“Votre Majesté, Votre Majesté, que conduit Dame Anna ?”

Roland se retourna et vit Echo et Soraya se précipiter vers lui.

“Une voiture, un véhicule à moteur fonctionnant grâce à des cubes magiques !” s’empressa de répondre Lune Mystérieuse avec ferveur. “Si tu veux la conduire, va faire la queue.”

“Une… voiture ?” Répéta Soraya : “Une machine propulsée par un moteur à vapeur ?”

“Oui, mais la chaudière de la machine à vapeur a été remplacée par la relique du clan des radiations, ce qui explique pourquoi elle est si petite”, répondit fièrement Lune Mystérieuse. “C’est quand même beaucoup plus grand qu’un moteur électrique. J’aimerais qu’il soit alimenté par Aube I. Ce serait parfait… Non, car on devrait alors l’appeler voiture à moteur magnétique !”

“Tu peux à peine travailler avec des douzaines de barres de cuivre”, jasa Lily en remuant les lèvres. “Et voilà que tu veux faire fonctionner une voiture?”

“Euh…”Lune Mystérieuse hésita: “Je… je viens juste d’atteindre l’âge adulte, donc évidemment je ne suis pas très puissante. Peut-être que je pourrais fabriquer des tonnes d’Aube I après l’avoir améliorée.”

“Je préférerais placer mes espoir en Melle Doris”, surenchérit  Lily de façon cinglante.

“Tais-toi, ou je t’enlève toutes tes Boissons du Chaos !”

“Je te défie…”

Phyllis éclata de rire. 

“En fait, qu’elle soit alimentée par de la vapeur ou de l’électricité, on l’appelle toujours une “voiture”.”

“Vraiment ?” Toutes les autres sorcières la regardèrent. 

“Oui, c’est ainsi qu’on l’appelle dans le Monde des Rêves”, répondit  triomphalement Phyllis.  “Là-bas, les voitures sont bien meilleures que celle que Son Altesse conduit actuellement. Non seulement elles vous protègent de la pluie et du vent, mais elles sont également équipées d’un système de chauffage et de climatisation de pointe. C’est un peu comme une maison mobile et c’est beaucoup plus rapide que les chevaux !

“Avez-vous… déjà conduit une voiture ?” la questionna Lune Mystérieuse, les yeux remplis de curiosité.

“Bien sûr”, répondit fièrement Phyllis. “Une fois, j’ai conduit le véhicule de Sa Majesté sur une route immense. Le véhicule a littéralement tremblé quand j’ai roulé à la vitesse maximale. Je n’entendais que le vent hurler autour de moi et j’avais l’impression de pouvoir conquérir le monde entier !”

Roland essuya les gouttes de sueur qui perlaient sur son front , profondément surpris que Phyllis ait pu conduire son mini van cabossé de la même manière que s’il s’agissait d’une luxueuse voiture de sport. Mais en vérité, son véhicule était mal isolé du bruit et il oscillait violemment sur l’autoroute.

Néanmoins, sa vieille mini-fourgonnette toute cabossé fonctionnait mieux que ce véhicule à moteur cubique.

Il n’avait fallu que quatre jours à Roland pour le concevoir.  Le véhicule était composé d’une machine à vapeur à l’avant, d’un système de chauffage à l’arrière, d’un groupe moteur fixé au châssis et d’un canapé au milieu. Outre le volant, l’embrayage et le frein, le véhicule n’avait pas de boîte de vitesses, mais seulement une soupape à côté du siège pour régler la vitesse.

Pour démarrer cette “voiture”, on enclenchait  le Cube de Cérémonie Magique qui chauffait l’eau et actionnait le moteur à vapeur. Un processus ingénieux. Au fur et à mesure que la pression de l’air dans les conduits augmentait, le véhicule accélérait. Le conducteur pouvait alors mettre en marche la soupape pour libérer un peu de vapeur afin que la machine à vapeur ne soit pas surchargée. De cette façon, le conducteur ajustait la vitesse du véhicule à sa convenance.

En d’autres termes, le conducteur n’avait qu’à appuyer sur le frein et l’embrayage pour ralentir, et à relâcher le frein pour accélérer. En raison de la pression d’air élevée, la roue dentée en rotation pouvait subir des dommages. Par conséquent, une fois le véhicule complètement arrêté, le conducteur devait ouvrir la soupape pour libérer la vapeur et réduire la pression de l’air dans la machine à vapeur.

Malgré le groupe motopropulseur cubique, le cadre primitif de l’automobile et le dispositif de direction rudimentaire, Anna était aux ange. Comme une petite fille qui venait de recevoir le plus beau cadeau du monde, elle se promenait dans la cour sans la moindre intention de se reposer.

Les autres sorcières, elles-aussi toutes excitées par le véhicule, murmuraient entre elles et s’exclamait. C’était la première fois qu’elles riaient de bon coeur depuis la bataille de Taquila.

Roland aurait bien voulu que Tilly puisse partager ce bonheur.

Aux dires de Rossignol, cette dernière investissait la majeure partie de son temps dans l’entraînement des Chevaliers Aériens, si bien que ces derniers temps, elle ne venait que rarement au château. Peut-être parce qu’à ses yeux, le plus important  était de vaincre les Diables. 

Lorsqu’ Anna, enfin, descendit du véhicule et demanda qui voulait essayer, toutes les sorcières se précipitèrent.  

Sylvie, la première à arriver sur les lieux et à repérer la voiture, eut enfin l’occasion de conduire.

“Alors, cela vous plaît? “, demanda Roland à Anna.

“C’est plus amusant que je ne le pensais”, répondit la Reine en souriant. “Merci, Roland. Je suis si contente que vous m’ayiez appris à conduire”.

Roland demeura un instant hébété devant le sourire éblouissant d’Anna puis, très vite, détourna les yeux, un peu gêné, comme s’il avait soudain fait un voyage dans le temps, jusqu’à à l’époque de leur première rencontre.  

 “Je suis content que cela vous plaise”, dit-il.  

Anna cligna des yeux : “Au fait, Céline a trouvé un moyen de stabiliser le Cube de Cérémonie magique. Cela signifie-t-il que nous pourrions l’utiliser dans la Bataille de la Divine Volonté ?”

Roland se ressaisit et se racla la gorge: 

“ En théorie, oui “, répondit-il. “Il nous suffira de continuer à fournir de l’eau pour que la machine à vapeur à moteur cubique fonctionne. Le temps nous dira dans quelle mesure cette nouvelle machine à vapeur pourra nous être utile quant à la logistique”.

“Pouvons-nous utiliser la machine à vapeur pour créer une machine de guerre blindée avec un Canon de Forteresse ancré au sommet ?” intervint Phyllis. “Si vous parveniez à fabriquer une telle arme, nous n’aurions plus à avoir peur des Diables Araignées.”

Il était vrai qu’une unité de puissance compétente rendrait possible une unité blindée. Avec un char puissant, ils pourraient immédiatement dominer la guerre (Ça va devenir World of Tank). Même le char le plus grossier pourrait aisément repousser les Diables Fous et bloquer les lances et les aiguilles d’os éjectées par les Bêtes Monstrueuses de Type Arachnéen. C’était une arme offensive autant que défensive.

Néanmoins, pour créer une telle arme, des recherches approfondies s’imposaient . Il fallait non seulement améliorer les technologies, mais aussi former les ouvriers. Anna ne pouvait pas fabriquer en même temps les biplans et les armes blindées et par ailleurs, il était irréaliste de créer directement un char. En bref, compte tenu des technologies et des ressources limitées, la majeure partie du travail devrait être effectuée par les ouvriers des usines.

Le premier projet auquel Roland avait pensé, cependant, n’était pas un char ou un véhicule de combat d’infanterie mais un outil de transport pour les services civils, capable d’améliorer considérablement l’efficacité de l’agriculture tout en permettant d’économiser beaucoup de main-d’œuvre. Le principe et les technologies appliqués à cet outil de transport étant assez similaires à ceux des véhicules blindés, Roland pourrait, du même coup, fournir aux soldats un entraînement spécial. Si besoin, les ouvriers pourraient aussi commencer immédiatement à produire ces armes blindées. 

Cet outil de transport était… (roulement de tambour) …un tracteur. (Plus puissant qu’un char Russe, meilleure arme blindée du monde et de loin :-P)