Le Maître des Secrets | Lord of the Mysteries | 诡秘之主
A+ a-
Chapitre 63 – Interprétation d’un rêve
Chapitre 62 – Les conseils du voyant Menu Chapitre 64 – L’Instigateur

Klein fit quelques pas en avant et aperçut le client. Il était vêtu d’un costume noir, portait un semi haut de forme et tenait à la main une canne de bois incrustée d’or. Ses cheveux blonds coupés courts dépassaient de chaque côté du chapeau et son nez aquilin évoquait un bec de faucon.

Le fiancée d’Anna… Le fameux Joyce Meyer qui avait traversé une épreuve terrifiante… Klein, qui l’avait vu dans son rêve de divination, l’accueillit aussitôt avec un sourire :

– « Bonjour, monsieur Meyer. »

– « Bonjour, monsieur Moretti », répondit Joyce en ôtant son chapeau et en s’inclinant pour le saluer. « Je tenais à vous remercier pour les conseils que vous avez donnés à Anna. Elle ne tarit pas d’éloges sur vous. »

Klein eut un petit rire :

– « Je n’ai rien changé. Vous ne le devez qu’à vous car sans votre détermination et votre espoir d’un lendemain meilleur, vous n’auriez jamais pu surmonter une telle épreuve. »

Sur cet échange de politesses, Klein ne put s’empêcher railler intérieurement :

S’agirait-il d’un léchage de bottes mutuel en bonne et due forme ?

– « En toute honnêteté, j’ai encore l’impression que mon retour est un rêve car je ne peux croire que j’ai survécu à tant d’épreuves consécutives », répondit Joyce d’un air triste en secouant la tête.

Sans attendre la réponse de Klein, il demanda : « Sitôt que vous m’avez vu, vous saviez qui j’étais. Est-ce à cause de mon nez particulier ou parce que votre talent vous a permis de deviner que je vous rendrais visite ? »

– « J’ai eu accès aux informations vous concernant. C’est suffisant pour un voyant », répondit Klein d’un ton évasif, à la manière d’un charlatan.

Joyce, en effet, demeura stupéfait et il se passa plus de dix secondes avant qu’il ne lui dise en souriant :

– « M. Moretti, je souhaiterais vous consulter. »

Il avait à peine terminé sa phrase qu’il réalisa soudain quelque chose :

M. Klein Moretti s’était présenté à lui comme un véritable voyant et non un simple diseur de bonne aventure.

– « Très bien, allons à la salle Topaze », répondit Klein avec un signe de la main.

À ce moment, il eut le sentiment qu’il aurait dû porter une longue robe noire. Il s’efforçait de parler le moins possible pour accentuer le côté mystérieux du voyant.

Joyce Meyer verrouilla la porte derrière lui et profitant de ce qu’il parcourait la salle des yeux, Klein activa sa Vision Spirituelle.

Le visiteur prit place et posa sa canne près de lui. Puis, tirant sur son nœud papillon noir, il dit d’une voix rauque :

– « M. Moretti, je voudrais que vous interprétiez mon rêve. »

– « Interpréter votre rêve ? » Répéta Klein avec l’air de quelqu’un qui s’y attendait mais demandait simplement confirmation.

Les couleurs représentant la santé sur l’aura de Joyce étaient ternes, mais aucune n’annonçait une maladie imminente. Quant à celles symbolisant ses émotions, elles étaient à dominance de bleu mais leur teinte sombre témoignait d’une nervosité manifeste.

Joyce acquiesça, l’air grave.

– « Depuis que la Luzerne est rentrée au Port d’Enmat, je fais chaque nuit le même et terrible rêve. Je sais que cela pourrait être associé à un traumatisme consécutif à ce que j’ai vécu et que je devrais aller voir un psychiatre, mais j’ai le sentiment que ce n’est pas un rêve ordinaire. Un rêve normal, même s’il se répétait chaque nuit, présenterait des détails différents mais celui-ci est constant, du moins dans mes souvenirs. »

– « Nous les voyants considérons ces rêves comme des révélations divine », expliqua Klein comme pour le réconforter. « Pourriez-vous me le décrire ? »

Joyce serra les poings et réfléchit un instant :

– « Je rêve que je tombe de la Luzerne dans un océan rouge sombre semblable à une mer de sang vicié.

« Quelqu’un tente de me rattraper. Je ne vois pas son visage mais c’est quelqu’un de très fort.

« De mon côté, je retiens un homme et tente de l’empêcher de tomber à la mer. Je connais cette personne. C’est Younis Kim, un passager de la Luzerne.

« En raison de son poids et comme il se débat, je finis par le lâcher et le vois se faire engloutir par la mer de sang.

« La personne qui me retenait me lâche alors à son tour. J’agite les bras dans l’espoir d’agripper quelque chose mais mes mains ne rencontrent que le vide et je tombe…

« C’est alors que je me réveille, horrifié, le front et le dos en sueur. »

Klein, qui se tenait le front et faisait mine de réfléchir, le tapota doucement. Puis, mesurant ses mots, il lui dit :

– « M. Meyer, cauchemars, cauchemars similaires et cauchemars répétés sont tous des problèmes psychologiques et ont une source correspondante. Un cauchemar récurrent comme le vôtre est un rappel de votre être spirituel et une révélation que vous fait le divin. »

Devant la confusion de Joyce, il expliqua : « N’ayez aucun doute là-dessus : l’être spirituel d’une personne ordinaire est également capable de lui adresser des rappels.

« Je ne sais pas exactement ce qui s’est passé sur la Luzerne, mais je peux voir que c’était une tragédie de sang et d’acier qui a laissé en vous un profond traumatisme. »

Voyant son client hocher légèrement la tête, Klein poursuivit : « Vous avez sans doute été terrifié, horrifié sur ce navire. Or il est très courant qu’une personne submergée par des émotions aussi intenses perde ses capacités d’observation et passe à côté de signes qu’en temps normal elle aurait remarqués. Cela ne signifie pas que vous n’avez pas vu ces signes, mais vous les avez ignorés, comprenez-vous ? Ignorés.

« Ceci dit, ils restent présents dans votre subconscient et dans votre être spirituel. Si ces détails sont en rapport avec quelque chose de suffisamment important, ce dernier ne manquera pas de vous les rappeler sous la forme d’un rêve. »

Il m’est arrivé un cas similaire. J’ai ignoré un ressenti pour me rendre compte par la suite que le journal était entre les mains de Ray Bieber… Seulement, j’étais plus perceptif et mon être spirituel plus fort. Mieux documenté sur le mysticisme, j’ai pu faire la déduction plus rapidement, se dit Klein en regardant Joyce Meyer dans les yeux.

– « Monsieur Younis Kim, que vous avez laissé tomber dans la mer de sang, vous aurait-il demandé quelque chose sur le bateau avant d’être finalement rattrapé par le sort ? »

A ces mots, Joyce parut soudain nerveux. Il ouvrit plusieurs fois la bouche avant de répondre :

– « Oui, mais je n’ai aucune compassion pour lui. D’ici quelques jours ou une semaine, vous lirez peut-être dans les journaux à quel point il était cruel et diabolique. Il a violé et assassiné au moins trois dames et jeté un bébé à la mer. Il était également à la tête d’un groupe de fous furieux qui ont massacré avec une brutalité sauvage les passagers et l’équipage du bateau.

« Il était fourbe, fort et mauvais. Je ne pouvais ni n’osais tenter de l’arrêter, j’aurais perdu la vie inutilement. »

– « Je n’ai aucun doute sur vous », déclara franchement Klein, « mais votre rêve me dit que vous éprouvez des regrets et de la peine. Vous vous dites que vous n’auriez pas dû le lâcher. Puisque vous êtes persuadés que le tuer était un acte de justice, pourquoi ces remords qui sont à l’origine de ce rêve récurrent ? »

– « Je n’en ai aucune idée … », répondit Joyce, confus.

Klein croisa les mains sous son menton et s’efforça d’analyser la situation.

– « Partant de ce que je viens de vous dire, il semblerait que vous ayez manqué certains détails comme par exemple tout ce que Younis Kim aurait pu dire, le contenu de son plaidoyer, la façon dont il s’est présenté, entre autres. Je ne peux m’en souvenir pour vous, aussi réfléchissez bien. »

– « Je ne vois rien … Il a juste eu le temps de dire : ” épargnez-moi, je me rends “… », marmonna Joyce, perplexe.

Klein, qui ne savait pas exactement ce qui s’était passé, ne pouvait le guider que d’après ce qu’il avait compris du rêve.

– « Peut-être avez-vous eu le sentiment que Younis Kim aurait été plus utile vivant, qu’il pouvait prouver ou expliquer quelque chose ? »

Joyce fronça les sourcils. Il lui fallut un certain temps avant de répondre :

– « Peut-être… J’ai toujours pensé que le conflit qui a éclaté sur la Luzerne était beaucoup trop soudain et avait pris trop vite de l’ampleur. C’était comme si le mal contenu dans le cœur de chacun venait d’éclater de façon incontrôlable … Ce n’était pas normal… Vraiment pas normal… peut-être aurais-je voulu interroger Younis Kim et découvrir pourquoi il avait agi comme s’il était possédé par le diable… »

En l’écoutant, Klein eut soudain un éclair d’inspiration et d’un ton mystérieux propre aux charlatans lui dit :

– « Non, ce n’est pas la seule raison… »

– « Pardon ? » S’exclama son client, stupéfait.

Le Voyant croisa les mains, leva le menton, le regarda droit dans les yeux et répondit lentement mais sur un ton résolu :

– « Non seulement vous avez trouvé la chose anormale, mais vous avez également vu des choses que vous avez ignorées et qui, si on les réunit, aboutissent à une conclusion terrifiante.

« Votre être spirituel tente de vous dire que le plus suspect de tous était celui qui, dans votre rêve, vous retenait puis vous a lâché. Comme rien ne vous poussait d’instinct à le soupçonner, vous n’avez pas pu l’identifier. Ceci parce que c’était un compagnon à vous, quelqu’un qui, un jour, avait joué un rôle dans votre destinée… peut-être même vous avait-il sauvé la vie. »

Joyce s’affala en arrière et heurta le dossier de son siège avec un bruit sourd. Il avait le regard confus et le front en sueur.

– « Je … je vois … »

Soudain, il se leva, si brusquement que sa chaise vacilla et faillit se renverser, et rassembla toute l’énergie qui lui restait pour prononcer :

– « M. Tris … »

C’était ce petit jeune homme amical et timide au visage rond, ce héros qui avait sauvé les survivants…

Klein, qui ne voulait pas interrompre le fil des pensées de son client, se pencha légèrement en arrière et attendit.

Il vit alors Joyce changer plusieurs fois d’expression pour finalement reprendre un visage normal. Normal mais légèrement pâle.

Le jeune homme eut un sourire triste :

– « Je comprends à présent et vous remercie d’avoir interprété mon rêve. Il est peut-être temps pour moi de me rendre au poste de police. »

Il prit son portefeuille de cuir et en tira un billet d’un Soli.

– « Je ne pense pas que l’argent puisse refléter pleinement votre valeur, aussi je me conterai de vous donner le prix demandé. Voici pour vous », dit-il en poussant le billet vers le voyant.

Je ne verrais pas d’inconvénient à ce que vous me donniez 10 Livres… Un Soli… Vous êtes bien comme votre fiancée… Se dit Klein. Cependant, il conserva son air mystérieux et se contenta de sourire, la main posée sur le billet.

Joyce prit une profonde inspiration, remit son chapeau et se dirigea vers la porte.

Il s’apprêtait à l’ouvrir lorsque soudain, il se retourna et dit avec sincérité :

– « Merci, Maître Moretti. »

Maître ? Klein se mit à rire. Il regarda Joyce quitter la salle de divination et se dit :

Ce qui s’est passé sur la Luzerne semble incroyable… Si seulement le capitaine était là. Il aurait pu comprendre la totalité du rêve de Joyce Meyer…

Tôt ce Mardi à Backlund, Quartier de l’Impératrice…

Audrey, qui s’est réveillée de très bonne heure, appela sa chienne et lui dit d’un ton grave :

– « Te voilà Transcendante toi aussi, Susie. Nous sommes désormais de la même espèce… euh, je voulais dire : nous devons nous entraider. Va monter la garde à la porte et ne laisse personne me déranger. Je dois procéder à un rituel. »

Susie regarda sa maîtresse et secoua la queue, impuissante.

🏆 Top tipeurs
  • 🥇1. Meifumado
  • 🥈2. matsu 1
🎗 Tipeurs récents
  • matsu 1
  • Meifumado


Rejoignez-nous et devenez correcteur de Chireads Discord []~( ̄▽ ̄)~*
Chapitre 62 – Les conseils du voyant Menu Chapitre 64 – L’Instigateur