Livre 16 : La Mer de Brume d’Étoiles – Chapitre 25 – L’Aîné à la tunique rouge
Quel choix Linley allait-il faire ? Cette décision lui donnait de l’urticaire. Il n’y avait pas de bon choix dans la proposition de Bakwill. Demeurer un Aîné en tunique rouge durant une période de 10 000 années était tout bonnement inconcevable pour lui, qui n’avait même pas vécu 1 000 ans depuis sa naissance !
– « Linley, vous n’avez pas encore pris votre décision ? » La colère de Bakwill montait de plus en plus en gravité. Il pensait que la deuxième option qu’il avait proposée était plus qu’honnête. Dix mille ans, pour des experts ultimes, passaient en une seule session de formation.
– « Dix mille ans, c’est trop long. Il faut que je me rende sur le continent de la Crête de Sang pour affaires. » Linley utilisa son sens divin.
Bakwill devint tout sourire. S’il avait vraiment voulu punir Linley, il l’aurait condamné à 100 millions d’années d’excuses ! « C’est facile à négocier. Linley, puisque vous êtes prêt à devenir un Aîné de mon clan, je n’irai pas trop loin non plus. Quoi qu’il en soit, vous devez toujours nous montrer votre sincérité en vous excusant. Disons juste cent ans alors. » Bakwill ne voulait pas non plus gaspiller sa Puissance du Souverain ni perdre les experts de son clan. S’il pouvait éviter la bataille, pourquoi ne pas le faire ? Mais bien sûr, c’était aussi parce que le « pouvoir » de Linley était trop grand. S’il s’agissait d’une autre personne, qui n’avait pas la Puissance du Souverain, Bakwill aurait déjà très probablement ordonné qu’on la tue !
– « Il n’y a rien que je puisse faire d’autre. C’est le seul choix possible. » Linley comprenait aussi le dilemme de la situation. Il pourrait utiliser son pouvoir, oui, mais certainement au prix de dommages collatéraux. Était-il au moins certain de pouvoir protéger son groupe.
– « J’accepte. » Linley fit un signe de tête.
– « Linley, suivez-nous alors. » Lui dit Bakwill via son sens divin.
– « Bébé, Delia, Olivier… vous tous, suivez-moi. » Bien qu’il fût miné de questionnements, le groupe le suivit dans les airs.
– « Nous partons ! » Dit Bakwill d’une voix claire.
Le père de Sequeira et toute sa bande, y compris Linley, prirent la direction de la partie ouest de l’île. Quant aux dizaines de milliers de gardiens qui couvraient le ciel, ils étaient tous complètement perdus. Mais pas uniquement eux. Les nombreux spectateurs qui regardaient la bataille restaient perplexes.
– « Pourquoi ce seigneur est-il parti avec le Clan Bagshaw ? »
– « Que s’est-il passé ? »
– « Il y a peu, ils se battaient puissamment. Pourquoi l’expert draconien est-il parti avec les habitants de l’île de Miluo ? »
– « Il est évident qu’il les craint. Depuis si longtemps, personne n’a jamais osé résister à l’île de Miluo. »
– « Je ne suis pas d’accord. Le plus probable, c’est que ce Seigneur draconien s’inquiétait pour ses amis. »
– « Les experts sont aussi communs que les nuages. Il me semble ne pas avoir de choix. Voyons voir… quel genre d’experts possède le Clan Bagshaw ! » Lomio Bornesen leva la tête, regardant Linley et les autres disparaître à l’horizon. Puis, il se tourna calmement et disparut dans la foule effervescente.
En vol vers la partie ouest de l’île et vers la zone résidentielle du Clan Bagshaw, Olivier, O’Brien et César posèrent à Linley toutes sortes de questions par télépathie.
– « Linley, qu’as-tu promis à ce clan ? » Demanda César, le cœur rempli de culpabilité. Car tout cela était de sa faute.
– « Patron, qu’est-ce que le Clan Bagshaw veut que nous fassions ? » Demanda Bébé.
– « Linley, es-tu un Dieu supérieur ou un Dieu ? » Demanda O’Brien.
– « Mon pouvoir, je ne l’expliquerai pas pour l’instant. Je te l’expliquerai en détail plus tard. Tu peux me considérer comme un démon six étoiles. Bébé, Delia, ils veulent juste que j’endosse le statut d’Ainé en tunique rouge pendant un siècle. Il vaut mieux prendre un peu de recul pour le moment ! »
Delia fut soulagée. Elle n’était pas pressée de se rendre à la préfecture Indigo, elle voulait juste que Linley fasse attention à lui. La terrible bataille qui venait de se produire l’avait terrifiée au plus haut point.
Le Clan Bagshaw occupait un espace extrêmement vaste, avec toutes sortes de bâtiments et de manoirs dispersés un peu partout.
– « Linley, à partir d’aujourd’hui, vous pouvez vivre dans notre domaine. Nous nous sommes mis d’accord sur la durée de 100 ans. Il n’est pas nécéssaire d’en faire tout un plat ! » Bakwill sortit un jeu de tuniques rouges et un insigne vert.
– « Voici votre tenue d’Aîné. Elle a le pouvoir de vous défendre tout comme le ferait un artefact divin de dieu supérieur. Cet insigne de l’île vous permet de convoquer et de mobiliser une centaine de gardes lorsque cela vous chante. »
– « Seigneur Bakwill, ne vous inquiétez pas. Durant cette période d’obligation parmi vous, je ne partirai pas sans votre assentiment ! » Dit Linley.
– « Je fais confiance à la parole d’un descendant du Clan des Quatre Bêtes Divines. » Bakwill savait très bien que ce clan disposait tout aussi bien que le sien, de la Puissance du Souverain. Pouvoir que l’on donnait aux membres de leurs clans de statut très élevé.
– « Seigneur Bakwill, que dois-je faire ? » Demanda Linley.
– « Pas grand-chose. C’est uniquement en cas de force majeure que les Aînés en tunique rouge sortent, comme aujourd’hui par exemple ! » Dit Bakwill d’un air taquin. « Mais il y a aussi des avantages à avoir votre statut. Pouvoir visiter la zone secrète, à l’ouest de l’île. »
– « Un endroit réservé ? »
Linley avait entendu parler d’autres personnes à ce sujet il y a longtemps. Apparemment, les vainqueurs de cent batailles consécutives effectuées dans l’Arène pouvaient s’y rendre eux aussi.
– « Linley, je dois vous laisser. Si vous avez besoin de quoi que ce soit, n’hésitez pas à venir me trouver. »
Linley resta sur sa faim, ne pouvant pas poser d’autres questions, et le regarda partir avec son fils et les trois Aînés en tunique rouge.
…
Dans la résidence de Bakwill…
La porte se ferma en craquant. Bakwill et Sequeira se trouvaient dans la salle principale.
– « Père, tu ne vas pas laisser Linley vivre ici cent ans confortablement ? C’est un traitement de faveur ou quoi ? Combien de nos hommes a-t-il tué ! » La rage que Sequeira avait réprimée commençait à bouillir.
Bakwill renâcla froidement, et cela mit fin à toute velléité de son fils de continuer. « Si l’on suit le fil de toute cette histoire, les seuls responsables sont César et sa sal**e ! Est-ce que pour elle, notre clan serait prêt à perdre plusieurs experts de niveau 7 étoiles et une ou deux gouttes de Puissance du Souverain, tout en offensant le Clan des Quatre Bêtes Divines ? Cela en vaut-il la peine ? »
– « Il ne s’agit que du Clan des Quatre Bêtes Divines. » Murmura Sequeira.
– « Ah oui, tu crois ? Un grand dragon qui meurt de faim, reste un dragon ! J’admets que par rapport à il y a dix mille ans, le Clan des Quatre Bêtes Divines a changé de façon spectaculaire, et que son pouvoir a diminué… mais il a dominé le Royaume Infernal pendant de très nombreuses années. Il a placé ses jalons très profondément ! » Ensuite, Bakwill hurla. « Notre Clan Bagshaw est plus puissant que le Clan des Quatre Bêtes Divines, mais de pas grand-chose ! »
Sequeira n’osa plus dire un mot.
…
A l’ouest de l’île. Dans le domaine résidentiel de Linley.
– « Aîné ! » Deux serviteurs le saluèrent respectueusement.
Linley donna des ordres à un garde. « Allez à la chambre 306, au quartier résidentiel des guerriers, et faites venir Tarosse et Dylin. »
– « A vos ordres, Aîné »
Linley rentra chez lui, où habitaient également Delia, Bébé, César, O’Brien et Olivier. En trois pas, il rejoignit les jardins, à l’arrière de la propriété.
O’Brien, Olivier et Bébé bavardaient tranquillement, tandis que César restait seul dans un coin, assis bêtement, à penser à « je ne sais quoi ».
– « Linley. » Délia le retrouva. « Il est probable que César pense encore à Cecily. » Elle avait remarqué l’isolement de César.
– « Oui, je crois ! » Linley lui fit un léger signe de tête. César avait probablement besoin de beaucoup de temps avant de pouvoir s’échapper de cette « vallée ».
– « Hé, patron, vous voici. » Bébé se précipita vers lui. « Je dois dire que cette tunique rouge que vous portez est très jolie et très attrayante. » Linley ne put s’empêcher de rire.
– « Linley, je peux te demander quelque chose ? » Les ayant aperçus en train de plaisanter, César osa une approche verbale.
– « César, si tu as besoin de quelque chose, n’hésite pas. » Linley avait toujours ressenti de la gratitude envers lui.
– « Pour que Sequeira s’en prenne soudainement à moi… Je crains que quelque chose de mauvais se soit produit entre Lily et lui. Sinon, comment expliquer la rage du fils de Bakwill ? J’avais pourtant rompu la veille de son mariage ! Depuis ce jour, nous ne nous sommes plus jamais revus, pas une seule fois. » César ne savait toujours pas que Cecily était enceinte de lui. « Linley, peux-tu essayer de savoir ce qui se passe s’il te plaît ? » César le supplia.
– « Entendu ! Ne t’en fais pas. Je vais mener une enquête approfondie. »
César et Cecily étaient véritablement amoureux l’un de l’autre. Malheureusement, le jeune maître Sequeira s’était épris de la jeune femme. Conséquemment, le Clan Gaylord avait demandé à Cecily d’épouser Sequeira, afin de gagner la faveur du Clan Bagshaw !
Comment pouvait-elle désobéir aux ordres de son clan ? Ce fut donc dans la douleur qu’elle dut se séparer de César.
– « César est vraiment malheureux, hélas. L’île de Miluo est censée avoir cinq clans, mais en réalité, seul le Clan Bagshaw a le pouvoir, les autres sont ses vassaux ! » Cecily avait sans aucun doute été contrainte !
…
Sous terre. Dans un tunnel obscur…
Le regard de Sequeira était glacial. De chaque côté du tunnel se trouvaient des cellules spécialement conçues pour accueillir des dieux. Et un guerrier à armure noire montait la garde tous les dix mètres. « La sal**e ! »
A chaque fois qu’il pensait à sa femme, c’était le couteau de la trahison qu’il ressentait dans son cœur. Porter l’enfant d’un autre était une humiliation sans nom pour lui !
– « Linley est partout. » Sequeira le détestait vraiment. « Il est temps de s’en occuper. » Sequeira prit une profonde respiration. Cecily était la honte de son clan. Si la nouvelle se savait, les Bagshaw deviendraient la risée de tous. Elle ne pouvait plus continuer à vivre. Ceci était l’ordre de son père !
Sequeira arriva devant une cellule. « Ouvrez. » Ordonna-t-il en montrant son insigne couleur sang.
Dans la cellule sombre et humide de la prison, la jeune femme était adossée contre un mur, ses longs cheveux un peu en bataille. En apercevant le visage de son mari, elle changea d’expression. « Tu… tu as tué César ? » Dit-elle, à voix basse.
– « Oui. Je l’ai tué. » Dit-il impassiblement, en la fixant sans émotion, pour la faire réagir.
Cecily devint blême. Ses larmes se mirent à couler. Depuis qu’elle était emprisonnée, elle s’était inquiétée pour lui et savait que Sequeira irait tuer son bien-aimé ! Mais… elle s’était accrochée à l’espoir.
– « César… » Elle revoyait les scènes heureuses qu’elle avait vécues avec César. Des moments de liberté où elle pouvait vivre comme elle souhaitait. Malheureusement, Sequeira s’était entiché d’elle, et elle avait dû vivre en s’efforçant de sourire.
– « Sequeira ! » Elle releva la tête pour le fixer, avec des yeux tueurs. « Sans ton clan, tu ne serais qu’une merde de chien ! Je vais t’en apprendre une belle. Chaque fois que je couchais avec toi, j’imaginais être avec César ! »
Le fils de Bakwill devint rouge de rage. « Sal**e ! » Il lança une gifle puissante à Cecily. Bang ! Tout son corps trembla, puis elle glissa lentement jusqu’au sol. Jusqu’à son dernier souffle, elle porta un sourire étrange sur le visage.
Elle avait provoqué Sequeira parce qu’elle voulait mourir. C’était l’unique évasion qu’elle avait trouvée pour rejoindre César. A quoi bon se forcer à être heureuse sans lui ?
– « Sal**e, sal**e, sal**e !!! » Le meurtre de sa femme n’avait pas entamé sa rage, qui demeurait inextinguible. Dans son esprit, les derniers mots qu’elle avait prononcés résonnaient encore et encore.