Relâchez cette Sorcière | Release that witch | 放开那个女巫
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Chapitre 804 : Accident sur la Montagne Enneigée
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À peine Foudre était-elle de retour à sa tente qu’elle retira ses lunettes de protection, ses gants et plaça ses mains gelées et engourdies au-dessus du brasero.

Très vite, ses doigts se mirent à picoter.

Bien que l’hiver fût terminé depuis près d’un mois et demi, les chutes de neige ne semblaient pas vouloir faiblir, bien au contraire. À chaque fois que Foudre revenait d’une enquête, ses cheveux étaient trempés de neige fondue et il lui fallait un bon moment avant que sa peau ne retrouve ses sensations.

Lorsque ses mains furent un peu réchauffées, la jeune fille plaça un tabouret près du brasero, ôta ses bottes de cuir détrempées et leva les pieds au-dessus des flammes. Un filet de vapeur blanche sortit du bout de ses chaussettes tandis qu’une vague de chaleur parcourait ses orteils gelés. L’odeur de transpiration qui émanait de ses pieds, tout à fait normale depuis le temps qu’elle portait les mêmes bottes, la déconcerta.

Elle comprenait maintenant pourquoi son père avait toujours insisté sur le fait qu’un grand explorateur devait être soutenu par une excellente équipe. En effet, si la Première Armée n’avait pas installé le brasero ou fait chauffer de l’eau, elle n’aurait pas pu se consacrer pleinement à l’exploration. Son ardent enthousiasme aurait eu tôt fait de retomber à la seule pensée de devoir le faire elle-même à son retour au camp, trempée et épuisée.

Foudre, à qui son père, au cours de l’une de ses aventures, avait dit qu’il était très difficile en hiver de s’offrir un bain chaud, pensait sans doute que seule l’équipe du Roi Roland était en mesure de fournir de l’eau chaude 24h / 24. En effet, le bois étant humide, les feuilles mortes couvertes de neige, il fallait tellement de temps et d’efforts pour collecter ces matériaux que la plupart du temps, l’équipage de Tonnerre étaient contraints d’attendre la fin de la mission pour pouvoir faire une toilette minutieuse.

Mais les machines inventées par Sa Majesté avaient résolu tous ces problèmes. Le camp n’étant pas très loin de la rivière, les chaudières des trois navires en béton fonctionnaient en permanence depuis le jour de leur arrivée pour alimenter ses occupants en eau chaude. En cas de besoin, il lui suffisait de prendre un seau et d’aller en chercher.

Même chose pour la nourriture : un navire avait été spécialement affecté à l’approvisionnement de l’équipe. À l’étage supérieur, transformé pour les circonstances en cuisine mobile, on cuisait chaque jour une grande quantité de gruau d’avoine à l’aide de la vapeur produite par les chaudières. Ce porridge, consommé avec de la viande séchée ou du poisson salé, était bien meilleur que ces aliments durs et sans goût.

Son père aurait dit que sur le plan logistique, c’était la meilleure équipe au monde.

Une fois ses mains et ses pieds réchauffés, Foudre prit son carnet et entreprit de consigner les informations recueillies au cours de cette journée.

« Seizième jour du printemps. Nous creusons toujours. La montagne entrave sérieusement les capacités de Sylvie, et surtout de Marge, qui sont contraintes de dépenser une grande quantité de magie pour pénétrer ces rochers.  Pour des raisons de sécurité, nous sommes tenues de réserver suffisamment de magie pour pouvoir rentrer au camp une fois l’opération terminée, aussi nous n’avons guère progressé.

La distance étant limitée, Sylvie ne peut indiquer à Mlle Fran que quelques directions approximatives où creuser. Au passage, celle-ci est charmante en dépit de son physique difforme mais lorsqu’elle mange, elle est encore plus effrayante que Maggie. J’espère vraiment qu’un jour, je pourrai voir à quoi elle ressemblait à l’origine. »

Cela faisait 13 jours que l’expédition était arrivée au pied de la Montagne Enneigée et la seule chose positive pour le moment était la présence d’une vaste caverne qui semblait déboucher sur plusieurs grottes. Il n’était pas facile de localiser la cavité principale où se trouvaient les vestiges et encore moins d’ouvrir un tunnel assez large pour que la Première Armée puisse passer. De ce fait, elle et Maggie, qui ne pouvaient guère aider, se contentaient de surveiller les abords de la montagne et de se faufiler dans ces étranges grottes pour repérer les failles et les crevasses que l’Arche Magique n’avait pas réussi à atteindre.

Il fallait beaucoup plus de temps, de travail, et d’efforts pour trouver le chemin menant aux ruines qu’il en faudrait pour les explorer.

Mais comme disait son père, un explorateur est toujours à la recherche de quelque chose.

Foudre mit ses mains devant sa bouche et souffla une bouffée d’air chaud qui se transforma aussitôt en un nuage de vapeur blanche. Puis elle se remit à écrire :

« Voici enfin la dernière découverte de Foudre, la plus grande exploratrice de Graycastle. »

« Sous la glace au sommet de la Montagne Enneigée, nous avons aperçu une longue silhouette sombre qui ressemblait à un énorme poisson. J’ignore combien de temps il a fallu à cette créature pour grossir à ce point, cependant, elle a certainement bon goût. Quel dommage qu’Anna ne soit pas avec nous : elle aurait pu faire fondre la glace et nous l’aurions récupérée. Comme il nous est interdit d’employer des explosifs au sommet de la montagne, Maggie a bien essayé de gratter la surface avec ses griffes mais elle n’y a laissé que des traces. Nous allons sans doute devoir attendre l’été. »  

La jeune fille, qui depuis longtemps n’avait pas mangé de poisson grillé au barbecue en raison de l’expédition, se lécha les lèvres. Peut-être pourrait-elle, avec Maggie, aller chercher de la nourriture à la Forêt aux Secrets avant la tombée de la nuit… Si elle ne voulait pas se faire disputer pour son espièglerie, il lui faudrait sans doute en ramener également à Wendy.  

Elle poursuivit : « En outre, nous avons fait une autre découverte importante. En effet, nous avons aperçu un groupe de bêtes démoniaques à l’est de la Forêt aux Secrets. Cependant, les remparts de Sa Majesté devraient être en mesure de les arrêter. »  

Lorsqu’elle eut terminé, Foudre glissa le carnet en peau de mouton dans une pochette étanche et le rangea dans son sac à dos. En tant qu’exploratrice, elle se devait de consigner quotidiennement tout ce qu’elle voyait, vivait et entendait. Assimilable au journal de bord d’un capitaine, ce carnet de route était non seulement la marque d’honneur de l’explorateur mais contenait également d’importantes références pour les expéditions futures. Si jamais son propriétaire venait à périr dans un accident, d’autres pourraient analyser son journal et éviter de prendre le même chemin.

Soudain, Foudre entendit des pas précipités et l’instant d’après, Wendy écarta le rideau qui fermait sa tente :

– « Ayesha et les autres viennent de rentrer », dit-elle d’un air inquiet. « Il y a eu un accident. Fran a disparu! »

– « Comment ? » S’exclama Foudre, surprise, en se levant brusquement. « Disparu ? »

Le temps que les sorcières restées au camp arrivent au bout du tunnel creusé par le ver, les soldats de la Première Armée y avaient allumé un feu et placé des sentinelles tandis qu’Ayesha et les survivantes de Taquila se disputaient.  

Foudre passa la tête par l’ouverture et en eut le souffle coupé. Devant elle se trouvait un trou dont on ne voyait ni le sommet, ni le fond. Elle n’entendait que le bruit de l’eau qui courait au-dessus d’elle.  

Une partie de la paroi du tunnel s’était effondrée. Foudre prit sa Pierre de Lumière et se pencha : la brèche était couverte d’un liquide visqueux.

– « Est-ce là que Mlle Fran est tombée ? »

– « Il semblerait », répondit Edith. « Sylvie a pris la bonne direction mais hélas, Fran a joué de malchance. En ouvrant le chemin menant à la grande grotte, elle n’a pas vu qu’il y avait un précipice devant elle et est tombée droit dedans. »

– « Il semblerait ? » Remarqua Foudre, notant au passage la formulation particulière.

Edith haussa les épaules :

– « Lorsque c’est arrivé, Sylvie et Marge étaient de l’autre côté à chercher un endroit d’où elles pourraient voir ce que faisait Fran. C’est alors, d’après Sylvie, que la réaction magique de Fran a soudain disparu de sa vue. Je ne sais pas exactement comment fonctionne votre pouvoir magique, mais je crois savoir que l’Œil de magie de Mlle Sylvie est en mesure de discerner des objets très éloignés, je me trompe ? Pourtant, en arrivant ici, elle n’a rien vu au fond du trou. »  

– « Elle n’a rien vu ? » Répéta la jeune fille, abasourdie.

– « Elles ne voyaient ni le fond, ni le ver dévorant », expliqua Edith en écartant les mains. « À cela, il y a deux explications possibles : soit le trou est si profond qu’il dépasse le champ visuel de l’Œil Magique de Sylvie, soit quelque chose entrave sa vision. Mais d’une façon ou d’une autre, cela ne présage rien de bon. » Edith s’interrompit un moment et regarda la Sorcière de Glace : « Elles se disputent pour savoir si elles doivent descendre immédiatement dans le trou pour sauver Fran », dit-elle.  

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