En entendant Ojwin parler de lui, Linley ne put retenir un rictus.
Jusque-là, ce dernier n’avait fait preuve d’aucune pitié, allant jusqu’à détruire le clone divin de Desri. Et voilà qu’il prétendait ne pas vouloir tuer Linley, seulement Olivier ? De toute évidence, il avait un peu peur de Tarosse et Dylin.
– « Vous ne voulez vraiment tuer qu’Olivier ? »
Dylin s’interrompit un moment. S’il ne ressentait guère d’affection pour Olivier, il n’en allait pas de même pour Linley qui avait largement contribué à sa fuite et à celle des Trois Lions-Ni Dorés à Six Yeux vers le continent Yulan, sauvé son fils à la Nécropole des Dieux et lui avait donné une Étincelle Divine sans rien demander en retour.
Il se devait de le protéger.
– « Cet Olivier n’a rien à voir avec moi », dit Tarosse en éclatant de rire.
Ojwin se détendit.
« Mais croyez-vous pour autant que je vais m’abstenir d’intervenir simplement parce que vous me l’ordonnez ? » Ajouta-t-il avec un rire mauvais. « D’autres pourraient penser que j’ai peur de vous. Vous feriez mieux de décamper, auquel cas je vous épargnerai, sinon… »
Tarosse étendit la main dans laquelle apparut un long fouet vert qui ressemblait à un serpent. Il émettait une aura glaciale au point de légèrement geler l’air tout autour.
– « Vous partez ou faut-il que je vous y oblige ? » Demanda Tarosse qui n’avait pas le moindre respect pour Ojwin.
Ojwin balaya d’un coup d’œil les deux experts avant de lancer vers Olivier un regard meurtrier.
– « Puisque c’est ainsi », répondit-il. « Je… »
Il tendit les doigts vers Olivier. Soudain, un rayon de lumière blanche fendit l’air et l’espace commença à se replier sur son passage avec des craquements et des grondements.
Tarosse plissa les yeux et laissa échapper un grognement froid et dédaigneux.
Le long fouet vert, qui, à l’origine, mesurait trois ou quatre mètres s’allongea d’au moins dix fois sa longueur tout en grossissants. Tel la queue d’un python géant, il vint frapper le rayon de lumière et émit une faible lueur verte qui l’encercla et le dispersa.
– « Merci, Seigneur Tarosse », murmura Olivier qui savait être reconnaissant, quoi qu’il sût parfaitement qu’étant donné son peu de relations avec eux, si Tarosse et Dylin leur venaient en aide, c’était essentiellement pour Linley.
– « Puisque le Seigneur Tarosse est prêt à agir, nos ennuis sont terminés pour aujourd’hui », dit Olivier en souriant.
– « Evidemment! » Dit Tarosse en éclatant d’un rire joyeux tout en agitant son fouet. « Vous connaissez le Seigneur Tarosse! »
Tel une ombre, son corps flottait et scintillait, échangeant coups et contrecoups avec Ojwin.
Au bout d’un court moment, ce dernier fut certain qu’il avait affaire à un puissant combattant, même parmi les Dieux.
De nature prudente, jamais il ne s’engageait s’il n’était pas certain de l’emporter. Sans la mort de son fils, il ne se serait pas lancé dans ce combat contre Tarosse. Mais durant toutes ces années, mis à part son objectif d’atteindre le sommet et d’accroître sa puissance, sa plus haute priorité était d’élever son fils qui était sa raison de vivre.
– « Vous m’y forcez, Tarosse!!!» Dit-il, furieux.
– « Vraiment ? Si vous possédez de puissantes techniques, montrez-les-moi! » Répondit ce dernier en s’élevant dans les airs, aussitôt suivi d’Ojwin.
Si ces deux dieux donnaient le maximum, les ondes de choc pourraient causer de graves blessures à Linley, voire le tuer.
– « Pour le moment, vous pouvez disposer », dit mentalement Ojwin à ses deux subordonnés qui avaient eu la chance de survivre.
Tous deux se regardèrent :
– « Vite, partons, tout va mal. »
Linley, Olivier et Dylin, quant à eux, observaient le combat entre les deux Dieux. Dylin, le premier, remarqua l’absence des deux Demi Dieux :
– « Hé! Ils sont partis! » S’écria-t-il.
– « Où sont-ils allés ? » Demanda Linley qui s’en apercevait seulement. Son visage se crispa et il ajouta : « l’Étincelle Divine de Desri! C’est cet homme qui l’a prise! »
Une fois le clone Divin détruit, son corps d’origine n’obtiendrait pas du ciel une autre Étincelle Divine d’affinité Lumière…. Cependant, il avait la possibilité de fusionner une nouvelle fois avec la sienne et retrouver très vite son niveau de puissance. Mais ce faisant, jamais plus Desri ne pourrait se former à d’autres Lois.
– « Hey, pas si vite », dit Dylin en s’éloignant dans l’intention de poursuivre cet homme à la robe d’argent.
En plein air, une silhouette humaine rouge vif armée d’une lance ardente émergea soudain du corps d’Ojwin et se précipita sur Dylin pour le frapper. Pris au piège, ce dernier ne parvint pas à s’en débarrasser.
– « Il a donc deux corps! » S’exclama Linley, grandement étonné.
Il échangea avec Olivier un regard stupéfait. Ojwin avait non seulement un clone divin de type Lumière mais aussi un autre d’affinité Feu. Tous deux affrontaient Dylin et Tarosse et, pour le moment, ils étaient au point mort.
Décidément, Ojwin était vraiment fort!
Après avoir exécuté « l’Hymne du Vent » et aidé Olivier à parer l’attaque meurtrière de son adversaire, Linley aurait bien voulu prendre en chasse cet homme à la robe d’argent, cependant, il n’avait presque plus d’énergie spirituelle et son âme elle-même était secouée.
En fait, il avait encore suffisamment d’énergie pour générer une seconde fois l’Hymne du Vent », mais Ojwin étant devenu comme fou suite à la mort de son fils, cette attaque était terriblement virulente.
Heureusement que Linley possédait son artefact Divin endommagé grâce auquel il avait pu encaisser le coup.
« L’Étincelle Divine de Desri », pensa-t-il, impuissant.
Il revoyait encore cet homme tuer Desri d’un seul coup de sa lame illusoire… L’homme à la robe d’argent était probablement le plus puissant des quatre experts qu’Ojwin commandait.
« En unissant leurs forces, Tarosse et Dylin devraient pouvoir le battre. »
En termes de force spirituelle, le clone divin de Linley était bien inférieur à son corps d’origine qui lui, avait fusionné avec les essences de vingt millions d’âme.
Celui-ci s’arrêta dans sa fuite, étendit son sens divin et localisa immédiatement chacun de ses proches qui, dans ce laps de temps, n’avait guère parcouru qu’un millier de kilomètres.
« Le danger est passé! » leur dit-il télépathiquement. « Retournez tous au château! »
En entendant ce message, tous ressentirent une grande joie et s’empressèrent de rentrer tandis qu’au-dessus du château, Tarosse et Ojwin se battaient à qui mieux mieux*.
– « Vous n’avez guère de pouvoir! » S’exclama Tarosse en éclatant de rire tandis que son long fouet s’enroulait comme un serpent.
La température chuta de façon spectaculaire et des cristaux bleus apparurent, planant dans les airs sur plusieurs kilomètres carrés, magnifique sous la lumière du soleil. Tarosse avait pris le contrôle des Essences Élémentaires de l’Eau.
Ojwin blêmit. De son corps jaillit une lumière sacrée éblouissante, et son épée géante, qui en était recouverte, se mit légèrement à trembler. Tout autour, on pouvait voir de minces fractures dans l’espace.
Avec un ricanement, Tarosse émit par la tête une onde invisible qui fut aussitôt absorbée par les cristaux de glace en suspension dans l’air. Ceux-ci émirent alors une lumière bleue et chaque fois que les rayons se croisaient, leur puissance augmentait. Finalement, ils se concentrèrent tous en un seul point.
Voyant que la situation était désastreuse, Ojwin frappa de son épée l’un des cristaux qui vola en morceaux. Mais en un clin d’œil, un autre se reforma. Cette incroyable formation restait intacte.
Soudain, l’un des cristaux qui se trouvait au centre des courants d’énergie émit un rayon de lumière noire en direction d’Ojwin.
Celui-ci laissa échapper un faible grognement guttural tandis qu’une corne blanche poussait sur son front. Il donna de toutes ses forces un coup d’épée en direction du rayon de lumière noire. Sous le choc frontal, le rayon de lumière se brisa en même temps que les bras de l’expert qui cracha une gorgée de sang.
Lançant à Tarosse un regard vicieux, il prit l’apparence d’un rayon lumineux et fila vers l’Ouest. La silhouette d’un rouge ardent qui retenait Dylin retourna vers Ojwin qui, bientôt, disparut à l’horizon non sans avoir lancé d’une voix furieuse :
– « Olivier, je jure de vous tuer! »
Le voyant battre en retraite, Linley et Olivier poussèrent un soupir de soulagement.
Tarosse et Dylin s’approchèrent :
– « D’où vient cet Ojwin ? Il est puissant. Seul contre lui, s’il y mettait toutes ses forces, ce serait tout au plus un match nul », soupira Tarosse, conscient que cet adversaire possédait un second clone divin.
Dylin eut un léger signe de tête.
– « Ceci dit, son clone d’affinité Feu n’est pas aussi fort que son autre d’affinité Lumière. Il n’a réussi qu’à m’entraver. Dommage que je vienne seulement de devenir un Dieu et que je ne sois pas encore en mesure d’utiliser les Lois de ce niveau à leur pleine efficacité. »
Si l’on pouvait devenir un Dieu en atteignant un certain niveau d’illumination, le fait de posséder davantage de connaissance ne signifiait pas nécessairement qu’on sache mieux les utiliser.
– « Avec ses deux clones de niveau Dieu, Ojwin est, en effet, un rude adversaire », Dit Linley qui trouvait le problème plutôt épineux.
– « Il n’y a rien d’exceptionnel à posséder deux clones de niveau Dieu », répondit dédaigneusement Tarosse. « Si quelqu’un devient une Divinité par ses propres moyens, son premier clone peut atteindre ce niveau. Quant à son corps d’origine… il lui suffit de trouver une Étincelle Divine et de fusionner avec. Durant tout le temps qu’il est resté à la Prison de Gebados, Ojwin est certainement devenu Demi Dieu, après quoi il a eu la chance de trouver une Étincelle Divine. C’est aussi simple que cela. »
Tandis qu’ils discutaient, ils virent venir vers eux O’Brien, le froid et sinistre Dieu de la Guerre, Catherine, le Grand Prêtre, et César.
– « Je vous félicite, Linley », dit avec un sourire le Dieu de la Guerre au visage rocailleux.
À sa vue, Linley soupira.
– « Avez-vous appris ce qui s’était passé au sein de l’Empire O’Brien ? » Demanda-t-il.
– « Vaguement », répondit le Dieu de la Guerre. « En quittant la Nécropole des Dieux, je ne m’attendais pas à apprendre une aussi terrible nouvelle. »
– « À propos », intervint Dylin, perplexe. « Je n’ai pas encore eu l’occasion de vous demander comment il se fait que tant d’experts soient parvenus à s’évader de la Prison de Gebados. Moi-même, j’ai eu grand mal à trouver ce point faible dans les murs de la réalité qui m’a permis de fuir pour la Chaîne de Montagnes des Créatures Magiques. »
– « C’est ma faute », répondit Olivier. « Je leur ai accidentellement ouvert une passerelle interdimensionnelle. »
– « Vraiment ?! »
Dylin, le Dieu de la guerre et les autres en furent profondément choqués car si un point faible dans les murs de la réalité n’était qu’une longue fissure qui, de temps à autres, laissait passer une goutte d’eau, l’ouverture d’une passerelle interdimensionnelle s’apparentait à un glissement de terrain massif provoquant une inondation.
– « Seigneur Dylin, comment avez-vous su que nous étions en danger ? » Demanda Linley, confus.
Dylin avait pris sa véritable forme pour arriver plus vite, suivi de Tarosse, légèrement moins rapide. Quant aux Demi Dieux, ils arrivaient après la bataille.
NDT* : Devant le fou-rire de mes checkers à la lecture de cette expression littéraire, visiblement très peu connue aujourd’hui 😛 , je me sens obligée de vous en donner un synonyme : Faire tout son possible pour surpasser l’autre.