »
– « Grand-père ! » S’écria Bébé une fois de plus, tout excité.
– « Haha… Grand-père t’a manqué, hein ? » Beirut rit très joyeusement.
Quant à Gislason, la Matriarche, et les quatre chefs de clan, ainsi que le Grand Aîné et les autres Aînés, et même Phusro… ils avaient les yeux écarquillés, incrédules. « Le Seigneur Préfet ? Grand-père ? »
Ce fut la stupéfaction la plus totale…